N° RG 20/02960 - N° Portalis DBVX-V-B7E-M7PT
Décision du
Tribunal de Grande Instance de ST ETIENNE
Au fond
du 12 décembre 2019
RG : 18/02222
[V]
C/
[U]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
1ère chambre civile B
ARRET DU 28 Février 2023
APPELANT :
M. [L] [V]
né le 07 Avril 1954 à [Localité 5] (69)
[Adresse 3]
[Localité 2] - FRANCE
Représenté par Me Simon LETIEVANT, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE
INTIME :
M. [R] [U]
[Adresse 4]
[Localité 1] - France
défaillant
* * * * * *
Date de clôture de l'instruction : 14 Janvier 2021
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 06 Octobre 2022
Date de mise à disposition : 13 décembre prorogée au 21 février 2023 prorogée au 28 Février 2023, les avocats dûment avisés conformément au code de procédure civile
Audience présidée par Stéphanie LEMOINE, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Myriam MEUNIER, greffier.
Composition de la Cour lors du délibéré :
- Olivier GOURSAUD, président
- Stéphanie LEMOINE, conseiller
- Bénédicte LECHARNY, conseiller
Arrêt rendu par défaut rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties présentes ou représentées en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Olivier GOURSAUD, président, et par Elsa SANCHEZ, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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EXPOSE DU LITIGE
M. [V] a fait l'acquisition en 2009, auprès de la société Solenzara marina services, dont le gérant est M. [U], d'un bateau de plaisance dénommé Merovee, avec un contrat de location longue durée conclu avec la société Viaxel.
En 2014, souhaitant vendre ce bateau, il a conclu un accord verbal avec M. [U], dont les termes étaient les suivants :
M. [V] cédait le bateau Merovée à la société Solenzara marina services, qui s'engageait à solder la location-vente du bateau auprès de la société Viaxel, à compter du mois de septembre 2015.
Le bateau de M. [V] devant être revendu à M. [K], il rachetait le bateau de cette personne dénommé Aldo II pour un prix de 25 000 euros, la société Solenzara marina services le rachetant ensuite, pour le même prix, en décembre 2015.
Par exploit d'huissier de justice des 21 et 30 juin 2018, M. [V] a assigné la société EB Loisirs et M. [U] devant le tribunal de grande instance de Saint-Etienne en paiement des sommes lui restant dues, outre le remboursement de frais d'huissier de justice et des dommages-intérêts.
Par jugement avant-dire-droit du 4 juin 2019, l'interruption de l'instance a été constatée, suite au placement en redressement judiciaire de la société EB Loisirs, et l'affaire renvoyée à la mise en état après que l'ordonnance de clôture ait été rabattue.
Puis, par jugement du 12 décembre 2019, le tribunal de grande instance de Saint-Etienne a constaté que l'instance n'a pas été reprise à l'égard de la société EB Loisirs et débouté M. [V] de l'ensemble de ses demandes.
Par déclaration du 12 juin 2020, signifiée à l'étude de l'huissier de justice le 14 août 2020, M. [V] a relevé appel du jugement.
Par conclusions notifiées le 20 juillet 2020, M. [V] demande de:
- infirmer le jugement en toutes ses dispositions,
- condamner M. [U] à lui payer la somme de 25.633,72 €,
- dire que cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 23 août 2016,
- ordonner la capitalisation des intérêts,
- condamner M. [U] à lui régler la somme de 10.000 € en réparation de son préjudice moral,
- condamner M. [U] à lui payer la somme de 1.959,10 €, correspondant aux frais d'huissier de justice engagés en dehors de la présente procédure,
- condamner M. [U] à lui verser la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [U] aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Me Letievant, avocat sur son affirmation de droit, conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC.
La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 14 janvier 2021.
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé aux conclusions précitées, en application de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION
1. Sur le cautionnement
M. [V] soutient que M. [U] s'est porté caution de la société Solenzara marina service, alors qu'il était le gérant de cette société. Il fait valoir qu'il s'agit d'un cautionnement commercial, dont la preuve peut être rapportée par tout moyen et résulte des quatre chèques qu'il a émis.
Il ajoute que cette preuve est corroborée par des mails et que la société Solenzara marina service ayant été placée en redressement puis en liquidation judiciaire, il a déclaré sa créance auprès du mandataire liquidateur, qui a été admise par le juge commissaire à hauteur de la somme de 26 663,72 euros.
Réponse de la cour
Selon l'article 2288 du code civil, le cautionnement est le contrat par lequel une caution s'oblige envers le créancier à payer la dette du débiteur en cas de défaillance de celui-ci.
En l'espèce, afin d'obtenir le paiement par M. [U] de différentes sommes, M. [V] fait valoir qu'il a conclu un accord verbal aux termes duquel, il cédait son bateau, Merovee, à la société Solenzara marina services, qui s'engageait à solder la location-vente du bateau auprès de la société Viaxel, à compter du mois de septembre 2015. Son bateau devant être revendu à M. [K], il rachetait le bateau, Aldo II, de cette personne, pour le prix de 25 000 euros. Puis la société Solenzara marina services lui rachetait le bateau Aldo II, pour le prix de 25 000 euros, en décembre 2015.
Il résulte d'un échange de courriels entre M [V] et M. [U] du 28 avril 2016, que compte tenu de l'inexécution par la société Solenzara marina services de ses obligations, M. [U] s'est engagé à régler, avant le 15 mai 2016, les sommes de 8 006,72 euros au titre de 8 mensualités de leasing, 1 127 euros au titre du droit annuel de navigation pour l'année 2016, et de 25 000 euros au titre du rachat du bateau Aldo II, étant précisé que le prix de vente du bateau a été ramené à 23 000 euros, selon le mandat signé par M. [V] le 2 mai 2016.
Par la suite, il est justifié que M. [U] a remis à M. [V] quatre chèques, tirés sur son compte personnel, d'un montant total de 28 500 euros, le dernier chèque de 5 500 euros étant finalement remplacé par un chèque émanant d'une société EB services, dont M. [U] est également le gérant, de 6 627 euros, pour tenir compte du remboursement du droit annuel de navigation.
Lors de l'encaissement des chèques, il est justifié qu'ils sont revenus impayés.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments, ainsi que d'un courriel du 12 août 2016 dans lequel il demande de lui laisser un peu de temps pour procéder aux règlements, que M. [U] s'est personnellement engagé à régler les dettes de la débitrice principale, la société Solenzara marina services.
Le cautionnement a une nature commerciale si la caution a un intérêt patrimonial dans l'opération ou l'affaire commerciale qu'elle garantit.
En l'espèce, M. [U] était le dirigeant de la société Solenzara marina service, débitrice principale, de sorte que le cautionnement revendiqué par M. [V] a bien une nature commerciale.
Dans cette hypothèse, les conditions de forme exigées pour la validité du cautionnement par l'article 1326 du code civil, dans sa rédaction alors applicable, s'appliquent à un souscripteur qui n'a pas la qualité de commerçant, même s'il a, en tant que dirigeant de la société cautionnée, un intérêt patrimonial dans l'opération principale.
Or, l'ancien art. 1326 précité prévoit que l'acte juridique par lequel une seule partie s'engage envers une autre à lui payer une somme d'argent ou à lui livrer un bien fongible doit être constaté dans un titre qui comporte la signature de celui qui souscrit cet engagement ainsi que la mention, écrite par lui-même, de la somme ou de la quantité en toutes lettres et en chiffres. En cas de différence, l'acte sous seing privé vaut pour la somme écrite en toutes lettres.
Cependant, les exigences de l'article 1326 sont des règles de preuve, qui ont pour finalité la protection de la caution, qui n'affectent pas la validité de l'engagement, mais la preuve de la portée et de l'étendue de celui-ci.
En l'espèce, les quatre chèques émis par M. [U] à l'ordre de M. [V] pour un montant total de 28 500 euros constituent un commencement de preuve par écrit de la volonté de M. [U] de s'engager personnellement, lequel est complété par ses courriels, dans lesquels il reconnaît être redevable du paiement des dettes de la société Solenzara marina services.
En conséquence, il convient de retenir que M. [U] s'est valablement engagé en qualité de caution de la société Solenzara marina services.
Suite au placement en redressement judiciaire par jugement du tribunal d'Ajaccio du 23 octobre 2017, converti en liquidation judiciaire par jugement du 22 octobre 2018, il est justifié que M. [V] a déclaré sa créance auprès du mandataire judiciaire, laquelle a été admise pour la somme de 26 663,72 euros par jugement du juge commissaire du 23 janvier 2019.
M. [V] faisant valoir que M. [U] ne reste lui devoir que cette somme, il convient par infirmation du jugement, de le condamner à payer à M. [V] la somme de 26 663,72 euros. En revanche, en l'absence de mise en demeure envoyée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception le 23 août 2016, les intérêts au taux légal ne peuvent courir à compter de cette date, ainsi qu'il est sollicité, mais à compter du 30 juin 2018, date de l'assignation devant le tribunal de grande instance de Saint-Etienne.
Il convient, en outre de faire droit à la demande de capitalisation des intérêts dus pour une année entière.
2. Sur les autres demandes
En l'absence de preuve de l'existence d'un préjudice distinct de celui résultant du retard dans le paiement, déjà réparé par les intérêts moratoire alloués, il convient de débouter M. [V] de sa demande de dommages-intérêts supplémentaires.
Par ailleurs, il convient de le débouter de sa demande de remboursement des frais d'huissier de justice d'un montant de 1 959,10 euros, qui ont été engagés à l'encontre la société EB Loisirs, celle-ci étant une personne morale distincte de M. [U] qui est seul dans la cause et l'engagement de caution reconnu à son encontre ne pouvant être étendu au delà de ce qu'il a reconnu devoir.
Le jugement est infirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'indemnité de procédure.
La cour estime que l'équité commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de M. [V] et condamne M. [U] à lui payer la somme de 4.000 euros à ce titre.
Les dépens de première instance et d'appel sont à la charge de l'assureur.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il constate que l'instance n'a pas été reprise à l'égard de la société EB loisirs;
statuant de nouveau et y ajoutant,
Condamne M. [R] [U] à payer à M. [L] [V], la somme de 26 663,72 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 30 juin 2018;
Ordonne la capitalisation des intérêts dus pour une année entière;
Déboute M. [L] [V] de sa demande de dommages-intérêts;
Déboute M. [L] [V] de sa demande de remboursement des frais d'huissier de justice;
Condamne M. [R] [U] à payer à M. [L] [V], la somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;
Condamne M. [R] [U] aux dépens de première instance et d'appel et accorde aux avocats qui en ont fait la demande le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.
La greffière, Le Président,