N° RG 21/01407 - N° Portalis DBVX-V-B7F-NNQ6
Décision du
TJ de Lyon
Au fond
du 27 janvier 2021
RG : 16/12887
[D]
C/
LA DIRECTION GÉNÉRALE DES DOUANES ET DROITS INDIRECTS REPRÉS
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
1ère chambre civile B
ARRET DU 13 Décembre 2022
APPELANT :
M. [I] [D]
né le [Date naissance 1] 1972 à [Localité 6] (38)
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté par Me Nathalie ROSE, avocat au barreau de LYON, toque : 1106
Assisté de Me François ROBBE de la SCP DESILETS ROBBE ROQUEL AXIOJURIS, avocat au barreau de VILLEFRANCHE-SUR-SAONE, toque : 786
INTIME :
LA DIRECTION GÉNÉRALE DES DOUANES ET DROITS INDIRECTS représentée par Monsieur le Directeur interrégional des douanes et droits indirects de la Direction interrégionale des douanes Auvergne-Rhône-Alpes
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représentée par Me Chloé DAUBIE, avocat au barreau de LYON, toque : 2274
Assistée de Me Colin MAURICE de la SARL CM & L AVOCATS, avocat au barreau de PARIS
* * * * * *
Date de clôture de l'instruction : 02 Décembre 2021
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 19 Septembre 2022
Date de mise à disposition : Délibéré au 22 novembre 2022, prorogé au 6 décembre 2022, prorogée au 13 Décembre 2022, les parties dûment avisées conformément au code de procédure civile
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
- Olivier GOURSAUD, président
- Stéphanie LEMOINE, conseiller
- Bénédicte LECHARNY, conseiller
assistés pendant les débats de Myriam MEUNIER, greffier
A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Olivier GOURSAUD, président, et par Elsa SANCHEZ, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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EXPOSE DU LITIGE
Le 2 juillet 2014, la direction générale des douanes et droits indirects a initié un contrôle des produits soumis à accises entreposés dans les locaux de M. [I] [D], distillateur.
Le service a procédé à un inventaire des alcools qui avaient été distillés pour le compte de M. [D], ainsi qu'à une visite du lieu de stockage de l'alambic et des alcools issus de la distillation des sous-produits de la vinification (lies et grappes) apportés par les viticulteurs dans le cadre de leurs obligations.
Un procès-verbal d'intervention a été dressé le 11 juillet 2014.
Par procès-verbal du 29 septembre 2014, M. [D] a été entendu sur les manquants d'alcools reprochés.
Après deux avis préalables de taxation datés des 12 juin et 3 juillet 2015, un avis définitif de taxation a été établi le 28 septembre 2015 pour un montant de 52 587 euros au titre de la période du 2 juillet 2011 au 2 juillet 2014.
Un procès-verbal de notification d'infractions a été établi le 7 octobre 2015, rappelant le non-respect de la réglementation en vigueur, soit le non-respect du statut d'entreprise agréée, le défaut de tenue de comptabilité-matières, le défaut d'épalement des cuves de stockage des alcools, le défaut de titre de mouvement pour la circulation des alcools livrés à Bourgogne Alcool, le défaut de dépôt de déclaration récapitulative mensuelle concernant les quantités de matières premières distillées et le défaut de dépôt de déclaration annuelle d'inventaire.
Il a été également constaté des manquants de litres d'alcool pur taxables en vertu de l'article 302 D 2° bis du code général des impôts pour les campagnes 2011/2012, 2012/2013 et 2013/2014 pour les sommes respectives de 39 053 euros, 7 384 euros et 6 011 euros, soit un montant total de 52 587 euros.
Un avis de mise en recouvrement a été émis le 4 novembre 2015.
Par courrier reçu le 13 novembre 2015, M. [D] a contesté cet avis et fait une demande de sursis de paiement.
Le 31 décembre 2015, la direction des douanes a proposé un arrangement transactionnel.
Par courrier reçu le 14 mars 2016, M. [D] a réitéré sa demande de sursis de paiement, et proposé une prise de garantie réelle sur un bien lui appartenant.
Faisant état de la violation des modalités légales d'exercice du droit de contrôle et de la qualification erronée des alcools objets de la taxation, M. [D] a contesté l'avis de mise en recouvrement par lettre recommandée avec avis de réception adressée à M. le directeur régional des douanes de Lyon reçue le 23 mars 2016.
Le 21 septembre 2016, la direction générale des douanes et droits indirects a rejeté sa contestation et lui a précisé qu'il avait la possibilité, dans le délai de deux mois à compter de la réception de son courrier, de porter le litige devant le tribunal de grande instance.
Par acte d'huissier de justice délivré le 17 novembre 2016, M. [D] a fait assigner la direction générale des douanes et droits indirects devant le tribunal de grande instance de Lyon aux fins de constater la nullité de la procédure poursuivie à son encontre, d'annuler le procès-verbal, les avis préalables, les avis définitifs, les avis de recouvrement et la décision de rejet de sa réclamation, de juger qu'il n'est redevable d'aucune somme, à titre subsidiaire de constater la prescription des faits relatifs à la campagne 2011-2012 et de le juger redevable de la somme de 13 534 euros au titre de la période 2012-2014, et en tout état de cause de la condamner à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de juger qu'il sera fait application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Par jugement du 27 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Lyon a :
- débouté M. [D] de l'ensemble de ses demandes,
- dit que les droits dus par M. [D] s'élèvent à la somme de 47 011 euros, suivant avis définitif d'impositions,
- débouté la direction générale des douanes et des droits indirects de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. [D] aux dépens de l'instance.
Par déclaration du 24 février 2021, M. [D] a interjeté appel de l'ensemble du jugement, sauf en ce qu'il a débouté la direction générale des douanes et des droits indirects de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Au terme de conclusions notifiées le 14 septembre 2021, M. [D] demande à la cour de :
- déclarer bien fondé son appel à l'encontre du jugement rendu le 27 janvier 2021 par le tribunal judiciaire de Lyon, qui l'a débouté de l'ensemble de ses demandes, a dit que les droits dus par lui s'élèvent à la somme de 47 011 euros suivant avis définitif d'imposition et l'a condamné aux dépens de l'instance,
- l'infirmer de ces chefs,
Statuant à nouveau :
- constater la nullité de la procédure poursuivie à son encontre,
- annuler le procès-verbal d'intervention du 11 juillet 2014,
- annuler les avis préalables de taxation des 12 juin et 3 juillet 2015,
- annuler l'avis définitif de taxation du 28 septembre 2015,
- annuler l'avis de mise en recouvrement du 4 novembre 2015,
- annuler la décision de rejet de sa réclamation en date du 21 septembre 2016,
- dire et juger qu'il n'est redevable d'aucune somme,
A titre subsidiaire, si la Cour ne constatait pas la nullité de la procédure :
- constater la prescription des faits relatifs à la campagne 2011-2012,
En conséquence :
- dire et juger qu'il ne peut être redevable d'une somme supérieure à 13 534 euros, montant du redressement évalué pour les campagnes 2012-2013 et 2013-2014,
A défaut :
- constater l'absence de bien-fondé de la mise en recouvrement en raison de la qualification erronée des produits taxés,
En tout état de cause,
- débouter la DGDDI de l'intégralité de ses demandes comme irrecevables et à défaut infondées,
- condamner la DGDDI à verser au conseil de M. [D] la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la DGDDI aux entiers dépens de l'instance.
Au terme de conclusions notifiées le 5 octobre 2021, la direction générale des douanes et des droits indirects demande à la cour de :
- statuer ce que de droit sur la recevabilité de l'appel de M. [D],
- la recevoir en ses conclusions et l'en dire bien fondée,
- confirmer l'ensemble des dispositions du jugement rendu le 27 janvier 2021 par le tribunal judiciaire de Lyon (RG 16/12887) dont appel,
En conséquence,
- débouter M. [D] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
- juger régulière la procédure menée par la direction générale des douanes et droits indirects,
- débouter M. [D] de ses demandes de nullité de la procédure et notamment de sa demande tendant à annuler l'avis de mise en recouvrement n°865/479/2015 du 4 novembre 2015,
- débouter M. [D] de sa demande de constatation de prescription des faits relatifs à la campagne 2011-2012 et le débouter par conséquent de sa demande, à titre subsidiaire, de dire et juger qu'il ne peut être redevable d'une somme supérieure à 13 534 euros,
- juger que M. [D] est redevable des droits dus sur les alcools manquants,
- juger régulier et bien fondé l'avis de mise en recouvrement n°865/479/2015 du 4 novembre 2015 et, en conséquence, le confirmer,
- confirmer aussi que les droits dus par M. [D] s'élèvent à 47 011 euros,
- condamner M. [D] à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [D] aux dépens.
La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 2 décembre 2021.
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé aux conclusions précitées, en application de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION
1. Sur la demande d'annulation de la procédure en l'absence de remise de la charte du contribuable vérifié.
M. [D] soutient que l'article L. 10, alinéa 4, du code des procédures fiscales, qui prévoit la remise au contribuable de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 et L. 13, est applicable à la procédure, notamment, car:
- l'objet du contrôle réalisé dans ses locaux répond à la définition de l'article L. 13, point I, du livre des procédures fiscales,
- il n'est pas mentionné que cette disposition, qui a une portée générale, ne concerne que le cas spécifique du contrôle de l'impôt sur le revenu des personnes physiques,
- les droits d'accises figurent parmi les hypothèses envisagées par la charte du contribuable,
- il résulte du BOFIP que les droits indirects sont visés dans le cadre des vérifications de comptabilité,
- la charte du contribuable vérifié ne lui a jamais été remise
- le non-respect de cette règle de procédure est attentatoire à ses droits
L'administration fait valoir qu'il résulte de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, qui est inséré au titre deuxième sur le contrôle de l'impôt à l'égard des personnes physiques, qu'elles ne concernent que le cas du contrôle de l'impôt effectué par l'administration et non, en matière de contributions indirectes. Elle ajoute que les dépositaires agréés sont soumis à à un système spécial de surveillance et de contrôle, qui déroge au droit commun, qui n'impose pas la remise de la charte.
Réponse de la cour
Selon l'article L. 10, alinéa 4, du code des procédures fiscales, avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 et L. 13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration.
Les premiers juges ayant relevé que cette disposition, insérée au titre deuxième sur le contrôle de l'impôt, ne concerne que le cas spécifique du contrôle de l'impôt sur le revenu des personnes physiques par l'administration fiscale, c'est par des justes motifs, que la cour adopte, qu'il a été retenu qu'elle ne s'applique pas, d'une part, à l'administration des douanes, qui n'appartient pas à l'administration fiscale, et d'autre part, au contrôle des impôts indirects, concernés par la présente procédure.
Il est ajouté qu'en application de l'article L. 34 du livre des procédures fiscales, dans sa version alors applicable, les entrepositaires agréés sont soumis à un régime spécial dérogeant au droit commun, en raison du report de paiement des accises dont ils bénéficient, ce qui exclut qu'ils puissent se prévaloir d'une discrimination.
En conséquence, par confirmation du jugement, il convient de rejeter la demande d'annulation de la procédure.
2. Sur la demande d'annulation de la procédure en l'absence d'information du contribuable de son droit d'être assisté par un conseil
M. [D] fait valoir que le contrôle qui a été réalisé le 2 juillet 2014, était un contrôle de comptabilité ponctuelle, de sorte que l'article L. 47 du livre des procédures fiscales, qui prévoit que l'avis de contrôle doit mentionner les années soumises à vérification et la possibilité de se faire assister par un conseil, bien qu'applicable à sa situation, n'a pas été respecté en l'espèce.
Il ajoute que l'article L. 47, qui est relatif aux modalités d'exercice du droit de contrôle, est un texte qui pose des garanties à portée générale.
L'administration soutient que L. 47 du livre de procédures fiscale n'est applicable qu'au contrôle de l'impôt et ne sont pas opposables au régime spécifique des contributions indirectes et du contrôle des produits soumis à accises, pour lesquels il convient d'appliquer le régime prévu à l'article L. 34 du Livre des procédures fiscales, qui institue un système spécial de surveillance et de contrôle applicable aux entrepositaires agréés en raison de la particularité de leur statut, puis qu'ils bénéficient du report du paiement des accises.
Réponse de la cour
Selon l'article L. 47 du code des procédures fiscales, un examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification.
Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix.
En cas de contrôle inopiné tendant à la constatation matérielle des éléments physiques de l'exploitation ou de l'existence et de l'état des documents comptables, l'avis de vérification de comptabilité est remis au début des opérations de constatations matérielles. L'examen au fond des documents comptables ne peut commencer qu'à l'issue d'un délai raisonnable permettant au contribuable de se faire assister par un conseil.
En l'espèce, il est constant que M. [D], qui a la qualité d'entrepositaire agréé, a fait l'objet d'un contrôle portant sur les contributions indirectes.
Dès lors, les dispositions de l'article L. 47 du code des procédures fiscales, relatives au contrôle de la situation fiscale d'une personne physique, qu'il invoque, ne sont pas applicables. Cette dérogation au droit commun s'explique, ainsi qu'il a été précédemment rappelé, par le statut particulier applicable aux entrepositaires agréés, qui bénéficient du report du paiement des accises et qui font l'objet, à ce titre, d'une système de contrôle spécial.
En conséquence, par confirmation du jugement, il convient de rejeter la demande d'annulation de la procédure.
3. Sur la nullité de l'extension d'objet de la vérification sans présentation d'un avis complémentaire
M. [D], soutient qu'en l'absence d'avis de contrôle extensif de leur mission originelle, « comptabilité matière, titres de mouvements, recensement des produits » et stock des produits soumis aux accises, alambic n° 38-3549 », les agents vérificateurs ne disposaient d'aucun droit de vérification des alcools non soumis à accise et donc hors du champ de contrôle inopiné prévu et notifié le 2 juillet 2014. Il ajoute que les agents verbalisateurs ont en outre étendu leur contrôle aux campagnes courant depuis 2008, même s'ils ont ultérieurement limité leur taxation indue aux années 2011 à 2014.
Selon lui, la nullité de cette extension du contrôle, ajoutée au caractère déloyal de la modification d'objet portée au procès-verbal du 11 juillet 2014 par rapport à l'avis du 2 juillet 2014, ne peut qu'entraîner la nullité de l'entière procédure.
Selon l'administration, les agents des douanes n'avaient pas à présenter un quelconque avis de contrôle complémentaire, dès lors que l'avis de contrôle du 2 juillet 201 indiquait le contrôle des stocks des produits soumis à accises, ce qui couvrait l'ensemble de l'activité de M. [D]. De la même manière, il importe peu que le procès-verbal d'intervention mentionne "recensement des boissons alcooliques", alors que l'avis de contrôle indique de façon différente que celui-ci portait sur l'alcool soumis à accise. Enfin, le contrôle s'est opéré dans le respect des dispositions de l'article L 34 du code de procédure fiscale, qui ne limite pas les pouvoirs de contrôle en matière de contributions indirectes, ni la période sur laquelle porte les contrôles, seul le droit de reprise pour la taxation étant limité à trois ans.
Réponse de la cour
Les premiers juges ayant justement rappelé que les boissons alcooliques étant tous des produits soumis à des droits d'accises, il importe peu que dans le procès-verbal d'intervention, il soit mentionné qu'il est procédé à un recensement des boissons alcooliques et dans l'avis de contrôle, que celui-ci porte sur l'alcool soumis à accise.
En outre, l'article L. 34 du code des procédures fiscales ne limite pas la période sur laquelle les contrôles en matière de contributions indirectes peuvent être effectués, la limite de trois ans ne s'appliquant qu'au droit de reprise pour la taxation.
En conséquence, par confirmation du jugement, il convient de rejeter la demande de nullité de ce chef.
4. Sur la nullité du procès-verbal du 11 juillet 2014
Selon M. [D], il convient d'annuler le procès-verbal du 11 juillet 2014 dressé par des agents qui, bien que se prétendant missionnés pour ce faire, ont omis de présenter et joindre leur ordre de mission, au procès-verbal qu'ils ont établis sur ce fondement.
Selon l'administration, les infractions en matière de contributions indirectes sont constatées par procès-verbal dressé dans les conditions prévues par les articles R.226-1 à R.226-3 du LPF, lesquels n'exigent pas que les agents de la douane présentent, de manière anticipée et avant tout contrôle, leur commission d'emploi. Selon elle, les agents de l'administration peuvent présenter leur commission d'emploi à première réquisition, c'est-à-dire sur simple demande de la personne contrôlée.
Réponse de la cour
Aucun texte ni aucun principe ne prévoyant que les agents des douanes auraient l'obligation de présenter spontanément leurs commissions avant de réaliser un contrôle, il convient, par confirmation du jugement, de rejeter la demande d'annulation du procès-verbal du 11 juillet 2014.
5. Sur la nullité du procès-verbal d'audition du 29 septembre 2014
Selon M. [D], aux termes d'une jurisprudence constante, dont un arrêt rendu par la chambre criminelle de la Cour de cassation, le 26 juin 1979, « les procès-verbaux dressés par l'administration doivent, à peine de nullité, être exclusivement rédigés par les agents qui ont pris une part personnelle et directe à la constatation des faits qui constituent la contravention' est nul le procès-verbal signé par un agent qui n'a pris aucune part personnelle et directe à la constatation des manquants et excédent d'alcool faisant l'objet de la poursuite. »
Il fait valoir que le procès-verbal d'audition qui lui a été présenté le 29 septembre 2014, était signé par des agents autres que ceux présents lors du contrôle. Il en déduit que la nullité de ce procès-verbal rend nuls, tous les procès-verbaux subséquents.
Selon l'administration, il n'est pas exigé que les mêmes agents procèdent à toutes les opérations de contrôle, ni que tous les agents y ayant procédé soient signataires du procès-verbal. Selon elle, il suffit que celui-ci soit signé par des agents ayant pris part aux opérations qu'il relate (Cf. Cass. crim. 10 janvier 1994, pourvoi n° 92- 80685, inédit ; Cass. crim. 17 décembre 2008, pourvoi n° 08-81505, inédit.).
Réponse de la cour
Il ne résulte pas de l'article L. 213 du livre des procédures fiscales que les mêmes agents procèdent à toutes les opérations ni que tous les agents y ayant procédé soient signataires du procès-verbal. Cette disposition exige seulement que le procès-verbal soit signé par des agents ayant pris part aux opérations qu'il relate.
En l'espèce, dès lors que l'audition a été réalisée par Mme [P] [B], Mme [S] [J], Mme [V] [G] et M. [M] [E], c'est sans encourir le grief de nullité que le procès-verbal relatant cette audition mentionne ces agents, nonobstant le fait que le contrôle de l'entrepôt ait été réalisé par d'autres agents.
En conséquence, par confirmation du jugement, il convient de rejeter la demande d'annulation du procès-verbal du 29 septembre 2014.
6. Sur la nullité de la procédure et la décharge d'imposition, pour irrégularité des avis préalables à taxation des 12 juin 2015 et 3 juillet 2015
Selon M. [D], l'avis préalable à taxation portant complément d'information, en date du 3 juillet 2015, omet, tout comme celui du 12 juin 2015, toute référence légale relative à la procédure en cours et toute mention de possible assistance par un conseil.
Selon lui, en application des principes généraux des droits de la défense, des droits du contribuable vérifié et de l'article L. 54 B du livre de procédure fiscale, qui indique que « la notification de proposition doit mentionner, sous peine de nullité, que le contribuable a la faculté de se faire assister d'un conseil de son choix pour discuter la proposition de rectification ou pour y répondre» , il aurait dû être informé de ce qu'il pouvait se faire assister par un conseil.
Selon l'administration, l'article L 56 du code de procédure fiscale prévoit que la procédure de rectification contradictoire n'est pas applicable en matière de contributions indirectes et l'article L 80 M du livre des procédures fiscales n'impose pas de mentionner l'assistance d'un conseil.
Réponse de la cour
C'est par de justes motifs, que la cour adopte expressément, que les premiers juges ont retenu que la procédure de rectification contradictoire n'étant pas applicable aux contributions indirectes, en application de l'article L. 56 du code des procédures fiscales, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article L. 54 B du livre de procédure fiscale.
En conséquence, par confirmation du jugement, il convient de rejeter la demande d'annulation de la procédure et de décharge d'imposition.
7. Sur la nullité de la procédure et décharge d'imposition pour irrégularité de l'avis définitif d'imposition
M. [D] soutient que l'administration des douanes a modifié de façon substantielle la base de taxation proposée, ce qui lui aurait été préjudiciable. Il explique qu'il a été procédé sur l'avis définitif de taxation, à une révision à la hausse de l'alcool issu de la campagne 2011-2012, alors, en outre, que les faits sont partiellement prescrits, en application de l'article L. 178 du livre des procédures fiscales. Il explique que la DGDDI a effectué un redressement sur la période allant de juillet 2011 à juillet 2014, alors que selon le Défenseur des droits, une éventuelle taxation ne pourrait pas porter sur les quantités d'alcools livrées à la distillerie Bourgogne Alcool en 2011. Selon lui, il convient d'appliquer l'article L178 du LPF dans sa version antérieure, prévoyant que le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à l'expiration de la première année suivant le fait générateur, et non dans sa nouvelle version, prévoyant un délai de 3 ans.
L'administration fait valoir que le contrôle sur une cuve a montré que les quantités déclarées par M. [D] sur les documents simplifiés d'accompagnement étaient erronés, le degré d'alcool constaté par le laboratoire étant plus élevé. Elle ajoute qu'il y a eu une modification de la base de taxation, mais à la baisse, de sorte que cela ne lui fait pas grief. Enfin, elle indique que c'est l'article L. 178 du livre des procédures fiscales, dans sa version applicable à compter du 1er janvier qui s'applique, de sorte que les faits portant sur la campagne 2011/2012 ne sont pas prescrits.
Réponse de la cour
Il est constant que les quantités d'alcool déclarées par M. [D] sur les documents simplifiés d'accompagnement ne correspondaient pas à celles obtenues à la suite du contrôle qui a été opéré par l'administration des douanes, de sorte que des manquants d'alcools ont été retenus, pour les campagnes de 2012/2013, à hauteur de 444,84 litres et pour les campagnes de 2013/2014, à hauteur de 363,98 litres.
S'agissant de la campagne de 2011/2012, aucun document justificatif n'a pu être produit par M. [D], de sorte que l'administration, après avoir évalué à 2578,66 litres d'alcool pur, la quantité d'alcool manquant, a ramené celle-ci à 2210,48 litres.
Il en résulte que, suite à cet avis définitif, c'est bien une baisse des droits dus qui a été retenue, ce qui ne saurait, contrairement à ce que soutient M. [D], lui causer un grief.
Enfin, c'est à juste titre que les premiers juges ont retenu que l'article L. 178 du livre des procédures fiscales, dans sa version en vigueur à compter du 1er janvier 2012, était applicable, le fait générateur de l'impôt étant la déclaration annuelle d'inventaire, qui date du mois d'août 2012. Ainsi, l'administration disposait d'un délai de reprise de 3 ans, de sorte qu'ainsi que l'ont retenu les premiers juges, les faits portant sur la campagne de 2011/2012 n'étaient pas prescrits.
En conséquence, par confirmation du jugement, il convient de rejeter la demande d'annulation de la procédure et de décharge d'imposition.
8. Sur la qualification des produits taxés
M. [D] soutient que le sous-produit d'une distillation de la viticulture dans le cadre de la distillation obligatoire, est un alcool exonéré de droits et était considéré comme tel par l'administration. Il ajoute que les agents verbalisateurs disposaient d'une triple preuve de ce que les alcools taxés sous appellation d'alcools en suspension de droits d'accise, étaient en réalité des alcools exonérés de droits d'accise :
- 1ère preuve : constat dans l'entrepôt du demandeur,
- 2ème preuve : établissement de la quantité d'alcool concernée par la collation des documents afférents à ces seuls alcools issus des sous-produits de la vinification,
- 3ème preuve : fixation par les agents de la valeur réelle de ces alcools destinés à une dénaturation en vue d'un usage industriel et/ou pharmaceutique.
M. [D] reproche aux agents verbalisateurs d'avoir établi un avis de taxation sur la fausse base d'alcool en suspension de droit, ce qui implique la perception de droits de consommation.
Selon lui, la mise en recouvrement est basée sur une qualification erronée « d'alcools manquants en suspension de droits », entachée d'une erreur manifeste de qualification des produits taxés.
L'administration soutient que les alcools issus de la distillation des sous-produits de la viticulture, dans le cadre de la distillation obligatoire, ne sont pas des alcools en exemption de droits mais des alcools en suspension de droits, sous condition de destination à savoir, au cas particulier, la livraison de ces produits aux organismes habilités dans le cadre des distillations communautaires. Elle fait valoir qu'à partir du moment où M. [D] n'a pas rempli ses obligations d'entrepositaire agréé, au titre de l'article 302G du CGI, il a perdu le bénéfice du régime suspensif et doit mettre ses produits à la consommation. Elle en déduit qu'il s'agit d'une taxation sur la base de l'article 302D du code général des impôts.
Réponse de la cour
Les alcools issus de la distillation des sous-produits de la viticulture dans le cadre de la distillation obligatoire, ne font pas partie des alcools repris à l'article 302 D bis du code général des impôts, traitant des alcools en exonération de droits, dont les alcools dénaturés en vue d'usages industriels et pharmaceutiques.
Dès lors, M. [D] n'est pas fondé à soutenir qu'il pourrait bénéficier de ce régime.
Or, selon le procès-verbal d'infractions du 7 novembre 2015, M. [D] n'a pas respecté plusieurs des obligations auxquelles il est tenu en qualité d'entrepositaire agréé, de sorte qu'il ne peut pas plus bénéficier du régime suspensif prévu à l'article 302 G du code général des impôts, qui suppose que les produits ne soient pas mis à la consommation.
Dès lors, le redressement dont il fait l'objet est justifié.
En conséquence, par confirmation du jugement, dont la cour adopte expressément les motifs, il convient de débouter M. [D] de ses contestations.
9. Sur les autres demandes
Le jugement est confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'application de l'article 700 du code de procédure civile.
L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'administration, en appel. M. [D] est condamné à lui payer à ce titre la somme globale de 2.500 €.
Les dépens d'appel sont à la charge de M. [D], qui succombe en sa tentative de remise en cause du jugement.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
y ajoutant,
Condamne M. [D] à payer à la direction générale des douanes et droits indirects, la somme de 2.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
Déboute les parties de toutes leurs autres demandes.
Condamne M. [D] aux dépens de la procédure d'appel, et accorde aux avocats qui en ont fait la demande le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.
La Greffière, Le Président