N° RG 21/07979 - N° Portalis DBVX-V-B7F-N5NI
N° RG 21/08410 - N° Portalis DBVX-V-B7F-N6P4
Décisions du :
Ordonnance du conseiller de la mise en état du tribunal de grande instance de LYON
du 02 Avril 2015
RG : 13/14000
Tribunal Judiciaire de LYON
Au fond
du 08 septembre 2021
RG : 13/14000
ch n°1 cab 01 A
[G]
C/
[D]
SARL à associé unique CORNIMMO
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
1ère chambre civile B
ARRET DU 19 Mars 2024
APPELANT ET INTIME :
M. [U] [G]
né le 21 Novembre 1976 à [Localité 6] (86)
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté par Me Vincent DE FOURCROY de la SELARL DE FOURCROY AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 1102
ayant pour avocat plaidant Me Brice LACOSTE de la SELARL LACOSTE CHEBROUX BUREAU D'AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 1207
INTIME ET APPELANT :
La société CORNIMMO
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Philippe NOUVELLET de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475
ayant pour avocat plaidant Me Anne BOLLAND-BLANCHARD de la SELAS Fiducial Legal by LAMY, avocat au barreau de LYON, toque : 656
INTIME :
M. [T] [D]
né le 23 Novembre 1961 à [Localité 5]
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représenté par Me Philippe NOUVELLET de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475
ayant pour avocat plaidant Me Anne BOLLAND-BLANCHARD de la SELAS Fiducial Legal by LAMY, avocat au barreau de LYON, toque : 656
* * * * * *
Date de clôture de l'instruction : 01 Décembre 2022
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 23 Octobre 2023
Date de mise à disposition : 09 Janvier 2024 prorogée au 19 Mars 2024, les avocats dûment avisés conformément à l'article 450 dernier alinéa du code de procédure civile
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
- Olivier GOURSAUD, président
- Stéphanie LEMOINE, conseiller
- Bénédicte LECHARNY, conseiller
assistés pendant les débats de Elsa SANCHEZ, greffier
A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.
Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Olivier GOURSAUD, président, et par Elsa SANCHEZ, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * *
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
La société Entreprise [D], spécialisée dans l'activité de plâtrerie, peinture et revêtement de sols, était entièrement détenue par Mr [T] [D] jusqu'au 13 décembre 2010, puis par la S.A.R.L. Cornimmo dont M. [D] était l'associé unique jusqu'au 17 mars 2011, avant d'être cédée à la S.A.S. Financière Cloué Marigny.
Mr [U] [G] est le dirigeant de la société financière Cloue Marigny, société holding créée pour racheter la société Entreprise. [D].
Mr [G], Mr [D] et la société Cornimmo se sont en effet rapprochés en vue de la cession de la totalité des parts détenues dans la société Entreprise [D] à Mr [G].
Le 13 décembre 2010, les parts sociales de la société Entreprise [D] ont été apportées en nature au capital de la société Cornimmo, qui a augmenté son capital.
Suivant protocole d'accord du 14 décembre 2010, la société Cornimmo s'est engagée à céder la totalité des parts de la société Entreprise. [D] qu'elle détenait au bénéfice de Mr [G]. Le prix de cession provisoire a été fixé à la somme de 1.950.000 €, le prix définitif devant être fixé en fonction de la situation nette au 31 décembre 2010. La date de réalisation était fixée au 31 janvier 2011.
Le protocole de cession a précisé que Mr [G] se réservait la faculté de se substituer toute personne morale de son choix à la réitération de la cession dont il restera solidairement garant, ce qu'il a fait en créant la société Financière Cloué Marigny.
La réalisation de la cession a été convenue sous la condition suspensive d'obtention par Mr [G] d'un prêt bancaire de 1.000.000 € mais compte tenu du refus de financement des établissements bancaires, les parties ont modifié le prix de cession des parts.
Le 17 mars 2011, les parties ont régularisé la cession définitive par un avenant au protocole de cession prévoyant un prix de cession des parts à 1.550.000 € avec un paiement différé de 450.000 €.
Parallèlement le cédant s'est engagé à réaliser une distribution exceptionnelle de dividendes prélevée sur le compte «Autres réserves» de 400.000 €.
Il a été convenu que le solde de 450.000 € serait payable :
- à raison de 150.000 € par compensation avec la créance que la société financière Cloue Marigny possédait sur la société Cornimmo au titre d'un contrat d'emprunt obligataire,
- à raison de 300.000 € en 4 échéances de 75.000 € payables les 17 mars 2012, 2013, 2014 et 2015.
La société financière Cloue Marigny s'est acquittée de la somme de 1.100.000 €, pour le paiement du prix de cession.
Par jugement du 30 juin 2013, le tribunal de commerce de Lyon a admis les sociétés Entreprise [D] et financière Cloue Marigny au bénéfice d'une procédure de redressement judiciaire.
Maître [C] a été désigné en qualité d'administrateur judiciaire et Maître [F] en qualité de Mandataire Judiciaire.
Suivant courrier recommandé avec accusé de réception du 1er octobre 2013, la société Cornimmo a déclaré une créance au passif de la société financière Cloue Marigny pour un montant total de 428 248,50 €.
Par un jugement en date du 24 juin 2014, le tribunal de commerce de LYON a converti le redressement judiciaire de la société financière Cloue Marigny en liquidation judiciaire et selon jugement du même jour, le tribunal de commerce de Lyon a arrêté le plan de cession de la société Entreprise. [D].
Puis, suivant jugement en date du 29 juillet 2014, le tribunal de commerce de Lyon a converti le redressement judiciaire de la société Entreprise. [D] en liquidation judiciaire.
Par ordonnance du 6 octobre 2014, le juge-commissaire de la société Entreprise. [D] a désigné Mr [Z] [J], expert-comptable, aux fins de faire un point précis sur un litige relatif aux conditions d'acquisition de la société Entreprise. [D] par la société financière Cloue Marigny et à divers problèmes comptables et financiers.
Dans le cadre de la procédure de vérification du passif, la société Financière Cloue Marigny a sollicité du juge-commissaire le sursis à statuer sur l'admission de la créance de la société Cornimmo, dans l'attente de l'issue de la procédure en cours devant le tribunal de commerce de Lyon.
En effet, en 2014, les administrateurs puis les liquidateurs judiciaires des sociétés financière Cloue Marigny et Entreprise [D] ont attrait la société Cornimmo devant le tribunal de commerce de Lyon afin d'obtenir de cette société :
- la restitution à la société Entreprise. [D] d'un dividende de 400.000 € perçu le 17 mars 2011, soutenant qu'il s'agissait d'un dividende fictif,
- sa condamnation à verser à la société financière Cloue Marigny une somme de 239.999,94€ pour dol reprochant à la société Cornimmo d'avoir frauduleusement augmenté le résultat de l'entreprise.
Par assignation du 23 juin 2014, les mêmes ont attrait Mr [T] [D] devant le tribunal de commerce de Lyon afin d'obtenir sa condamnation à restituer à la société Entreprise. [D] une somme totale de 530.290,16 €, correspondant à des rémunérations perçues au titre des exercices 2010 et 2011, non approuvées par la société [D].
Les instances ont été jointes et le tribunal de commerce de Lyon a rendu son jugement le 15 novembre 2016 qui a été partiellement infirmé par la cour d'appel de Lyon.
En effet, par un arrêt du 31 mai 2018, la cour d'appel a :
- déclaré Maître [F] en ses qualités respectives de liquidateur judiciaire des sociétés financière Cloue Marigny et Entreprise [D] recevable en ses demandes,
- condamné Mr [D] à verser à Maître [F] en sa qualité de liquidateur judiciaire des sociétés financière Cloue Marigny et Entreprise [D] la somme de 240.000 € au titre de rémunération indues qu'il a perçues,
- débouté Maître [F] en ses qualités respectives de liquidateur judiciaire des sociétés financière Cloue Marigny et Entreprise [D] de ses autres demandes.
A la suite de cet arrêt, un protocole d'accord transactionnel est intervenu entre Maître [F] es qualités, d'une part, et Mr [T] [D] et la société Cornimmo, d'autre part, autorisé par le juge-commissaire et homologué par le tribunal de commerce par jugement du 12 janvier 2021 par lequel les parties ont renoncé à tout recours contre cet arrêt et d'une façon générale à tout recours les uns contre les autres et il a été convenu que Mr [T] [D] versait à Maître [F] es qualités une indemnité transactionnelle de 170.000 €
***
Par exploit du 13 décembre 2013, la société Cornimmo a fait assigner Mr [U] [G] devant le tribunal de grande instance de Lyon soutenant qu'il était codébiteur solidaire de la société financière Cloue Marigny, car il s'était porté garant des sommes dues par cette société au bénéfice de la société Cornimmo en paiement au titre du contrat obligataire d'une part, de la somme de 100.000 €, outre intérêts au taux légal, et au titre du crédit vendeur d'autre part, de la somme de 300.000 €, outre intérêts.
Par exploit du 29 juin 2017 Mr [U] [G] a fait assigner la société Cornimmo et Mr [T] [D] aux fins de faire juger leur responsabilité leur reprochant d'avoir commis des fautes dans le cadre de la cession des titres de la société et donné une image trompeuse de la société Entreprise. [D] ne lui ayant pas permis d'apprécier la valeur réelle de la dite entreprise et soutenant que leurs man'uvres étaient à l'origine du redressement puis la liquidation judiciaire des sociétés Entreprise. [D] et financière Cloue Marigny.
Les deux affaires ont été jointes.
Dans le cadre de cette procédure, Mr [G] a saisi le juge de la mise en état d'une demande de sursis à statuer sur la demande de la société Cornimmo à son encontre dans l'attente de la fixation de l'éventuelle créance de cette société au passif de la société financière Cloue Marigny.
Par ordonnance en date du 2 avril 2015, le juge de la mise en état a :
- dit que Mr [U] [G] est recevable en sa demande de sursis à statuer,
- débouté Mr [U] [G] de sa demande de sursis à statuer,
- déclaré irrecevables les demandes de la société Cornimmo tendant à ce que le juge de la mise en état constate que Mr [G] ne prétend plus être lié à la société Cornimmo par un cautionnement mais qu'il reconnaît sa qualité de codébiteur solidaire et lui en donner acte et tendant à ce qu'il soit constaté qu'en application du protocole d'accord du 14 décembre 2010, Mr [G] est tenu au paiement du solde du prix de cession des actions de la société Entreprise. [D].
Par jugement du 8 septembre 2021, le tribunal judiciaire de Lyon a :
- dit n'y avoir lieu à sursis à statuer,
- déclaré les demandes de la société Cornimmo à l`encontre de Mr [U] [G] recevables,
- déclaré les demandes indemnitaires formulées par Mr [U] [G] contre Mr [T] [D] irrecevables car prescrites,
- débouté Mr [U] [G] de ses demandes ;
- condamné Mr [U] [G] à payer à la société Cornimmo :
* 75.000 €, outre les intérêts conventionnels au taux de 5 % l'an depuis le 17 mars 2011 jusqu'au complet paiement de cette échéance, et outre intérêt au taux légal à compter du 17 mars 2012 ;
* 75.000 € outre les intérêts conventionnels au taux de 5 % l'an depuis le l7 mars 2011 jusqu'au complet paiement de cette échéance, et outre l'intérêt au taux légal à compter du 17 mars 2013;
* 75.000 €, outre les intérêts conventionnels au taux de 5 % l'an depuis le 17 mars 2011 jusqu'au complet paiement de cette échéance, et outre l`intérêt au taux légal à compter du 17 mars 2014 ;
* 75.000 € outre les intérêts conventionnels au taux de 5 % l'an depuis le 17 mars 2011 jusqu'au complet paiement de cette échéance, et outre l'intérêt au légal à compter du 17 mars 2015
- rejeté le surplus de la demande,
- ordonné la capitalisation des intérêts échus par année entière à compter du 13 décembre 2013;
- rejeté les demandes formées à titre de dommage et intérêt pour procédure abusive,
- condamné Mr [U] [G] à payer à la société Cornimmo la somme de 3.000 € au titre de l`article 700 du code de procédure civile et à Mr [T] [D] la somme de 3.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné Mr [U] [G] aux entiers dépens d`instance ;
- assortit le jugement de l'exécution provisoire.
Par déclaration du 3 novembre 2021, Mr [U] [G] a interjeté appel de l'ordonnance du juge de la mise en état du 2 avril 2015 et du jugement au fond du 8 avril 2021 et a intimé Mr [T] [D] et la société Cornimmo .
Par déclaration du 23 novembre 2021, la société Cornimmo a interjeté appel de ce jugement et a intimé Mr [U] [G].
Au terme de ses dernières conclusions notifiées le 19 octobre 2022 (doss 21/7979) et 2 novembre 2022 (doss N° 21/8410), Mr [U] [G] demande à la cour de :
sur l'ordonnance rendue par le juge de la mise en état le 2 avril 2015,
- infirmer l'ordonnance rendue par le juge de la mise en état le 2 avril 2015 en ce qu'elle a:
- débouté Mr [G] de sa demande de sursis à statuer,
- condamné Mr [G] à payer à la société Cornimmo la somme de 1.200 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l'incident,
et statuant à nouveau,
- surseoir à statuer dans l'attente de la fixation définitive de la créance de la société Cornimmo au passif de la société Financière Cloue Marigny suivant décision définitive insusceptible de recours passée en force de chose jugée,
sur le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lyon le 8 septembre 2021,
- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lyon le 8 septembre 2021, en ce qu'il a :
- dit n'y avoir lieu à sursis à statuer,
- déclaré les demandes de la société Cornimmo à l'encontre de Mr [U] [G] recevables,
- déclaré que les demandes indemnitaires formulées par Mr [U] [G] contre Mr [T] [D] sont irrecevables car prescrites,
- débouté Mr [U] [G] de ses demandes,
- condamné Mr [U] [G] à payer à la société Cornimmo :
* 75 000,00 €, outre les intérêts conventionnels au taux de 5 % l'an depuis le 17 mars 2011 jusqu'au complet paiement de cette échéance, et outre intérêt au taux légal à compter du 17 mars 2012,
* 75 000,00 €, outre les intérêts conventionnels au taux de 5 % l'an depuis le 17 mars 2011 jusqu'au complet paiement de cette échéance, et outre intérêt au taux légal à compter du 17 mars 2013,
* 75 000,00 €, outre les intérêts conventionnels au taux de 5 % l'an depuis le 17 mars 2011 jusqu'au complet paiement de cette échéance, et outre intérêt au taux légal à compter du 17 mars 2014,
* 75 000,00 €, outre les intérêts conventionnels au taux de 5 % l'an depuis le 17 mars 2011 jusqu'au complet paiement de cette échéance, et outre intérêt au taux légal à compter du 17 mars 2015,
- ordonné la capitalisation des intérêts échus par année entière à compter du 13 décembre 2013,
- condamné Mr [U] [G] à payer à la société Cornimmo la somme de 3.000,00€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à Mr [T] [D] la somme de 3 000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Mr [U] [G] aux entiers dépens de l'instance,
- assorti le jugement de l'exécution provisoire,
et statuant à nouveau,
In limine litis,
- surseoir à statuer dans l'attente de la fixation définitive de la créance de la société Cornimmo au passif de la société financière Cloue Marigny suivant décision de justice définitive insusceptible de recours passée en force de chose jugée,
Au fond,
- déclarer la société Cornimmo irrecevable en ses demandes,
- débouter la société Cornimmo de l'intégralité de ses demandes, fins, moyens et prétentions,
- condamner la société Cornimmo à lui verser les sommes suivantes :
* 650 000 € au titre du préjudice résultant de la perte de chance de réaliser un meilleur investissement,
* 20 000 € au titre du préjudice moral subi,
* une somme équivalente aux condamnations éventuelles prononcées à son encontre, par la cour d'appel de céans dans le cadre de la présente instance, au titre de la perte de chance de ne pas être poursuivi,
- ordonner la compensation avec les condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre et celles prononcées à son bénéfice,
- confirmer le jugement entrepris pour le surplus.
sur la rectification d'erreur matérielle,
- rectifier l'ordonnance rendue par le juge de la mise en état le 2 avril 2016 en supprimant la mention suivante :
' Mr [U] [G] reconnaissant être coobligé de la société Financière Cloue Marigny, il est tenu personnellement et directement à la dette dont le paiement lui est réclamé',
en tout état de cause,
- débouter la société Cornimmo et Mr [T] [D] de l'intégralité de leurs demandes, fins, prétentions et moyens,
- débouter la société Cornimmo et Mr [T] [D] de leur appel incident,
- condamner in solidum la société Cornimmo et Mr [T] [D] à lui verser une somme de 20.000,00 €, au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner in solidum la société Cornimmo et Mr [T] [D] aux entiers dépens, distraits au profit de la Selarl de Fourcroy Avocats Associés, Avocat sur son affirmation de droit.
Au terme de leurs dernières conclusions notifiées le 08 août 2022 (doss 21/8410 et doss 21/7979), la société Cornimmo et Mr [T] [D] demandent à la cour de :
- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lyon le 8 septembre 2021 dans l'affaire enrôlée sous le RG n°13/14000 en ce qu'il a rejeté la demande de la société Cornimmo tendant à faire condamner Mr [U] [G] à lui payer la somme de 100.000€ en principal correspondant au solde de l'emprunt obligataire qui devait être amorti par anticipation au plus tard le 1er juillet 2011 outre les intérêts conventionnels échus depuis la date d'émission augmentés de la prime de remboursement outre les intérêts au taux légal sur la totalité de ces sommes depuis le 26 juin 2013 date de la mise en demeure,
statuant à nouveau,
- condamner Mr [U] [G] à payer à la société Cornimmo :
- la somme de 100.000 € correspondant au solde du capital de l'emprunt obligataire restant dû,
- outre les intérêts conventionnels de 4% l'an à partir du 17 mars 2011 prévu par l'article 2.1 de l'emprunt obligataire (rubrique « intérêt annuel fixe ») payable le 31 décembre de chaque année depuis le 31 décembre 2011
- outre une prime de non conversion correspondant à un intérêt annuel supplémentaire de 4% l'an à partir du 31 mars 2015 tel que prévu par l'article 2.1 de l'emprunt obligataire (rubrique « prime de non conversion » et « amortissement »),
- outre un intérêt au taux légal majoré de 1 % sur chaque échéance annuelle non réglé à bonne date, conformément aux stipulations de l'article 2.1 de l'emprunt obligataire (rubrique intérêts de retard),
pour le surplus,
- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lyon le 8 septembre 2021 dans l'affaire enrôlée sous le RG n°13/14000 en ce qu'il :
- a dit n'y avoir lieu sursis à statuer
- a déclaré les demandes de la société Cornimmo à l'encontre de Mr [U] [G] recevables,
- a condamné Mr [U] [G] à payer à la société Cornimmo :
* 75 000 €, outre les intérêts conventionnels au taux de 5 % l'an depuis le 17 mars 2011 jusqu'au complet paiement de cette échéance, et outre l'intérêt au taux légal à compter du 17 mars 2012 ;
* 75 000 € outre les intérêts conventionnels au taux de 5 % l'an depuis le l7 mars 2011 jusqu'au complet paiement de cette échéance, et outre l'intérêt au taux légal à compter du 17 mars 2013;
* 75 000 €, outre les intérêts conventionnels au taux de 5 % l'an depuis le 17 mars 2011 jusqu'au complet paiement de cette échéance, et outre l`intérêt au taux légal à compter du 17 mars 2014 ;
* 75 000 € outre les intérêts conventionnels au taux de 5 % l'an depuis le 17 mars 201 1 jusqu'au complet paiement de cette échéance, et outre l'intérêt au légal à compter du 17 mars 2015
- a ordonné la capitalisation des intérêts échus par année entière à compter du 13 décembre 2013,
- a condamné Mr [U] [G] à payer à la société Cornimmo la somme de 3.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- a condamné Mr [U] [G] aux entiers dépens de l'instance,
- a assorti le jugement de l'exécution provisoire,
en tout état de cause,
- débouter Mr [U] [G] de toutes ses demandes, fins et conclusions plus amples et contraires,
- condamner Mr [U] [G] à payer à la société Cornimmo la somme de 20.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner Mr [U] [G] aux entiers dépens de l'instance en cause d'appel.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 1er décembre 2022.
A l'audience des plaidoiries du 23 octobre 2023, conformément à l'accord des parties, la cour a ordonné la révocation de l'ordonnance de clôture, déclaré recevable la production de l'arrêt rendu par la chambre commerciale de la cour d'appel de Lyon le 19 octobre 2023 et prononcé de nouveau la clôture de l'affaire.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Il convient en vue d'une bonne administration de la justice d'ordonner la jonction des affaires enrôlées sous les N° 21/7979 et 21/8410.
1° sur les demandes de la société Cornimmo :
a) sur la demande de sursis à statuer formée par Mr [G] et l'appel de l'ordonnance du juge de la mise en état :
Mr [G] forme une demande de sursis à statuer dans l'attente de la fixation définitive de la créance de la société Cornimmo au passif de la société financière Cloue Marigny et sollicite dans le même temps la rectification de l'ordonnance du conseiller de la mise en état en ce qu'il a constaté qu'il reconnaissait être coobligé de la société Financière Cloue Marigny.
Il fait valoir que :
- l'ordonnance du juge de la mise en état ayant rejeté sa demande mais ne statuant pas sur un incident mettant fin à l'instance, il ne pouvait en interjeter appel qu'en même temps que le jugement sur le fond, ce qu'il a fait,
- il est nécessaire de surseoir à statuer dans l'attente de la fixation définitive de la créance de la société Cornimmo au passif de la société financière Cloue Marigny, cette fixation étant contestée du chef de sa tierce opposition contre l'arrêt de la cour d'appel de Lyon du 31 mai 2018,
- en effet, s'il devait être qualifié de codébiteur solidaire, il serait alors recevable et bien fondé à se prévaloir des exceptions inhérentes à la dette, et en l'espèce de l'indétermination du montant de la créance,
- l'ordonnance du conseiller de la mise en état est par ailleurs entachée d'une erreur matérielle en ce qu'elle a constaté qu'il avait reconnu sa qualité de coobligé de la société Financière Cloue Marigny ce qui n'est pas le cas.
La société Cornimmo et Mr [D] répliquent sur cette demande qu'elle a déjà été rejetée par le juge de la mise en état et qu'elle est devenue sans objet.
sur ce :
Il n'y a pas lieu de rectifier l'ordonnance du juge de la mise en état en ce qu'il a constaté dans les motifs de sa décision ' Mr [U] [G] reconnaissant être coobligé de la société Financière Cloue Marigny, il est tenu personnellement et directement à la dette dont le paiement lui est réclamé' s'agissant d'un motif non décisoire et sur lequel le juge ne s'est pas appuyé pour fonder sa décision de rejet.
Le juge de la mise en état a en effet retenu pour rejeter la demande de sursis à statuer que la demande de la société Financière Cloue Marigny devant le tribunal de commerce reposait exclusivement sur le dol, exception personnelle à cette société que Mr [G] ne pouvait opposer et que la décision du tribunal de commerce n'avait pas d'autorité de chose jugée à son égard.
Il a d'ailleurs dans le dispositif de sa décision déclaré irrecevable la demande de la société Cornimmo tendant à ce qu'il constate que Mr [G] reconnaissait sa qualité de codébiteur solidaire et à lui en donner acte.
La cour relève que la recevabilité de l'appel de l'ordonnance rendue par le juge de la mise en état le 2 avril 2015 en ce qu'il a déclaré Mr [G] recevable en sa demande de sursis à statuer mais en ce qu'il l'a débouté de cette demande n'est pas discutée devant la cour.
S'il est constant que la demande de sursis à statuer constitue une exception de procédure, de sorte que par application de l'article 794, anciennement article 775, du code de procédure civile, la décision du juge de la mise en état qui statue sur une telle demande est revêtue de l'autorité de chose jugée au principal, une telle circonstance n'interdisait pas au tribunal de statuer au fond sur l'opportunité d'un sursis.
Cette demande de sursis à statuer apparaît toutefois désormais sans objet dés lors que :
- d'une part, par un arrêt en date du 31 mai 2018, la cour d'appel de Lyon a confirmé le jugement du tribunal de commerce de Lyon du 15 novembre 2016 qui avait fixé la créance de la société Cornimmo au passif de la société Financière Cloue Marigny à 428.248,50 € et que cette décision est définitive et insusceptible de recours passé en force de chose jugée,
- d'autre part, que la question de l'admission de cette créance est revenue devant le juge commissaire saisi à l'initiative de Mr [G], qui dans une ordonnance du 10 février 2021 a constaté que la créance de la société Cornimmo avait été définitivement fixée à la somme de 428.248,50 €, que dans le cadre de l'appel de cette décision, Mr [G] et la société Financière Cloue Marigny ont formé tierce opposition à l'encontre de l'arrêt du 31 mai 2018 et demandé l'annulation de l'ordonnance du juge commissaire du 10 février 2021 et que par un arrêt en date du 19 octobre 2023, la cour d'appel de Lyon a rejeté les prétentions de Mr [G] et de la société Cloue Marigny, notamment en jugeant que la tierce opposition n'était pas recevable et en confirmant l'ordonnance.
Ainsi, tant l'ordonnance du juge de la mise en état du 2 avril 2015 que le jugement du 8 septembre 2021 sont confirmés en ce qu'ils ont rejeté la demande de sursis à statuer de Mr [G].
b) sur la recevabilité des demandes en tant que dirigée à l'encontre de Mr [G] :
Mr [G] fait valoir que les demandes formées à son encontre exclusivement fondées sur l'avenant du 17 mars 2011 auquel il n'est pas partie à titre personnel puisqu'il ne l'a signé qu'en sa qualité de dirigeant de la société financière Cloue Marigny, sont irrecevables.
Plus précisément, il déclare que :
- il n'a jamais conclu par écrit à sa qualité de codébiteur solidaire de la société financière Cloue Marigny, ni reconnu cette qualité devant le juge de la mise en état,
- les engagements pris aux termes du protocole d'accord régularisé entre la société Cornimmo et lui même le 14 décembre 2010 sont nuls et de nul effet, et a minima caducs,
- en effet, le financement prévu au contrat n'a pas été obtenu de sorte que la condition suspensive à laquelle il n'avait pas renoncé est défaillie,
- le nouvel accord de mars 2011 est un nouvel engagement distinct de son engagement initial dés lors qu'il a été conclu avec la société financière Cloue Marigny et qu'il n'existe aucun engagement de se porter 'solidairement garant' de la société Cloue Marigny,
- ainsi, le premier rapport d'obligation entre lui même et la société Cornimmo a fait l'objet d'une novation par changement de débiteur qui est désormais la société financière Cloue Marigny et par le remplacement de l'obligation initiale par une nouvelle obligation,
- l'engagement qu'il a initialement pris de se porter 'solidairement garant' est donc sans portée et ne peut produire d'effet faute d'être défini.
La société Cornimmo fait valoir en réplique que :
- dans son ordonnance du 2 avril 2015, le juge de la mise en état a indiqué que Mr [G] avait reconnu être coobligé de la société financière Cloue Marigny et qu'il était tenu personnellement et directement à la dette dont le paiement lui était réclamé et cette décision qui tranche une exception de procédure a autorité de chose jugée et la force probante d'un acte authentique,
- la novation ne se présume pas et en l'absence de mention expresse d'une intention de nover de sa part, la modification des modalités de l'obligation initiale n'a pas emporté novation,
- l'avenant du 17 mars 2011 n'a opéré qu'une adjonction de débiteur, seules les modalités d'exécution de l'obligation (prix et conditions de paiement) ayant changé,
- en outre, toute novation a été expressément écartée par l'avenant du 17 mars 2011 qui précise que restent inchangées les autres stipulations du protocole du 14 décembre 2010, lequel précisait que Mr [G] resterait solidairement garant pour l'exécution des dispositions du protocole.
Sur ce :
Ainsi que rappelé plus haut, le motif de l'ordonnance du juge de la mise en état du 2 avril 2015 qui était seulement saisi d'une demande de sursis à statuer et selon lequel 'Mr [G] a reconnu être coobligé de la société financière Cloue Marigny et être tenu personnellement et directement à la dette dont le paiement est réclamé' n'est pas un motif décisoire et la décision sur ce point n'est pas revêtue de l'autorité de chose jugée.
Ce moyen est donc inopérant pour en déduire que Mr [G] est personnellement tenu aux obligations souscrites par la société Cloue Marigny.
Mr [G] n'est pas fondé à se prévaloir de la nullité ou de la caducité du protocole d'accord régularisé le 14 décembre 2010 avec la société Cornimmo et Mr [D] au motif que la condition suspensive d'obtention d'un prêt bancaire de 1.000.000 € au plus tard le 20 janvier 2011 n'a pas été réalisée.
En effet, il est expressément mentionné qu'à défaut de réalisation des conditions suspensives le 30 janvier 2011, les engagements pris en vertu de l'acte seront nuls et de nul effet, et les parties en conséquence déliées de leur engagements, sauf accord des soussignés pour proroger le présent protocole.
Or précisément, il est intervenu entre les partie un nouveau protocole signé le 17 mars 2011.
Mr [G] soutient que cet acte aurait emporté novation par changement de débiteur et l'aurait ainsi libéré de ses obligations.
En application de l'article 1273 ancien du code civil, dans sa version applicable au litige, la novation ne se présume point et il faut que la volonté de l'opérer résulte clairement de l'acte.
Par des motifs pertinents que la cour adopte, les premiers juges, après avoir rappelé que les changements des modalités de l'obligation et de son exécution n'emportaient pas novation et que la novation par changement de débiteur requiert la décharge expresse du premier débiteur par le créancier, ont justement retenu que :
- aux termes du protocole d'accord du 14 décembre 2010, Mr [U] [G] a pris l'engagement personnel de payer le prix de cession des actions composant le capital social de la société Entreprise. [D] 'en se réservant la faculté de se substituer pour la réitération des présentes toute personne morale de son choix dont il restera solidairement garant',
- l'avenant du 17 mars 2011 qui a substitué la société Financière Cloue Marigny , avec une modification du montant du prix de cession et de ses modalités de paiement précise que 'les autres stipulations du protocole d'accord signé en date du 14 décembre 2010 demeurent inchangées',
- il s'en déduisait que deux codébiteurs solidaires étaient engagés envers la société Cornimmo, à savoir la société Financière Cloue Marigny et Mr [U] [G].
La cour ajoute que les mentions des actes ci-dessus rapportés sont particulièrement claires et ne nécessitent aucune interprétation.
Il n'est stipulé aucune mention expresse portant sur une volonté de nover l'engagement initial de Mr [G] et au contraire, l'avenant du 17 mars 2011 n'est que la prolongation de l'accord initial impliquant un engagement personnel de Mr [G] ainsi qu'en atteste la formule portée en tête de l'acte sur la faculté de substitution pour la réitération de l'acte '...dont il restera solidairement garant pour l'exécution des dispositions du présent protocole'.
Mr [G] est donc personnellement tenu aux engagements souscrits dans l'avenant du 17 mars 2011 et le jugement est confirmé en ce qu'il a déclaré recevables les demandes de la société Cornimmo à son encontre.
c) sur la demande en paiement au titre du crédit vendeur (300.000 € en principal) :
La société Cornimmo fait valoir que Mr [G] est personnellement tenu au paiement du solde du prix des actions ainsi qu'il l'a reconnu devant le juge de la mise en état et qu'il résulte du protocole de cession du 14 décembre 2010 et de l'avenant du 17 mars 2014.
Elle déclare que :
- Mr [G] n'est pas fondé à se prévaloir du caractère indéterminé du quantum de la créance en raison du dol invoqué par la société financière Cloue Marigny devant le tribunal de commerce alors d'une part qu'un coobligé ne peut se prévaloir du dol invoqué par son coobligé pour prétendre à l'existence d'une exception relative à la dette, le dol invoqué étant une exception purement personnelle au codébiteur, et que d'autre part, et en tout état de cause, l'absence de dol a été retenue par le tribunal de commerce confirmé en cela par l'arrêt de la cour d'appel de Lyon,
- il n'est pas davantage fondé à soutenir que la créance a été définitivement fixée dés lors qu'au contraire, elle l'a été par l'arrêt de la cour d'appel de Lyon du 31 mai 2018,.
Mr [G] déclare que :
- cette créance qui n'est pas définitivement fixée au passif de la liquidation judiciaire n'est pas certaine, liquide et exigible,
- cela ressort notamment des travaux opérés par des techniciens intervenus relevant le caractère extraordinaire du résultat de l'année 2010, de ce que les informations fournies par Mr [D] et par la société Cornimmo étaient incomplètes et erronées et des irrégularités affectant les comptes.
sur ce :
Comme rappelé ci-dessus, Mr [G] est personnellement tenu aux engagements souscrits dans le protocole de cession du 14 décembre 2010 et de l'avenant du 17 mars 2011
Comme également rappelé par ailleurs, la créance de la société Cornimmo au passif de la société Financière Cloue Marigny a été fixée par une décision désormais irrévocable à savoir l'arrêt du 31 mai 2018 et les contestations de Mr [G] sur l'admission de cette créance ont également été rejetées par la cour d'appel de Lyon dans son arrêt du 19 octobre 2023.
Toute contestation de Mr [G] sur ce point est désormais inopérante.
Les premiers juges ont justement constaté qu'en application du protocole de cession du 14 décembre 2010 et de l'avenant du 17 mars 2011, Mr [G] restait personnellement tenu au paiement du crédit vendeur qui constitue une des modalités de paiement du prix.
La somme de 300.000 € ainsi due est payable en quatre fois échelonné tous les 12 mois, la première devant intervenir dans un délai de 12 mois à compter de la date de la signature définitive des actes de cession, soit le 17 mars 2012.
Il est également stipulé que la somme de 300.000 € payable à terme portera intérêts au taux de 5 % l'an et qu'à défaut de paiement dans les délais sus visés, il sera appliqué en sus l'intérêt légal.
Il est constant qu'aucune somme n'a été réglée et le jugement est confirmé en ce qu'il a condamné Mr [G] au paiement des dites sommes à la société Cornimmo avec intérêts au taux conventionnel de 5 % depuis le 17 mars 2011 et au taux légal à compter de chaque date d'échéance.
d) sur la demande en paiement d'une somme de 100.000 € au titre d'un emprunt obligataire:
Le tribunal a considéré que selon le protocole, le prix est payé par compensation avec la créance détenue par la société financière Cloue Marigny au titre du contrat obligataire d'un montant de 150.000 € émis par l'associé unique de la société cessionnaire au profit de la société Cornimmo, cette dernière devant souscrire 15.000 obligations convertibles de 10 € chacune de sorte qu'il était acquis que le paiement avait été fait ou à tout le moins qu'une novation par changement de débiteur était acquise sur cette somme.
La société Cornimmo conteste l'existence de cette compensation et fait valoir que le tribunal a opéré une confusion entre sa demande portant sur le solde d'un prêt obligataire et la demande en paiement d'une quote-part du prix de cession.
Elle déclare en effet que :
- en exécution du contrat d'émission d'obligations convertibles en actions, la société financière Cloue Marigny devait lui rembourser une somme de 150.000 € sur laquelle elle n'a réglé que 50.000 €,
- l'avenant du 17 mars 2011 n'a pas prévu de compensation entre le prix de cession et les sommes dues en exécution du prêt obligataire et elles ne peuvent être liquides et exigibles qu'au débouclage de l'emprunt obligataire donc postérieurement à la cession,
- aucune compensation n'est donc venue éteindre la dette de la société Financière Cloue Marigny ni celle de Mr [G] en sa qualité de co-débiteur solidaire au titre de l'obligation de remboursement du solde du prêt obligataire,
- il ne pouvait par ailleurs y avoir de novation par changement de débiteur du remboursement du solde de l'emprunt obligataire dés lors que la société financière Cloue Marigny était la débitrice initiale de cette obligation.
Mr [G] fait valoir que :
- cette demande en paiement du solde de l'emprunt obligataire est fondée sur un contrat d'émission d'obligations convertibles en actions souscrit entre la société financière Cloue Marigny et la société Cornimmo à laquelle il n'est pas partie,
- il n'est en outre pas démontré que la société Cornimmo a effectivement versé la somme de 150.000 € lors de la souscription,
- aucune garantie n'a été émise de sorte qu'il ne peut être garant de la dite obligation,
- en effet, l'émission d'obligations n'est pas envisagée par le protocole du 14 décembre 2010 et l'avenant de mars 2011 n'indique pas non plus que le contrat d'émission d'obligations convertibles en action est une modalité de cession.
Sur ce :
La société Cornimmo fonde donc sa demande en paiement sur un contrat d'émission d'obligations convertibles en actions.
Aux termes de ce contrat signé entre la société Financière Cloue Marigny et la société Cornimmo, la première représentée par son associé unique, Mr [U] [G], a émis un emprunt obligataire sans appel public à l'épargne d'un montant nominal de 150.000 € en une seule tranche par l'émission de 15.000 obligations convertibles en actions au prix unitaire de 10 €.
Il est constant que la somme investie par la société Cornimmo a été réglée par compensation avec une partie de la dette souscrite par la société Financière Cloue Marigny dans l'avenant au protocole du 17 mars 2011.
Il est en effet stipulé que le paiement du prix de cession des titres de la société Entreprise. [D] à la société Cloue Marigny devait intervenir à concurrence de 150.000 € par compensation avec la créance détenue par la société cessionnaire (Cloue Marigny) au titre du contrat d'emprunt obligataire d'un montant de 150.000 € émis par l'associé unique de la société Financière Cloue Marigny au profit de la société Cornimmo, obligataire.
En exécution de ce contrat d'émission d'obligations convertibles, la société Financière Cloue Marigny était donc redevable vis à vis de la société Cornimmo de la somme de 150.000 € sur laquelle selon celle-ci, la société Cloue Marigny n'aurait remboursé que 50.000 €.
Force de constater que Mr [G] n'est pas personnellement partie à ce contrat d'émission d'obligations convertibles lequel ne comporte aucun engagement personnel de sa part de garantir le paiement de la dette souscrite par sa société vis à vis de la société Cornimmo.
Il est même stipulé dans l'acte qu'aucune garantie relative au paiement des intérêts ou au remboursement des obligations n'a été émise.
Par ailleurs, l'engagement de garantie solidaire souscrit par Mr [G] dans le protocole d'accord du 14 décembre 2010 et de son avenant du 17 mars 2011 ne saurait être étendu au contrat d'émission d'obligations convertibles, s'agissant de conventions totalement distinctes.
Mr [G] n'est donc pas contractuellement tenu au paiement de la dette souscrite par la société Cloue Marigny au titre du contrat d'émission d'obligations convertibles.
Le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté la société Cornimmo de sa demande en paiement de la somme de 100.000 €.
2° sur les demandes de Mr [G] :
Mr [G] sollicite la condamnation de Mr [T] [D] et de la société Cornimmo in solidum à lui payer la somme de 650.000 € au titre du préjudice résultant de la perte de chance de réaliser un meilleur investissement et de 20.000 € au titre d'un préjudice moral.
a) sur la recevabilité des demandes :
Mr [D] et la société Cornimmo font valoir que :
- la demande est doublement irrecevable, d'une part en tant que dirigée à l'encontre de Mr [D] dés lors que les fautes qu'il reproche, notamment la présentation de comptes donnant une image trompeuse de la société, seraient imputables à la société Cornimmo en sa qualité de vendeur et non pas à Mr [D] et d'autre part en tant que formée par Mr [G] dés lors que le préjudice serait subi par la société financière Cloue Marigny et non pas par Mr [G] lui même,
- seule la société financière Cloue Marigny peut se prévaloir d'un dol et pas Mr [G] lui même,
- en outre, les fautes reprochées à Mr [D] et à la société Cornimmo sont antérieures au 17 mars 2011, soit plus de cinq ans avant l'introduction de l'instance contre Mr [D], formée par assignation du 29 juin 2017, et contre la société Cornimmo, formée par des conclusions datées du 3 novembre 2018,de sorte que la demande est prescrite à leur égard.
Mr [G] réplique que les demandes sont recevables en tant que formées à l'encontre des deux parties intimées car elles sont fondées sur les fautes qu'ils ont commises dans le cadre de la cession des titres et qu'elles ne sont pas prescrites alors que la liquidation judiciaire est intervenue le 24 juin 2014 et qu'en outre, le délai pour agir sur le fondement du dol court à compter de la découverte du vice.
Sur ce :
L'action indemnitaire engagée par Mr [G] n'étant pas exclusivement fondée sur le dol mais sur aussi sur le comportement fautif de Mr [D] au visa notamment de l'article 1240 du code civil, elle peut être dirigée aussi contre Mr [D] et le moyen tiré d'un défaut de qualité pour défendre à l'action est rejeté.
De même, Mr [G] qui se prétend personnellement victime des agissements de Mr [D] et de la société Cornimmo qui l'auraient conduit à régler le prix de cession de parts sociales d'une entreprise sous-évaluée et seraient à l'origine de la liquidation judiciaire de sa société et de celle qu'il avait acquise, justifie d'une qualité à agir et le moyen tiré d'un défaut de qualité du demandeur à l'action est également rejeté.
Selon l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
Mr [G] formule des demandes indemnitaires à l'encontre de Mr [D] et de la société Cornimmo en raison des fautes qu'ils auraient commises dans le cadre de la cession des titres de la société Entreprise. [D], estimant qu'elles ont conduit à donner une image trompeuse de cette société.
Il se prévaut pour cela de deux rapports d'expertise établis respectivement le 14 mars 2014 par la société Exinco et le 23 février 2015 par Mr [Z] [J] de sorte que le point de départ pour agir peut être fixé au plus tard le 14 mars 2019.
Son action n'est donc pas prescrite et le jugement, qui a par ailleurs considéré à tort que la demande était irrecevable vis à vis de la société Cornimmo en raison de l'autorité de chose jugée s'attachant à l'arrêt de la cour d'appel de Lyon du 31 mai 2018 alors que Mr [G] n'était pas partie à cette instance opposant les liquidateurs des sociétés Cloue Marigny et Entreprise. [D] à Mr [T] [D] et la société Cornimmo, est infirmé en ce qu'il déclaré irrecevables les demandes indemnitaires formulées contre Mr [D].
b) sur le bien fondé des demandes :
Mr [G] soutient que la société Cornimmo et Mr [D] ont commis des manoeuvres de nature à gonfler artificiellement la valeur de la société Entreprise. [D] et qui ont causé sa liquidation judiciaire et que notamment :
- la situation au 30 juin 2010 et les comptes clos au 31 décembre 2010 laissent apparaître des résultats 'curieusement extra ordinaires' de la société Entreprise. [D],
- seul un projet de situation arrêté au 30 juin 2010 a été transmis alors que cela ne lui a pas été présenté comme tel
- aucun commissaire aux comptes n'a été désigné par Mr [D] puis par la société Cornimmo, ce qui a facilité une présentation des comptes sociaux de la société Entreprise. [D], avantageuse pour les cédants,
- les comptes sociaux de la société Entreprise. [D] sont entachés d'irrégularités, ce qui l'a conduit à avoir une mauvaise appréciation de la société,
- l'amélioration significative des comptes sociaux pour l'exercice 2010 a permis à la société Cornimmo, lors de la signature de l'avenant du 17 mars 2011 de percevoir un dividende de 400.000 €,
- la valeur des titres de cette société a été volontairement été surévaluée par la société Cornimmo et Mr [D],
- le redressement puis la liquidation judiciaire des sociétés financière Cloue Marigny et Entreprise [D] sont imputables aux manoeuvres de Mr [D] et de la société Cornimmo.
Il considère avoir subi des préjudices personnels et directs du fait de ces agissements qu'il estime imputables à la société Cornimmo mais également à Mr [D] qui a agi à titre personnel avant l'acquisition des titres de la société Entreprise. [D] par la société Cornimmo.
Il invoque :
- une perte de chance de réaliser un meilleur investissement, soit un préjudice de 650.000€,
- un préjudice moral qu'il chiffre à 20.000 €,
- une perte de chance de ne pas être poursuivi en qualité de codébiteur solidaire qui peut être chiffrée à hauteur d'une somme équivalente aux condamnations éventuellement prononcées à son encontre.
La société Cornimmo et Mr [D] concluent au rejet de ces demandes et font valoir que:
- le rapport commandé par le liquidateur judiciaire de la société Entreprise. [D] démontre que la plupart des points invoqués étaient connus du cessionnaire avant la cession et qu'il avait toute latitude pour ceux non connus ou apparus après de contester les conditions de la cession en faisant jouer la garantie de l'actif et du passif,
- les griefs contenus dans ce rapport ont été contestés par la société Cornimmo,
- il n'est en outre justifié à l'encontre de Mr [D] d'aucune faute détachable de ses fonctions de dirigeant de la société Cornimmo.
Sur ce :
Si l'arrêt du 31 mai 2018 en ce qu'il a écarté l'existence de manoeuvres dolosives imputables à la société Cornimmo n'est pas revêtue de l'autorité de chose jugée concernant l'action indemnitaire engagée par Mr [G], force est de constater que cette décision a estimé qu'il n'était pas démontré que la société Cornimmo avait malicieusement et délibérément présenté les comptes de la société Entreprise. [D] afin d'obtenir un prix supérieur.
Les pièces produites par Mr [G] dans le cadre de la présente instance ne permettent pas d'avoir un avis différent.
Le rapport de Mr [Z] [J], expert-comptable missionné par le juge commissaire, a certes relevé un certain nombre d'irrégularités des comptes présentés au 31 décembre 2009 et au 30 juin 2010.
Il indique toutefois que la plupart des points étaient connus du cessionnaire, à savoir la société Cloue Marigny et donc son dirigeant Mr [G], avant la cession et que pour ceux non connus ou pouvant être intervenus après la cession, le cessionnaire avait toute latitude pour contester les conditions de la cession et ce, dés l'année 2011, en faisant jouer la garantie d'actif et de passif ou en faisant désigner un expert par le tribunal, comme le prévoyait les termes des accords de cession.
Le rapport de la société ExinCo n'est pas non plus de nature à établir l'existence de manoeuvres en vue de présenter des comptes de nature à induire le cessionnaire des titres en erreur et ce alors même que ce document a été établi en quelque sorte, sur commande, à la demande de Mr [G].
Il n'est pas davantage établi à l'encontre de Mr [D] de fautes détachables de ses fonctions de dirigeant de la société Cornimmo pour la période antérieure à l'acquisition de la société Entreprise. [D] par cette dernière.
Les conditions d'une action en responsabilité qui seraient fondées sur l'existence de manoeuvres dolosives ou d'un comportement fautif ne sont pas réunies en l'espèce et le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté Mr [G] de ses demandes indemnitaires.
3° sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :
Les dépens d'appel sont à la charge de Mr [G] qui succombe en sa tentative de remise en cause du jugement.
La cour estime que l'équité commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société Cornimmo et lui alloue à ce titre la somme de 6.000€.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Ordonne la jonction des affaires enrôlées sous les N° 21/7979 et 21/8410.
Confirme l'ordonnance du juge de la mise en état du 2 avril 2015 ;
Dit n'y avoir lieu à rectifier cette ordonnance pour erreur matérielle ;
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes indemnitaires formulées par Mr [U] [G] contre Mr [T] [D] car prescrites ;
Statuant de nouveau sur les dispositions infirmées et y ajoutant,
Déclare recevable mais mal fondée la demande de dommages et intérêts formée par Mr [U] [G] à l'encontre de Mr [T] [D] ;
En conséquence, déboute Mr [U] [G] de sa demande de dommages et intérêts à l'encontre de Mr [T] [D] ;
Condamne Mr [U] [G] à payer à la société Cornimmo la somme de 6.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel .
Condamne Mr [U] [G] aux dépens de l'appel.
La greffière, Le Président,