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11/06/2024 | FRANCE | N°22/02444

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile b, 11 juin 2024, 22/02444


N° RG 22/02444 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OG3T









Décision du

Tribunal Judiciaire de SAINT-ETIENNE

Au fond

du 02 mars 2022



RG : 20/02312

ch 1



[E]



C/



[E]





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile B



ARRET DU 11 Juin 2024







APPELANT :



M. [R] [E]

né le [Date naissance 2] 1961 à [Localité 1

2] (42)

[Adresse 5]

[Localité 6]



Représenté par Me Jean-yves DIMIER de la SELARL JEAN-YVES DIMIER, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE









INTIME :



M. [X]-[F] [E]

né le [Date naissance 4] 1959 à [Localité 12](LOIRE)

[Adresse 11]

LIEUDIT [Adresse 11]

[...

N° RG 22/02444 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OG3T

Décision du

Tribunal Judiciaire de SAINT-ETIENNE

Au fond

du 02 mars 2022

RG : 20/02312

ch 1

[E]

C/

[E]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRET DU 11 Juin 2024

APPELANT :

M. [R] [E]

né le [Date naissance 2] 1961 à [Localité 12] (42)

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représenté par Me Jean-yves DIMIER de la SELARL JEAN-YVES DIMIER, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

INTIME :

M. [X]-[F] [E]

né le [Date naissance 4] 1959 à [Localité 12](LOIRE)

[Adresse 11]

LIEUDIT [Adresse 11]

[Localité 13]

Représenté par Me Vérane BOIVIN de la SELARL RUDENT-BOIVIN, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE, toque : 57

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 04 Mai 2023

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 27 Février 2024

Date de mise à disposition : 04 Juin 2024 prorogée au 11 Juin 2024, les avocats dûment avisés conformément à l'article 450 dernier alinéa du code de procédure civile

Audience tenue par Olivier GOURSAUD, président, et Stéphanie LEMOINE, conseiller, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,

assistés pendant les débats de Elsa SANCHEZ, greffier

A l'audience, un des membres de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Olivier GOURSAUD, président

- Stéphanie LEMOINE, conseiller

- Bénédicte LECHARNY, conseiller

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Olivier GOURSAUD, président, et par Elsa SANCHEZ, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

[D] [W] veuve [E] est décédée le [Date décès 3] 2016 à [Localité 12] en laissant ses deux enfants: MM. [X]-[F] et [R] [E].

Les biens immobiliers des époux [E] ont fait l'objet d'une donation-partage le 18 décembre 1998 au profit de leurs deux fils.

Le 21 juillet 2020, M. [X]-[F] [E] a fait assigner M. [R] [E] devant le tribunal judiciaire de Saint-Etienne aux fins de voir ordonner le partage de la succession de leur mère par moitié entre eux, la prise en charge au titre du passif de la succession des sommes de 4.514,51 euros et 236,94 euros et la condamnation au titre des frais funéraires.

Par un jugement du 2 mars 2022, le tribunal judiciaire de Saint-Etienne a:

- ordonné la liquidation et le partage de la succession d' [D] [W] veuve [E] décédée le [Date décès 3] 2016,

- dit que M. [R] [E] doit rapporter à la succession les donations perçues pour la somme totale de 55.143,20 euros et M. [X]-[F] [E] pour la somme totale de 44.295,50 euros,

- mis au passif de la succession la somme de 4.514,51 euros au titre des frais funéraires et la somme de 564,30 euros pour les frais de recherches

- débouté les parties de leurs demandes relatives à l'évaluation du mobilier, de condamnation au passif, du recel successoral et des frais à mettre au passif de la succession,

- condamné M. [R] [E] à payer à M. [X]-[F] [E] les sommes suivantes : 1.000 euros au titre du préjudice moral et 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté M. [R] [E] de sa demande de 15.000 euros de dommages et intérêts,

- condamné M. [R] [E] aux dépens, qui sont recouvrés directement par Maître Boivin, avocate, pour la part qu'elle a avancée sans recevoir provision,

- dit n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire.

