N° RG 22/03211 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OIX6
Décision du
Tribunal Judiciaire de BOURG EN BRESSE
Au fond
du 07 mars 2022
RG : 21/00302
[J]
C/
[J]
[J]
[A]
[A]
[A]
[J]
DE LA REGION RHONE ALPES ET DU DEPARTEMENT DU RHONE
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
1ère chambre civile B
ARRET DU 28 Mai 2024
APPELANT :
M. [K] [J]
né le [Date naissance 13] 1964 à [Localité 29] (69)
[Adresse 19]
[Localité 1]
Représenté par Me Pierre emmanuel THIVEND de la SELARL SELARL D'AVOCAT PIERRE-EMMANUEL THIVEND, avocat au barreau d'AIN
INTIMES :
Mme [D] [J]
née le [Date naissance 8] 1961 à [Localité 29] (69)
[Adresse 23]
[Localité 3]
Mme [W] [J]
née le [Date naissance 7] 1963 à [Localité 29] (69)
[Adresse 14]
[Localité 2]
Représentées par Me Romain LAFFLY de la SELARL LX LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938
Représentées par Me Philippe REFFAY de la SCP REFFAY ET ASSOCIÉS, avocat au barreau d'AIN
Représentées par Me Michel DESILETS de la SCP AXIOJURIS LEXIENS, avocat au barreau de VILLEFRANCHE-SUR-SAONE
Mme [Y] [A]
née le [Date naissance 12] 1981 à [Localité 29] (69)
[Adresse 15]
[Localité 20]
défaillante
M. [E] [A]
né le [Date naissance 10] 1974 à [Localité 29] (69)
[Adresse 22]
[Localité 18]
défaillant
Mme [U] [A]
née le [Date naissance 6] 1977 à [Localité 29] (69)
[Adresse 21]
[Localité 25]
défaillante
Mme [S] [J]
née le [Date naissance 16] 1948 à [Localité 29] (69)
[Adresse 28]
[Localité 4]
défaillante
MONSIEUR LE DIRECTEUR REGIONAL DES FINANCES PUBLIQUES DE LA REGION AUVERGNE RHONE ALPES
pôle de gestion des patrimoines privés
[Adresse 17]
[Localité 24]
défaillant
* * * * * *
Date de clôture de l'instruction : 04 Mai 2023
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 26 Février 2024
Date de mise à disposition : 28 Mai 2024
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
- Olivier GOURSAUD, président
- Stéphanie LEMOINE, conseiller
- Bénédicte LECHARNY, conseiller
assistés pendant les débats de Elsa SANCHEZ, greffier
A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.
Arrêt rendu par défaut rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Olivier GOURSAUD, président, et par Elsa SANCHEZ, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * *
EXPOSÉ DE L'AFFAIRE
[I] [F] veuve [J] est décédée à [Localité 3] le [Date décès 9] 2015, laissant pour lui succéder ses quatre enfants : Mme [D] [J], Mme [W] [J], M. [K] [J] et Mme [S] [J] épouse [A]. Cette dernière ayant renoncé à la succession, ses trois enfants, M. [E] [A], Mme [Y] [A] et Mme [U] [A], viennent en représentation de leur mère.
L'époux de [I] [F] était quant à lui décédé le [Date décès 11] 2008, sa succession n'étant toujours pas réglée.
La succession de [I] [F] est notamment composée d'une maison d'habitation de 100 m² sur un terrain de 1085 m² située à [Localité 31] (Ain) et d'une dette d'impayés de 15'914,44 euros liée principalement à son hébergement en maison de retraite.
Par une ordonnance du 2 février 2016, le président du tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse a déclaré vacante la succession de [I] [J] et a désigné M. le directeur régional des finances publiques de la région Rhône-Alpes et du département du Rhône - France domaine - en qualité de curateur à la succession.
Un acte de notoriété rectificatif a été établi le 30 mars 2018 par le notaire saisi de la succession, Maître [M], notaire à [Localité 26] (Rhône).
Compte tenu de la dette d'impayés, le curateur de la succession et les héritières ont souhaité mettre en vente la maison située à [Localité 31] afin de rembourser le créancier de la succession, ce à quoi s'est opposé M. [K] [J].
Mmes [D] et [W] [J] ont alors assigné devant le tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse, devenu le tribunal judiciaire de Bourg-en-Bresse, M. [K] [J], Mme [Y] [A], M. [E] [A], Mme [U] [A], Mme [S] [J] et la direction régionale des finances publiques de la région Auvergne Rhône-Alpes et du département du Rhône afin notamment d'être autorisées à vendre le bien immobilier pour la somme de 210'000 euros.
Par jugement du 7 mars 2022, le tribunal a :
- déclaré la succession de [I] [F] comme n'étant plus vacante,
- déchargé le service des domaines de la direction régionale des finances publiques de la région Auvergne Rhône-Alpes et du département du Rhône de sa mission de curateur de la succession de [I] [F],
- dit que la direction régionale des finances publiques de la région Auvergne Rhône-Alpes et du département du Rhône ne pourra être tenue au paiement d'aucune somme excédant l'actif successoral en tant que curateur de la succession précédemment déclarée vacante de [I] [F],
- prononcé la restitution de la succession de [I] [F] à ses héritiers reconnus,
- autorisé Mmes [D] et [W] [J], dans le cadre du mandat confié à M. le directeur régional des finances publiques de la région Rhône-Alpes et du département du Rhône - France domaine - à procéder à la vente du bien immobilier situé à [Localité 31] dans le cadre du mandat confié à [32] à M. [R] pour la somme de 210'000 euros,
- débouté M. [K] [J] de sa demande de sommation de communiquer une liste des vices cachés afférents à l'immeuble indivis,
- débouté Mmes [D] et [W] [J] de leur demande de dommages-intérêts,
- condamné M. [K] [J] à payer à Mmes [D] et [W] [J] la somme totale de 2 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. [K] [J] aux entiers dépens de l'instance,
- dit n'y avoir lieu à dire que le présent jugement sera commun et opposable à M. le directeur régional des finances publiques de la région Rhône-Alpes et du département du Rhône, à Mme [S] [J], Mme [Y] [A], Mme [U] [A] et M. [E] [A].
Par déclaration du 3 mai 2022, M. [K] [J] a relevé appel du jugement.
Par conclusions notifiées le 2 août 2022, il demande à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il :
décharge le service des domaines de la direction régionale des finances publiques de sa mission de curateur de la succession de [I] [F],
prononce la restitution de la succession de [I] [F] à ses héritiers reconnus,
déboute Mmes [D] et [W] [J] de leur demande de dommages et intérêts,
- infirmer le jugement en ce qu'il :
déclare la succession de [I] [F] comme n'étant plus vacante,
autorise Mmes [D] et [W] [J] dans le cadre du mandat confié à M. le directeur régional des finances publiques de la région Rhône-Alpes et du département du Rhône - France domaine - à procéder à la vente du bien immobilier situé à [Localité 31] dans le cadre du mandat confié à [32] à M. [R] pour la somme de 210'000 euros,
le condamne à payer à Mmes [D] et [W] [J] la somme totale de 2 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,
le condamne aux entiers dépens,
Et statuant à nouveau,
- déclarer la succession de [I] [F] comme n'étant pas vacante en l'absence de renonciation des héritiers à la succession,
- dire et juger par conséquent le mandat confié à M. le directeur régional des finances publiques de la région Rhône-Alpes et du département du Rhône -France domaine - pôle de gestion des patrimoines privés - comme étant nul,
- débouter Mmes [D] et [W] [J] de leur demande tendant à voir ordonner la vente de la maison d'habitation au profit de M. [R], en raison de l'absence de péril de l'intérêt commun,
- débouter Mmes [D] et [W] [J] de l'intégralité de leurs demandes,
- condamner in solidum Mmes [D] et [W] [J] à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure de civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Par conclusions notifiées le 16 mars 2023, Mmes [D] et [W] [J] demandent à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a :
déclaré la succession de [I] [F] comme n'étant plus vacante,
déchargé le service des domaines de la direction régionale des finances publiques de la région Auvergne Rhône-Alpes et du département du Rhône de sa mission de curateur de la succession de [I] [F],
dit que la direction régionale des finances publiques de la région Auvergne Rhône-Alpes et du département du Rhône ne pourra être tenue au paiement d'aucunes sommes excédant l'actif successoral en tant que curateur de la succession précédemment déclarée vacante de [I] [F],
prononcé la restitution de la succession de [I] [F] à ses héritiers reconnus,
sur le principe, autorisé Mmes [D] et [W] [J] à procéder à la vente du bien immobilier situé à [Localité 31] à une somme égale ou supérieure à 210'000 euros,
débouté M. [K] [J] de sa demande de sommation de communiquer une liste des vices cachés afférents à l'immeuble indivis,
condamné M. [K] [J] à payer à Mmes [D] et [W] [J] la somme totale de 2 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
condamné M. [K] [J] aux entiers dépens de l'instance,
- infirmer le jugement en ce qu'il a :
autorisé la vente à M. [O] [R] pour la somme de 210'000 euros dans le cadre du mandat confié à M. le directeur régional des finances publiques de la région Rhône-Alpes et du département du Rhône - France domaine -pôle de gestion des patrimoines privés,
débouté Mmes [D] et [W] [J] de leur demande de dommages-intérêts,
En conséquence, statuant à nouveau,
- rejeter toutes demandes indemnitaires de M. [K] [J] quelles qu'elles soient,
- juger leur demande devant la cour recevable et fondée,
Y faire droit, et en conséquence,
- les autoriser à procéder à la vente du bien indivis situé à [Localité 30] à tout acquéreur, à laquelle aucun indivisaire ne s'oppose hormis M. [K] [J], pour une somme égale ou supérieure à 210'000 euros,
- juger que M. [K] [J] occupe le bien dans son seul et unique intérêt, et qu'il est redevable auprès des autres indivisaires d'une indemnité correspondant à une somme mensuelle de 200 euros à compter de la date de l'assignation délivrée, soit le 19 janvier 2021, soit une somme totale de 200 € x 24 mois = 4 800 euros, sauf à parfaire,
- condamner M. [K] [J] à leur régler les 2/5èmes de 4 800 euros, soit 960 euros chacune, sauf à parfaire,
- condamner M. [K] [J] à leur régler une somme de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts,
- condamner M. [K] [J] à leur régler une somme de 5 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,
- le condamner aux entiers dépens.
Mmes [Y] et [U] [A] et M. [E] [A], auxquels l'assignation a été signifiée par acte d'huissier de justice remis à l'étude, Mme [S] [J] et la direction régionale des finances publiques de la région Auvergne Rhône-Alpes et du département du Rhône, auxquelles l'assignation à été remise à personne, n'ont pas constitué avocat devant la cour.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 4 mai 2023.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1. Sur la vacance de la succession et la demande d'annulation du mandat confié au directeur régional des finances publiques
M. [K] [J] demande à la cour d'infirmer le jugement rendu par le tribunal, lequel a considéré que la succession n'était plus vacante.
Pour considérer que la succession n'était pas vacante et juger que le mandat confié au service des domaines est donc nul, il fait valoir que :
- dans la mesure où il a été démontré que la succession n'a jamais été vacante, le tribunal, au lieu de déclarer que la succession n'est plus vacante et de décharger le service des domaines de sa mission de curateur, aurait dû préciser que la mission du service des domaines était nulle et qu'il était dès lors déchargé de sa mission de curateur à compter même de l'ordonnance du 2 février 2016 ;
- il ressort des éléments du dossier que la décision de mettre en vente le bien immobilier a été prise par le curateur ; or, dans la mesure où la succession n'a jamais été vacante, les actes accomplis par le curateur doivent être considérés comme nuls ;
- le mandat confié au service des domaines par les deux héritières est également nul de sorte que le mandat pour vendre le bien immobilier à M. [R] est sans effet.
Mmes [D] et [W] [J] répliquent que :
- pour une raison ignorée, la succession de [I] [F] a été déclarée vacante le 2 février 2016 ;
- la cour appréciera la demande d'infirmation du jugement formée par M. [K] [J] relativement à l'absence de vacance de la succession depuis l'origine et à la nullité du mandat confié au service des domaines pour vendre le bien immobilier à M. [R].
Réponse de la cour
Selon l'article 809 du code civil, la succession est vacante :
1° Lorsqu'il ne se présente personne pour réclamer la succession et qu'il n'y a pas d'héritier connu ;
2° Lorsque tous les héritiers connus ont renoncé à la succession ;
3° Lorsque, après l'expiration d'un délai de six mois depuis l'ouverture de la succession, les héritiers connus n'ont pas opté, de manière tacite ou expresse.
Et selon l'article 809-1 du même code, le juge, saisi sur requête de tout créancier, de toute personne qui assurait, pour le compte de la personne décédée, l'administration de tout ou partie de son patrimoine, d'un notaire, de toute autre personne intéressée ou du ministère public, confie la curatelle de la succession vacante, dont le régime est défini à la présente section, à l'autorité administrative chargée du domaine.
L'ordonnance de curatelle fait l'objet d'une publicité.
Encore, l'article 493 du code de procédure civile dispose que l'ordonnance sur requête est une décision provisoire rendue non contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse.
Et l'article 496, alinéa 2, du même code dispose que s'il est fait droit à la requête, tout intéressé peut en référer au juge qui a rendu l'ordonnance.
En l'espèce, par une ordonnance sur requête du 2 février 2016, la présidente du tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse a déclaré vacante la succession de [I] [F] au motif que personne ne s'est présenté pour la réclamer et qu'il n'y a pas d'héritier connu.
Toutefois, il résulte de l'acte de notoriété rectificatif du 30 mars 2018 versé aux débats que le 20 janvier 2016, un acte de notoriété avait été établi constatant la dévolution successorale et mentionnant comme héritiers : Mmes [S], [D] et [W] [J] et M. [K] [J].
Par ailleurs, il convient d'observer que l'ensemble des héritiers connus n'avaient pas renoncé à la succession et qu'à la date de l'ordonnance sur requête, il ne s'était pas écoulé un délai de six mois depuis l'ouverture de la succession, de sorte que les conditions de l'article 809 du code civil, 1°, 2° ou 3°, n'étaient pas remplies, ce dont il ressort que la succession n'était pas vacante.
Aussi convient-il d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré la succession de [I] [F] comme n'étant plus vacante et de déclarer la succession comme n'étant pas vacante.
S'agissant en revanche de la demande d'annulation du mandat confié à M. le directeur régional des finances publiques de la région Rhône-Alpes et du département du Rhône -France domaine - pôle de gestion des patrimoines privés, la cour relève que ce mandat résulte de l'ordonnance sur requête du 2 février 2016 qui a désigné le directeur régional des finances publiques en qualité de curateur à la succession. Or, aucune des parties n'a sollicité la rétractation de ladite ordonnance sur le fondement de l'article 496 du code de procédure civile.
Aussi convient-il de rejeter la demande présentée par M. [K] [J] en cause d'appel et tendant à voir dire et juger le mandat confié au directeur régional des finances publiques comme étant nul.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a :
- déchargé le service des domaines de la direction régionale des finances publiques de la région Auvergne Rhône-Alpes et du département du Rhône de sa mission de curateur de la succession de [I] [F],
- dit que la direction régionale des finances publiques de la région Auvergne Rhône-Alpes et du département du Rhône ne pourra être tenue au paiement d'aucunes sommes excédant l'actif successoral en tant que curateur de la succession précédemment déclarée vacante de [I] [F],
- prononcé la restitution de la succession de [I] [F] à ses héritiers reconnus.
2. Sur l'autorisation de vendre le bien immobilier
M. [K] [J] s'oppose à la vente de la maison dans les conditions du mandat confié à l'agence [32]. Il fait valoir que :
- Mmes [D] et [W] [J] ne justifient d'aucun péril de l'intérêt commun des indivisaires ; la dette d'impayés d'un montant de 15'914,44 euros n'est qu'hypothétique en l'absence d'actions entreprises pour le recouvrement de la somme et son montant est incertain ; les intimées ne justifient pas de l'impossibilité pour l'indivision de régler cette dette potentielle ; Mme [W] [J] qui alléguait en première instance des difficultés financières ne produisait aucun document sur sa situation financière et Mme [D] [J] ne justifiait d'aucune difficulté financière ;
- son refus de vendre la maison au prix de 210'000 euros est justifié par le fait que la maison est affectée de vices cachés et est parfaitement impropre à sa destination ; en revanche, le terrain peut quant à lui être valorisé ; il a présenté en première instance une proposition en vue du rachat du bien pour un montant de 215'000 euros, supérieure à l'offre présentée par M. [R] est donc plus profitable à la succession ;
- en cause d'appel, les intimées indiquent avoir été destinataires d'une offre de 220'000 euros qu'elles entendent accepter ; par conséquent, il convient d'en tirer la conclusion qu'en acceptant cette offre, les intimés renoncent à l'offre de 210'000 euros de M. [R], de sorte que la procédure en vente forcée actuelle n'a plus lieu d'être.
Mmes [D] et [W] [J] répliquent que :
- la succession se trouve bloquée et le créancier de celle-ci ne peut être payé ; en outre, l'indivision expose des frais au titre du bien, sans contrepartie ;
- en s'opposant à la vente, M. [K] [J] a mis et met toujours en péril l'intérêt commun, puisque les dettes vont s'accumuler, le bien se déprécie et le premier acheteur a renoncé à son offre ; en conséquence, la vente apparaît plus que jamais comme une nécessité imposée par les circonstances ;
- certains indivisaires sont dans l'incapacité de régler leur quote-part de la dette.
Réponse de la cour
Selon l'article 815-5 du code civil, un indivisaire peut être autorisé par justice à passer seul un acte pour lequel le consentement d'un coïndivisaire serait nécessaire, si le refus de celui-ci met en péril l'intérêt commun.
En l'espèce, c'est par des motifs pertinents, justement déduits des faits de la cause et des pièces produites, que la cour adopte, que le premier juge a retenu, pour autoriser Mmes [D] et [W] [J] à procéder à la vente du bien immobilier dépendant de la succession, que :
- si l'intérêt personnel de Mme [D] [J] ne peut avoir d'influence sur la demande d'autorisation de vente du bien, il doit néanmoins être tenu compte de sa situation financière précaire et de ses dettes qui, non réglées, peuvent conduire ses créanciers à poursuivre le paiement de leurs créances sur le bien indivis,
- le règlement de la dette de 15 914,44 euros s'avère impossible compte tenu de l'actif successoral s'élevant, hors bien immobilier, à la somme de 2 210,69 euros,
- les parties s'accordent pour convenir que le bien indivis, faute d'occupation et d'entretien depuis plusieurs années, ne cesse de dépérir par l'effet du temps qui passe, entraînant une diminution consécutive de sa valeur vénale et portant atteinte aux intérêts patrimoniaux de l'indivision,
- l'existence d'éventuels vices cachés affectant la maison indivise est inopérante, alors, d'une part, que les désordres allégués ont l'air d'être apparents, d'autre part, que tout acquéreur dispose de la possibilité d'invoquer la garantie des vices cachés.
Pour confirmer le jugement attaqué, la cour ajoute seulement que, contrairement à ce soutient l'appelant, le fait qu'aucune action en recouvrement forcé de la dette d'impayés n'ait encore été engagée n'a pas pour effet de rendre cette dette hypothétique, étant observé au surplus qu'il ressort du mémoire présenté en première instance par la direction régionale des finances publiques de la région Rhône-Alpes et du département du Rhône - France domaine - que sa désignation était justement intervenue à l'initiative du comptable public de [Localité 27], créancier de la succession au titre des frais d'hébergement en maison de retraite de [I] [F], dans le but d'obtenir le paiement de sa créance.
La mise en péril de l'intérêt commun de l'indivision par le refus de M. [K] [J] de vendre du bien immobilier dépendant de la succession étant caractérisé et l'existence de vices cachés n'étant pas un motif pour refuser la vente, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a, d'une part, autorisé Mmes [D] et [W] [J] à procéder à la vente du bien immobilier situé à [Localité 31] pour une somme égale ou supérieure à 210'000 euros, d'autre part, débouté M. [K] [J] de sa demande de sommation de communiquer une liste des vices cachés afférents à l'immeuble indivis.
Compte tenu de l'évolution de la demande en cause d'appel, il convient d'infirmer le jugement en ce qu'il a précisé que la vente devrait se faire au profit de M. [R] dans le cadre du mandat confié à [32].
3. Sur la demande de dommages-intérêts
Mmes [D] et [W] [J] exposent que la résistance, voire l'opposition systématique de leur frère, a généré pour elle un préjudice ; qu'il existe bien un lien de causalité entre l'attitude de M. [K] [J] et l'impossibilité de vendre qui leur cause préjudice.
Toutefois, le droit d'exercer une action en justice ou une voie de recours ne dégénère en abus que s'il révèle de la part de son auteur une intention maligne, une erreur grossière ou une légèreté blâmable dans l'appréciation de son droit qui ne saurait résulter du seul rejet de ses prétentions.
Faute pour les intimées d'établir un tel abus, la demande de dommages-intérêts est rejetée.
4. Sur l'indemnité d'occupation
En cause d'appel, Mmes [D] et [W] [J] exposent que leur frère occupe le bien dans son seul et unique intérêt, en remisant un camping-car sur le terrain et une moto dans le garage, et sollicitent donc sa condamnation à régler une indemnité d'occupation aux autres indivisaires.
M. [K] [J] ne forme aucune observation sur cette demande.
Réponse de la cour
Selon l'article 815-9 du code civil, chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires et avec l'effet des actes régulièrement passés au cours de l'indivision. A défaut d'accord entre les intéressés, l'exercice de ce droit est réglé, à titre provisoire, par le président du tribunal.
L'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité.
Aucune indemnité n'est due dès lors que l'occupation de l'immeuble indivis n'exclut pas la même utilisation par les autres indivisaires.
En l'espèce, s'il ressort bien du courrier du 11 juillet 2022 du conseil de M. [K] [J] qu'un camping-car et une moto appartenant à ce dernier sont entreposés dans le bien immobilier, les intimées ne démontrent ni ne soutiennent que du fait de l'occupation du bien par leur frère pour stationner ces véhicules, les autres indivisaires sont placés dans l'impossibilité de pouvoir utiliser le bien à cette même fin de stockage ou d'entrepôt, étant observé qu'elles indiquent dans leurs conclusions que la maison n'est pas habitable.
Aussi convient-il, ajoutant au jugement déféré, de les débouter de ce chef de demande.
5. Sur les demandes accessoires
Le jugement est confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.
M. [K] [J] qui succombe en son appel est condamné aux dépens et à payer à Mmes [D] et [W] [J] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a :
- déclaré la succession de [I] [F] comme n'étant plus vacante,
- dit que la vente du bien immobilier indivis sis [Adresse 5] à [Localité 31] se ferait dans le cadre du mandat confié à [32] à M. [R],
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
Déclare la succession de [I] [F] comme n'étant pas vacante,
Dit n'y avoir lieu à préciser que la vente du bien immobilier indivis sis [Adresse 5] à [Localité 31] doit se faire dans le cadre du mandat confié à [32] à M. [R],
Déboute Mmes [D] et [W] [J] de leur demande de condamnation de M. [K] [J] au paiement d'une indemnité d'occupation au titre de la jouissance exclusive du bien immobilier indivis,
Condamne M. [K] [J] à payer à Mmes [D] et [W] [J] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [K] [J] aux dépens d'appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT