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11/06/2024 | FRANCE | N°22/02976

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile b, 11 juin 2024, 22/02976


N° RG 22/02976 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OIFZ









Décision du

Tribunal Judiciaire de lyon

Au fond

du 15 février 2022



RG : 17/11504

ch n°9 cab 09 F





[C]



C/



A.S.L. DU [Localité 9]





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile B



ARRET DU 11 Juin 2024







APPELANTE :



Mme [Z] [C] veuve [R]

née le 23 Avril 1948 à [Localité 7] (25)

[Adresse 3]

[Localité 6]



Représentée par Me Aurélie MONTANE-MARIJON de la SELARL VERBATEAM LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 698









INTIMEE :



L'ASSOCIATION SYNDICALE LIBRE DU [Localité 9] dont le siègz social se...

N° RG 22/02976 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OIFZ

Décision du

Tribunal Judiciaire de lyon

Au fond

du 15 février 2022

RG : 17/11504

ch n°9 cab 09 F

[C]

C/

A.S.L. DU [Localité 9]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRET DU 11 Juin 2024

APPELANTE :

Mme [Z] [C] veuve [R]

née le 23 Avril 1948 à [Localité 7] (25)

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par Me Aurélie MONTANE-MARIJON de la SELARL VERBATEAM LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 698

INTIMEE :

L'ASSOCIATION SYNDICALE LIBRE DU [Localité 9] dont le siègz social se situe [Adresse 2] représentée par son mandataire, la société

SAGI-TER sis

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représentée par Me Bertrand BALAS de la SELARL BALAS METRAL & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 773

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 04 Mai 2023

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 26 Février 2024

Date de mise à disposition : 04 Juin 2024 prorogée au 11 Juin 2024, les avocats dûment avisés conformément à l'article 450 dernier alinéa du code de procédure civile

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Olivier GOURSAUD, président

- Stéphanie LEMOINE, conseiller

- Bénédicte LECHARNY, conseiller

assistés pendant les débats de Elsa SANCHEZ, greffier

A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Olivier GOURSAUD, président, et par Elsa SANCHEZ, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Les époux [R] ont acquis de Mme [W] divorcée [F] une maison située dans le lotissement [Localité 9], sis à [Localité 8], sur un terrain constitué de 3 lots :

- lot 15 sur lequel la maison est bâtie

- lot 84 terrain, fonds servant des eaux de ruissellements

- lot 81 terrain.

Ce lotissement, géré par l'association syndicale libre du [Localité 9] (l'ASL), est composé de 58 villas.

Un litige s'est élevé entre les époux [R] et l'ASL en raison de difficultés causées par l'écoulement des eaux pluviales.

Considérant que cette dernière était à l'origine des désordres causés par l'écoulement des eaux de pluie sur leur propriété, [O] [R] a saisi le juge de proximité de Lyon, qui s'est déclaré incompétent au profit du tribunal d'instance à l'audience du 7 juillet 2016.

Par jugement du 16 octobre 2017 le tribunal d'instance, prenant acte de l'intervention volontaire de Mme [R], à la suite du décès de [O] [R] le 8 février 2017, s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance de Lyon.

Par jugement du 15 février 2022, le tribunal judiciaire de Lyon a :

- débouté Mme [R] de ses demandes au titre de l'aggravation de la servitude,

- débouté l'ASL de sa demande de condamnation de Mme [R] au titre de la prise en charge des frais d'inspection vidéo,

- condamné l'ASL à prendre en charge ses frais pour un montant de 1.060,79 € retenus à l'encontre de Mme [R],

- débouté Mme [R] de ses demandes de condamnation de l'ASL à lui payer les sommes de 1.650 € et 1.680 €,

- débouté Mme [R] de sa demande au titre du préjudice moral,

- débouté Mme [R] de sa demande de condamnation de l'ASL à l'entretien de l'ensemble des canalisations servant à évacuer les eaux pluviales du lotissement,

- débouté l'ASL de sa demande de condamnation de Mme [R] à faire procéder à l'entretien annuel de la canalisation située sur sa parcelle,

- débouté les parties de leur demande faite en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- laissé à chacune des parties la charge de ses dépens,

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement,

- débouté les parties de toutes leurs demandes plus amples et contraires.

Par déclaration du 22 avril 2022, Mme [R] a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions, notifiées le 17 janvier 2023, Mme [R] demande à la cour de :

- la déclarer recevable et bien fondée en son appel,

y faisant droit,

- infirmer la décision en ce qu'elle l'a déboutée de ses demandes au titre de :

- l'aggravation de la servitude

- condamnation de l'ASL [Localité 9] à lui payer les sommes de 1.650€ (travaux) et 1.680 € (portillon et remise en état du terrain)

- condamnation de l'ASL [Localité 9] au titre de son préjudice moral

- condamnation de l'ASL [Localité 9] à l'entretien de l'ensemble des canalisations servant à évacuer les eaux pluviales du lotissement

- de l'article 700 du code de procédure civile

- dépens,

statuant à nouveau :

- acter l'existence d'une servitude en tréfonds d'écoulement des eaux pluviales du lotissement au bénéfice de l'ASL (fonds dominant) sur la parcelle de Mme [R], fonds servant (parcelle n°[Cadastre 1] - lot n°84) depuis l'acquisition dudit fonds, soit depuis 1979,

- condamner l'association syndical libre du [Localité 9] à payer à Mme [R] la somme de 5.000 € du fait de sa responsabilité au titre de l'aggravation de la servitude sur le fonds de Mme [R] par des travaux rendant plus difficile l'évacuation des eaux, débordant sur le fonds servant et l'endommageant,

- condamner l'association syndical libre du [Localité 9] à payer à Mme [R] les sommes de :

* 1.650 € au titre du remboursement des travaux de remplacement des canalisations,

* 1.680 € au titre du préjudice matériel (portillon et remise en état du terrain)

* 1.000 € au titre de son préjudice moral en raison de l'aggravation de la servitude

- condamner l'association syndical libre du [Localité 9], sous astreinte de 150€/jour de retard à compter d'un mois après le prononcé de la décision à intervenir à :

- retirer le remblaiement du fonds du bassin,

- mettre en place un ouvrage de visite de la canalisation sur son fonds conformément à l'article 30.03.01 du cahier des prescriptions générales du lotissement,

- condamner l'association syndical libre du [Localité 9] à déboucher la canalisation n°4 sur le fonds de Mme [R] au titre de la servitude,

y ajoutant :

- rejeter toute autre demande adverse plus ample ou contraire,

- condamner l'association syndical libre du [Localité 9] à payer à Mme [R] la somme de 3.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel,

- condamner, sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile, l'association syndical libre du [Localité 9] aux entiers dépens de première instance et d'appel en ce compris les frais de constats d'huissier de justice et de recouvrement devant rester à la charge du créancier.

Aux termes de ses dernières conclusions, notifiées le 18 octobre 2022, l'association syndicale Libre du [Localité 9] demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [R] de ses demandes,

- débouter Mme [R] de ses demandes en cause d'appel,

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné l'ASL [Localité 9] à prendre en charge les frais d'inspection vidéo pour un montant de 1.060,79 € et l'a déboutée de ses demandes,

- condamner Mme [R] à payer à l'association syndicale libre la somme de 1.060,79 € correspondant au coût de l'inspection vidéo réalisée par la société Mont d'or assainissement et facturée le 31 août 2015,

- condamner Mme [R] à supporter seule le paiement de la facture Fonteret et fils du 26 novembre 2015,

- condamner Mme [R] à faire procéder annuellement et à supporter le coût de l'entretien de la canalisation située sur sa parcelle et construite par son auteur,

- condamner Mme [R] à payer à l'association syndicale libre [Localité 9] la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [R] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 04 mai 2023.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DECISION

1. Sur l'existence et l'aggravation de la servitude d'écoulement des eaux

Mme [R] sollicite que soit actée l'existence d'une servitude en tréfonds d'écoulement des eaux pluviales du lotissement au bénéfice de l'ASL (fonds dominant) sur sa parcelle n°[Cadastre 1]- lot n°84 (fonds servant) depuis l'acquisition du fonds en 1979 et que soit reconnue une aggravation de cette servitude. Elle sollicite à ce titre, la condamnation de l'ASL à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts, ainsi que sa condamnation à réaliser divers travaux, sous astreinte.

Elle soutient que :
- les travaux de busage de 1977 sur la parcelle n°[Cadastre 1], actuel lot n°84, lui appartenant constituent une servitude d'écoulement des eaux, établie par le fait de l'homme, continue et apparente du fait de la visibilité de l'entrée de la buse sur le fonds dominant et le tabouret sur le fonds servant,

- cette servitude est née par destination du père de famille, la parcelle n°[Cadastre 1] étant issue du découpage de la zone verte, propriété de l'ASL, en 1979, et elle existe depuis plus de 30 ans,
- il existe une aggravation de cette servitude, du fait de l'agrandissement du lotissement depuis les travaux de busage de 1977 et des modifications de l'écoulement des eaux sur le fonds de l'ASL : en 1993, 30 mètres de canalisation ont été supprimés, un bassin de rétention a été créé, qui a été remblayé en 2006 à une hauteur d'1,50 m au-dessus de la buse d'entrée, ce qui empêche son nettoyage et a engendré l'inondation du fonds servant,

- ces faits sont établis par les procès-verbaux d'assemblée générale et le constat d'huissier de justice du 29 décembre 2017.

L'ASL fait valoir en réplique que :
- le cahier des charges du lotissement impose contractuellement à Mme [R] de récupérer les eaux fluviales sur son fonds,
- la prétendue aggravation de la servitude n'est pas de son fait,

- la canalisation n°4 litigieuse sur le terrain des époux [R], qui est à l'origine des inondations, n'apparaît ni sur le plan du cahier des charges ni sur aucun autre plan, ni sur leur titre de propriété,

- l'installation de cette canalisation n'a fait l'objet d'aucune discussion ni décision commune, M [F], auteur des époux [R], ayant décidé unilatéralement de son installation,

- l'ASL a été contrainte de mettre en place un exutoire en 1993 afin de remédier aux inondations du terrain causées par cette construction non autorisée,
- Mme [R] ne démontre pas le lien de causalité entre le remblaiement du bassin en 2006 et l'aggravation de la servitude ainsi que le bouchage de la canalisation litigieuse,
- contrairement à l'ASL qui a toujours veillé à l'entretien de son terrain dans le respect de copropriétaires, l'appelante ne démontre pas qu'elle entretient régulièrement la canalisation située sur son terrain.

Réponse de la cour

Selon l'article 640 du code civil, les fonds inférieurs sont assujettis envers ceux qui sont plus élevés à recevoir les eaux qui en découlent naturellement sans que la main de l'homme y ait contribué.

Le propriétaire inférieur ne peut point élever de digue qui empêche cet écoulement.

Le propriétaire supérieur ne peut rien faire qui aggrave la servitude du fonds inférieur.

L'article 641 du même code ajoute que tout propriétaire a le droit d'user et de disposer des eaux pluviales qui tombent sur son fonds.

Si l'usage de ces eaux ou la direction qui leur est donnée aggrave la servitude naturelle d'écoulement établie par l'article 640, une indemnité est due au propriétaire du fonds inférieur.

La même disposition est applicable aux eaux de sources nées sur un fonds. Lorsque, par des sondages ou des travaux souterrains, un propriétaire fait surgir des eaux dans son fonds, les propriétaires des fonds inférieurs doivent les recevoir ; mais ils ont droit à une indemnité en cas de dommages résultant de leur écoulement.

Les maisons, cours, jardins, parcs et enclos attenant aux habitations ne peuvent être assujettis à aucune aggravation de la servitude d'écoulement dans les cas prévus par les paragraphes précédents.

Les contestations auxquelles peuvent donner lieu l'établissement et l'exercice des servitudes prévues par ces paragraphes et le règlement, s'il y a lieu, des indemnités dues aux propriétaires des fonds inférieurs sont portées, en premier ressort, devant le juge du tribunal judiciaire du canton qui, en prononçant, doit concilier les intérêts de l'agriculture et de l'industrie avec le respect dû à la propriété.

S'il y a lieu à expertise, il peut n'être nommé qu'un seul expert.

Il est constant entre les parties que:

- le lot n°164 du lotissement est traversé par un fossé dans lequel coule un ruisseau, qui récupère les eaux de source et des eaux pluviales,

- le lot n° 164 a fait l'objet d'une cession partielle le 16 mai 1979 aux époux [F], auteurs de Mme [R], par création d'un lot n° 103 devenu n° 84,

- le ruisseau traversant le lot n°84, qui était à l'origine à ciel ouvert, a été canalisé en 1978 par M. [F], avant qu'il n'en soit propriétaire.

Les parties s'opposent sur la question de savoir si M. [F], qui a fait buser une partie du ruisseau afin que le lot n°84 devienne exploitable, a agi en son nom propre ou pour le compte de l'ASL, puisque les travaux ont été exécutés alors qu'il n'était pas encore propriétaire de ce lot et qu'il était le président de l'ASL, mais sans que ces travaux n'aient fait l'objet d'une résolution en assemblée générale ou ne soient mentionnés sur le cahier des charges.

Cependant, pour constater l'existence d'une servitude d'écoulement des eaux, qui est un droit réel, il importe peu de savoir qui a décidé de sa réalisation mais seulement que les conditions de la servitude sont remplies soit, dans la présente hypothèse, que la servitude d'écoulement naturel des eaux de ruissellement est canalisée au moyen d'un ouvrage apparent depuis plus de trente ans, ce que tant l'ASL que Mme [R] admettent, l'entrée des buses étant visible et les ouvrages ayant été mis en place en 1978.

A partir de ces éléments, Mme [R] sollicite que la cour constate « l'existence d'une servitude en tréfonds d'écoulement des eaux pluviales du lotissement au bénéfice de l'ASL (fonds dominant) sur la parcelle de Mme [R], fonds servant parcelle n°[Cadastre 1] - lot n° 84) depuis l'acquisition dudit fonds, soit depuis 1979 ».

Cependant, à défaut pour Mme [R] de préciser le fonds - la parcelle ou le lot- pour l'usage et l'utilité duquel une charge a été imposée sur son propre fonds (lot n°84), la cour n'est pas en mesure de constater l'existence de la servitude demandée, étant rappelé qu'une servitude n'est pas attachée à une personne mais à un fonds.

En outre, Mme [R] ne précise pas dans ses conclusions quels sont les lots qui appartiennent à l'ASL.

En conséquence, il convient de débouter Mme [R] de sa demande.

Au surplus, s'agissant de l'aggravation de la servitude alléguée, force est de constater que celle-ci ne peut résulter des travaux exécutés en 1978 qui ont organisé l'écoulement des eaux en les canalisant, qui sont couverts par la prescription trentenaire, ainsi que Mme [R] le soutient par ailleurs.

Par ailleurs, c'est par des motifs pertinents, justement déduits des faits de la cause et des pièces produites, que la cour adopte, que les premiers juges ont retenu que:

- il n'est pas établi que la construction d'un bassin de rétention et d'un exutoire en 1993 par l'ASL, puis le réhaussement du bassin de rétention par remblaiement en 2006 sont à l'origine des incidents invoqués par Mme [R], les inondations dénoncées s'étant produites des années après, en 2015, et alors même que cette dernière ne justifie pas avoir entretenu régulièrement la canalisation litigieuse située sur son terrain,

- alors que la DDT du Rhône, qui a constaté un engorgement du bassin de rétention a demandé la réalisation d'une étude hydraulique afin de déterminer s'il est dû à un sous dimensionnement, celle-ci n'a pas été réalisée,

- en l'absence de certitude sur la nature de l'objet - pierre ou calcaire - ayant obstrué la canalisation de Mme [R], il ne peut être déterminé son origine et sa cause.

Pour confirmer le jugement qui déboute Mme [R] de sa demande d'indemnisation au titre de l'aggravation de la servitude, la cour ajoute que:

- il n'est pas plus démontré que les travaux réalisés dans le bassin de rétention ou sur l'exutoire sont à l'origine de l'entrée de la pierre dans la canalisation, constatée par l'entreprise Fonteret, chargée de procéder au changement de la canalisation bouchée le 25 novembre 2015,

- la présence de calcaire dans la canalisation, telle que constatée par l'entreprise Mont d'Or assainissement grâce au passage d'une caméra dans la colonne horizontale, qui n'est pas incompatible avec la présence de la pierre précitée, a également participé à l'obstruction du tuyau et résulte de son défaut d'entretien.

Ainsi, le lien de causalité entre les travaux réalisés par l'ASL et les inondations sur le terrain de Mme [R] n'est pas établi.

Le jugement qui déboute Madame [R] de sa demande d'indemnisation au titre de l'aggravation de la servitude d'écoulement des eaux est donc confirmé.

Par voie de conséquence, il convient également de la débouter de sa demande tendant à voir condamner l'ASL à retirer le remblaiement du fonds du bassin de rétention, étant précisé que cette demande, bien que présentée pour la première fois en appel, est recevable, s'agissant d'un complément nécessaire de la demande initiale.

De même, il convient de débouter Mme [R] de sa demande tendant à voir condamner l'ASL à mettre en place un ouvrage de visite de la canalisation sur son fonds, l'article 30.03.01 du cahier des prescriptions générales du lotissement qu'elle invoque à l'appui de cette demande faisant référence aux « plans joints » au cahier des charges, qui a été établi avant la construction de la canalisation litigieuse.

2. Sur la demande d'indemnisation du préjudice matériel de Mme [R]

Mme [R] sollicite la réparation du préjudice matériel qu'elle a subi à hauteur de 1.680€, soutenant que la remise en état de son terrain s'avère nécessaire pour une somme estimée à 1.380 €, et que les inondations régulières ont également endommagé le portillon de sa propriété qui devra être remplacé pour un prix estimé à 300 €.

L'ASL [Localité 9] fait valoir en réplique que :
- sur le portillon Mme [R] ne démontre aucun préjudice, d'autant que les prix de ce type de portail sont de l'ordre de 100 €, elle ne prouve par ailleurs ni faute ni lien de causalité entre les faits évoqués et l'endommagement de son portillon,

-les photos du portillon démontrent qu'il est vétuste car il n'a pas été entretenu et date de plus de 30 ans et qu'il est condamné car un arbre situé sur le terrain de Mme [R] en empêche l'ouverture,
- sur la remise en état du terrain, Mme [R] ne prouve pas l'état antérieur de son terrain, ni la nécessité de cette remise en état et surtout en quoi elle serait imputable à l'ASL.

Réponse de la cour

Ainsi qu'il a été précédemment retenu, la preuve que les inondations du terrain de Mme [R] ont été causées par les travaux réalisés par l'ASL sur le bassin de rétention ou l'exutoire n'est pas démontrée, de sorte qu'il convient de débouter Mme [R] de sa demande de condamnation à lui payer les frais de remise en état de son terrain et de son portillon.

Le jugement est donc confirmé.

3. Sur la demande de remboursement du coût du changement de la canalisation n°4 de Mme [R]

Mme [R] sollicite le remboursement du coût du changement de la canalisation n°4 soit la somme de 1.650 € assorti des intérêts légaux depuis le 18 mars 2016, faisant valoir que :
- le protocole signé entre les parties le 7 août 2015 prévoyait que la prise en charge du curage se ferait au frais de l'association si la canalisation s'avérait bouchée et non endommagée,

-d'après inspection vidéo, la canalisation était obstruée par une pierre et du sable, qui ne peut provenir que du fonds de l'ASL, son terrain étant entièrement busé.

L'ASL [Localité 9] fait valoir en réplique que :
- en signant le protocole du 7 août 2015, elle souhaitait maintenir de bonnes relations avec les époux [R], en acceptant de prendre en charge le curage si la canalisation se trouvait bouchée par des végétaux en provenance des parties communes du lotissement qui seraient passées par la grille de l'exutoire,
- la canalisation n'était pas simplement bouchée par des végétaux mais par un amoncellement de calcaire et de limon et après trois tentatives de curage infructueuses il s'est avéré que la canalisation était profondément endommagée, Mme [R] a alors consenti à procéder à son remplacement,
- elle a pris en charge l'intégralité des travaux de curage et d'inspection vidéo pour une somme totale de 1.060,79 €, ainsi qu'il était convenu pour le cas où la canalisation était bouchée, et non pas les frais de remplacement de la canalisation sur 6 mètres,
- la présence d'une pierre dans le conduit n'est pas prouvée et est un événement postérieur à la signature du protocole le 7 août 2015 qui ne peut donc être considéré comme ayant été l'objet de l'accord trouvé.

L'ASL sollicite, pour sa part, le remboursement de la somme de 1.060,79 € correspondant à sa prise en charge des travaux de curage et d'inspection vidéo puisque la canalisation s'est avérée endommagée et non simplement obstruée.

Réponse de la cour

Selon le protocole d'accord signé entre les parties le 7 août 2015, « il a été décidé de faire déboucher le conduit à partir du tabouret situé chez M. [R] avant de faire inspecter ce conduit par caméra en fonction du résultat soit:

- le conduit est cassé et effondré la charge financière du curage sera à M. [R],

- le conduit est juste bouché la charge du curage sera à l'association. »

Les termes de ce protocole sont clairs et ne nécessitent pas d'être interprétés. Contrairement à ce qui est soutenu par l'ASL, aucun élément ne permet de retenir qu'elle a accepté de prendre en curage la canalisation « si et seulement si des végétaux en provenance des parties communes du lotissement avait pu boucher le conduit ».

Selon la facture de la société Mont d'Or investissement du 31 août 2015, émanant de l'ASL, l'inspection vidéo a eu lieu le 21 août 2015 et a mis en évidence que le conduit était obstrué, ce qui signifie bien « bouché », par du calcaire.

Le fait que la canalisation soit bouchée est corroboré par la facture émanant de l'entreprise du 25 novembre 2015, ainsi que le rapport d'expertise non judiciaire du 20 avril 2017, qui retient que « le conduit en litige était uniquement bouché et non endommagé ».

Dès lors, il convient, par confirmation du jugement, de débouter l'ASL de sa demande de remboursement de la facture de 1 060,79 euros qu'elle a réglée, correspondant à sa prise en charge des travaux de curage et d'inspection vidéo.

De même, par infirmation du jugement, il convient de condamner l'ASL à payer à Mme [R] la somme de 1 650 euros qu'elle a réglée, afin de remplacer 6 mètres de canalisation bouchée, la circonstance que les travaux ne consistent pas en un simple curage étant indifférent, à partir du moment où ils sont réalisés dans le but de mettre fin à une obstruction du tuyau.

4. Sur la demande d'indemnisation du préjudice moral de Mme [R]

Mme [R] sollicite la condamnation de l'ASL à lui verser la somme de 1.000 € au titre de son préjudice moral, faisant valoir que :
- elle et son époux ont subi une campagne de dénigrement et déstabilisation par mail de la part du président de l'ASL appelant les autres colotis à s'opposer à leurs demandes,
- elle a entrepris de régler le litige à l'amiable via les compagnies d'assurance, mais les différents protocoles d'accord qui lui ont été adressés par l'ASL ne respectaient pas les conclusions des experts,
- rien n'a été fait pour régulariser la situation et son terrain se trouve toujours inondé régulièrement.

Réponse de la cour

S'il est avéré qu'un conflit important oppose l'ASL à Mme [R], cette dernière ne justifie pas du préjudice moral qu'elle invoque.

Par confirmation du jugement, il convient de débouter Mme [R] de cette demande.

Sur l'entretien des canalisations et le débouchage de la canalisation n°4

Mme [R] sollicite la condamnation de l'ASL à entretenir l'ensemble des canalisations servant à évacuer les eaux pluviales du lotissement et à déboucher la canalisation n°4 « au titre de la servitude ».

L'ASL sollicite la confirmation du jugement ayant débouté l'appelante de la demande d'entretien et soulève l'irrecevabilité de la demande de débouchage en raison de sa nouveauté.

Réponse de la cour

A défaut pour Mme [R] d'avoir demandé dans le dispositif de ses conclusions que l'ASL soit condamnée à entretenir l'ensemble des canalisations, la cour n'est pas saisie de cette prétention qu'il n'y a donc pas lieu d'examiner, en application de l'article 954 du code de procédure civile.

Par ailleurs, il convient, par confirmation du jugement, de débouter l'ASL de sa demande tendant à voir condamner Mme [R] à entretenir la canalisation située sur son fonds à défaut de l'avoir mise en demeure d'y procéder.

Si la demande de débouchage de la canalisation n°4 est présentée pour la première fois en cause d'appel, elle doit être déclarée recevable puisqu'elle tend aux mêmes fins que celle soumise aux premiers juges et en constitue un accessoire.

En revanche, Mme [R], qui formule cette demande dans le dispositif de ses conclusions, ne développe aucun moyen à son soutien dans le coeur de ses conclusions, de sorte que la cour n'est pas mise en mesure de statuer sur cette demande, sans qu'il ne soit établi en particulier que la canalisation est encore obstruée à ce jour.

Mme [R] est donc déboutée de cette demande.

5. Sur les autres demandes

Le jugement est confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Les dépens d'appel sont à la charge de l'ASL.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu'il déboute Mme [Z] [R] de sa demande de condamnation de l'association syndicale libre du [Localité 9] à lui payer la somme de 1 650 euros,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déboute Mme [Z] [R] de sa demande tendant à voir constater « l'existence d'une servitude en tréfonds d'écoulement des eaux pluviales du lotissement au bénéfice de l'ASL (fonds dominant) sur la parcelle de Mme [R], fonds servant parcelle n°[Cadastre 1] - lot n° 84) »,

Condamne l'association syndicale libre du [Localité 9] à payer à Mme [Z] [R] la somme de 1 650 euros au titre des travaux de remplacement de la canalisation,

Déclare recevables les demandes tendant à condamner l'association syndicale libre du [Localité 9] à retirer le remblaiement du fonds du bassin, à mettre en place un ouvrage de visite de la canalisation sur le fonds de Mme [Z] [R] et à déboucher la canalisation n°4,

Déboute Mme [Z] [R] de ces demandes,

Dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties de toutes leurs autres demandes,

Condamne l'association syndicale libre du [Localité 9] aux dépens de la procédure d'appel, et accorde aux avocats qui en ont fait la demande le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

La greffière, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile b
Numéro d'arrêt : 22/02976
Date de la décision : 11/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 17/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-11;22.02976 ?
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