Par déclaration du 31 mars 2022, M. [R] [E] a interjeté appel de la décision.

Aux termes de ses dernières conclusions, notifiées le 1er février 2023, M. [R] [E] demande à la cour de :

- infirmer le jugement du 2 mars 2022 de la 1ère chambre civile du tribunal judiciaire de Saint-Etienne (RG 20/02312) en ce qu'il a :

o dit que M. [R] [E] doit rapporter à la succession les donations perçues pour la somme totale de 55.143,27 euros et M. [X]-[F] [E] pour la somme totale de 44.295,50 euros

o mis au passif de la succession la somme de 564,30 euros pour les frais de recherche

o débouté les parties de leurs demandes relatives à l'évaluation du mobilier, de condamnation au passif, du recel successoral et des frais à mettre au passif de la succession

o condamné M. [R] [E] à payer à M. [X]-[F] [E] les sommes suivantes : 1.000 euros au titre du préjudice moral et 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile

o débouté M. [R] [E] de sa demande de 15.000 euros de dommages et intérêts

o condamné M. [R] [E] aux dépens.

et en ce que M. [R] [E] a été débouté des demandes suivantes :

o juger que la somme de 35 063,27 € reconstituée par M. [X]-[F] [E] n'a pas à être réintégrée dans l'actif successoral et ne constitue pas un recel successoral imputable à M. [R] [E]

o débouter M. [X]-[F] [E] concernant la somme de 7.000 euros au titre d'un véhicule Citroen C4

o désigner Maître [J] [B], notaire associé à [Localité 12], pour procéder à la liquidation du partage de la succession de [D] [W] veuve de M. [R] [E], et subsidiairement juger que Maître [J] [B] sera co-désigné avec tel notaire qu'il appartiendra

o rejeter la demande de M. [X] [F] [E] au titre du ticket de carte bleue de 40 euros du 4 février 2016 de la superette de [Localité 13]

o juger que M. [X]-[F] [E] doit rapporter au titre de l'actif successoral les sommes suivantes et le condamner au paiement de ces sommes : 29 550 euros (vente appartement [Adresse 1] à [Localité 12]), 7622,45 euros au titre des meubles et 1524,49 euros au titre des bijoux.

o juger que la somme de 1 095,09 euros au titre de la facture des frais de déplacement de M. [R] [E] doit être inscrite au passif de la succession de [D] [W] veuve de M. [R] [E]

o juger que M. [X]-[F] [E] s'est rendu coupable de recel successoral à hauteur de 54 910,67 euros (500 € + 500 € + 7000 € + 500 € + 8995,50 € + 9000 € + 5200 € + 6000 € + 1632,89 + 971,35 € + 10,93 € +14 600 €) et de 29 550 €, 7622,45 € et 1524,49€

o juger en conséquence que M. [X]-[F] [E] ne pourra prendre aucune part sur les sommes recelées

o condamner M. [X]-[F] [E] aux intérêts au taux légal à compter de son appropriation des sommes recelées

o juger en conséquence que M. [X]-[F] [E] doit rapporter à la succession de [D] [W] veuve de M. [R] [E] les sommes de 54 910,67 €, 29 550 €, 7622,45 € et 1524,49 €, et le condamner au paiement de ces sommes

o juger que les frais d'acte notariés à venir liés au recel successoral commis par M. [X]-[F] [E] seront supportés exclusivement par M. [X]-[F] [E]

o condamner M. [X]-[F] [E] à payer à M. [R] [E] la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts en raison du préjudice moral subi

o condamner M. [X]-[F] [E] à payer à M.[R] [E] la somme de 8.400 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance, les dépens comprenant la somme de 144 euros au titre de frais de recherches de chèques, y compris les sommes prévues par les articles R 444-3 et ses annexes et A 444-31 du code de commerce portant fixation du tarif des huissiers de justice, au profit de Maître Jean-Yves Dimier, avocat de la SCP Crochet Dimier, sur son affirmation de droit en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Et statuant à nouveau :

- juger que la somme de 35 063,27 euros reconstituée par M. [X]-[F] [E] n'a pas à être réintégrée dans l'actif successoral et ne constitue pas un recel successoral imputable à M. [R] [E]

- débouter M. [X]-[F] [E] concernant la somme de 7.000 euros au titre d'un véhicule Citroen C4

- désigner Maître [J] [B], notaire associé à [Localité 12], pour procéder à la liquidation du partage de la succession de [D] [W] veuve de M. [R] [E], et subsidiairement juger que Maître [J] [B] sera co-désigné avec tel notaire qu'il appartiendra

- rejeter la demande de M. [X] [F] [E] au titre du ticket de carte bleue de 40 euros du 4 février 2016 de la superette de [Localité 13]

- juger que M. [X]-[F] [E] doit rapporter au titre de l'actif successoral les sommes suivantes et le condamner au paiement de ces sommes : 29.550 euros (vente appartement [Adresse 1] à [Localité 12]), 7.622,45 euros au titre des meubles et 1.524,49 euros au titre des bijoux

- juger que M. [X]-[F] [E] s'est rendu coupable de recel successoral à hauteur de 66.422,67 euros (500 + 1000 + 3012 +500 + 500 + 500 + 500 + 7000 + 500 + 8995,5 + 9000 + 6000 + 5200 +1632,89 + 971,35 + 10,93 + 6 000,00 € + 14 600,00 €)

- juger en conséquence que M. [X]-[F] [E] ne pourra prendre aucune part sur les sommes recelées

- condamner M. [X]-[F] [E] aux intérêts au taux légal à compter de son appropriation des sommes recelées

- juger en conséquence que M. [X]-[F] [E] doit rapporter à la succession de [D] [W] veuve de M. [R] [E] les sommes de 66 422,67 €, 29 550 €, 7622,45€ et 1524,49 €, et le condamner au paiement de ces sommes

- juger que les frais d'acte notariés à venir liés au recel successoral commis par M. [X]-[F] [E] seront supportés exclusivement par M. [X]-[F] [E]

- condamner M. [X]-[F] [E] à payer à M. [R] [E] la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts en raison du préjudice moral subi

- condamner M. [X]-[F] [E] à payer à M. [R] [E] la somme de 8.400 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance, les dépens comprenant la somme de 144 euros et 58 euros au titre de frais de recherches de chèques, y compris les sommes prévues par les articles R 444-3 et ses annexes et A 444-31 du code de commerce portant fixation du tarif des huissiers de justice, au profit de Maître Dimier, avocat de la Scp Crochet Dimier, sur son affirmation de droit en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernière conclusions, notifiées le 16 mars 2023 , M. [X]-[F] [E] demande à la cour de :

- confirmer le jugement du 2 mars 2022 de la première chambre civile du tribunal judiciaire de Saint-Étienne en ce qu'il a :

o désigné Maître [P] [L] en tant que notaire chargé de la succession de [D] [W],

o dit que M. [X]-[F] [E] doit rapporter les donations perçues pour la somme totale de 44.295,50 euros

o mis au passif de la succession la somme de 4.514,51 euros au titre des frais funéraires et la somme de 564,30 euros pour les frais de recherche de M. [X]-[F] [E]

o débouté M. [R] [E] de sa demande de 15.000 euros de dommages et intérêts

o débouté M. [R] [E] de sa demande en recel successoral

o débouté M. [R] [E] de sa demande de prise en charge des frais de recherche

o condamné M. [R] [E] aux dépens de première instance

- infirmer le jugement du 2 mars 2022 de la première civile du tribunal judiciaire de Saint-Étienne en ce qu'il a :

o dit que M. [R] [E] doit rapporter à la succession les donations perçues pour la somme de 55 043,27 euros

o débouté M. [X]-[F] [E] de sa demande au titre de l'évaluation du mobilier et des frais à mettre au passif de la succession sur la somme de 236,94 euros

o condamné M. [R] [E] au paiement de la somme de 1.000 euros au titre du préjudicie moral de M .[X]-[F] [E]

o condamné M. [R] [E] au paiement de la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Et statuant de nouveau :

- ordonner que M. [R] [E] rapporte à la succession de [D] [W] la somme de 62 943,27 euros au titre des donations qu'il a perçu

- condamner M. [R] [E] au paiement de la somme de 15.000 euros au titre du préjudice moral de M. [X]-[F] [E]

- condamner M. [R] [E] au paiement de la somme de 3 719,20 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile de première instance

- rejeter l'intégralité des demandes de [R] [E] en appel

- subsidiairement ordonner le recel à l'encontre de M. [R] [E] pour la somme de 62.943,27 euros

- fixer l'évaluation des biens mobiliers de l'appartement situé [Adresse 8] à [Localité 12] à la somme de 21 500 euros

- ordonner la mise au passif de la succession de [D] [W] des frais annexes de M. [X]-[F] [E] pour la somme de 236,94 euros de frais annexes

- ordonner l'attribution des biens mobiliers de l'appartement situé [Adresse 8] à [Localité 12] à M. [R] [E]

- en conséquence, condamner M. [R] [E] à payer à M. [X]- [F] [E] une soulte au titre de l'attribution desdits biens mobiliers

- subsidiairement, fixer l'évaluation des biens mobiliers de l'appartement situé [Adresse 8] à [Localité 12] à la somme de 18 795 euros

- ordonner le partage des souvenirs et bijoux de famille retenus par M. [R] [E]

- condamner M. [R] [E] à payer somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- condamner M. [R] [E] aux entiers dépens de l'instance d'appel distrait au profit de Maître Boivin au titre de l'article 699 du code de procédure civile.

La clôture a été ordonnée le 4 mai 2023.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DECISION

1. Sur la demande de partage et liquidation de la succession et la désignation du notaire

M. [R] [E] fait valoir qu'il n'est pas opposé à la demande en liquidation et partage de la succession de sa mère ni à la désignation d'un notaire. Il demande à ce que M. [B] soit désigné.

Il ajoute qu'il n'y a aucune raison de rejeter la désignation de Maître [B] et que son frère s'y oppose uniquement parce qu'il n'a pas voulu restituer les clés de l'appartement appartenant à M. [R] [E].

De même, M. [X]-[F] [E] sollicite le partage judiciaire. En revanche, concernant la désignation du notaire il soutient que son frère n'a pas interjeté appel sur le chef de jugement de désignation de Maître [L] en tant que notaire chargé des opérations de liquidation de partage de la succession. Il ajoute que compte tenu de la mésentente entre lui et son frère, il est justifié de désigner un notaire neutre.

Réponse de la cour

Selon la déclaration d'appel du 31 mars 2022, M. [R] [E] n'a pas relevé appel du chef de dispositif du jugement ayant désigné Me [P] [L], notaire demeurant [Adresse 7] pour procéder aux opérations de liquidation et partage de la succession d'[D] [W] veuve [E].

Celui-ci s'est en effet borné à reprendre sa prétention, qui doit uniquement figurer dans les conclusions à l'exclusion de la déclaration d'appel, tendant à voir « désigner Me [B] notaire associé à [Localité 12], pour procéder à la liquidation du partage de la succession de [D] [W] veuve de M. [R] [E], et subsidiairement juger que Maître [J] [B] sera co-désigné avec tel notaire qu'il appartiendra ».

L'effet dévolutif n'ayant pas opéré, la cour n'est pas saisie de la demande de désignation d'un autre notaire.

2. Sur le rapport des donations

M. [R] [E] soutient que son frère a été destinataire de sommes d'argent issues des comptes bancaires de ses parents qui doivent être rapportées à l'actif de la succession et qu'il lui a été fait sommation de communiquer tous les justificatifs des sommes qu'il a perçues à ce titre.

Il soutient que:

- son frère a obtenu une carte bancaire postérieurement au décès de son père pour le compte bancaire de sa mère et qu'il a obtenu parallèlement une procuration sur son compte,

- plusieurs retraits ont été réalisés, entre 500 et 3.000 euros du compte de sa mère à destination de M. [X]-[F] [E],

- rien ne vient justifier que les sommes retirées ont servi pour des achats destinés à [D] [E],

- certains justificatifs de son frère sont donnés en double voire en triple exemplaire, ce qui démontre que les achats étaient destinés à l'utilisation personnelle de M. [X]-[F] [E],

- un chèque de 7.000 euros a été rédigé par son frère, l'écriture et la signature étant différentes de celle de [D] [E],

- son frère a été destinataire d'un chèque de 9.000 euros, ainsi que de retraits de 5.200 euros et 6.000 euros,

- sa mère était diminuée par sa maladie et son frère a profité de son état de faiblesse pour obtenir une procuration sur les comptes bancaires,

- une somme totale de 66 422,67 euros doit être rapportée à la succession.

M. [X]-[F] [E] soutient qu'à la clôture des comptes, le solde des liquidités de leur mère a été transféré auprès du notaire, qui a procédé au règlement de factures pour le compte de la succession. Il fait notamment valoir que:

- M. [R] [E] ne justifie pas de la disparition des sommes qu'il invoque ou qu'il aurait profité de ces sommes,

- il s'occupait de sa mère seul depuis 2011 et à ce titre, il a réalisé des dépenses quotidiennes pour subvenir à ses besoins, ce qui explique les retraits de 500 euros,

- sa mère n'avait pas de déficit moteur et il n'a pas abusé de sa faiblesse pour lui faire signer une procuration sur son compte,

-la plainte déposée par son frère pour abus de faiblesse a été classée sans suite,

- la production des relevés bancaires ne peut suffire à prouver qu'il a été destinataire des fonds,

- la donation de 7.000 euros a été réalisée en contrepartie de la sommes qui lui a été versée par ses parents pour l'achat d'un véhicule,

- le chèque de 29.550 euros correspond au boni de la vente de l'appartement [Adresse 1] à [Localité 12], qu'il a reçu en donation de ses parents et qui leur a été versé par erreur par le notaire,

- ses parents ont retracé les libéralités faites au profit de leurs enfants, en parfaite équité depuis 2006,

- son frère doit rapporter à la succession les sommes qu'il a perçues, qui ne sont pas des présents d'usage,

- M.[R] [E] a été également bénéficiaire de plusieurs chèques libellés à son ordre de 2012 à 2015, qui sont rapportables à la succession.

Réponse de la cour

Le rapport des donations par M. [X]-[F] [E]

C'est par des motifs pertinents, justement déduits des faits de la cause et des pièces produites, que la cour adopte, que les premiers juges ont retenu que M. [X]-[F] [E] doit rapporter à la succession les donations dont il a bénéficié pour un montant total de 44 295, 50 euros.

Pour confirmer cette décision, la cour ajoute que:

- si le compte d'[D] [W] à la [9] s'élevait à la somme de 1 632,89 euros au 20 janvier 2016, M. [X]-[F] [E] justifie à l'aide d'un courrier du 17 mai 2018 de Me [B], notaire chargé de la succession, auquel est joint un relevé des opérations de compte du 20 janvier 2016 au 1er février 2016, qu'il a réglé diverses factures de la succession avant de clôturer les comptes bancaires de la défunte et qu'il a ensuite soldé ses frais d'acte et honoraires, ainsi que les frais de succession,

- M. [X]-[F] [E] ne soutient pas que la procuration qu'il détenait sur le compte de sa mère a été signée devant un médecin, mais devant une personne assermentée par l'hôpital pour les diligences administratives, ce qui est usuel,

- cette procuration date du mois de mars 2015, de sorte que le compte-rendu d'hospitalisation qui a été rédigé en 2016 ne peut être pris en compte pour démontrer son état de faiblesse, étant précisé que la plainte qui a été déposée à son encontre pour abus de faiblesse a été classée sans suite le 11 février 2020,

- s'il est exact que certains des tickets de caisse que M. [X]-[F] [E] produits pour justifier ses dépenses pour le compte de sa mère sont présentés en double exemplaire, il y a lieu de retenir qu'il s'agit d'erreurs, au demeurant parfaitement excusables compte tenu de leur nombre,

- M. [X]-[F] [E] justifie à l'aide d'une photographie de la cuisine de sa mère qu'il a acquis une plaque à induction d'un montant de 261 euros pour elle, en remplacement de sa plaque d'origine au gaz devenue trop dangereuse,

- de même, les frais de boucherie de 25,33 euros pendant que sa mère était hospitalisée ne sont pas incompatibles avec le fait qu'il lui apportait ses repas lors de ses visites, ainsi qu'il le soutient,

- en tout état de cause, les comptes bancaires d'[D] [W] de 2015 et 2016 mettent en évidence l'absence de toute dépense pour la vie quotidienne autre que les retraits mensuels de 500 euros effectués par M. [X]-[F] [E], ce qui se justifie pleinement.

Le rapport des donations par M. [R] [E]

C'est par des motifs pertinents, justement déduits des faits de la cause et des pièces produites, que la cour adopte, que les premiers juges ont retenu que M. [R] [E] devait rapporter à la succession les donations dont il a bénéficié pour la somme totale de 55 153,27 euros, étant précisé que devant la cour, M. [X]-[F] [E] demande bien le rapport des donations de son frère à la succession.

Il est ajouté que même s'il est démontré que les sommes qui ont été versées à M. [R] [E] étaient des cadeaux, cette circonstance n'est pas de nature à faire obstacle à leur rapport à la succession, à défaut, compte tenu de leur valeur et d'informations sur la fortune du disposant à la date des donations, de pouvoir être considérés comme des dons d'usage.

De même, M. [R] [E] ne démontre pas que les sommes qu'il dit lui avoir été prêtées par ses parents, lui ont été remboursées.

3. Sur les biens mobiliers et les bijoux

M. [R] [E] demande que M. [X]-[F] [E] rapporte à la succession les sommes de 7 622,45 euros au titre des meubles et de 1 524,49 euros au titre des bijoux.

Il fait notamment valoir que:

- il appartient à M. [X]-[F] [E] de justifier de la réalité des meubles et de leur valeur, étant rappelé qu'il a tout conservé,

- son frère n'ayant pas restitué les clés de l'appartement qui lui a été attribué, il a pris les meubles qui avaient de la valeur,

- s'agissant des biens mobiliers compris dans l'appartement appartenant à M. [X]-[F] [E], celui-ci minimise les biens présents dans le logement ainsi que leur évaluation,

- il a été lésé en raison du prix de vente de la maison et de la plus value effectuée par son frère, de sorte que la somme de 1 524,49 euros correspondant à la valeur des bijoux doit être rapportée à la succession.

M. [X]-[F] [E] demande que les biens mobiliers de l'appartement [Adresse 8] à [Localité 12] soient évalués à la somme de 21 500 euros et attribués à M. [R] [E], sous réserve de sa condamnation au paiement d'une soulte. Il demande également que soit ordonné le partage des souvenirs et bijoux de famille.

Il fait notamment valoir que:

- il a été impossible de réaliser un inventaire de ses biens, M. [R] [E] refusant tout accès à son logement contenant les meubles,

- son frère ne produit aucun document indiquant qu'il aurait sollicité les clés de ce bien,

- il produit le contrat d'assurance habitation qui stipule que les biens mobiliers sont couverts à hauteur de la somme de 21 700 euros en 2017, sur laquelle il convient de tenir compte de la vétusté à hauteur de 25%,

- le mobilier dépendant de la succession doit donc être évalué à la somme de 17.360 euros,

- M. [R] [E] doit se voir attribuer les biens mobiliers, sous réserve du paiement d'une soulte à hauteur de la moitié de leur valeur soit 8.780 euros,

- si la cour ne retient pas cette valeur, il sollicite de retenir la valeur la plus récente du mobilier à savoir celle estimée en 2004 soit 18.795 euros,

- concernant les biens mobiliers compris dans l'appartement lui appartenant, il déclare le mobilier suivant : deux lits, deux armoires, deux chevets, deux fauteuils, deux méridiennes, évalué à la somme de 720 euros,

- les souvenirs de famille tels que les photos et les bijoux sont restés en possession de M. [R] [E] et doivent être partagés,

- son frère ne rapporte pas la preuve qu'il n'est pas possession des bijoux et il ne procède que par affirmation lorsqu'il prétend qu'ils sont encore en sa possession.

Réponse de la cour

Il est constant entre les parties que les biens mobiliers ne faisaient pas partie des donations partage, de sorte qu'ils doivent être partagés.

S'agissant des biens mobiliers afférents à l'appartement situé [Adresse 8] à [Localité 12], dont M. [R] [E] a hérité, il y a lieu de retenir, en premier lieu, que M. [R] [E] ne rapporte pas la preuve que son frère aurait, d'une part, conservé les clés et, d'autre part, pris les meubles de valeur s'y trouvant, la circonstance qu'il soit en possession de documents destinés à sa mère postérieurement à son décès étant insuffisante à cet égard, surtout que M. [X]-[F] [E], dont il est établi qu'il gérait la situation administrative de sa mère, indique avoir conservé les numéros de contrats de sa mère pour accomplir les démarches nécessaires postérieurement à son décès.

En second lieu, en l'absence de tout inventaire du mobilier et des bijoux de famille, la cour n'est pas mise en mesure de fixer le montant de leur évaluation, le contrat d'assurance [10], qui fixe la valeur garantie du mobilier en 2004, étant à cet égard insuffisant. La mention manuscrite qui a été ajoutée en 2017 par une personne indéterminée ne peut par ailleurs pas être prise en compte en présence d'une contestation par M. [R] [E].

Il en va de même pour les biens immobiliers afférents à l'appartement de M. [X]-[F] [E], dont l'inventaire, qui est contesté, n'a pas été dressé d'un commun accord entre les héritiers.

Le jugement ayant débouté les parties à ces titres est donc confirmé.

4. Sur le passif de la succession

M. [R] [E] ne conteste pas que les frais funéraires de 4 514,51 euros exposés par son frère soient mis au passif de la succession mais s'oppose à l'inscription de la somme de 236,94 euros correspondant aux frais divers de fournitures et de poste dans le cadre du règlement de la succession de sa mère.

M. [X]-[F] [E] sollicite que la somme de 236,94 euros correspondant aux frais divers de fournitures et de poste soit mise au passif de la succession, ajoutant qu'il s'est entièrement occupé des funérailles d'[D] [W].

S'agissant des frais annexes, il précise qu'il a dû débourser des sommes relatives aux divers frais de fourniture et de poste dans le cadre du règlement de la succession.

Il sollicite également le débouté de la demande de son frère de la prise en charge au passif de la succession de la somme de 1.095,09 euros au titre de frais kilométrique pour un bien immobilier ne dépendant pas de la succession de la défunte.

Réponse de la cour

Les parties sollicitent l'une et l'autre la confirmation du jugement ayant mis au passif de la succession la somme de 4 514,51 euros au titre des frais funéraires, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'examiner cette demande.

En revanche, s'agissant des frais annexes, M. [X]-[F] [E] justifie devant la cour, en produisant les tickets de caisse afférents, du coût des cartes de remerciements, des timbres, des lettres administratives pour un montant total de 236, 94 euros qu'il a exposé pour la succession de leur mère.

En conséquence, par infirmation du jugement, il convient d'ajouter cette somme au passif de la succession.

Contrairement à ce qui est soutenu par M. [X]-[F] [E], M. [R] [E] ne réclame plus devant la cour que soit inscrite au passif de la succession la somme de 1.095,50 euros qu'il dit avoir exposée pour se rendre à Concarnau, même s'il demande que le jugement l'ayant débouté de cette demande soit infirmé de ce chef.

En conséquence, il n'y a pas lieu d'examiner cette demande.

5. Sur le recel successoral

M. [R] [E] fait notamment valoir que:

- son frère a dissimulé des milliers d'euros qui doivent être rapportés à la succession de leur mère,

- M. [X]-[F] [E] l'a assigné sans faire état des sommes qu'il devait rapporter, ce qui démontre l'intention de les dissimuler,

- son frère a utilisé à des fins personnelles l'argent appartenant à sa mère, profitant de son état défaillant,

- les conditions du recel successoral sont réunies,

- il n'a lui-même pas réalisé de recel successoral,

- les sommes dont fait état son frère sont des présents d'usage.

M. [X]-[F] [E] fait notamment valoir que:

- lui et son frère étaient parfaitement au courant des donations faites par leurs parents, de sorte qu'il n'existe pas de recel successoral,

- l'abus de faiblesse n'est pas caractérisé dans la mesure où sa mère n'était pas défaillante mentalement,

- il n'est pas démontré qu'il a eu l'intention de dissimuler les donations,

- si le recel successoral devait être retenu, il le serait à l'égard des deux frères, M. [R] [E] ne reconnaissant toujours pas les donations qui ont été faites à son profit.

Réponse de la cour

C'est par des motifs pertinents, justement déduits des faits de la cause et des pièces produites, que la cour adopte, que les premiers juges ont retenu qu'en l'absence de démonstration de l'intention de dissimuler les donations dont chacun des frères a bénéficié, ils doivent être déboutés de leur demande tendant à voir reconnaître un recel successoral.

La cour ajoute que la seule circonstance que M. [X]-[F] [E] ne mentionne pas les donations dont il a été bénéficiaire dans son assignation en liquidation partage n'est pas de nature à établir qu'il a eu la volonté de les dissimuler.

Le jugement est donc confirmé.

6. Sur les demandes de dommages et intérêts

M. [R] [E] sollicite la somme de 15.000 euros en réparation de son préjudice moral en faisant notamment valoir qu'il a subi du harcèlement de la part de son frère.

M. [X]-[F] [E] sollicite également la somme de 15 000 euros à ce titre en faisant notamment valoir que:

- son frère a un comportement agressif envers lui qui a provoqué un état de détresse émotionnelle,

- il a subi du harcèlement téléphonique ainsi que des injures,

- il reçoit des soins en raison du comportement de son frère,

- la production de ses conclusions en divorce est un procédé déloyal et vexatoire.

Réponse de la cour

C'est par des motifs pertinents, justement déduits des faits de la cause et des pièces produites, que la cour adopte, que les premiers juges ont retenu, d'une part, que M. [R] [E] devait payer la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts à son frère en réparation du préjudice qu'il lui a causé et, d'autre part, que M. [R] [E] devait être débouté à ce titre.

7. Sur les autres demandes

Le jugement est confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de M. [X]-[F] [E], en appel. M. [R] [E] est condamné à lui payer à ce titre la somme de 3.000 €.

Les dépens d'appel sont à la charge de M. [R] [E] qui succombe en sa tentative de remise en cause du jugement.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu'il déboute M. [X]-[F] [E] de sa demande tendant à mettre au passif de la succession la somme de 236, 94 euros au titre des frais de fournitures et de poste,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que la cour n'est pas saisie de la demande de désignation d'un autre notaire,

Met au passif de la succession la somme de 236, 94 euros au titre des frais de fournitures et de poste,

Condamne M. [R] [E] à payer à M. [X]-[F] [E], la somme de 3.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties de toutes leurs autres demandes,

Condamne M. [R] [E] aux dépens de la procédure d'appel, et accorde aux avocats qui en ont fait la demande le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

La greffière, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile b
Numéro d'arrêt : 22/02444
Date de la décision : 11/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 17/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-11;22.02444 ?
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