La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/11/2022 | FRANCE | N°20/02558

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile b, 22 novembre 2022, 20/02558


N° RG 20/02558 - N° Portalis DBVX-V-B7E-M6O5















Décision du

Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond du 07 novembre 2019



RG : 16/08823

ch 9 cab 09 F









[O]

S.A.R.L. MAJI



C/



[E]





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile B



ARRET DU 22 Novembre 2022







APPELANTS :r>


M. [S] [O]

né le [Date naissance 3] 1984 à [Localité 7] (38)

[Adresse 6]

[Localité 5]



Représenté par la SELARL MARTIN SEYFERT & ASSOCIES, avocats au barreau de LYON, toque : 1792

Assisté de Me Alexis TRESCA, avocat au barreau de PARIS





S.A.R.L.U. MAJI

[Adresse 6]

[Lo...

N° RG 20/02558 - N° Portalis DBVX-V-B7E-M6O5

Décision du

Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond du 07 novembre 2019

RG : 16/08823

ch 9 cab 09 F

[O]

S.A.R.L. MAJI

C/

[E]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRET DU 22 Novembre 2022

APPELANTS :

M. [S] [O]

né le [Date naissance 3] 1984 à [Localité 7] (38)

[Adresse 6]

[Localité 5]

Représenté par la SELARL MARTIN SEYFERT & ASSOCIES, avocats au barreau de LYON, toque : 1792

Assisté de Me Alexis TRESCA, avocat au barreau de PARIS

S.A.R.L.U. MAJI

[Adresse 6]

[Localité 5]

Représentée par la SELARL MARTIN SEYFERT & ASSOCIES, avocats au barreau de LYON, toque : 1792

Assistée de Me Alexis TRESCA, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉ :

M. [N] [E]

né le [Date naissance 2] 1989 à [Localité 8] (69)

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par la SELARL LAFFLY & ASSOCIES - LEXAVOUE LYON, avocats au barreau de LYON, toque : 938

Assisté de la SELARL AC JURIS ASSOCIES, avocats au barreau de LYON, toque : 599

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 17 Juin 2021

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 08 Septembre 2022

Date de mise à disposition : 08 Novembre 2022, prorogée au 22 Novembre 2022, les avocats dûment avisés conformément à l'article 450 dernier alinéa du code de procédure civile

Audience présidée par Stéphanie LEMOINE, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Myriam MEUNIER, greffier.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Olivier GOURSAUD, président

- Stéphanie LEMOINE, conseiller

- Bénédicte LECHARNY, conseiller

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties présentes ou représentées en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Olivier GOURSAUD, président, et par Elsa SANCHEZ, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

EXPOSÉ DE L'AFFAIRE

La société KLE a été constituée en avril 2009 pour reprendre l'activité de la société KLE industrie, placée en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Lyon du 8 janvier 2009 et ayant fait l'objet d'un plan par cession, selon jugement du même tribunal, en date du 16 avril 2009.

L'activité principale de cette société était l'étude, la conception, la fabrication et la commercialisation de pièces moulées ou non, en polyuréthane, sous toutes ses formes.

M. [O] a pris le contrôle de la société KLE en 2011, par l'intermédiaire de la société MAJI, qui a acquis 20% de ses titres, à l'aide d'un prêt consenti par la Lyonnaise de banque.

Le 20 février 2012, M. [E] a été embauché en CDI par la société KLE, en qualité de commercial confort. Il a ensuite été promu au poste de responsable commercial technique et de production.

Le 14 novembre 2013, la société KLE a été placée en redressement judiciaire, puis la société KLE a été en pourparlers avec la SAS [M] pour envisager une fusion. Le 3 juillet 2014, était signée une promesse de cession de parts de la société [M] à M. [E], qui a été dénoncée le 31 juillet 2014 par le directeur de la société [M].

Le 10 juillet 2014, le redressement de la société KLE a été transformé en liquidation judiciaire.

Le 9 février 2015, la SAS Europe ployuréthane industrie, dont M. [E] était l'unique associé et le président, a été immatriculée au RCS, avec comme activité principale la transformation des élastomères et un début d'activité au 20 janvier 2015.

A la suite de la liquidation de la société KLE, M. [O] et la société Maji ont été assignés par la société Lyonnaise de banque au titre des emprunts consentis pour la reprise de la société KLE.

Par arrêts du 28 février 2019 et du 6 juin 2019 :

- la société Maji a été condamnée, en sa qualité d'emprunteur, à verser à la banque la somme de 51 757,32 euros, outre intérêts au taux de 4,1% à compter du 5 décembre 2014, et capitalisation à compter du 12 février 2016;

- M. [O] a été condamné solidairement, en sa qualité de caution, à hauteur de la somme de 41 357,91 euros, outre intérêt au taux légal à compter du 5 décembre 2014, et capitalisation à compter du 5 décembre 2015.

Par acte d'huissier de justice du 15 juillet 2016, M. [O] et la société Maji ont assigné M. [E] devant le tribunal de grande instance de Lyon, aux fins de dire et juger que M. [E] a réalisé des actes de concurrence déloyale à l'encontre de la société KLE, ayant conduit à sa mise en liquidation judiciaire.

Suivant un jugement du 7 novembre 2019, le tribunal de grande instance de Lyon a débouté M. [O] et la société Maji de leurs demandes et les a condamnés in solidum à payer à M. [E] la somme de 3.000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive, ainsi qu'à celle de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Par déclaration du 4 mai 2020, M. [O] et la société Maji ont relevé appel du jugement.

Par conclusions notifiées le 25 janvier 2021, M. [O] et la société Maji demandent l'infirmation du jugement et la condamnation de M. [E] à leur verser la somme de 60.000 euros à titre de dommages-intérêts, en réparation du préjudice subi suite aux actes de concurrence déloyale commis à l'encontre de la société KLE, ayant conduit à sa liquidation judiciaire, ainsi qu'au titre de la mise en jeu de la responsabilité de M. [O] en sa qualité de caution. M. [O] sollicite, en outre, la somme de 50.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral résultant des difficultés nées de la procédure collective. Ils sollicitent, enfin, la condamnation de M. [E] à leur verser la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les dépens, avec droit de recouvrement au profit de Me Martin en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions notifiées le 26 octobre 2020, M. [E] demande la confirmation du jugement, en ce qu'il a débouté M. [O] et la société Maji de l'ensemble de leurs demandes, condamné in solidum M. [O] et la société Maji à des dommages-intérêts pour procédure abusive, et à payer la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de première instance.

En revanche, il sollicite l'infirmation du jugement s'agissant des condamnations mises à la charges de M. [O] et la société Maji et, statuant à nouveau, de :

- condamner in solidum M. [O] et la société MAJI à lui payer la somme de 10.000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive, ainsi que la somme de 5.000 € à titre de dommages-intérêts, en réparation de son préjudice moral ;

- condamner in solidum M. [O] et la société Maji à lui payer la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens distraits au profit d Maître Laffly, Lexavoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 17 juin 2021.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1. Sur les actes de concurrence déloyale

M. [O] et la société Maji soutiennent que M. [E] a commis différents actes de concurrence déloyale ayant engagé sa responsabilité et sollicitent en conséquence sa condamnation à leur payer la somme 'forfaitaire' de 60.000 euros en réparation du préjudice subi, outre la somme de 50.000 euros en réparation de leur préjudice moral.

A l'appui de ces demandes, ils font notamment valoir que :

- au début de l'année 2014, la société KLE était en pourparlers avec la société [M], en vue d'une fusion, mais alors que les négociations étaient en cours, M. [E], qui était salarié de la société KLE, s'est rapproché de M. [B], le dirigeant de la société [M], pour lui proposer d'acquérir la société en lieu et place de la société KLE,

- M. [B] a en conséquence mis fin au projet de fusion,

- de mars à juillet 2014, M. [E] a détourné des commandes adressées à la société KLE, pour les diriger vers la société [M],

- il est responsable de l'effondrement du chiffre d'affaires de la société KLE et sa mise en liquidation judiciaire,

- ces actes de concurrence déloyale sont établis par un courrier de M. [B], qui a décidé de rompre avec lui toute relation commerciale,

- M. [E] a également démarché les clients de la société KLE et détourné les commandes qui leur étaient destinées en novembre 2013,

- les actes commis par M. [M] sont à l'origine de la liquidation judiciaire de la société KLE,

- le 9 février 2015, M. [E] a immatriculé une société dénommée Europe polyuréthane industrie, dont l'activité est directement concurrente de celle qui était exercée par la société KLE.

M. [E] soutient notamment que :

- les appelants produisent pour seule preuve des faits qui lui sont reprochés, une lettre recommandée qui lui a été adressée par M. [B], une attestation de M. [B] et des échanges de courriels avec M. [B],

- ces preuves sont sujettes à caution, dans la mesure où M. [B] est dirigeant de la société [M], dont la société Europe polyuréthane industrie est un concurrent direct et que les griefs formulés à son encontre ont constitué un prétexte pour se désengager de la promesse de cession d'actions du 3 juillet 2014,

- il n'a pas commis de faute en engageant des pourparlers à partir du mois de mai 2014 en vue du rachat d'une entreprise concurrente de la société KLE, puisqu'il s'agit d'actes préparatoires à une future activité concurrente, ce qui est licite,

- il n'avait pas été informé que la société KLE souhaitait acquérir la société [M],

- l'existence de pourparlers entre la société [M] et la société KLE n'est pas démontrée,

- il n'a pas commis de faute en démarchant les clients de la société KLE postérieurement à sa liquidation judiciaire,

- les trois commandes d'anciens clients de la société KLE dont il est fait état sont postérieures au 10 juillet 2014, date de la liquidation judiciaire,

- il n'a jamais détourné des moules et des pièces qui étaient la propriété de la société KLE.

Sur ce :

A titre liminaire, il est observé que les appelants ne précisant pas le fondement juridique de leur action en responsabilité, il y a lieu de l'examiner au regard des dispositions de l'article 1382 du code civil, devenu 1240, ainsi qu'il a été procédé par les premiers juges, en l'absence de contestation sur ce point.

Dès lors, il appartient à M. [O] et à la société Maji de démontrer que M. [E] a commis une faute leur ayant causé un préjudice.

En premier lieu, M. [O] et la société Maji font grief à M. [E] d'avoir engagé des pourparlers avec M. [B], afin de racheter une entreprise concurrente, la société [M], alors qu'il était encore salarié de la société Kle et qu'ils étaient eux-mêmes en négociation avec cette société.

M. [E] ne conteste pas être entré en négociation avec la société [M] à compter du 8 mai 2014 et avoir signé une promesse de cession avec elle le 3 juillet 2014.

Cependant, à défaut pour M. [O] et la société Maji d'établir, voire même d'alléguer, que M. [E] était lié à la société Kle par une clause de non-concurrence, ne constitue pas une faute, le fait, pour un salarié, de réaliser des actes préparatoires en vue de reprendre une société concurrente, dès lors qu'il n'y a eu aucun commencement d'activité avant la cessation du contrat de travail.

Or, il n'est pas soutenu que M. [E] aurait exercé une telle activité durant son contrat de travail. M. [O] et la société Maji font uniquement grief à M. [E] d'avoir engagé ces pourparlers, alors que la société Kle était elle-même en négociation avec la société [M], ce dont elle ne rapporte pas la preuve, le courriel de M. [B] du 15 mai 2014 produit à cet effet ne faisant état que d'un 'rapprochement' à cette époque entre la société [M] et la société Kle. Aucun document pré-contractuel qui aurait été conclu entre ces deux sociétés, et qui viendrait préciser et corroborer ces allégations n'est par ailleurs produit.

En second lieu, M. [O] et la société Maji font grief à M. [E] d'avoir détourné des commandes de la société Kle et soustrait des moules lui appartenant.

Il est fait état de trois commandes passées le 15 juillet 2014, le 18 juillet 2014 et en novembre 2013 auprès de M. [E], qu'il aurait dirigées vers la société [M].

M. [E] ne conteste pas l'existence de ces trois commandes, mais précise que la commande du mois de novembre 2013 aurait été redirigée vers la société [M] en août 2014, ce qui résulte bien du courrier du 31 juillet 2014, dont M. [O] se prévaut, aux termes duquel M. [B], en sa qualité de dirigeant de la société [M], précise que 'le travail était à faire en août (...)'.

Or, il est constant que la société Kle a été placée en liquidation judiciaire le 10 juillet 2014.

C'est dès lors, c'est sans commettre de faute, que M. [E], qui n'était alors plus salarié de la société Kle, a dirigé ces trois commandes vers la société [M], postérieurement à l'arrêt de l'activité de la société Kle.

Enfin, s'agissant du vol des moules et pièces moulées, allégué par M. [O] et la société Maji, mise à part la lettre du 31 juillet 2014, qui mentionne qu'il n'y avait 'pas de document prouvant sa propriété' et reste donc très hypothétique quant à la propriété de ces biens, aucun élément objectif ne permet d'établir qu'ils appartenaient bien à la société Kle et qu'ils auraient donc été détournés par M. [E].

Il résulte de l'ensemble de ces éléments, qu'aucune faute, ni aucun acte de concurrence déloyale, ne sont établis à l'encontre de M. [E].

En outre, c'est par de justes motifs que la cour adopte expressément, que les premiers juges ont retenu qu'aucun préjudice personnel à M. [O] et à la société Maji n'a été à l'origine de la liquidation judiciaire de la société Kle.

Il convient donc de confirmer le jugement.

2. Sur les demandes de dommages-intérêts pour procédure abusive et en réparation d'un préjudice moral

A défaut de circonstances particulières de nature à faire dégénérer en faute le droit d'agir en justice de M. [O] et de la société Maji, il y a lieu, infirmant le jugement, de débouter M. [E] de ses demandes de dommages-intérêts pour procédure abusive, ainsi que celles en réparation de son préjudice moral.

3. Sur les autres demandes

Le jugement est confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de M. [E], en appel. M. [O] et la société Maji sont condamnés in solidum à lui payer à ce titre la somme globale de 4.000 €.

Les dépens d'appel sont in solidum à la charge de M. [O] et la société Maji qui succombent en leur tentative de remise en cause du jugement.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu'il condamne M. [O] et la société Maji in solidum à payer à M. [E], la somme de 3.000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déboute M. [E] de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,

Condamne in solidum M. [O] et la société Maji à payer à M. [E] la somme de 4.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

Déboute les parties de toutes leurs autres demandes.

Condamne in solidum M. [O] et la société Maji aux dépens de la procédure d'appel, et accorde aux avocats qui en ont fait la demande le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile b
Numéro d'arrêt : 20/02558
Date de la décision : 22/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-22;20.02558 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award