N° RG 20/07478 - N° Portalis DBVX-V-B7E-NKGW
Décision du
TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de LYON
Au fond
du 10 novembre 2020
RG : 17/05217
ch n°10 cab 10 H
Société LA FENICE
C/
[G]
[T]
S.A. LEROY MERLIN FRANCE
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
1ère chambre civile B
ARRET DU 04 Juillet 2023
APPELANTE :
Société LA FENICE, société de droit italien venant aux droits de la Société KEKART
Via Statale 467 - N°7
[Localité 1]
Représentée par Me Emmanuelle BAUFUME de la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON, toque : 1547
ayant pour avocat plaidant Me Paul BONSIRVEN, avocat au barreau de LYON, toque : 109
INTIMES :
Mme [X] [G]
née le 12 Juillet 1984 à [Localité 8]
[Adresse 5]
[Localité 3]
Représentée par Me Caroline CAUZIT, avocat au barreau de LYON, toque : 2081
M. [L] [T]
né le 10 Juillet 1981 à [Localité 4]
[Adresse 5]
[Localité 3]
Représenté par Me Caroline CAUZIT, avocat au barreau de LYON, toque : 2081
Société LEROY MERLIN FRANCE
[Adresse 6]
[Localité 2]
Représentée par Me Christelle BEULAIGNE de l'AARPI B&C AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 796
ayant pour avocat plaidant Maître Philippe SIMONEAU, avocat au barreau de LILLE
* * * * * *
Date de clôture de l'instruction : 19 Mai 2022
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 20 Mars 2023
Date de mise à disposition : 20 Juin 2023 prorogée au 04 Juillet 2023, les avocats dûment avisés conformément à l'article 450 dernier alinéa du code de procédure civile
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
- Olivier GOURSAUD, président
- Stéphanie LEMOINE, conseiller
- Dominique DEFRASNE, magistrat honoraire
assistés pendant les débats de Elsa SANCHEZ, greffier
A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Olivier GOURSAUD, président, et par Elsa SANCHEZ, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * *
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
En 2012, Mme [G] et M. [T] ont acheté à la société Leroy-Merlin et fait poser, par la société Design Carrelage, du carrelage dans le hall d'entrée, le séjour, la cuisine, les escaliers, la salle de bains et les toilettes de leur maison, située sur la commune de [Localité 7] (Rhône), moyennant le prix de 987 € en matériaux et 4 860,21 € en pose.
Une expertise amiable réalisée par le cabinet [R] les 24 juillet et 2 septembre 2014 fait état de l'existence de rayures généralisées.
La société Leroy-Merlin a été mise en demeure de prendre en charge les travaux de reprise et a répondu, le 24 novembre 2014, que la preuve d'un défaut du carrelage n'était pas rapportée.
Par exploit d'huissier de justice du 25 mars 2015, Mme [G] et M. [T] ont fait assigner la société Leroy-Merlin France et la société Cunningham Lindsey France, son assureur.
Par exploit d'huissier de justice du 20 mai 2015, la société Leroy-Merlin a appelé à la cause son propre vendeur, la société italienne Kerart, absorbée par la société italienne La Fenice.
Par ordonnance du 20 juillet 2015, le juge des référés du tribunal de grande instance de Lyon a désigné M. [I], ès-qualité d'expert judiciaire. Le 10 octobre 2016, l'expert a déposé son rapport.
Par exploit d'huissier de justice du 30 mai 2017, Mme [G] et M. [T] ont fait assigner les sociétés Leroy-Merlin et La Fenice ainsi que la société Cunningham Lindsey France, assureur de la société Leroy-Merlin, en garantie des vices cachés et en responsabilité contractuelle.
Par jugement du 10 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Lyon a :
- constaté le désistement de Mme [G] et de M. [T] à l'égard de la société Cunningham Lindsey France,
- jugé que la loi applicable à l'action de Mme [G] et M. [T] à l'encontre de la société La Fenice est la loi française,
- rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en garantie des vices cachés,
- jugé que le carrelage vendu à Mme [G] et M. [T] était affecté d'un vice caché au sens de l'article 1641 du code civil,
- condamné in solidum la société Leroy-Merlin et la société La Fenice à payer à Mme [G] et M. [T] les sommes suivantes :
- 8 401,88 € au titre de la repose du carrelage, à valoriser en fonction de l'indice BT 01 courant à compter du 10 octobre 2016 jusqu'au jour du présent jugement,
- 842,60 € en frais de plomberie concernant la dépose et la repose de sanitaires, à valoriser en fonction de l'indice BT 01 courant à compter du 10 octobre 2016 jusqu'au jour du présent jugement,
- 2 040 € au titre des frais de déménagement et de garde-meuble pendant les travaux,
- 1 337,48 € en frais d'hôtellerie,
- 305,79 € en perte de salaire d'assistance maternelle de Mme [G],
- 1 000 € au titre du préjudice de jouissance,
- 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum la société Leroy-Merlin et la société La Fenice aux dépens, comprenant notamment les frais d'expertise judiciaire,
- condamné la société La Fenice à garantir la société Leroy-Merlin de la totalité des sommes que cette dernière pourrait devoir verser en principal, frais et accessoires,
- débouté les parties de toutes autres demande de condamnation,
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.
Par déclaration du 29 décembre 2020, la société La Fenice a interjeté appel.
Au terme de ses dernières conclusions, notifiées le 11 mars 2022, la société La Fenice, venant aux droits de la société Kekart, demande à la cour de :
- la déclarer recevable et fondée en son appel,
- confirmer le jugement :
- en ce qu'il a fait application du règlement 593/2008 retenant que l'action des consorts [G] et [T] est de nature contractuelle,
- en ce qu'il a reconnu l'application de la loi italienne dans le contrat de vente entre elle et Leroy Merlin,
- infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a déclaré :
- que la loi applicable à l'action des consorts [G]/[T] à son encontre était la loi française,
- que l'action en garantie des vices cachés n'était pas prescrite,
- que le carrelage litigieux était affecté d'un vice caché,
- infirmer encore le jugement dont appel en ce qu'il l'a condamnée à l'égard des consorts [G]/[T] mais aussi en ce qu'il l'a condamnée à relever indemne la société Leroy-Merlin de toute condamnation,
et statuant à nouveau,
- déclarer que la loi applicable à l'action des consorts [G]/[T] à son encontre est la loi italienne, la loi italienne étant la loi applicable au contrat originaire entre elle et Leroy-Merlin,
- déclarer que l'action en garantie des vices cachés des consorts [G]/[T] est prescrite en application de l'article 1495 du code civil italien,
- déclarer que l'action en garantie de la société Leroy-Merlin à son encontre est également prescrite en application de l'article 1495 du code civil italien,
- subsidiairement, déclarer que l'action des consorts [G]/[T] et l'appel en garantie de Leroy Merlin sont également prescrits en application de l'article 1648 du code civil français et L.110-4 du code de commerce,
- déclarer que le sous-acquéreur ne peut pas avoir plus de droit que le vendeur intermédiaire,
- déclarer que l'effet interruptif de la prescription ne peut être allégué ni par les consorts [G]/[T] ni par Leroy Merlin,
- déclarer que la société Leroy Merlin ne lui a pas dénoncé le prétendu défaut dans un délai raisonnable conformément à l'article 39 de la CVIM et que cette dernière et donc déchue du droit de se prévaloir d'un prétendu défaut de conformité et donc du droit de se prévaloir d'un quelconque droit à garantie,
-déclarer que les désordres allégués par les demandeurs sont des défauts facilement reconnaissables qu'elle n'est pas tenue à garantir en application de l'article 1491 du code civil italien,
- subsidiairement, déclarer que les désordres allégués par les demandeurs sont des vices apparents qu'elle n'est pas tenue à garantir en application de l'article 1642 du code civil français,
- déclarer que l'expertise lui est inopposable et que les conclusions de l'expert sont erronées tant en ce qui concerne la prétendue non-conformité des carrelages, que dans l'évaluation des prétendus préjudices des consorts [G] et [T],
- déclarer que la preuve de la non-conformité des carrelages à la norme en vigueur n'est pas rapportée,
-déclarer qu'elle n'est donc pas responsable des prétendus dommages subis par les consorts [G]/[T],
- déclarer que la société Leroy Merlin a manqué à son devoir de conseil,
- déclarer que la société Leroy Merlin a manqué à ses obligations d'examen des carreaux au moment de la livraison en application de l'article 38 de la CVIM,
- déclarer qu'elle ne saurait être condamnée à relever indemne la société Leroy Merlin de toute condamnation,
- condamner au besoin la société Leroy Merlin à la relever indemne de toute condamnation à son encontre pour ne pas avoir dénoncé le prétendu défaut dans un délai raisonnable et pour avoir manqué à son obligation de conseil et à son obligation d'examen des carreaux,
- rejeter l'ensemble des demandes d'indemnisations des consorts [G] /[T] et des demandes d'indemnisations de la société Leroy Merlin,
- condamner Mme [G] et M. [T] et la société Leroy-Merlin in solidum à lui payer, chacun, la somme de 6.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile et en tous les dépens distraits à la SCP Baufume-Sourbe.
Au terme de leurs dernières conclusions notifiées le 2 février 2022, Mme [G] et M. [T] demandent à la cour de :
- confirmer le jugement du 10 novembre 2020 en toutes ses dispositions,
- débouter la société La Fenice et la société Leroy-Merlin de leurs demandes, fins et conclusions,
y ajoutant en cause d'appel,
- condamner la société La Fenice, ou qui mieux le devra, à leur payer la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens d'instance distraits au profit de Me Cauzit, avocat sur son affirmation de droit.
Au terme de ses dernières conclusions, notifiées le 2 février 2022, la société Leroy-Merlin demande à la cour de :
- confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Lyon du 10 novembre 2020, rendu dans l'affaire enregistrée sous le numéro RG n° 17/05217 en ce qu'il a :
- constaté le désistement de Mme [G] et M. [T] à l'égard de la société Cunnigham Lindsay France,
- jugé que la loi applicable à l'action de Mme [G] et M. [T] à l'encontre de la société La Fenice est la loi française,
- rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en garantie des vices cachés,
- jugé que le carrelage vendu à Mme [G] et M. [T] était affecté d'un vice caché au sens de l'article 1641 du code civil,
- condamné la société La Fenice à garantir la société Leroy Merlin de la totalité des sommes que cette dernière pourrait devoir verser au titre de la décision en principal, frais et accessoires,
- la déclarer recevable et bien fondée en son appel incident,
en conséquence,
- infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Lyon du 10 novembre 2020, rendu dans l'affaire enregistrée sous le numéro RG n° 17/05217 en ce qu'il a :
- condamné in solidum la société Leroy Merlin et la société La Fenice à payer à Mme [G] et M. [T] les sommes suivantes :
o 8.401,88 € au titre de la repose du carrelage, à valoriser en fonction de l'indice BT 01 courant à compter du 16 octobre 2016 jusqu'au jour du jugement,
o 842,60 € au titre de frais de plomberie concernant la dépose et la repose des sanitaires, à valoriser en fonction de l'indice BT 01 courant à compter du 16 octobre 2016 jusqu'au jour du jugement,
o 2.040 € au titre des frais de déménagement et de garde-meuble pendant les travaux,
o 1.337,48€ au titre de frais d'hôtellerie,
o 305,79 € au titre de pertes de salaire d'assistance maternelle de Mme [G],
o 1.000 € de préjudice de jouissance,
o 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum la société Leroy Merlin et la société La Fenice aux dépens, comprenant notamment les frais d'expertise judiciaire,
statuant à nouveau,
à titre principal,
- déclarer qu'elle n'a pas commis de faute,
- dire n'y avoir lieu à prononcer sa condamnation,
- déclarer la société La Fenice exclusivement responsable,
- débouter Mme [G] et M. [T] de leurs demandes, fins et conclusions dirigées à son encontre,
- condamner tout succombant à lui payer la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance et 5 000€ au titre de l'instance d'appel,
à titre subsidiaire si la cour devait confirmer sa condamnation,
- débouter Mme [G] et M. [T] de leurs demandes indemnitaires infondées,
- ramener les demandes indemnitaires de Mme [G] et M. [T] à de plus justes proportions,
- condamner la société La Fenice à la garantir de la totalité des sommes qu'elle pourrait devoir verser au titre de l'arrêt en principal, frais et accessoires,
- débouter la société La Fenice de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, en ce compris en son appel en garantie sollicité à son encontre,
- condamner la société La Fenice à lui payer la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel,
- condamner la société La Fenice aux entiers frais et dépens de l'instance d'appel.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 19 mai 2022.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.
MOTIFS DE LA DECISION
1. Sur la loi applicable
La société La Fenice soutient que l'action des consorts [G]/[T] est de nature contractuelle et que c'est la loi italienne qui est applicable, tant dans ses rapports avec Mme [G] et M. [T], que dans ses rapports avec la société Leroy Merlin.
Elle fait notamment valoir:
- que les parties au contrat de vente du carrelage litigieux, à savoir Leroy Merlin et la société La Fenice, n'ont désigné aucune loi applicable,
- que la société La Fenice, vendeur, a son siège social en Italie,
- que c'est la loi italienne qui est applicable au contrat originaire entre la société La Fenice et la société Leroy-Merlin,
- que le contrat de coopération commerciale conclu entre Leroy-Merlin et la société La Fenice en 2012 est soumis à la loi française, à l'exclusion de tout autre contrat, de sorte que les contrats de vente ne sont pas concernés,
- qu'en cas de doute quant à l'interprétation de la clause, celui-ci doit lui profiter,
- que la loi du contrat originaire s'appliquant à toute la chaîne de contrat, c'est la loi italienne qui doit s'appliquer à l'action de Mme [G] et M. [T],
- que les articles 4§3 et 6 du règlement Rome I ne sont pas applicables dès lors que Mme [G] et M. [T] n'ont conclu aucun contrat avec la société La Fenice,
- que seul le contrat conclu entre la Fenice et Leroy Merlin a un caractère international,
- que seule la situation entre la société La Fenice et Leroy Merlin au moment de la conclusion du contrat doit être prise en compte pour déterminer la loi applicable au contrat originaire et non l'ensemble des éléments intervenus postérieurement à sa conclusion, de sorte que l'exception à l'application de la loi du pays dans laquelle le vendeur à sa résidence habituelle prévue par l'article 4§3 du règlement Rome I est inapplicable,
- que les éléments mis en avant par Leroy Merlin pour tenter de démontrer que la loi française présente des liens manifestement plus étroits avec le contrat sont des circonstances extra contractuelles.
Mme [G] et M. [T] soutiennent que la loi française est applicable. Ils font essentiellement valoir:
- que le règlement Rome I a des dispositions spécifiques pour les contrats conclus par les consommateurs dans le but de protéger la partie la plus faible,
- que le contrat de vente fondant leur action a été conclu en France entre des consommateurs français et une entreprise française,
- que si la société Fenice a son siège social en Italie, il n'en demeure pas moins qu'elle a conclu un contrat avec une entreprise française, à destination du marché français,
- que la convention de La Haye du 15 juin 1955 et la convention de Vienne du 11 avril 1980 ne sont pas applicables aux rapports entre le sous-acquéreur et le vendeur.
La société Leroy-Merlin soutient que la loi française est applicable. Elle fait essentiellement valoir:
- que l'acquéreur étant un consommateur, la loi applicable est celle du pays du consommateur dès lors que le vendeur dirige son activité vers ce pays et que le contrat rentre dans le cadre de cette activité,
- que la société La Fenice, en fournissant des produits à la société Leroy-Merlin puis, in fine, à des consommateurs français, dirige son activité vers la France,
- qu'en vertu de l'article 4§3 du règlement Rome I, le contrat présentant des liens manifestement plus étroits avec le droit français, c'est celui-ci qui a vocation à s'appliquer,
- que le recours en garantie du vendeur à l'encontre de son fournisseur suit l'action principale de sorte que celui-ci doit être soumis à la loi française,
- que la relation contractuelle des sociétés Leroy-Merlin et La Fenice dépasse le simple contrat de vente dès lors qu'elle s'insère dans le cadre d'un accord de distribution donnant lieu à l'application de la loi française.
Réponse de la cour
En application de l'article 3, 1°, du Règlement n° 593/2008 du Parlement et du Conseil du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles, « le contrat est régi par la loi choisie par les parties. Le choix est exprès ou résulte de façon certaine des dispositions du contrat ou des circonstances de la cause. Par ce choix, les parties peuvent désigner la loi applicable à la totalité ou à une partie seulement de leur contrat. »
Selon l'article 4 du même Règlement, « 1. À défaut de choix exercé conformément à l'article 3 et sans préjudice des articles 5 à 8, la loi applicable au contrat suivant est déterminée comme suit:
a) le contrat de vente de biens est régi par la loi du pays dans lequel le vendeur a sa résidence habituelle; (...)
3. Lorsqu'il résulte de l'ensemble des circonstances de la cause que le contrat présente des liens manifestement plus étroits avec un pays autre que celui visé au paragraphe 1 ou 2, la loi de cet autre pays s'applique.
4. Lorsque la loi applicable ne peut être déterminée sur la base du paragraphe 1 ou 2, le contrat est régi par la loi du pays avec lequel il présente les liens les plus étroits. »
Par ailleurs, l'article 6 du même Règlement prévoit que, « sans préjudice des articles 5 et 7, un contrat conclu par une personne physique (ci-après «le consommateur»), pour un usage pouvant être considéré comme étranger à son activité professionnelle, avec une autre personne (ci-après «le professionnel»), agissant dans l'exercice de son activité professionnelle, est régi par la loi du pays où le consommateur a sa résidence habituelle, à condition que le professionnel:
a) exerce son activité professionnelle dans le pays dans lequel le consommateur a sa résidence habituelle, ou
b)par tout moyen, dirige cette activité vers ce pays ou vers plusieurs pays, dont celui-ci,
et que le contrat rentre dans le cadre de cette activité. »
La société La Fenice, qui est le fournisseur et vendeur de carrelages à la société Leroy-Merlin, est une société de droit italien, qui a son siège social en Italie. La société Leroy-Merlin, qui est le vendeur, est une société de droit français, qui a son siège social en France. Mme [G] et M. [T], qui sont des particuliers, consommateurs, ont leur résidence habituelle en France.
L'action de Mme [G] et M. [T], tant à l'égard de la société Leroy-Merlin, que de la société La Fenice, contre laquelle ils disposent d'une action directe en application de l'article 1641 du code civil, ainsi que l'action de la société Leroy-Merlin à l'égard de la société La Fenice sont de nature contractuelle, de sorte que le Règlement précité est applicable.
Il en résulte, s'agissant des rapports entre Mme [G] et M. [T], d'une part, et la société Leroy-Merlin, d'autre part, ainsi que des rapports entre Mme [G] et M. [T], d'une part, et la société La Fenice, d'autre part, qu'ainsi que l'ont justement retenu les premiers juges, que la loi française est applicable, la société La Fenice dirigeant son activité vers la France, où se trouve son client la société Leroy-Merlin et où Mme [G] et M. [T], consommateurs, ont leur résidence habituelle.
S'agissant des rapports entre les professionnels, que sont la société Leroy-Merlin et la société La Fenice, la première agissant en garantie contre la seconde, il y a lieu d'observer qu'en principe l'action en garantie suit l'action principale, de sorte que c'est la loi française qui doit s'appliquer.
Par ailleurs, l'accord commercial conclu entre la société Kerart, devenue la société La Fenice et la société Leroy- Merlin, le 22 décembre 2011, qui constitue un accord de distribution, prévoit expressément en son titre 4, que leurs relations sont soumises à la loi française. Contrairement à ce qui est soutenu par la société La Fenice, il n'y a aucune ambiguïté dans cet accord, qui a bien vocation à régir les ventes entre ces deux sociétés, ainsi que le précise expressément le titre 1, intitulé « Les conditions de l'opération de vente des produits du fournisseur résultant de la négociation commerciale ».
Au regard de ces éléments, c'est également la loi française qui doit s'appliquer dans les rapports entre les professionnels. Le jugement est donc infirmé de ce chef.
2. Sur la prescription
La société La Fenice soutient que l'action est prescrite. Elle fait essentiellement valoir:
- que selon le code civil italien, la prescription d'une année de l'action en garantie des vices cachés court à compter du jour de la livraison,
- que la facture d'achat du carrelage par la société Leroy Merlin n'a jamais été produite alors que cette pièce est essentielle pour déterminer la date du point de départ de la prescription,
- qu'en tout état de cause, l'achat du carrelage par les consorts [G]/[T] est nécessairement postérieur à l'achat du même carrelage par Leroy Merlin,
- que les consorts [G]/[T] ayant acquis le carrelage le 27 août 2012 et l'assignation datant du 26 avril 2017, le délai de prescription d'un an à compter de la livraison est acquis,
- que l'appel en garantie de la société Leroy Merlin est également prescrit, de sorte qu'elle ne peut être condamnée à la relever et garantir,
- qu'en vertu du droit français, l'action en garantie des vices cachés est également prescrite dès lors que les consorts [G]/[T] ayant constaté la présence de rayures sur le carrelage dès la pose de ce dernier en octobre 2012, l'action n'a pas été intentée dans les deux ans de la découverte du vice,
- que la société Design Carrelages, professionnel du carrelage, a signalé aux consorts [G]/[T] la présence de rayures sur les carreaux et a attiré leur attention sur le risque de dégradation de sorte qu'en acceptant la pose, ils ont accepté les rayures et les risques d'évolution,
- qu'en tout état de cause, les consorts [G]/[T] disent constater des rayures à partir du moment où ils habitent la maison, soit à partir de janvier 2013, de sorte que le vice était connu au moment du dépôt du rapport d'assurance en 2014,
- que plus de deux ans se sont écoulés entre la découverte du vice et la date d'assignation en expertise, le 25 mars 2015,
- que l'effet interruptif de l'expertise ne peut être invoqué par les consorts [G]/[T] dès lors qu'il est de jurisprudence constante qu'un tel effet ne peut être invoqué que par le demandeur d'une mesure d'expertise et qu'il n'a d'effet qu'à l'égard des seules personnes citées à l'occasion de cette mesure,
- que les consorts [G]/[T] ayant assigné en référé seulement la société Leroy Merlin, l'assignation ne peut avoir d'effet interruptif à l'encontre de la société La Fenice,
- que l'action de la société Leroy Merlin étant prescrite et le sous-acquéreur ne pouvant disposer de plus de droit que le vendeur intermédiaire, les consorts [G]/[T] ne peuvent invoquer un quelconque effet interruptif de prescription.
Sur l'action récursoire, elle ajoute essentiellement que la société Leroy-Merlin doit être déchue de son droit de se prévaloir d'un défaut de conformité, dès lors qu'elle ne rapporte pas la preuve, ni d'avoir examiné les carrelages dans ses entrepôts lors de la réception ni d'avoir dénoncé les rayures dans un délai raisonnable.
Les consorts [G]/[T] soutiennent que leur demande est recevable. Ils font essentiellement valoir:
- que le droit italien étant inapplicable, le raisonnement de la société La Fenice relatif à la prescription de la loi italienne doit être écarté,
- que le vice ne résulte pas du fait que certains carreaux ont été livrés rayés mais du fait qu'au fur et à mesure de leur utilisation, ils étaient facilement rayables,
- qu'il s'agit d'un vice caché qui se manifeste au fur et à mesure du temps et non d'un vice apparent,
- que si le poseur leur a effectivement signalé la présence de carreaux rayés à l'ouverture des cartons, l'étendue du vice n'a été connue qu'en mars 2014,
- que la procédure d'expertise initiée en 2015 a été intentée dans le délai de deux ans à compter de la découverte du vice,
- que la prescription a été interrompue pendant le temps des opérations d'expertise jusqu'au dépôt du rapport.
La société Leroy Merlin soutient notamment :
- que l'apparition de rayures sur le carrelage immédiatement après la pose ne caractérise pas la connaissance effective du vice,
- que les consorts [G]/[T] ont eu recours à une expertise amiable puis à une expertise judiciaire pour déterminer la cause des rayures de sorte qu'ils ont découvert, à l'occasion de ces opérations, que leur carrelage était affecté d'un vice,
- que l'assignation du 25 mars 2015 a interrompu le cours de la prescription, de sorte que l'action en garantie des vices cachés intentée par les consorts [G]/[T] n'est pas prescrite.
Sur l'action récursoire, elle ajoute:
- que son action à l'encontre de la société La Fenice est une action récursoire, de sorte que le délai de prescription qui y est attaché ne court qu'à compter du moment où elle a eu connaissance du recours pouvant être exercé contre le fabriquant, soit à compter du jour où elle a été mise en demeure par les consorts [G]/[T],
- qu'immédiatement après son assignation en référé expertise du 25 mars 2015, elle a fait assigner la société La Fenice par acte du 25 mai 2015
Réponse de la cour
Selon l'article 1648 du code civil, l'action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l'acquéreur dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice.
En outre, il résulte des articles 2231 et 2239 du code civil, d'une part, que l'assignation en référé expertise interrompt le délai de prescription et, d'autre part, que la prescription est ensuite suspendue jusqu'au dépôt du rapport.
Par ailleurs, l'action récursoire en garantie des vices cachés ne peut être intentée par le vendeur avant d'avoir été lui-même assigné par son acquéreur. Le point de départ du délai de prescription se situe donc au jour de cette assignation.
En l'espèce, selon les factures produites, le carrelage a été acheté le 27 août et le 15 octobre 2012 et posé le 22 octobre 2012.
Mme [G] et M. [T] reconnaissent que dès la pose du carrelage, la société Design carrelage, chargée de cette pose, leur a indiqué que certains carreaux présentaient des rayures.
Selon le premier rapport d'expertise amiable, [R], réalisé le 24 juillet 2014, à l'initiative de Mme [G] et M. [T], si des rayures sur certains carreaux existaient dès l'origine, celles-ci se sont aggravées au fils du temps.
Le caractère évolutif des rayures est corroboré par le second rapport d'expertise amiable [R] réalisé le 2 septembre 2014, qui constate désormais que « les rayures sont présentes sur un nombre très important d'éléments. (...) Elle sont généralisées dans les pièces. Il n'apparaît pas de surface sans rayures. » et qui émet l'hypothèse d'un défaut de fabrication du produit.
Ainsi que l'observent Mme [G] et M. [T], le vice résulte donc de la « rayabilité » des carreaux et non du fait que certains d'entre eux aient pu être rayés à l'ouverture des cartons.
Mme [G] et M. [T] ayant fait réaliser un devis le 24 mars 2014 afin de connaître le coût de remplacement de leur carrelage, il y a lieu de retenir que c'est à cette date qu'ils ont eu connaissance du vice et, par voie de conséquence, que le délai de prescription a commencé à courir.
Le délai de prescription a été interrompu par la saisine du juge des référés le 25 mars 2015, lequel a été suspendu jusqu'au 10 octobre 2016, date de dépôt du rapport d'expertise.
Dès lors, l'action en garantie contre les vices cachées ayant été introduite par acte d'huissier de justice du 30 mai 2017, soit dans le délai de deux ans, est recevable.
Le jugement est donc confirmé de ce chef.
Il est ajouté que la société Leroy Merlin ayant, après son assignation en référé expertise, le 25 mars 2015, mis en cause la société La fenice, par acte d'huissier de justice du 25 mai 2015, soit dans le délai de deux ans à compter duquel elle a elle-même découvert le vice, son action récursoire doit également être déclarée recevable.
3. Sur la garantie des vices cachés
La société La Fenice soutient que les consorts [G]/[T] et la société Leroy Merlin ne rapportent pas la preuve de ce que les désordres proviennent d'un carrelage non-conforme à sa destination ni de son imputabilité au fabriquant.
Elle fait essentiellement valoir :
- que les rayures existaient dès l'ouverture des cartons et que les consorts [G]/[T] en ont été informés par la société Design carrelage, de sorte que les défauts n'étaient pas cachés,
- que les rayures étaient visibles à l''il nu de sorte qu'un profane pouvait facilement voir que le carrelage avait un défaut,
- que les consorts [G]/[T], informés de l'existence de rayures par le poseur, auraient dû interrompre la pose,
- que le vice qui entache les carreaux litigieux se manifeste par la présence de rayures dès l'origine et non par le caractère évolutif de celles-ci comme l'indique le tribunal judiciaire,
- que les analyses effectuées par la société française de céramique ont été réalisées en l'absence de toute fiche technique du carrelage litigieux et de toute facture, de sorte que toute comparaison avec la classe déclarée par le fabriquant est impossible,
- que les tests réalisés par la société française de céramique ne sont pas conformes dès lors qu'elle n'a pas utilisé le nombre de carreaux requis,
- que la société française de céramique n'a pas effectué le test nécessaire pour déterminer la dureté du carrelage et donc, sa résistance aux rayures,
- que la preuve du prétendu défaut de conformité du carrelage à l'usage auquel il était destiné n'est pas rapportée,
- que l'exigence d'une protection telle que des tapis brosse est prévue par la norme NF DTU 52.1 P1-1 mais que l'expert ne relève pas l'absence de tapis brosse de protection alors qu'il relève par ailleurs que l'entrée de la maison donne sur une route gravillonnée,
- que l'expert ne précise pas, dans son rapport, comment il a satisfait aux conditions d'examen et aux angles de vision.
Elle ajoute que le rapport d'expertise lui est inopposable en ce que :
- la facture d'achat du carrelage par la société Leroy Merlin n'a pas été produite, alors qu'elle est indispensable pour connaître avec exactitude le vendeur, la date de livraison, mais également la qualité du carrelage commandé et livré,
- qu'il n'y a pas eu de débat contradictoire,
- que l'évaluation des préjudices est imprécise et erronée.
Les consorts [G]/[T] font valoir :
- qu'ils ont choisi un carrelage normalement résistant aux rayures,
- que lors de l'expertise, M. [I] a fait tester les carreaux par la société française de céramique qui a mis en évidence un défaut de conformité majeure à la norme NF EN 14411 :2007,
- que l'argumentation de la société La Fenice remettant en cause les tests de la société française de céramique est basé sur des prescriptions non applicables, dès lors qu'elle se fonde sur les préconisations pour un classement UPEC, lequel permet une sur-classification des produits mais ne porte pas sur le respect de la norme applicable,
- que le laboratoire Modena Centro Prove, dont le rapport conteste celui de la société française de céramique, n'a réalisé aucun test sur les carreaux,
- que le rapport Modena Centro Prove relève que le carrelage litigieux n'est pas conforme à la norme invoquée,
- qu'il n'a jamais été établi que les consorts [G]/[T] n'utilisaient pas de tapis de protection,
- que les rayures sont visibles à l''il nu, de sorte que le carrelage n'est pas conforme à l'usage attendu par la classe indiquée sur l'emballage,
- que le vice était présent au moment de la vente.
S'agissant du rapport d'expertise, ils font essentiellement valoir:
- que la provenance des carreaux, attestée par leur numéro de série, ne fait aucun doute,
- qu'il appartient à la société La Fenice, vendeur initial du carrelage litigieux, de produire sa propre facture,
- que la société La Fenice a été en mesure, tout au long de l'expertise, de faire valoir ses observations et de déposer des dires auxquels l'expert judiciaire a répondu.
La société Leroy Merlin soutient :
- que les rayures ne sont que la conséquence du défaut de cuisson du carrelage à l'origine d'une résistance amoindrie,
- que le défaut, intrinsèque au produit et invisible, était donc bien caché,
- que si des carreaux présentaient des rayures dès la pose, le phénomène ne s'est manifesté dans toute son ampleur qu'ultérieurement,
- que la société La Fenice ne peut valablement se prévaloir du fait que les analyses ont été faites sans la fiche technique du produit dès lors qu'elle a elle-même refusé de communiquer ce document,
- que l'expert judiciaire ne pouvait solliciter des analyses de conformité par rapport à l'échelle MOHS définissant la résistance aux rayures dès lors que la société La Fenice n'a jamais voulu préciser si son produit faisait l'objet d'un classement au regard de la norme MOHS,
- qu'il est manifeste que le carrelage présente un défaut de fabrication et qu'il n'est pas conforme, ni aux normes en vigueur ni à la classification présentée par la société La Fenice.
S'agissant du rapport d'expertise, elle indique notamment:
- qu'il ne fait aucun doute que le carrelage litigieux a été vendu par la société Kekart aux droits de laquelle vient la société La Fenice, dès lors qu'elle produit une facture du 15 mai 2012 portant sur la fourniture d'un carrelage identique au carrelage litigieux et que les emballages du carrelage acheté font état de la dénomination et du siège social de la société La Fenice,
- que la société La Fenice a refusé de justifier du « choix » du produit en versant sa facture aux débats,
- qu'il résulte de la facture du 15 mai 2012 que le carrelage est un carrelage de premier choix,
- que la société La Fenice a été régulièrement convoquée aux opérations d'expertise et a été rendue destinataire de l'ensemble des échanges intervenus entre les parties et l'expert judiciaire,
- que la société La Fenice a fait valoir ses observations au moyen de dires lors des opérations d'expertise, de sorte que ces dernières lui sont opposables.
Réponse de la cour
Selon l'article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.
L'article 1642 du même code ajoute que le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même.
A titre liminaire, il y a lieu d'observer que la société La Fenice, qui a été appelée en cause dans la procédure de référé expertise par la société Leroy Merlin, a participé aux opérations d'expertise et est en mesure, dans le cadre de la présente procédure, de discuter du rapport d'expertise.
En outre, ainsi que l'ont pertinemment relevé les juges du fond, l'expert a pris en compte les 60 pages de dires que la société La Fenice lui a adressés, de sorte que le principe de la contradiction a été respecté.
En conséquence, il convient de la débouter de sa demande tendant à voir déclarer que le rapport d'expertise lui serait inopposable, étant précisé que la violation du principe de la contradiction ou le moyen selon lequel la facture d'achat des carrelages litigieux n'aurait jamais été produite, n'a pas pour conséquence de rendre le rapport d'expertise inopposable.
Enfin, il n'existe aucune critique sérieuse de nature à remettre en cause l'analyse et les conclusions de l'expert judiciaire qui s'est adjoint les services de la société française de céramique pour réaliser sa mission et a complètement et objectivement rempli sa mission en répondant aux nombreux dires des parties. Dès lors, ce rapport servira de base d'appréciation à la cour sur les prétentions faites par les parties.
En premier lieu, s'agissant du caractère apparent du vice, ainsi qu'il a été précédemment retenu, il résulte des deux rapports d'expertise amiable et du rapport d'expertise judiciaire que le vice ne consiste pas en l'existence de quelques rayures sur certains carreaux, qui ont pu être observées dès le déballage des cartons mais dans le caractère évolutif des rayures présentes sur les carreaux, celles-ci s'étant généralisées à toute la surface de tous les carreaux au fil du temps.
Or, la circonstance que les quelques rayures visibles au moment du déballage des cartons soient évolutives et prennent une telle ampleur au fil du temps n'était pas apparente.
En conséquence, il y a lieu de retenir que le vice était caché.
En deuxième lieu, s'agissant de la matérialité du vice, c'est par de justes motifs que la cour adopte expressément que les premiers juges ont retenu que la présence de rayures ayant été constatée par l'expert judiciaire, mais aussi par les experts des assureurs de Mme [G] et M. [T], ainsi que de la société Leroy Merlin, leur présence et leur ampleur est établie, nonobstant l'absence de référence, dans le rapport d'expertise, aux recommandations techniques qui exigent de respecter un angle de 45° entre le plan du carrelage et le regard de l'observateur.
En troisième lieu, s'agissant de l'imputabilité du vice, contrairement à ce qui est soutenu par la société La Fenice, il est établi par la société Leroy-Merlin, qui produit deux factures de la société Kerart, devenue société La Fenice, du 15 mai 2012, que la première a vendu le carrelage litigieux à la seconde, les factures mentionnant qu'elles portent sur du carrelage 45 X 45 « Turino Tulli Antrax » référence 14A6BZ, ce qui correspond aux factures des 28 août, 15 octobre et 28 novembre 2012 établies par la société Leroy-Merlin pour Mme [G] et M. [T], ainsi qu'à l'étiquette sur l'une des boîtes de carrelage sur laquelle il est inscrit le nom de la société Kerart et la référence « Tulli antrax ».
Il est précisé que même si les factures produites par la société Leroy Merlin sont en tout point concordantes quant à la référence et au type de carrelage, il est exact qu'il y a une différence par rapport à la nuance du carrelage (nuance 49 P sur l'étiquette du carrelage er 49 B ou 51 H sur les factures), ainsi que l'observe la société La Fenice. Néanmoins, cela n'a pas d'incidence sur le fait qu'il est établi que le carrelage provient de la société Kerart (nom sur les étiquettes et les factures) et que Mme [G] et M. [T] l'ont acheté à la société Leroy-Merlin, de sorte que la société Leroy-Merlin l'a nécessairement acheté à la société Kerart, avec laquelle il est par ailleurs démontré qu'elle est habituellement en relations commerciales.
En conséquence, il y a lieu de retenir que le carrelage litigieux a été fourni par la société Kerart, devenue la société La Fenice, à la société Leroy-Merlin, qui l'a vendu à Mme [G] et M. [T].
Par ailleurs, s'agissant de la cause des rayures, l'expert a sollicité la société française de céramique qui a procédé à des analyses chimiques portant sur la vérification de la conformité des carreaux sur la base des caractéristiques techniques indiquées par la société Kerart, devenue la société La Fenice, sur les emballages du carrelage, en l'absence de toute documentation technique fournie par cette dernière, relative au produit, ainsi que le document technique fourni par la société Leroy Merlin et signé par la société La Fenice, qui précisent, de façon concordante, que le carrelage en cause appartient à une classification Bla.
Il est ressorti des analyses chimiques que le carrelage présente une « absorption d'eau moyenne de 0,64% », soit une valeur supérieure à celle prévue par la norme NF EN ISO 10545-3, ce qui, selon la société française de céramique « provient généralement d'un défaut de cuisson des carreaux (incuisson du produit ou cuisson non aboutie); ce qui peut également altérer les propriétés de surface des carreaux finaux (résistance à l'abrasion par exemple) ».
L'expert en déduit que le carrelage ne correspond pas à la classification Bla déclarée, qui correspond à un produit dit de premier choix, ainsi qu'il est mentionné sur les factures de la société Leroy-Merlin du 15 mai 2012. Il est précisé à cet égard que l'affirmation de la société La Fenice selon laquelle une même référence, soit en l'espèce 14A6BZ, pourrait être utilisée pour des carrelages de choix différent, n'est assortie d'aucune preuve et ne peut en tout état de cause pas justifier un défaut affectant la cuisson.
Ainsi, la cuisson insuffisante du carrelage constitue un défaut de fabrication à l'origine des rayures qui, de par leur caractère évolutif et leur étendue, constituent un vice le rendant impropre à son usage en lui faisant perdre sa dimension esthétique.
4. Sur les préjudices
La société La Fenice soutient :
- que l'expert n'a pas procédé à un métrage de la superficie réelle de carrelage à remplacer, de sorte que les parties n'ont pas pu en débattre contradictoirement,
- que l'expert a arrêté le coût du nouveau carrelage à la somme de 30€/m² après avoir consulté un spécialiste de la pose mais sans que cette consultation n'ait fait l'objet d'un débat contradictoire,
- que le métrage de plinthe déterminé par l'expert, à savoir 84 mètres-linéaire, n'est pas réaliste dès lors que Mme [G] et M. [T] produisent un ticket d'achat de 9 mètres-linéaire de plinthes,
- que le devis « déménagement et garde meuble » ne précise pas la nature exacte des meubles déménagés,
- que Mme [G] et M. [T] n'ont subi aucun préjudice du fait de l'entreposage de leurs meubles pendant la durée des travaux puisqu'ils possèdent un garage,
- qu'en ce qui concerne la plomberie, les parties n'ont pas constaté contradictoirement, sur place, que les éléments sanitaires devaient faire l'objet d'un démontage,
- que Mme [G] ne peut prétendre à une indemnisation pour son préjudice de perte de salaire dès lors qu'elle ne démontre pas qu'elle devra effectivement garder des enfants pendant la semaine où les travaux auront lieu,
- que dans la mesure où ils ont accepté la pose des carreaux qu'ils savaient rayés, Mme [G] et M. [T] ne peuvent prétendre à indemnisation d'un prétendu préjudice moral ou de jouissance,
- que les microfissures constituent des défauts esthétiques qui ne peuvent donner lieu à réparation,
- que les carreaux rayés ont bien été posés dès lors que Mme [G] et M. [T] n'ont pas commandé de nouveaux carreaux pour remplacer ceux qui auraient prétendument été écartés et alors même qu'ils soutiennent que le métrage était exact,
- qu'en procédant à la pose des carreaux litigieux et en ne demandant aucune réparation à la société Leroy Merlin dès l'achat, Mme [G] et M. [T] ont causé leur propre préjudice.
Mme [G] et M. [T] font valoir :
- qu'il est de jurisprudence constante que la victime n'est pas obligée de limiter son préjudice dans l'intérêt du responsable,
- que dans la mesure où le carrelage est non-conforme, ils sont contraints de le remplacer en intégralité, peu importe qu'il soit rayé ou non,
- que le devis du 6 août 2014 ne comprenant pas de plinthes, la quantité de carrelage est nécessairement plus importante dès lors que les plinthes doivent être fabriquées à partir des carreaux,
- que le choix d'un carrelage de remplacement présentant les mêmes caractéristiques que le carrelage initial ne constitue pas un enrichissement sans cause dans la mesure où le choix d'un carrelage fin permet d'éviter d'autres postes de dépenses coûteux comme l'enlèvement et la repose du carrelage, le changement des portes, etc,
- que le ticket de caisse ne fait pas état de 5 mètres de plinthes mais de 5 * 9,95€, de sorte qu'ils ont acheté 5 paquets de plinthes,
- qu'il ne ressort pas du devis de déménagement que les meubles des chambres seraient concernés,
- que le fait qu'ils disposent d'un garage ne les empêche pas de procéder au déménagement des meubles,
- que leur garage ne peut constituer un local d'entreposage des meubles dès lors qu'ils s'en servent déjà au quotidien pour leurs besoins domestiques et pour leur véhicule,
- que pendant le temps des travaux, la famille doit loger à l'hôtel pour la somme de 1.337,48€,
- que la société La Fenice a fait valoir ses observations quant au devis plomberie lors de l'expertise dans son dire récapitulatif n°10 du 28 juillet 2016, de sorte que le contradictoire a été respecté,
- que le cumulus étant fixé sur le carrelage litigieux qui doit être changé, il doit être déposé et reposé,
- que la société Leroy Merlin ne peut prétendre que ce poste contreviendrait aux préconisations de l'expert alors que celui-ci l'a justement inclus dans son chiffrage contradictoire,
- que Mme [G] exerce son activité d'assistance maternelle à son domicile, de sorte que pendant les travaux, celle-ci sera obligée de chômer,
- que leur préjudice de jouissance résultant du fait d'avoir dû supporter pendant plusieurs années un carrelage rayé et de devoir être importunés par les contraintes des travaux à venir doit être indemnisé.
La société Leroy Merlin soutient :
- que l'expert judiciaire chiffre le nouveau carrelage au prix de 30€/m² alors que celui acheté par Mme [G] et M. [T] était d'un montant de 12,67€/m²,
- qu'il en résulte un enrichissement sans cause,
- que les travaux de reprise sont évalués à la somme de 8 401,88€ TTC, ce qui représente un surcoût par rapport au coût initial de la pose des carreaux,
- que les frais de déménagement et de garde meuble ne sont pas justifiés dès lors que de telles précautions n'avaient pas été nécessaires lors de la pose initiale du carrelage,
- que Mme [G] et M. [T] disposent d'un garage, de sorte qu'ils n'ont pas besoin d'un garde meuble pour stocker leurs meubles,
- que le devis de la société Monet ne comportant aucun détail concernant le volume et la nature des meubles à déménager, il ne peut être retenu en l'état,
- que l'indemnisation de Mme [G] et M. [T] au titre de la dépose et de la repose du chauffe-eau, de deux sanitaires, d'un évier et d'un lavabo contrevient aux préconisations de l'expert judiciaire consistant à poser un carrelage extra-fin pouvant être posé au-dessus du carrelage existant,
- que si Mme [G] et M. [T] avaient remplacé, de leur propre initiative leur carrelage, ils n'auraient pas exposé de tels frais d'hébergement en pension complète pendant sept nuits,
- que le prétendu préjudice de Mme [G] du fait de la perte de salaire est incertain et donc, non-indemnisable,
- que Mme [G] peut, tout au plus, prétendre à l'indemnisation d'une perte de chance d'exercer son activité d'assistante maternelle à son domicile pendant les travaux.
Réponse de la cour
C'est par des motifs pertinents, justement déduits des faits de la cause et des pièces produites, que la cour adopte, que les premiers juges ont retenu :
s'agissant de la pose du carrelage
- que le métrage linéaire de 79 m2, retenu par l'expert, bien que supérieur à celui commandé initialement par Mme [G] et M. [T], est cohérent avec la superficie à recouvrir, qui est découpée en plusieurs espaces,
- que le carrelage « slim », évalué à 30 euros le m2, dont sera recouvert l'ancien carrelage est par nature plus onéreux que ce dernier mais permet d'éviter les coûts liés à sa dépose,
- que l'évaluation de l'expert est bien inférieure aux devis de 2014 et 2016,
La cour ajoute que le choix d'un carrelage, certes plus coûteux que le carrelage initial, mais qui a la possibilité, en raison de sa faible épaisseur, d'être posé par dessus l'ancien ne constitue pas un enrichissement sans cause car il évite, ainsi que l'explique l'expert de faire intervenir un menuisier, de déposer le carrelage ou de perdre plusieurs jours de travaux, ce qui représente en réalité une économie et a permis à l'expert de défalquer 30% le prix par rapport aux devis qui lui ont été présentés.
Dès lors, ce poste doit être évalué à la somme demandée par Mme [G] et M. [T] et proposée par l'expert de 8 401,88 euros, avec valorisation en fonction de l'indice BT 01 à courir depuis la date du dépôt du rapport d'expertise jusqu'au jour de l'arrêt.
Le jugement est donc infirmé uniquement sur la date de valorisation en fonction de l'indice BT 01.
s'agissant de la plomberie
- que selon l'expert, la dépose et la repose du cumulus est nécessaire pour permettre la repose du carrelage de sorte que ce poste doit être évalué à la somme de 842,60 euros proposée par l'expert, correspondant au devis Plomberie du 5ème produit, avec valorisation en fonction de l'indice BT 01 à courir depuis la date du dépôt du rapport d'expertise jusqu'au jour de l'arrêt.
Le jugement est donc infirmé uniquement sur la date de valorisation en fonction de l'indice BT 01.
s'agissant des frais de déménagement et de garde-meubles
- que l'expert évalue à 4 jours de travail le délai pour poser un nouveau carrelage et que les meubles doivent être déménagés et stockés puis remis en place,
La cour ajoute que Mme [G] et M. [T] sont bien fondés à demander l'indemnisation du coût du déménagement de leurs vêtements même si les travaux ne concernent pas les chambres car ils seront dans l'impossibilité, durant cette période, d'habiter leur maison.
Par ailleurs, la circonstance qu'ils possèdent un garage ne signifie pas qu'ils ont la possibilité d'y entreposer tous leurs meubles.
Dès lors, ce poste doit être évalué selon le devis produit, établi par la société Monet, qui correspondant à la somme de 2 040 euros proposée par l'expert.
s'agissant des frais d'hôtellerie
- que selon l'expert, il y a lieu de prévoir, compte tenu de la durée des opérations de travaux et de déménagement, 7 nuits en pension complète pour 4 personnes dans un hôtel de catégorie moyenne,
La cour ajoute qu'en application du principe de réparation intégrale, Mme [G] et M. [T] sont fondés à réclamer une indemnisation à ce titre même s'ils n'avaient pas, lors de la pose initiale de leur carrelage, exposé ces frais qui leur permettent de réduire la gêne engendrée par les opérations de reprise.
Dès lors, ce poste doit être évalué selon le devis produit, établi par Brithotel, à la somme de 1 337,48 euros proposée par l'expert.
s'agissant de la perte de salaire
- que la perte de salaire pendant 6 jours d'immobilisation est avérée pour une assistante maternelle travaillant à domicile.
Dès lors, ce poste doit être évalué, selon les bulletins de salaire produits, à la somme de 305,79 euros proposée par l'expert.
s'agissant du préjudice moral et du préjudice de jouissance
- que le préjudice de jouissance résultant du fait d'avoir dû supporter un carrelage rayé et d'être importuné par les travaux à venir est établi;
- qu'en revanche, aucun préjudice moral, distinct du préjudice de jouissance, n'est démontré.
Dès lors, ce poste doit être évalué à la somme de 1 000 euros.
Au regard de l'ensemble de ces éléments, il convient, en application de l'article 1643 du code civil, par confirmation du jugement, de condamner in solidum la société Leroy-Merlin,en sa qualité de vendeur tenu à garantie, et la société La Fenice, à payer à Mme [G] et M. [T], qui disposent d'une action directe contre cette dernière, l'ensemble des sommes précitées.
5. Sur les responsabilités
La société La Fenice fait valoir que la société Leroy Merlin engage sa responsabilité. Elle soutient :
- qu'il appartenait à la société Leroy Merlin, en tant que professionnel averti, de se renseigner sur la destination des carrelages,
- qu'en conseillant les carreaux litigieux à Mme [G] et M. [T] alors que ces derniers n'avaient pas de tapis de protection chez eux et avaient des graviers autour de leur maison, la société Leroy Merlin a manqué à son obligation de conseil,
- que la société Leroy Merlin devait attirer l'attention de Mme [G] et M. [T] sur l'obligation d'équiper leur maison de tapis brosse de protection,
- que la société Leroy Merlin aurait dû contrôler les carreaux dès leur livraison,
- que la présence de rayures sur les carreaux au moment de l'ouverture des cartons démontre que cette vérification n'a pas été effectuée.
La société Leroy Merlin soutient :
- que l'expert judiciaire, s'appuyant sur le rapport de la société française de céramique, impute la responsabilité du litige à 100% à la société La Fenice qui a fourni un carrelage vicié,
- que seule la société La Fenice est responsable, tant du processus de fabrication de ses produits que des mentions figurant sur les emballages,
- qu'il ne lui appartient pas de vérifier les propriétés physico-chimiques des produits vendus,
- qu'en sa qualité de vendeur, elle ne pouvait avoir connaissance du défaut de fabrication affectant le carrelage ainsi que du caractère erroné des mentions figurant sur l'emballage,
- qu'il était impossible de déceler les désordres lors de l'arrivée des marchandises dès lors que les rayures se sont généralisées postérieurement à la pose des carreaux,
- que le contrôle effectué par la société Leroy Merlin porte seulement sur la conformité du produit par rapport à la commande, à savoir, la référence, la couleur et la quantité, et en aucun cas sur les qualités intrinsèques du produit,
- que la société La Fenice est, seule, responsable du vice affectant le carrelage et doit être condamnée à la relever et garantir de toute condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre.
Réponse de la cour
C'est par des motifs pertinents, justement déduits des faits de la cause et des pièces produites, que la cour adopte, que les premiers juges ont retenu :
- que la responsabilité du défaut de fabrication incombe à titre exclusif à la société La Fenice,
- qu'au regard de la relation de confiance existant entre la société La Fenice et la société Leroy Merlin et en l'absence de discordance apparente entre les matériaux commandés et ceux reçus, la société Leroy Merlin n'était pas tenue de procéder à un contrôle approfondi des carrelages au moment de leur réception.
La cour ajoute qu'il a été précédemment retenu que le vice était caché et évolutif, de sorte que la société Leroy Merlin n'avait pas la possibilité, en procédant à un contrôle visuel au moment de sa livraison, de détecter le vice inhérent au carrelage.
Par ailleurs, le carrelage litigieux avait un défaut de fabrication, de sorte que la société La Fenice n'est pas fondée à lui reprocher un manquement à son devoir de conseil, qui impliquerait une inadéquation du carrelage à l'usage spécifique voulu par Mme [G] et M. [T].
Au regard de l'ensemble de ces éléments, il convient, par confirmation du jugement, de
retenir que la société Le Fenice a seul commis une faute en vendant à la société Leroy-Merlin un carrelage impropre à son usage, de sorte que cette dernière est fondée à l'appeler en garantie pour l'intégralité des sommes qu'elle sera amenée à verser à Mme [G] et M. [T].
6. Sur les autres demandes
Le jugement est confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'application de l'article 700 du code de procédure civile.
L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de Mme [G] et M. [T], en appel. La société La Fenice est condamnée à leur payer à ce titre la somme de 3.000 €.
Les dépens d'appel sont à la charge de la société La Fenice et de la société Leroy Merlin qui succombent en leur tentative de remise en cause du jugement.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu'il valorise les sommes allouées au titre de la repose du carrelage et au titre des frais de plomberie, en fonction de l'indice BT 01 courant à compter du 10 octobre 2016 jusqu'au jour du jugement,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Dit que les sommes allouées au titre de la repose du carrelage et au titre des frais de plomberie, sont valorisées en fonction de l'indice BT 01 courant à compter du 10 octobre 2016 jusqu'au jour du présent arrêt,
Condamne la société La Fenice à payer à Mme [G] et M. [T], la somme de 3.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute les parties de toutes leurs autres demandes,
Condamne la société La Fenice et la société Leroy Merlin aux dépens de la procédure d'appel, et accorde aux avocats qui en ont fait la demande le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.
La greffière, Le Président,