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15/12/2022 | FRANCE | N°22/02396

France | France, Cour d'appel de Lyon, 6ème chambre, 15 décembre 2022, 22/02396


N° RG 22/02396 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OGX5









Décision du JUGE DE L'EXECUTION du TGI de GRENOBLE



du 02 juillet 2019



RG : 18/03596







[S]

[S]



C/



[W]





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



6ème Chambre



ARRET DU 15 Décembre 2022



statuant sur renvoi après cassation







APPELANTS :



M. [F] [S]



né le [Date naissance 5] 1964 à [Localité 10]

[Adresse 6]

[Localité 9]



M. [Z] [S]

né le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 10]

[Adresse 2]

[Localité 9]



Représenté par Me Romain LAFFLY de la SELARL LAFFLY & ASSOCIES - LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON, toque...

N° RG 22/02396 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OGX5

Décision du JUGE DE L'EXECUTION du TGI de GRENOBLE

du 02 juillet 2019

RG : 18/03596

[S]

[S]

C/

[W]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

6ème Chambre

ARRET DU 15 Décembre 2022

statuant sur renvoi après cassation

APPELANTS :

M. [F] [S]

né le [Date naissance 5] 1964 à [Localité 10]

[Adresse 6]

[Localité 9]

M. [Z] [S]

né le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 10]

[Adresse 2]

[Localité 9]

Représenté par Me Romain LAFFLY de la SELARL LAFFLY & ASSOCIES - LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938

assisté de Me Alexis GRIMAUD, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMEE :

Mme [O] [W] veuve [S]

née le [Date naissance 3] 1962 à [Localité 10]

[Adresse 8]

[Localité 7]

Représentée par Me Laurent BURGY de la SELARL LINK ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 1748

assisté de Me Alain GONDOUIN, avocat au barreau de GRENOBLE

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 03 Novembre 2022

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 10 Novembre 2022

Date de mise à disposition : 15 Décembre 2022

Audience tenue par Dominique BOISSELET, président, et Evelyne ALLAIS, conseiller, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,

assistés pendant les débats de William BOUKADIA, greffier

A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Dominique BOISSELET, président

- Evelyne ALLAIS, conseiller

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Dominique BOISSELET, président, et par Valentine VERDONCK, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

FAITS, PROCÉDURE ET DEMANDES DES PARTIES

[V] [S] est décédé le [Date décès 4] 2013, laissant pour lui succéder ses deux fils d'un premier lit, [F] et [Z] [S], et sa seconde épouse, [O] [W].

Dans le cadre des opérations de comptes, liquidation et partage, les parties ont signé le 12 décembre 2017 une transaction en la forme authentique, aux termes de laquelle les frères

[S] s'engageaient à verser une somme de 250.000 euros à Mme [W] dans le délai de cinq mois à compter dela signature de l'acte.

Arguant de l'inexécution de leurs obligations, Mme [W] veuve [S] a fait signifier le 22 août 2018 à [F] et [Z] [S] un commandement avant saisie vente de payer chacun un solde de 66.830,70 euros.

Par acte d'huissier de justice du 28 août 2018, [F] [S] et [Z] [S] ont assigné Mme [W] à comparaître devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Grenoble, aux fins d'obtenir l'annulation d'un commandement de payer délivré le 22 août 2018 et sa condamnation à leur payer à chacun la somme de 4.000 euros au titre des frais irrépétibles et les dépens.

A l'audience du 21 mai 2019, les consorts [S], représentés par leur conseil ont soutenu que le commandement de payer, qui est un préalable nécessaire à la mesure de saisie vente, constitue un commandement d'exécution rendant compétent le juge de l'exécution.

Ils en ont demandé l'annulation au motif qu'il ne mentionne pas l'adresse exacte de Mme [W] et que cette omission leur cause un préjudice.

Ils ont soutenu à titre subsidiaire que Mme [W] est infondée dans sa demande de paiement de la somme de 250.000 euros issue de la transaction notariée signée entre les parties le 12 décembre 2017. Ils ont détaillé les éléments contenus dans cette transaction pour démontrer que le quantum réclamé n'est pas justifié en raison des règlements déjà effectués ou des concessions des parties. Ils ont dénoncé l'acharnement procédural dont ils font l'objet. Ils ont réclamé la condamnation de Mme [W] à leur payer à chacun une indemnité de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.

A l'audience du juge de l'exécution, Mme [W], représentée par son avocat, a invoqué l'irrecevabilité des demandes des requérants, au motif que le commandement de payer n'est pas un acte d'exécution et que la transaction notariée signée entre les parties le 12 décembre 2017 ne peut être ni modifiée ni remise en cause en raison de l'autorité de la chose jugée. Elle a contesté la nullité du commandement de payer car les requérants ne démontrent pas l'existence d'un grief. Elle a critiqué de manière détaillée les moyens des requérants tendant à diminuer le montant de la somme qu'elle réclame.

Elle a demandé à titre subsidiaire de fixer la somme que chacun des requérants lui doit à 49.500 euros, outre intérêts au taux légal de 3,60 % à compter du 13 mai 2018. Elle a réclamé la condamnation in solidum des consorts [S] à lui payer à lui payer 3.000 euros pour procédure abusive, 4.000 euros au titre des frais irrépétibles et les dépens.

Par jugement du 2 juillet 2019, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Grenoble a :

- déclaré irrecevables les demandes de [F] [S] et [Z] [S],

- condamné in solidum [F] [S] et [Z] [S] à payer à [O] [W] veuve [S] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum [F] [S] et [Z] [S] aux dépens,

- et débouté les parties du surplus de leurs demandes.

[F] [S] et [Z] [S] ont relevé appel de cette décision par déclaration reçue au greffe de la cour d'appel de Grenoble le 5 juillet 2019.

Par ordonnance du 25 mai 2020, le président de la 1ère chambre civile de la cour d'appel de Grenoble a déclaré irrecevables les conclusions déposées par Mme [W] le 25 octobre 2019, tout en la déboutant de ses demandes visant à contester la recevabilité de l'appel et obtenir la radiation de l'affaire pour défaut d'exécution des condamnations de première instance.

Par arrêt du 17 novembre 2020, la cour d'appel de Grenoble a :

- 'confirmé' le jugement déféré en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes de [F] et [Z] [S],

statuant à nouveau,

- déclaré recevables les demandes de [F] et [Z] [S],

- rejeté la demande de nullité du commandement de payer du 22 août 2018,

- débouté la demande de [F] et [Z] [S] tendant à voir la demande de paiement de Mme [W] mal fondée,

- rejeté la demande des appelants au titre des frais irrépétibles,

- condamné [F] et [Z] [S] aux dépens d'appel.

Par arrêt du 3 mars 2022, la 2ème chambre civile de la Cour de cassation a :

- rectifié l'erreur matérielle entachant l'arrêt du 17 novembre 2020,

- remplacé 'Confirme le jugement déféré en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes de Messieurs [F] et [Z] [S]' par 'Infirme le jugement déféré en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes de Messieurs [F] et [Z] [S]',

- cassé et annulé cet arrêt, mais seulement en ce qu'il déboute [F] et [Z] [S] de leur demande tendant à voir déclarer la demande de paiement de Mme [W] mal fondée,

- remis, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les a renvoyées devant la cour d'appel de Lyon,

- condamné Mme [W] aux dépens,

- et, en application de l'article 700 du code de procédure civile, rejeté la demande formée par Mme [W] et condamné celle-ci à payer à MM. [S] la somme globale de 3.000 euros.

*

Entretemps, par acte d'huissier de justice du 4 septembre 2019, Mme [W] a fait pratiquer une saisie-attribution, au titre de la même créance, sur un compte bancaire de [Z] [S] et appréhendé la somme de 41.523,51 euros.

Par jugement du 29 septembre 2020, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Grenoble a, notamment, ordonné la mainlevée de cette saisie-attribution.

Par arrêt du 16 mars 2021, la cour d'appel de Grenoble a, notamment, infirmé le jugement sur ce point et débouté [Z] [S] de sa demande de mainlevée de la saisie-attribution.

La cour d'appel a considéré que la créance dont se prévaut Mme [W] est certaine, liquide et exigible.

Par arrêt du 30 juin 2022, la 2ème chambre civile de la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par [Z] [S] contre cette décision.

*

La présente Cour de renvoi a été saisie sur déclaration de MM. [S] du 29 mars 2022.

Par ordonnance du 1er avril 2022, le président de la chambre, faisant application des dispositions des articles 905 et 1037-1 du code de procédure civile, a fixé l'examen de l'affaire à l'audience du 10 novembre 2022 à 13h30.

Par ordonnance du 17 octobre 2022, le président de la chambre, saisi par voie incidente par MM. [S], s'est notamment déclaré incompétent à connaître de la recevabilité des conclusions sur incident et au fond prises par Mme [W] le 12 juillet 2022, cette recevabilité étant contestée par les appelants au regard de l'effet de l'ordonnance rendue le 25 mai 2020 par le président de la chambre de la cour d'appel de Grenoble.

En leurs dernières conclusions du 21 octobre 2022, [F] et [Z] [S] demandent à la Cour de juger leur appel recevable et bien fondé et statuer comme suit, au visa des articles 625, 631 et 634, 905, 905-2 et 1037 code de procédure civile :

- déclarer irrecevables les conclusions prises par Mme [W] devant la cour d'appel de Lyon ou, subsidiairement, mal fondées, débouter Mme [W] de toutes ses demandes ;

- statuer sur les conclusions de MM. [S] prises devant la cour d'appel de Grenoble dont le dispositif est repris :

Vu le bordereau de communication de pièces,

vu l'article 905-2 du code de procédure civile

- déclarer irrecevables les conclusions de Mme [W],

vu l'article L.213-6 du code de l'organisation judiciaire,

vu les articles L.221-1 et R.221-1 du code des procédures civiles d'exécution,

réformer le jugement dont appel,

juger recevables et bien fondées les demandes de MM. [S],

vu les articles 114 et 648 du code de procédure civile,

- déclarer nul le commandement de payer, ou subsidiairement dépourvu de tout effet,

- débouter Mme [W] de toutes ses demandes en paiement,

- en tout état de cause, condamner Mme [W] à payer la somme de 7.000 euros à [F] [S] d'une part et à [Z] [S] d'autre part ainsi que les entiers dépens.

Par dernières conclusions du 2 novembre 2022, [O] [W] demande à la Cour de :

- juger vu les articles 1037, 632, 633, 634 et 638 du code de procédure civile,

- juger vu les articles 122, 123, 124 et 125 du code de procédure civile,

- juger vu le non-respect du calendrier de procédure par MM. [S], vu l'article 1037-1 du code de procédure civile, tardives et partant irrecevables les conclusions du 21 octobre 2022 de MM. [S] et les écarter des débats ainsi que les pièces jointes ;

- juger vu le caractère régulier du commandement de payer, vu les articles 114 et 118 du code de procédure civile, vu l'absence de grief possible puisque Mme [W] avait bien initialement son domicile à St Tropez au moment où le commandement de payer a été effectué, dire en conséquence qu'il n'y a pas lieu à annuler le commandement de payer pour une question de pure forme qui ne fait pas grief ;

- juger et déclarer irrecevables toutes les prétentions de M. [S], vu les articles 1355 au titre de la chose jugée, et 122, 124 et 125 du code de procédure civile et l'entière exécution effectuée ;

- débouter MM. [S] de toutes leurs contestations non reprises par ailleurs au dispositif de leurs conclusions et dès lors irrecevables ;

plaise à la cour d'appel de Lyon sur renvoi de cassation,

- juger vu l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble 1er mars 2021 et de la Cour de Cassation du 30 juin 2022 passé en force de chose jugée sur les mêmes prétentions et constatations,

qu'il y a lieu de réformer le jugement rendu le 29 septembre 2020 en précisant qu'il n'y a pas lieu à condamnation de Mme [W] à payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;

- juger vu l'arrêt de la cour d'appel du 17 novembre 2020 et la cassation partielle du 3 mars 2022, qui en réalité n'a fait que censurer le dispositif de l'arrêt de la cour d'appel tel qu'il était libellé, que la réformation du jugement prononcée n'entrainera au surplus aucune conséquence, sauf la réformation de la condamnation à l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;

- juger vu l'arrêt du 16 mars 2021 rendu sur les mêmes contestations formulées ensuite de la saisie-attribution et du même commandement de payer qui a tranché l'affaire au fond en déboutant MM. [S] de leurs contestations mal fondées et validant la saisie-attribution pour son quantum ;

- juger vu l'autorité de la chose jugée de l'arrêt du 16 mars 2021 entre les mêmes parties, sur les mêmes contestations de la même saisie-attribution et le débouté de M. [S] de ses contestations non fondées identiques, qu'il est irrecevable en toute prétention pour l'autorité de la chose jugée ;

- juger vu l'arrêt de cassation du 30 juin 2022 rejetant le pourvoi de M. [S] et l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble du 16 mars 2021 qu'il n'y a plus rien à juger sur le fond du litige ;

- déclarer irrecevables, vu les articles 1355 et 122, 124 et 125 du code de procédure civile, MM. [S] en toutes demandes puisqu'ils ne peuvent pas en l'état de ce nouvel arrêt les ayant déboutés sur le fond de leurs contestations par des motifs propres définitifs, s'en remettre à leurs précédentes écritures d'appel du 25 novembre 2019 qu'ils n'ont pas reprises ni communiquées, ne tirant d'ailleurs aucune conséquence légale pratique possible de la cassation partielle et vu l'arrêt de la Cour de cassation du 30 juin 202 rejetant le pourvoi de M. [S] contre l'arrêt du 16 mars 2021 tranchant définitivement le litige et les mêmes contestations et prétentions.

- infirmer le jugement du 2 juillet 2019 par voie de conséquence notamment de l'évolution du litige et de la chose jugée ;

- juger en conséquence, confirmer en tout état de cause le débouté de la demande de MM. [S] tendant à voir la demande de paiement de Mme [W] mal fondée, puisqu'ils ont déjà été déboutés de leurs contestations postérieures par l'arrêt du 16 mars 2021, confirmé par l'arrêt de cassation du 3 Juin 2022 du rejet de leur pourvoi, et ce afin d'éviter une contrariété évidente d'arrêts tant de cour d'appel que de la Cour de cassation elle-même ;

- condamner MM. [S] à payer à Mme [W] la somme de 6.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de première instance et d'appel dont ceux de l'arrêt cassé ;

- prononcer la distraction des dépens au bénéfice de la société Link Associés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 3 novembre 2022.

Il est expressément renvoyé aux dernières conclusions des parties pour l'exposé exhaustif de leurs moyens et prétentions.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'irrecevabilité des conclusions de Mme [W]

La procédure de renvoi après cassation s'inscrit dans la continuité de la procédure d'appel. A la suite de la cassation partielle, les parties sont en l'état où elles se trouvaient avant l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble. Il s'en suit que l'ordonnance rendue le 25 mai 2020 par le président de chambre de la cour d'appel de Grenoble conserve son plein effet et, par suite, Mme [W], privée du droit de conclure en appel, n'est pas recevable à conclure au fond devant la présente cour de renvoi.

Sur l'irrecevabilité des conclusions de MM. [S]

Il résulte de l'article 1037-1 alinéa 3 du code de procédure civile que les conclusions de l'auteur de la déclaration de saisine de la cour de renvoi après cassation doivent être remises au greffe et notifiées dans un délai de deux mois suivant cette déclaration.

MM. [S], déclarants, n'ont pas déposé et notifié de conclusions dans ce délai, de sorte que, conformément aux dispositions de l'alinéa 5, ils sont réputés s'en tenir aux moyens et prétentions qu'ils avaient soumis à la cour d'appel dont l'arrêt a été cassé.

Par suite, les conclusions déposées ultérieurement par MM. [S], les 21 octobre et 4 novembre 2022, sont irrecevables sur le fond du litige. La présente cour doit statuer au vu des dernières conclusions déposées par les appelants devant la cour d'appel de Grenoble, datées du 25 novembre 2019 (et non 2020 comme indiqué par erreur dans l'arrêt de cette cour).

Sur la demande d'annulation du commandement de payer

La cassation n'atteint pas la disposition de l'arrêt du 17 novembre 2020 de la cour d'appel de Grenoble qui a rejeté la demande de nullité du commandement de payer du 22 août 2018. En conséquence, il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de MM. [S] visant à voir déclarer nul le commandement de payer.

Il en va de même de la demande subsidiaire tendant à le voir déclarer dépourvu de tout effet, laquelle n'est pas explicitée mais ne peut procéder que du même argumentaire de contestation de la validité de l'acte au regard de l'adresse de la créancière déclarée dans celui-ci.

Sur la contestation de la créance par MM. [S]

En l'état de la cassation partielle, la cour de renvoi est saisie du dispositif des conclusions de MM. [S] demandant le débouté de Mme [W] de toutes ses demandes en paiement.

Dans son arrêt du 3 mars 2022, la Cour de cassation a dit que, pour débouter MM. [S] de leur demande tendant à voir déclarer la demande de paiement de Mme [W] mal fondée, l'arrêt retient qu'ils étaient tenus de verser une somme totale de 250.000 euros au titre de cette transaction.

En statuant ainsi, alors que cet acte stipule que cette somme « sera minorée d'une somme correspondant à toute diminution d'actif ou augmentation de passif de plus de 10.000 euros, qui n'aurait pas été prise en compte dans le bilan de la SCI Altitude arrété au 30 juin 2017, et d'une somme correspondant à ia différence entre la créance de la « SCI Altitude '' à I'encontre de la « SARL Les Alpages '' et la somme qui sera versée par cette demière à la SCI Altitude', la cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis.

Pour débouter MM. [S] de leurs demandes, l'arrêt retient qu'il leur appartiendra le cas échéant, si une mesure d'exécution forcée est mise en oeuvre, de discuter le montant des sommes alors réclamées. En statuant ainsi, alors que le commandement de payer à fin de saisie-vente engage la procédure d'exécution et qu'ainsi le juge de l'exécution est compétent pour statuer sur la contestation formée contre une mesure d'exécution forcée d'une transaction conclue devant notaire, la cour d'appeI a violé l'article L.213-6 du code de l'organisation judiciaire qui prévoit que le juge de l'exécution connaît des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit.

Sur ce, au terme du commandement de payer, Mme [W] a demandé à chacun des frères [S] la somme de :

- Principal (50% de 250.000 euros) 125.000,00 euros

- Intérêts au taux légal depuis le 13 mai 2018

- Le coût de l'acte

- Droit article A 444-31

à déduire, un versement de 59.885,00 euros.

MM. [S] font valoir que la somme de 250.000 euros n'est pas acquise à Mme [W] qui reconnaît, dans l'acte transactionnel, qu'elle doit être minorée :

'- d'une somme correspondant à toute diminution d'actif ou augmentation de passif de plus de 10.000 euros qui n'aurait pas été prise en compte dans le bilan de la SCI Altitude connu des parties arrêté au 30 juin 2017,

- d'une somme correspondant à la différence entre la créance de la SCI Altitude à l'encontre de la Sarl Les Alpages (189.534,68 euros) et la somme qui sera réellement versée par cette dernière comme il a été dit ci-dessus.'

- Sur l'absence d'autorité de la chose jugée

Il ressort des motifs de l'arrêt du 16 mars 2021 de la cour d'appel de Grenoble, aujourd'hui définitif, que la créance alléguée par Mme [W] a été considérée comme certaine, liquide et exigible.

II est constant que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a été tranché dans le dispositif de la décision et ne s'étend pas à ses motifs, quand bien même ils en sont le soutien nécessaire. L'arrêt du 16 mars 2021 n'a pas autorité de chose jugée sur le quantum de la créance débattu dans la présente instance et non tranché dans le dispositif de l'arrêt.

- Sur les demandes relatives à une diminution d'actif ou augmentation de passif de plus de 10.000 euros qui n'aurait pas été prise en compte dans le bilan de la SCI Altitude

La transaction, acte contractuel, s'interprète en recherchant la commune intention des parties et doit être exécuté de bonne foi.

En l'espèce, les parties ont entendu régler leur litige en se fondant sur le bilan de la SCI Altitude dont ils avaient connaissance au jour de la souscription de l'acte, en se réservant la possibilité d'intégrer des opérations qui n'auraient pas été prises en compte dans ce bilan, tant en ce qu'elles seraient de nature à réduire l'actif qu'à augmenter le passif, sous la seule condition qu'elles totalisent au moins 10.000 euros.

La démonstration d'éléments de nature à réduire l'actif ou augmenter le passif doit donc conduire à une minoration de la créance reconnue à Mme [W] dans l'acte transactionnel, qu'il s'agisse de sommes qui n'auraient pas dû figurer à l'actif du bilan ou qui auraient dû apparaître en son passif.

MM. [S] démontrent que le bilan arrêté au 30 juin 2017 comportait en son actif plusieurs créances inexistantes ou irrecouvrables qui n'auraient pas dû y figurer :

- compte débiteur MEV : 9.872,98 euros

- compte débiteur Mairie de [Localité 11] : 15.312,00 euros

- compte débiteur [J] : 4.396,82 euros

- compte débiteur Orange : 914,57 euros

- compte notaire [G] : 15.289,00 euros

- compte AO37 : 981,51 euros

- compte syndic Giverdon : 4.796 euros.

Sous-total : 51.562,88 euros.

Il est aussi justifié qu'une facture Apave de janvier 2017 a été omise du passif au bilan arrêté au 30 juin 2017, n'étant pas parvenue à temps : 900,00 euros. Le fait qu'elle soit parvenue après l'acte transactionnel n'enlève rien à la nécessité de déduire le montant correspondant.

Il en va de même pour les charges connues ou prévisibles qui auraient dû être provisionnées au bilan, en l'espèce les frais de mainlevée d'hypothèque et les rémunérations d'huissier de justice et d'administrateur judiciaire, pour un montant de 6.158 euros.

Total : 51.562,88 + 900 + 6158 = 58.620,88 euros.

En revanche, concernant les taxes d'habitation, MM. [S], qui se bornent à évoquer une charge inscrite par l'expert-comptable en provision pour risque dans le bilan au 31 décembre 2018, ne justifient pas de dettes fiscales de ce chef qui auraient été omises dans le bilan au 30 juin 2017.

Concernant une réclamation de la société MEV, il n'est pas plus justifié de l'omission d'une dette de la SCI Altitude.

- Sur la différence entre la créance de la SCI Altitude à l'encontre de la Sarl Les Alpages (189.534,68 euros) et la somme réellement versée par cette dernière

La Sarl Les Alpages, qui exploitait son fonds de commerce dans les murs de la SCI Altitude, devait régler sa dette de loyer après la vente de son fonds. Il est démontré que la SCI Attitude a perçu la somme de 186.128,97 euros, soit un différentiel arrondi à 3.405,71 euros.

Sur la créance de Mme [W]

Au regard de ces éléments, la créance alléguée par Mme [W] dans le commandement de payer délivré le 22 août 2018 doit être minorée de 58.620,88 + 3.405,71 = 62.026,59 euros.

Pour le surplus, est bien acquise à Mme [W] la somme principale de 250.000 - 62.026,59 = 187.973,41 euros. MM. [S] sont donc déboutés du surplus de leur contestation.

Sur les demandes accessoires

Mme [W], partie perdante en principal, supporte les dépens de la présente procédure ainsi que les frais irrépétibles exposés par ses contradicteurs, à concurrence de 1.500 euros chacun.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Déclare irrecevables les conclusions des parties notifiées dans la présente instance ;

Statuant dans les limites du renvoi,

Dit que la créance de [O] [W] veuve [S] doit être réduite de la somme de 62.026,59 euros ;

Dit que la créance de [O] [W] veuve [S] au jour du commandement avant saisie-vente du 22 août 2018 s'élevait à 187.973,41 euros, outre intérêts et frais et sous déduction des sommes déjà perçues ;

Condamne [O] [W] veuve [S] aux dépens de la présente instance ;

La condamne à payer à [F] [S] et [Z] [S] chacun la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute [F] et [Z] [S] du surplus de leurs demandes.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22/02396
Date de la décision : 15/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-15;22.02396 ?
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