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27/06/2023 | FRANCE | N°21/01829

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile b, 27 juin 2023, 21/01829


N° RG 21/01829 - N° Portalis DBVX-V-B7F-NORN









Décision du

Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond

du 03 avril 2019



RG : 15/13989

ch n°1 cab 01 A





[I] Veuve [D]

[D] divorcée [J]



C/



[O]

[G]

Société CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE [Localité 14]





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile B



ARRET DU 27 Juin 20

23







APPELANTES :



Mme [M] [I] Veuve [D]

née le [Date naissance 7] 1952 à [Localité 19] (Madagascar)

[Adresse 11]

[Localité 15] (MADAGASCAR)





Représentée par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au...

N° RG 21/01829 - N° Portalis DBVX-V-B7F-NORN

Décision du

Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond

du 03 avril 2019

RG : 15/13989

ch n°1 cab 01 A

[I] Veuve [D]

[D] divorcée [J]

C/

[O]

[G]

Société CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE [Localité 14]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRET DU 27 Juin 2023

APPELANTES :

Mme [M] [I] Veuve [D]

née le [Date naissance 7] 1952 à [Localité 19] (Madagascar)

[Adresse 11]

[Localité 15] (MADAGASCAR)

Représentée par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475

ayant pour avocat plaidant Me Jean-pierre MAISONNAS, avocat au barreau de LYON, toque : 415

Mme [Z] [D] divorcée [J]

née le [Date naissance 3] 1968 à [Localité 17] (MADAGASCAR)

[Adresse 6]

[Localité 13]

Représentée par Me Philippe NOUVELLET de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475

ayant pour avocat plaidant Me Jean-pierre MAISONNAS, avocat au barreau de LYON, toque : 415

INTIMES :

M. [A] [O]

né le [Date naissance 8] 1942 à [Localité 18] ([Localité 18])

[Adresse 16]

[Localité 21]

Représenté par Me Charles RICHARD, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE, toque : 71

Mme [E] [P] - [H] épouse [O]

née le [Date naissance 1] 1951 à [Localité 21] ([Localité 21])

[Adresse 16]

[Localité 21]

Représentée par Me Charles RICHARD, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE, toque : 71

La CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE [Localité 14]

[Adresse 2]

[Localité 14]

Représentée par Me Jean-laurent REBOTIER de la SELAS AGIS, avocat au barreau de LYON, toque : 538

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 03 Février 2022

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 28 Mars 2023

Date de mise à disposition : 27 Juin 2023

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Olivier GOURSAUD, président

- Stéphanie LEMOINE, conseiller

- Bénédicte LECHARNY, conseiller

assistés pendant les débats de Elsa SANCHEZ, greffier

A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Olivier GOURSAUD, président, et par Elsa SANCHEZ, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSE DU LITIGE

La SCI [N] a été constituée le 12 juin 1992 et son capital social réparti entre Mme [I] [D], à hauteur de 5 000 parts, Mme [Z] [D], à hauteur de 1 500 parts, M. [O], à hauteur de 750 parts et Mme [O] à hauteur de 750 parts.

Par acte authentique du 7 novembre 1997, la Caisse de crédit mutuel de [Localité 14] (la banque) a consenti à la SCI [N] un prêt immobilier d'un montant de 1 300 000 francs, soit 198 183,72 euros, destiné à financer l'acquisition d'un bien à [Localité 21].

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 7 février 2000, elle a prononcé la déchéance du terme et mis la SCI en demeure de lui régler les sommes dues au titre des engagements souscrits.

Par jugement du 17 mai 1999 du tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse, confirmé par un arrêt du 25 janvier 2001 de la cour d'appel de Lyon, la vente entre la SCI [N] et M. [O] a été annulée sur l'action paulienne intentée par M. [L], victime d'une escroquerie de M. [O].

Par jugement du 22 mars 2004, le tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse a déclaré inopposable à la banque l'annulation de la vente entre M. [O] et la SCI [N].

Selon annonce publiée au BODACC du 24 juillet 2013, la SCI [N] a été dissoute suite à sa cessation d'activité.

Suite à la vente du bien immobilier, la banque a évalué sa créance résiduelle à la somme de 146.469,79 euros.

La banque sollicite la condamnation de M. [O], Mme [O], Mme [I] [D] et Mme [Z] [D], associés de la SCI, à lui payer cette somme au regard de leurs droits dans la SCI.

Par acte des 27, 28 juillet et 28 octobre 2015, la banque les a assignés devant le tribunal de grande instance de Lyon, aux fins de les voir condamnés à lui payer cette somme.

Par jugement du 3 avril 2019, le tribunal de grande instance de Lyon a, notamment:

- dit que la demande de la banque est recevable,

- condamné en qualité d'associés de la SCI [N], à payer à la banque:

M. [O]: 9,375% de la somme de 97 592,31 euros, outre intérêts au taux conventionnel de 6,5 % l'an à compter du 19 novembre 2012, date d'arrêté des comptes, au titre du solde exigible du prêt immobilier,

Mme [O]: 9,375% de la somme de 97 592,31 euros, outre intérêts au taux conventionnel de 6,5 % l'an à compter du 19 novembre 2012, date d'arrêté des comptes, au titre du solde exigible du prêt immobilier,

Mme [I] [D]: 62,50% de la somme de 97 592,31 euros, outre intérêts au taux conventionnel de 6,50% l'an à compter du 19 novembre 2012, date d'arrêté des comptes, au titre du solde exigible du prêt immobilier,

Mme [Z] [D] devra 18,75% de la somme de 97 592,31 euros, outre intérêts au taux conventionnel de 6,50% l'an à compter du 19 novembre 2012.

Par deux déclarations du 11 mars et du 6 mai 2021, Mme [I] [D], puis Mme [I] [D] et Mme [Z] [D] ont relevé appel du jugement.

Par ordonnance du 3 juin 2021, le conseiller de la mise en état a:

- prononcé la nullité de la signification du jugement déféré à l'encontre de Mme [I] [D],

- déclaré recevable l'appel régularisé par Mme [I] [D] à l'encontre du jugement,

- déclaré recevable l'appel incident de Mme [Z] [D].

Par ordonnance du 16 décembre 2021, le conseiller de la mise en état a ordonné la jonction des procédures n° RG 21/3810 et 21/1829 et la poursuite sous le numéro 21/1829.

Par conclusions notifiées le 29 septembre 2021, Mme [I] [D] demande de:

Déclarer l'appel recevable et bien fondé,

Réformer le jugement entrepris et statuant à nouveau,

Déclarer la banque mal fondée en son action et l'en débouter,

Déclarer la demande irrecevable comme prescrite,

Déclarer nul et de nul effet l'acte de prêt établi par Me [Y], notaire, le 7 novembre 1997,

Dire qu'en conséquence, les associés ne doivent restituer que le principal assorti des intérêts (non prescrits) au taux légal,

Constater que la banque inclut à son décompte des indemnités, frais et intérêts conventionnels et n'établit pas le montant perçu,

la débouter en conséquence de ses demandes,

En tant que de besoin,

Dire et juger que la dette des associés ne naît que de la faute de la banque,

Condamner en conséquence la banque à payer à Mme [D] à titre de dommages-intérêts, l'intégralité de la condamnation prononcée contre elle et à défaut 62,5% de 146.469,79 euros, outre intérêts au taux de 6,5% l'an, assurance vie et accessoires compris,

Ordonner la compensation judiciaire,

Dans tous les cas,

Dire et juger que le tribunal a statué ultra petita sur la date d'arrêté des comptes,

Dire que la date fixée par le premier juge est retranchée,

Confirmer, en tant que de besoin, la réduction de la clause pénale à la somme d'un euro,

Débouter la banque de son appel incident,

Condamner la banque à régler à Mme [D] les sommes de:

- 10 000 euros pour procédure abusive,

- 6 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens,

Déclarer recevable et bien fondé l'appel contre M et Mme [O]

Déclarer l'arrêt commun et opposable aux époux [O],

Condamner M. et Mme [O] ou qui d'entre eux deux mieux vaudra à relever et garantir Mme [D] indemne de toute condamnation,

Condamner M. [O] à régler à Mme [D] la somme de 6 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions notifiées le 29 septembre 2021, Mme [Z] [D] demande de:

Déclarer l'appel recevable et bien fondé,

Réformer le jugement entrepris et statuant à nouveau,

Déclarer la banque mal fondée en son action et l'en débouter,

Déclarer la demande irrecevable comme prescrite,

Déclarer nul et de nul effet l'acte de prêt établi par Me [Y], notaire, le 7 novembre 1997,

Dire qu'en conséquence, les associés ne doivent restituer que le principal assorti des intérêts (non prescrits) au taux légal,

Constater que la banque inclut à son décompte des indemnités, frais et intérêts conventionnels et n'établit pas le montant perçu,

La débouter en conséquence de ses demandes,

En tant que de besoin,

Dire et juger que la dette des associés ne naît que de la faute de la banque,

Condamner en conséquence la banque à payer à Mme [J] à titre de dommages-intérêts, l'intégralité de la condamnation prononcée contre elle et à défaut 18,75 % de 146.469,79 euros, outre intérêts au taux de 6,5% l'an, assurance vie et accessoires compris,

Ordonner la compensation judiciaire,

Dans tous les cas,

Dire et juger que le tribunal a statué ultra petita sur la date d'arrêté des comptes,

Dire que la date fixée par le premier juge est retranchée,

Confirmer, en tant que de besoin, la réduction de la clause pénale à la somme d'un euro,

Débouter la banque de son appel incident,

Déclarer l'appel incident de Mme [J] recevable et bien fondé,

Prononcer la nullité de l'hypothèque judiciaire prise le 7 décembre 2015 sur l'immeuble section AD n°[Cadastre 12] lots 111 et 128 contre elle pour fraude et subsidiairement en prononcer la mainlevée,

Ordonner la publication foncière de cette mesure aux frais de la banque,

Condamner la banque à régler à Mme [J] les sommes de:

- 10 000 euros pour procédure abusive,

- 6 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.

Déclarer recevable et bien fondé l'appel contre M et Mme [O],

Déclarer l'arrêt commun et opposable aux époux [O],

Condamner M. et Mme [O] solidairement ou qui d'entre eux mieux devra à régler à Mme [D] et Mme [D] [I] la somme de 6 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions notifiées le 30 juin 2021, la banque demande de:

Confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 3 avril 2019 par le tribunal de grande instance de Lyon, sauf en ce qu'il a retenu un solde à devoir au 19 novembre 2012 de 97.592,31 € outre intérêts au taux conventionnel depuis cette date,

Et, statuant à nouveau,

Condamner M. [O] à lui payer 9,375 % de la somme de 146.469,79 € outre intérêts au taux conventionnel de 6,50 % l'an et les cotisations d'assurance-vie de 0,50 % l'an, à compter du 21 avril 2015, date d'arrêté des comptes, au titre du solde exigible du prêt immobilier, ès qualité d'associé de la SCI [N],

Condamner Mme [O] à lui payer 9,375 % de la somme de 146.469,79 € outre intérêts au taux conventionnel de 6,50 % l'an et les cotisations d'assurance-vie de 0,50% l'an, à compter du 21 avril 2015, date d'arrêté des comptes, au titre du solde exigible du prêt immobilier, ès qualité d'associé de la SCI [N],

Condamner Mme [I] [D] à lui payer 62,50 % de la somme de 146.469,79 € outre intérêts au taux conventionnel de 6,50 % l'an et les cotisations d'assurance-vie de 0,50% l'an, à compter du 21 avril 2015, date d'arrêté des comptes, au titre du solde exigible du prêt immobilier, ès qualité d'associé de la SCI [N],

Condamner Mme [Z] [D] à lui payer 18,75 % de la somme de 146.469,79 € outre intérêts au taux conventionnel de 6,50 % l'an et les cotisations d'assurance-vie de 0,50 % l'an, à compter du 21 avril 2015, date d'arrêté des comptes, au titre du solde exigible du prêt immobilier, ès qualité d'associé de la SCI [N],

Débouter Mmes [I] [D] et [Z] [D] de l'intégralité de leurs demandes, fins et prétentions contraires,

Condamner in solidum Mmes [I] [D] et [Z] [D] à lui payer la somme de 6.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner in solidum les mêmes aux entiers dépens.

M. et Mme [O] qui ont constitué avocat n'ont pas déposé de conclusions devant la cour.

Par ordonnance du 3 février 2022, la clôture de la procédure a été ordonnée.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé aux conclusions précitées, en application de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

1. Sur la recevabilité de l'action de la banque

La banque soutient qu'elle n'est pas tenue de justifier aux associés qu'elle a préalablement et vainement poursuivi la SCI [N] en paiement, puisque cette dernière est dissoute.

Elle ajoute que la prescription biennale prévue par l'article L. 218-2 du code de la consommation n'est pas applicable, le prêt n'ayant pas été consenti à un consommateur.

Enfin, elle indique qu'elle n'agit pas en paiement de la créance issue du prêt consenti à la SCI [N], mais en paiement de la créance issue de leur qualité d'associés de la SCI, de sorte que le délai de prescription a commencé à courir à compter du jour où le prêt a été rendu exigible, soit le 7 février 2000. La banque précise que le délai de prescription a été interrompu, d'abord, par l'assignation qu'elle a fait délivrer le 6 février 2002, afin de lui voir déclarer inopposable le jugement ayant annulé la vente de M. [O] à la SCI [N], puis par la procédure de saisie immobilière engagée le 30 juin 2009 par M. [L] contre la SCI [N], qui s'est terminée suivant une ordonnance du juge de l'exécution de Bourg-en-Bresse du 13 août 2012, qui a homologué le projet de règlement amiable.

Selon Mmes [D] et [J] la banque ne justifie pas avoir exercé de vaines poursuites préalables à l'encontre de la SCI et n'a pas déclaré de créance au passif, de sorte que son action est irrecevable. Elles ajoutent qu'en outre, la SCI n'était pas insolvable.

S'agissant de la prescription, elles soutiennent que le délai de prescription est biennal à compter de la première échéance impayée, en application de l'article L. 218-2 du code de la consommation.

Elles ajoutent que la nullité du contrat de prêt, qui découle de la nullité de la vente, rend nuls tous les actes effectués en vertu de ce document, qui a perdu toute valeur authentique. Elles en déduisent qu'il lui appartenait de requérir un nouveau titre dans le délai de cinq ans à compter de la date à compter de laquelle elle a eu connaissance de l'annulation de la vente, ce qu'elle n'a jamais fait.

Réponse de la cour

Selon l'article 1857 du code civil, à l'égard des tiers, les associés répondent indéfiniment des dettes sociales à proportion de leur part dans le capital social à la date de l'exigibilité ou au jour de la cessation des paiements.

L'associé qui n'a apporté que son industrie est tenu comme celui dont la participation dans le capital social est la plus faible.

L'article 1858 du même code précise que les créanciers ne peuvent poursuivre le paiement des dettes sociales contre un associé qu'après avoir préalablement et vainement poursuivi la personne morale.

En premier lieu, la SCI [N] ayant été dissoute le 24 juillet 2013, suite à sa cessation d'activité, la banque n'était pas tenue d'exercer des poursuites préalablement à son action contre ses associés.

En tout état de cause, elle justifie avoir exercé des poursuites à son encontre puisqu'elle a déclaré sa créance dans le cadre de la procédure de saisie immobilière pratiquée par M. [L] à son encontre.

En deuxième lieu, le délai biennal de prescription édicté à l'ancien article L. 137-2 du code de la consommation, invoqué par Mmes [D] et [J], ne s'applique qu'aux consommateurs personnes physiques, de sorte qu'il ne saurait être opposé à un crédit octroyé à une SCI.

Dès lors, il convient de faire application de l'article L. 110-4, I, du code de commerce, prévoyant, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, un délai de prescription de dix ans.

En l'espèce, il est constant que la déchéance du terme du prêt a été prononcée le 7 février 2000, marquant le point de départ du délai de prescription jusqu'au 7 février 2010.

Par ailleurs, la banque justifie avoir tenté de procéder au recouvrement de sa créance en la déclarant par acte du 17 juillet 2009 dans la procédure de saisie immobilière poursuivie par M. [L] à l'encontre de la SCI [N], ce qui a eu pour effet d'interrompre le délai de prescription et faire courir un nouveau délai de 5 ans prévu à l'article L. 110-4 du code de commerce, dans sa rédaction applicable à compter du 17 juin 2008.

Enfin, suivant une ordonnance du 13 août 2012, le juge de l'exécution de Bourg-en-Bresse a homologué le projet de règlement amiable résultant du procès-verbal du 27 avril 2012 par lequel la SCI [N] a, par hypothèse, reconnu la créance de la banque, ce qui a eu pour effet d'interrompre à nouveau le délai de prescription.

En conséquence, lors de l'assignation de Mmes [D] et [J] par acte d'huissier de justice des 27, 28 juillet et 28 octobre 2015, la créance de la banque envers la SCI [N] n'était pas prescrite.

De même, la SCI [N] ayant été dissoute par acte publié au Boddac du 24 juillet 2013, l'action en paiement des dettes sociales introduite par la banque contre les associés par acte d'huissier de justice des 27, 28 juillet et 28 octobre 2015, soit dans le délai de 5 ans dont elle disposait, est recevable.

Le jugement est donc confirmé.

2. Sur la nullité ou la caducité du prêt

Mmes [D] et [J] font valoir que la nullité de la vente ayant été prononcée par le tribunal de grande instance de Bourg-en Bresse, cela a entraîné, compte tenu de l'article 1186 du code civil et le principe de l'indivisibilité conventionnelle existant entre le prêt et la vente, la nullité ou la caducité de l'acte de prêt, de sorte que la banque aurait dû les assigner en paiement en remboursement du prêt, ce qu'elle n'a pas fait.

Elles ajoutent que la banque a commis des fautes inexcusables puisque la SCI était représentée lors de la souscription du contrat de prêt par M. [J], qui n'est pas associé, qu'il n'existait aucun bilan, ni aucune assemblée, et enfin la résolution votée lors de l'assemblée générale autorisant l'acquisition était nulle comme ayant été signée par M. [J], qui est un tiers à la société, et comme n'ayant pas été prise à la majorité des 2/3 des parts sociales,

La banque fait valoir que le jugement du tribunal de grande instance de Bourg-en Bresse ayant annulé la vente entre la SCI [N] et M. [O] sur l'action paulienne intentée par M. [L] a été déclaré inopposable à la banque par jugement du 22 mars 2004, de sorte que le prêt dont elle cherche à obtenir le paiement ne peut être annulé sur ce fondement.

Elle ajoute que la demande de nullité du prêt est prescrite pour n'avoir pas été introduite dans les 10 ans de l'acte de prêt.

Par ailleurs, elle fait valoir que la SCI [N] était représentée par M. [J] pour signer l'acte de prêt parce qu'il était désigné en tant que gérant non associé dans les statuts.

Elle ajoute que les appelantes ne démontrent pas que le prêt aurait été excessif par rapport aux capacités financières de la SCI, celui-ci ayant servi à l'acquisition d'un bien valorisé à près de 200 000 euros.

Réponse de la cour

Suivant un jugement du 17 mai 1999, confirmé par un arrêt du 25 janvier 2001 de la cour de céans, le tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse a « déclaré nul et de nul effet l'acte de vente reçu par Me [Y], notaire à [Localité 20], le 7 novembre 1997, consenti pat M. [O] à la SCI [N] portant sur les immeubles situés à [Localité 21] section AC [Cadastre 9]-[Cadastre 10] et à Miribel, section E [Cadastre 4]-[Cadastre 5]. », suite à l'action paulienne exercée par M. M. [L] à l'encontre de M. [O].

Cependant, suivant un jugement du 22 mars 2004, le tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse a « dit que l'annulation de la vente du 7 novembre 1997 prononcée par jugement du tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse du 17 mai 1999 (...) Ets inopposable à la Caisse de crédit mutuel de [Localité 14] » et « dit en conséquence que le privilège de prêteur de deniers inscrit par la Caisse de crédit mutuel de [Localité 14] en vertu de l'acte du 7 novembre 1997 à la conservation des hypothèques de [Localité 22] le 14 novembre 1997, volume 1997 V n°3338 conserve son plein et entier effet. »

Il résulte de ces décisions, irrévocables, revêtues de l'autorité de la chose jugée, que la nullité de la vente ne peut être opposée à la banque, de sorte que la nullité ou la caducité de l'acte de prêt qu'elle a consenti à la SCI [N] ne saurait résulter de la nullité de cette vente.

En outre, l'article 1186 du code civil dont il est réclamé l'application, qui a été introduit par l'ordonnance du 10 février 2016, n'était pas applicable en 1997, au moment de la souscription du contrat de prêt.

Par ailleurs, en application de l'article 1849, alinéa 1, du code civil, dans les rapports avec les tiers, le gérant engage la société par les actes entrant dans l'objet social, de sorte que Mmes [D] et [J] ne peuvent utilement se prévaloir du fait que le procès-verbal annexé à l'assemblée générale du 2 septembre 1997 ayant décidé de contracter serait nul comme n'ayant pas été voté à la majorité des 2/3 ou serait signé par M. [J], pour obtenir l'annulation du contrat de prêt.

Plus encore, M. [J] étant désigné dans les statuts comme le gérant non associé de la société, il pouvait valablement engager la société.

En tout état de cause, cette assemblée générale, qui a eu lieu il y a eu plus de 25 ans, n'a jamais été contestée en justice et encore moins annulée, de sorte qu'elle est valable.

Enfin, le fait qu'il n'existe pas de bilan ou d'assemblée, ce qui n'est au demeurant pas démontré, ne saurait entraîner la nullité du prêt.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, il convient de débouter Mmes [D] et [J] de leur demande d'annulation du prêt.

3. Sur la responsabilité de la banque

Mmes [D] et [J] font valoir que les irrégularités précédemment dénoncées leur ont causé un préjudice qui doit être indemnisé par l'allocation de dommages-intérêts équivalent aux demandes formées à leur encontre. Elles ajoutent que la banque a été négligente en procédant au seul nantissement des parts sociales de la SCI, en obtenant le cautionnement de M. [O], qui était insolvable, ainsi qu'un privilège de prêteur de deniers sur une maison qui n'a pas été évaluée et une htpothèque conventionnelle.

La banque fait valoir que les appelantes ne démontrent pas que le prêt aurait été excessif par rapport aux capacités financières de la SCI, le prêt ayant servi à l'acquisition d'un bien valorisé à la somme de 1 300 000 francs ( 198 183,72 euros).

Réponse de la cour

Mmes [D] et [J] ne rapportent pas la preuve d'une faute qui aurait été commise par la banque, les garanties prises, qui consistent en un nantissement des parts sociales, un cautionnement d'un des associés, un privilège de prêteur de deniers, ainsi qu'une hypothèque conventionnelle étant tout à fait adaptées et proportionnées à un crédit consenti pour l'achat d'un bien immobilier.

Par ailleurs, le préjudice résultant de l'absence de vérification des bilans de la SCI ou plus largement de sa négligence consiste en une perte de chance, pour les associées de la SCI, de ne pas contracter, ce dont elles ne demandent pas l'indemnisation.

En conséquence, il convient, par confirmation du jugement, de rejeter les demandes indemnitaires de Mmes [D] et [J].

4. Sur la créance de la banque

Mmes [D] et [J] font valoir que la banque ne justifie pas avec précision des sommes dues.

La banque soutient que le décompte qu'elle produit est explicite et fait ressortir le détail des intérêts et des remboursements.

Réponse de la cour

La banque se bornant à produire le décompte de créances qu'elle a produit en première instance, il convient, par adoption des motifs pertinents des premiers juges, de confirmer le jugement sur le montant de la créance de la banque, sauf en ce qui concerne le point de départ des intérêts qui doit être fixé au 28 octobre 2015, date de l'assignation en paiement, à défaut de justifier d'une mise en demeure de payer adressée aux associés de la SCI.

5. Sur les autres demandes

Compte tenu de ce qui vient d'être décidé, Mme [Z] [D] [J] reste débitrice de la banque, de sorte qu'il convient de la débouter de ses demandes d'annulation ou de mainlevée de l'hypothèque judiciaire inscrite sur son immeuble par la banque le 7 décembre 2015.

Le jugement est confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la banque, en appel. Mmes [D] et [J] sont condamnées in solidum à lui payer à ce titre la somme de 1.000 €.

Les dépens d'appel sont in solidum à la charge de Mmes [D] et [J] qui succombent en leur tentative de remise en cause du jugement.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il fait courir les intérêts conventionnels de 6,50% l'an à compter du 19 novembre 2012, date d'arrêté des comptes, au titre du solde exigible du prêt immobilier,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déboute Mmes [M] [I] [D] et [Z] [D] [J] de leur demande d'annulation ou de caducité du prêt immobilier du 7 novembre 1997,

Dit que les intérêts conventionnels de 6,50% l'an dus par Mme [M] [I] [D] et Mme [Z] [D] [J] au titre du solde exigible du prêt immobilier courent à compter du 28 octobre 2015,

Condamne in solidum Mmes [M] [D] et [Z] [J] à payer à la Caisse de crédit mutuel de [Localité 14], la somme de 1.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties de toutes leurs autres demandes,

Condamne in solidum Mmes [M] [I] [D] et [Z] [D] [J] aux dépens de la procédure d'appel, et accorde aux avocats qui en ont fait la demande le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

La greffière, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile b
Numéro d'arrêt : 21/01829
Date de la décision : 27/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-27;21.01829 ?
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