N° RG 20/06671 - N° Portalis DBVX-V-B7E-NIJ4
Décision du
Tribunal de Grande Instance de LYON
Au fond
du 13 octobre 2020
RG : 17/04089
[K]
C/
[F]
[Y]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
1ère chambre civile B
ARRET DU 27 Septembre 2022
APPELANT :
M. [N] [K]
né le 31 Août 1944 à [Localité 12] (69)
[Adresse 1]
[Localité 13]
Représenté par Me Anne-sophie LEFEVRE, avocat au barreau de LYON, toque : 1259
INTIMES :
M. [W] [F]
[Adresse 9]
[Localité 13]
Représenté par la SELARL PIRAS ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 704
Mme [C] [Y] épouse [F]
[Adresse 9]
[Localité 13]
Représentée par la SELARL PIRAS ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 704
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Date de clôture de l'instruction : 28 Octobre 2021
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 21 Juin 2022
Date de mise à disposition : 27 Septembre 2022
Audience tenue par Olivier GOURSAUD, président, et Stéphanie LEMOINE, conseiller, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,
assistés pendant les débats de Myriam MEUNIER, greffier
A l'audience, un des membres de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.
Composition de la Cour lors du délibéré :
- Olivier GOURSAUD, président
- Laurence VALETTE, conseiller
- Stéphanie LEMOINE, conseiller
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Olivier GOURSAUD, président, et par Myriam MEUNIER, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES:
Les époux [O] étaient propriétaires d'un certain nombre de parcelles sur la commune de [Localité 13], sur lesquelles étaient édifiés des bâtiments.
Les parents de M. [N] [K] sont devenus propriétaires de ces parcelles pour en avoir acquis une partie en 1942 (soit les parcelles portant les numéros [Cadastre 2], [Cadastre 10], [Cadastre 6] et [Cadastre 7] pour une contenance de 12a 52ca), l'autre partie ayant été reçue en donation en 1947 par la mère de M. [K] (soit les parcelles portant les numéros [Cadastre 4] et [Cadastre 5] pour une contenance de 21a 69ca).
M. [K] est devenu propriétaire de toutes ces parcelles pour les avoir acquises suite au partage de la succession de ses parents en 1977.
Les parcelles [Cadastre 10] et [Cadastre 7] jouxtent la parcelle [Cadastre 3], qui était un terrain appartenant aux époux [M].
Au cours de l'année 1971, les champs au sud de la propriété [K] ont été divisés et bornés lors de la création des différents lots à construire mais toutefois, aucune borne n'a été placée entre la parcelle [Cadastre 3] et les parcelles de M. [K] (F290, 331 et 333), pourtant contiguës.
Les époux [M] ont vendu leur terrain (F326 et F232) aux époux [V] en 1979, lesquels ont fait construire une maison dans les années 1979-1980 qu'ils ont ensuite vendue à M. [W] [F] et Mme [C] [Y] épouse [F] en 1985.
A l'occasion de travaux de voirie au cours de l'année 2007, la parcelle [Cadastre 3] a été divisée en deux parcelles : [Cadastre 8] qui demeure aux époux [F], et [Cadastre 11] qui a été acquise par la commune pour y aménager un parking.
Ces travaux et modifications n'ont pas non plus donné lieu à la mise en place de bornes.
Des différends sont apparus entre M. [K] et les époux [F], concernant l'entretien des arbres sur la propriété [K] et l'édification de constructions par les époux [F] prenant appui sur le muret séparatif des propriété.
Par exploit d'huissier du 25 avril 2017, M. [K] a fait assigner M. et Mme [F] devant le tribunal de grande instance de Lyon aux fins de revendication de la propriété du muret de séparation des deux parcelles et obtenir la destruction sous astreinte des constructions édifiées à moins de 3 mètres de sa propriété.
Il a sollicité à titre subsidiaire une expertise afin de vérifier la distance des constructions par rapport au mur séparatif.
Les époux [F] ont sollicité à titre reconventionnel que soit ordonné sous astreinte l'arrachage ou l'élagage de plantations ne respectant pas les distances légales.
Par jugement du 13 octobre 2020, le tribunal judiciaire de Lyon a :
- dit que M. [K] est propriétaire du muret séparant, sur la commune de [Localité 13], ses parcelles cadastrées [Cadastre 10] et [Cadastre 7] de la parcelle cadastrée [Cadastre 8], propriété de M. et Mme [F],
- condamné les époux [F] à payer la somme de 1 500 € à M. [K] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté les parties de toutes leurs autres demandes mal fondées,
- condamné les époux [F] aux entiers dépens de l'instance.
Par déclaration du 30 novembre 2020, M. [K] a interjeté appel du jugement en ce qu'il a débouté les parties de toutes les autres demandes mal fondées.
Au terme de ses dernières conclusions notifiées le 30 août 2021, M. [K] demande à la cour de :
- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lyon, le 13 octobre 2020 en ce qu'il a :
* dit qu'il est propriétaire du muret séparant les parcelles cadastrées [Cadastre 10] et [Cadastre 7] de la parcelle [Cadastre 8], propriété de M. et Mme [F],
* débouté M. et Mme [F] de leurs demandes,
* condamné M. et Mme [F] à lui payer la somme de 1.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile en première instance,
- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lyon le 13 octobre 2020 en ce qu'il l'a débouté de sa demande de destruction des constructions réalisées par les époux [F],
en conséquence,
- condamner M. et Mme [F] à procéder à la destruction de toutes les constructions édifiées contre son muret, sous astreinte de 100 € par jour de retard passé le délai de 15 jours à compter de la décision à intervenir,
dans tous les cas,
- débouter M. et Mme [F] de l'ensemble de leurs demandes,
- condamner M. et Mme [F] à lui payer la somme de 3.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, pour la procédure d'appel,
- condamner M. et Mme [F] aux entiers dépens de l'instance, distraits au profit de Maître Anne-Sophie Lefevre, Avocat, sur son affirmation de droit.
A l'appui de sa demande de démolition, M. [K] fait valoir que :
- M. et Mme [F] ont fait construire deux édifices à savoir
- un abri de jardin édifié entre le mur séparant la parcelle appartenant à la commune et la parcelle [Cadastre 8] mais qui est également adossé au mur séparant la dite parcelle de la sienne,
- un garage édifié contre le mur séparant la parcelle [Cadastre 8] et la parcelle [Cadastre 7],
- ces deux constructions prennent appui sur son mur séparant les parcelles [Cadastre 8] ([F]) des parcelles [Cadastre 10] et [Cadastre 7] ([K]),
- elles ne respectent pas les dispositions de l'article R 111-17 du code de l'urbanisme selon lequel les bâtiments à construire peuvent jouxter la limite parcellaire et à défaut doivent respecter une distance de trois mètres,
- si l'arrière de l'abri est adossé au mur séparant le terrain de la commune, ainsi que le soutiennent les époux [F], un des trois côtés du mur est contre le mur séparant leur fonds de son terrain, l'emplacement de cet abri contre le mur empêche de l'entretenir et de plus, le toit de l'abri déborde contre son mur,
- s'agissant du garage, dont les époux [F] soutiennent qu'il s'agit d'un cabanon de jardin, il est également adossé à son mur de sorte qu'il n'est pas possible de l'entretenir ni le grillage,
- même si les dispositions du code de l'urbanisme ne s'appliquent pas en présence d'un plan local d'urbanisme dans la commune, ces constructions édifiées contre son mur sans son autorisation sont constitutives d'un trouble anormal du voisinage,
- en effet, du fait de ces constructions, son grillage ne peut être implanté du côté de chez M. et Mme [F] et son mur ne peut être entretenu et cette construction dénature le paysage,
- en outre, l'autorisation de travaux invoquée par les époux [F] n'a pas été publiée, la construction ne correspond pas et elle lui est en outre inopposable s'il y a eu des manquements à son égard,
- de surcroît, l'emprise au sol du cabanon excède celle prévue par le PLU.
Au terme de leurs dernières conclusions notifiées le 13 octobre 2021, M. et Mme [F] demandent à la cour de :
- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lyon du 30 octobre 2020 en ce qu'il a débouté les parties de toutes les autres demandes mal fondées,
statuant à nouveau,
à titre principal,
- rejeter purement et simplement les demandes de destruction de ces constructions sous astreinte,
- rejeter purement et simplement la demande d'expertise,
à titre subsidiaire et reconventionnel,
- juger que la procédure initiée par M. [K] constitue une procédure abusive et condamner M. [K] à une amende civile dont le montant est laissé à l'appréciation souveraine de la cour,
- condamner M. [K] à leur verser la somme de 5.000 € à titre de dommages intérêts,
en toute hypothèse,
- condamner M. [K] à leur payer la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [K] aux entiers dépens de l'instance, distraits au profit de la selarl Piras, avocat sur son affirmation de droit.
M. et Mme [F] font valoir que :
- les dispositions de l'article R 111-17 du code de l'urbanisme sont inapplicables, la commune étant dotée d'un PLU,
- l'abri de jardin n'est pas une construction mais un abri mobile avec armature en tube métallique non scellé sans fond, autoportant, couvert, et il n'est pas adossé au mur de M. [K] mais seulement à celui séparant leur parcelle de celle de la commune,
- le "garage" dont M. [K] fait état est en réalité un abri de jardin qui a fait l'objet d'une autorisation de travaux des services de l'urbanisme de la commune de [Localité 13],
- ce cabanon de jardin est érigé entièrement sur leur propriété, en limite de propriété et sans prendre appui sur le mur appartenant à M. [K] et il respecte l'autorisation qui a été donnée.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 28 octobre 2021.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Le jugement n'est pas remis en cause en ce qu'il a :
- considéré que le mur litigieux est la propriété de M. [K],
- débouté les époux [F] de leur demande d'arrachage des végétaux,
Par ailleurs, M. [K] qui ne sollicite plus d'expertise, maintient devant la cour sa demande tendant à la démolition des constructions édifiées à moins de 3 mètres de sa propriété.
1. sur la demande de démolition des constructions :
Il est donc acquis que par suite de la décision de première instance, définitive sur ce point, le muret séparant le fonds [K] (parcelles [Cadastre 10] et [Cadastre 7]) du fonds [F] (parcelle [Cadastre 8]) est la propriété de M. [K].
* sur la demande de démolition d'un abri de jardin :
A l'appui de sa demande de démolition, M. [K] verse aux débats des photographies de cet abri de jardin (pièce 9 et 35) qui se présente comme étant une structure démontable composée de tubes en acier et d'un toit.
Il ne ressort nullement des dites photographies, ni d'ailleurs de celle figurant dans les écritures des époux [F], que l'abri soit adossé au muret séparant les deux fonds.
Par ailleurs, les dispositions de l'article R 111-17 du code de l'urbanisme sont sans application en l'espèce dés lors que la commune de [Localité 13] est doté d'un plan local d'urbanisme, ainsi que l'a justement relevé le premier juge, et qu'au surplus, l'abri en question ne constitue pas un bâtiment à construire.
Il ne ressort pas enfin des photographies produites que la présence de cet abri interdise à M. [K] d'entretenir son mur ni, en l'absence de mesures précises sur ce point, qu'il déborde au dessus du mur.
Le jugement est confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de démolition de cet abri.
* sur la demande de démolition d'un cabanon de jardin :
M. et Mme [F] ont fait édifier un bâtiment qualifié de cabanon de jardin en vertu d'une déclaration de travaux exemptée de permis de construire qui a été autorisée par une décision du maire en date du 2 août 2002.
Là encore, la photographie produite par l'appelant (pièce 34) ne permet pas de constater que cette construction est adossée au muret séparant les deux fonds et il ressort au contraire du constat produit par les époux [F] établi le 22 juin 2017 que le mur périphérique de ce cabanon et le pignon situé côté nord ont été édifiés sur le terrain [F] à l'avant du muret, limite de propriété et que le pignon exposé nord n'a pas été édifié sur le muret mais au contraire à l'arrière de ce muret.
Il convient d'observer là encore que les dispositions du code de l'urbanisme invoquées par M. [K] sont sans application, en présence d'un plan local d'urbanisme dans la commune.
M. [K] ne rapporte pas davantage la preuve par les pièces qu'il produit que la présence de cette construction ne lui permet plus d'entretenir son mur ni qu'elle constitue pour lui un trouble anormal du voisinage, les photographies qu'il verse aux débats ne caractérisant nullement une dénaturation du paysage ainsi qu'il le soutient.
Enfin, il n'est pas non plus établi par l'appelant que l'emprise au sol du cabanon excéderait la surface autorisée par le plan local d'urbanisme, cette affirmation étant contredite par le plan de l'abri de jardin qui fait ressortir qu'un des côtés de cette construction est inférieur à l'autre, ce qui réduit la surface de l'ensemble, étant rappelé au surplus qu'une éventuelle violation du plan local d'urbanisme ne justifierait une demande de démolition qu'en cas de démonstration d'un préjudice ce qui n'est manifestement pas le cas en l'espèce.
Le jugement est également confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de démolition de cette construction.
2. sur la demande au titre d'une amende civile et de dommages et intérêts pour procédure abusive
L'exercice d'une voie de recours ne peut en soi caractériser un abus de droit et il n'est pas démontré que l'appel ait été interjeté par M. [K] dans une intention malicieuse ou dilatoire et dans le but de nuire à la partie adverse.
Il n'y a donc pas lieu de prononcer une amende civile et il convient de débouter M. et Mme [F] de leur demande en dommages et intérêts pour procédure abusive.
3. sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :
Le jugement est confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'application de l'article 700 du code de procédure civile.
M. [K] qui succombe en sa tentative de remise en cause du jugement sur les points qu'il discute en cause d'appel est condamné aux dépens de la procédure l'appel et il est condamné à payer à M. et Mme [F] la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile .
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
statuant dans les limites de l'appel,
Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour,
y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à amende civile,
Déboute M. et Mme [F] de leurs demandes en dommages et intérêts pour procédure abusive.
Condamne M. [N] [K] à payer à M. [W] [F] et Mme [C] [Y] épouse [F] la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Déboute les parties du surplus de leurs demandes.
Condamne M. [N] [K] aux dépens d'appel et accorde à Maître Piras, avocat le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRESIDENT