N° RG 19/02892 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MKPM
décision du
Tribunal de Grande Instance de LYON
Au fond
du 12 mars 2019
RG :18/04595
ch n°1 cab 01
Société CREDIT AGRICOLE CENTRE EST
C/
[V]
[C]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
1ère chambre civile B
ARRET DU 10 Janvier 2023
APPELANTE :
La CAISSE RÉGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL CENTRE EST
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentée par Me Pierre-yves CERATO de la SAS IMPLID AVOCATS ET EXPERTS COMPTABLES, avocat au barreau de LYON
INTIMES :
M. [F] [V]
né le [Date naissance 3] 1958 à [Localité 7] (69)
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représenté par Me Thomas BOUDIER, avocat au barreau de LYON
Mme [L] [C] épouse [V]
née le [Date naissance 4] 1961 à [Localité 8] (ALGERIE)
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentée par Me Thomas BOUDIER, avocat au barreau de LYON
* * * * * *
Date de clôture de l'instruction : 03 Juin 2021
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 10 Novembre 2022
Date de mise à disposition : 10 Janvier 2023
Audience présidée par Bénédicte LECHARNY, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Sylvie NICOT, greffier.
Composition de la Cour lors du délibéré :
- Olivier GOURSAUD, président
- Stéphanie LEMOINE, conseiller
- Bénédicte LECHARNY, conseiller
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Olivier GOURSAUD, président, et par Elsa SANCHEZ, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire .
* * * * *
EXPOSÉ DE L'AFFAIRE
Suivant acte notarié du 29 mai 2009, la caisse régionale de crédit agricole mutuel centre-Est (la banque) a consenti à la SCI La Rize (la SCI) un prêt immobilier d'un montant de 184 000 euros au taux contractuel de 4,85 %.
Par jugement du 28 novembre 2017, le tribunal de grande instance de Lyon a prononcé la liquidation judiciaire de la SCI.
Par acte huissier du 6 mars 2018, la banque a fait assigner en paiement du solde du prêt M. [F] [V] et Mme [L] [C] épouse [V] (les époux [V]), détenteurs, chacun, de 50 % du capital social de la SCI.
Par jugement du 12 mars 2019, le tribunal de grande instance de Lyon a débouté la banque de l'ensemble de ses demandes et a laissé à sa charge les dépens de l'instance.
Par déclaration du 24 avril 2019, la banque a relevé appel du jugement.
Par conclusions notifiées le 18 novembre 2000, elle demande à la cour de :
A titre principal,
- réformer le jugement déféré dans son intégralité,
Statuant à nouveau,
- recevoir comme régulière et bien fondée sa demande,
- condamner M. [V] à lui payer la somme de 34 475,35 euros arrêtée au 28 novembre 2017, outre intérêts postérieurs au taux de 4,85 %,
- condamner Mme [V] à lui payer la somme de 34 475,35 euros arrêtée au 28 novembre 2017, outre intérêts postérieurs au taux de 4,85 %,
- ordonner la capitalisation des intérêts conformément à l'article 1343-2 du code civil,
En tout état de cause,
- débouter les époux [V] de l'intégralité de leurs prétentions,
- condamner solidairement les époux [V] à lui payer la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Par conclusions notifiées le 14 janvier 2021, les époux [V] demandent à la cour de :
- débouter la banque de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- confirmer le jugement en tous points,
A titre subsidiaire, en cas de condamnation,
- leur accorder les plus larges délais de paiement,
En tout état de cause,
- condamner la banque à leur régler, chacun, la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 3 juin 2021.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1. Sur la demande en paiement contre les associés de la SCI
La banque fait valoir que dès lors qu'elle verse aux débats le jugement du 28 novembre 2017 prononçant la liquidation judiciaire de la SCI, sa déclaration de créance et un certificat d'irrecouvrabilité d'huissier, il n'y a pas de débat sur la recevabilité de son action ; que l'admission de la créance est totalement hors débat dans la recevabilité de son action ; que s'agissant du quantum de la créance, elle verse aux débats un décompte arrêté au 28 novembre 2017 qui prend en compte le versement de la somme de 134 387,56 euros suivant vente forcée du bien appartenant à la SCI ; que les intimés étant chacun associé à hauteur de 50% de la SCI, elle est bien fondée à solliciter la condamnation de chacun d'entre eux à lui payer la somme de 34 475,35 euros arrêtée au 28 novembre 2017, outre intérêts postérieurs au taux de 4,85 % ; qu'elle renouvelle sa demande de capitalisation des intérêts formée en première instance.
Les époux [V] répliquent que le certificat d'irrecouvrabilité et le jugement de liquidation judiciaire ne suffisent pas à caractériser de vaines poursuites préalables au sens de l'article 1858 du code civil ; que si la banque produit sa déclaration de créance, elle ne produit aucun élément sur son admission par le liquidateur auquel il appartient d'établir un relevé de créances ; qu'un simple décompte lapidaire antérieur au jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire est insuffisant à établir la créance de la banque ; que cette dernière ne produit pas le jugement d'orientation qui fixe le montant de sa créance ; que la demande de capitalisation des intérêts est nouvelle en appel.
Réponse de la cour
Selon l'article 1858 du code civil, les créanciers ne peuvent poursuivre le paiement des dettes sociales contre un associé qu'après avoir préalablement et vainement poursuivi la personne morale.
Il résulte de ces dispositions que les créanciers d'une société civile de droit commun ne peuvent poursuivre le paiement des dettes sociales contre les associés, débiteurs subsidiaires du passif social envers les tiers, qu'après avoir préalablement et vainement poursuivi la personne morale et que, dans le cas où la société est soumise à une procédure de liquidation judiciaire, la déclaration de la créance à la procédure dispense le créancier d'établir que le patrimoine social est insuffisant pour le désintéresser. L'action peut être régularisée si la créance a été régulièrement déclarée à la procédure.
Le tribunal a débouté la banque de sa demande en paiement contre les époux [V] aux motifs qu'elle n'établit pas que la SCI a fait l'objet d'une liquidation judiciaire par jugement du tribunal de grande instance de Lyon du 28 novembre 2017, comme elle le soutient, et qu'elle ne justifie pas de sa créance à hauteur de la somme de 68 950,07 euros en l'absence de production d'un état des sommes dues au 28 novembre 2017.
En cause d'appel, la banque verse aux débats la copie :
- d'un jugement du 28 novembre 2017 du tribunal de grande instance de Lyon constant l'état de cessation des paiements et prononçant la liquidation judiciaire de la SCI,
- de sa déclaration de créance adressée le 26 décembre 2017 au mandataire judiciaire,
- d'un extrait du BODACC daté des 16 et 17 juin 2018 faisant état d'un jugement de clôture pour insuffisance d'actif de la procédure de liquidation judiciaire de la SCI en date du 24 avril 2018,
- d'un certificat d'irrecouvrabilité dressé par la Selarl Partensky, huissier de justice à [Localité 7], le 3 août 2017,
- d'un jugement du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Lyon du 8 avril 2014 constant que la créance de la banque est de 184 866,65 euros selon décompte arrêté au 3 juin 2013,
- d'un jugement d'adjudication du 12 février 2015 du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Lyon adjugeant le bien immobilier de la SCI financé par la banque au prix de 140 000 euros.
Au vu de ces pièces, il y a lieu de considérer que les conditions de l'article 1858 du code civil sont remplies.
La banque justifie en outre du montant de sa créance par la production d'un décompte arrêté au 28 novembre 2017 pour un montant de 68 950,70 euros, déduction faite de la somme de 134 387,56 euros résultant de la vente immobilière forcée.
Les époux [V] détenant chacun 50 % des parts de la SCI, ainsi qu'il ressort des statuts de cette dernière, il convient de les condamner à payer à la banque, chacun, la somme de 34 475,35 euros, avec intérêts au taux contractuel de 4,85 % à compter du 6 mars 2018, date de l'assignation devant le tribunal de grande instance de Lyon valant mise en demeure.
Conformément à la demande de la banque, qui n'est pas nouvelle en appel contrairement à ce que soutiennent les époux [V], il y a lieu d'ordonner la capitalisation des intérêts échus, dus au moins pour une année entière, en application de l'article 1343-2 du code civil.
2. Sur la demande de délais de paiement
En l'absence de tout justificatif de leur situation financière et personnelle, les époux [V] sont déboutés de leur demande de délais de paiement.
3. Sur les frais irrépétibles et les dépens
Compte tenu de la solution donnée au litige en cause d'appel, il convient d'infirmer le jugement en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.
Les époux [V], partie perdante, sont condamnés aux dépens de première instance et d'appel et à payer à la banque la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Condamne M. [F] [V] à payer à la caisse régionale de crédit agricole mutuel centre-Est la somme de 34 475,35 euros, avec intérêts au taux contractuel de 4,85 % à compter du 6 mars 2018,
Condamne Mme [L] [C] épouse [V] à payer à la caisse régionale de crédit agricole mutuel centre-Est la somme de 34 475,35 euros, avec intérêts au taux contractuel de 4,85 % à compter du 6 mars 2018,
Dit que les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produiront intérêt en application de l'article 1343-2 du code civil,
Déboute M. [F] [V] et Mme [L] [C] épouse [V] de leur demande de délais de paiement,
Condamne in solidum M. [F] [V] et Mme [L] [C] épouse [V] à payer à la caisse régionale de crédit agricole mutuel centre-Est la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Les condamne in solidum aux dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT