N° RG 21/01854 - N° Portalis DBVX-V-B7F-NOTV
Décision du
Juge des contentieux de la protection de VILLEURBANNE
Au fond
du 22 février 2021
RG : 11-18-2532
[P]
C/
[15]
[16]
[17]
[20]
HOPITAL PRIVE [24]
OPAC 38
OPAC DU RHONE
SIP [Localité 26]
[H]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
6ème Chambre
ARRET DU 15 Septembre 2022
APPELANTE :
Mme [E] [P]
née le 31 Juillet 1971 à [Localité 23]
[Adresse 14]
[Adresse 14]
[Localité 9]
Représentée par Me Sonia AKUE, avocat au barreau de LYON, toque : 340
INTIMEES :
[15]
Service surendettement
[Adresse 3]
[Localité 12]
non comparante
[16]
Chez [25]
[Adresse 18]
[Localité 6]
non comparante
[17]
CHEZ [25]
[Adresse 18]
[Localité 6]
non comparante
[20]
CHEZ [22]
[Adresse 13]
[Localité 11]
non comparante
HOPITAL PRIVE [24]
[Adresse 4]
[Localité 7]
non comparant
OPAC 38
[Adresse 1]
[Localité 5]
non comparant
OPAC DU RHONE
[Adresse 19]
[Adresse 19]
[Localité 10]
non comparant
SIP [Localité 26]
[Adresse 2]
[Localité 26]
non comparant
Mme [M] [H]
[Adresse 21]
[Adresse 21]
[Localité 8]
non comparante
******
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 22 Juin 2022
Date de mise à disposition : 15 Septembre 2022
Audience présidée par Stéphanie ROBIN, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Sylvie GIREL, greffier.
Composition de la Cour lors du délibéré :
- Dominique BOISSELET, président
- Evelyne ALLAIS, conseiller
- Stéphanie ROBIN, conseiller
Arrêt réputé contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties présentes ou représentées en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Dominique BOISSELET, président, et par Sylvie GIREL, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
*****
FAITS, PROCEDURE ET DEMANDES DES PARTIES :
Par décision du 1er mars 2018, la commission de surendettement des particuliers du Rhône a déclaré recevable la demande de Mme [E] [P] du 2 février 2018, afin de voir traiter sa situation de surendettement.
Le 14 juin 2018, la commission a fixé les mesures qu'elle entendait imposer au débiteur et aux créanciers, consistant en un rééchelonnement du paiement des dettes d'un montant total de 32.254,82 euros sur une durée de 64 mois, sans intérêt, en tenant compte d'une capacité de remboursement mensuelle de 462,96 euros, et un effacement du solde des dettes à l'issue du délai susvisé, à hauteur de la somme totale de 3.235,16 euros.
Ces mesures ont été notifiées le 29 juin 2018 à Mme [P].
Elles faisaient suite à de précédentes mesures de la commission exécutées, pendant une durée de 20 mois.
Par lettre recommandée envoyée le 17 juillet 2018 à la commission, Mme [P] a contesté les mesures imposées du 14 juin 2018.
Les parties ont été convoquées devant le juge des contentieux de la protection, du tribunal de proximité de Villeurbanne, saisi de cette contestation. A l'audience, Mme [P], comparante en personne, a indiqué que sa situation ne s'était pas améliorée.
Par jugement du 22 février 2021, le juge des contentieux de la protection a :
- déclaré recevable et fondée la contestation de Mme [P],
- fixé à la somme de 110 euros la mensualité de remboursement,
- modifié les mesures imposées élaborées par la commission conformément au tableau annexé à la décision, lequel tableau prévoit :
' le rééchelonnement du paiement des dettes d'un montant total de 31.126,35 euros sur une durée de 64 mois, sans intérêt,
' un effacement du solde des dettes à l'issue du délai susvisé, à hauteur de la somme totale de 24.059,22 euros,
- laissé à chacune des parties la charge des éventuels dépens, qu'elle aurait pu engager.
Le jugement a été notifié à Mme [P], par lettre recommandée datée du 22 février 2021, dont l'avis de réception est signé, mais non daté.
Par lettre recommandée envoyée le 8 mars 2021, Mme [P] a interjeté appel du jugement, aux motifs que sa situation financière reste fragile, même si elle a pu réduire ses dettes, en respectant le plan établi par la commission. Elle fait valoir également que la durée totale des mesures ne peut excéder 84 mois, alors que les mesures dont elle bénéficie ont été prorogées selon elle, sur une durée plus longue. Constatant sa totale insolvabilité, elle sollicite le bénéfice d'un rétablissement personnel, sans liquidation judiciaire.
Les parties ont été régulièrement convoquées, à l'audience du 26 janvier 2022.
A cette date, Mme [P] a sollicité un renvoi, indiquant qu'elle avait sollicité le bénéfice de l'aide juridictionnelle et qu'elle n'avait pas eu d'information sur le traitement de sa demande. L'affaire a été renvoyée au 25 mai 2022.
Précédemment, par décision du 31 mars 2022, notifiée le 2 avril 2022, à Mme [P], sa demande d'aide juridictionnelle a été rejetée.
Avant l'audience du 25 mai 2022, Mme [P] a transmis un certificat médical attestant d'un IRM indispensable, prévu le 25 mai. Dans ce contexte, l'affaire a été renvoyée au 22 juin 2022 à 13H30.
A cette date, Maître Akue, avocat de Mme [P], la représentant, comparaît à l'audience.
Par des conclusions développées à l'oral, elle demande à la Cour de :
- déclarer l'appel de Mme [P] recevable et bien fondé,
- réformer le jugement du juge des contentieux du tribunal de proximité de Villeurbanne, en ce qu'il a limité l'effacement des dettes de Mme [P] et l'a condamnée au paiement de la somme de 110 euros par mois, pendant une durée de 64 mois,
- confirmer le jugement pour le surplus,
et statuant à nouveau de :
- prononcer le rétablissement personnel sans liquidation judiciaire de Mme [P],
- arrêter les dettes de Mme [P] à la date de l'arrêt à intervenir,
- statuer ce que de droit sur les dépens.
A l'appui de ses prétentions, elle fait valoir que la situation de Mme [P] est irrémédiablement compromise. Elle fait préalablement état de l'état de santé très fragile de Mme [P], qui l'a amenée, à être en arrêt de travail à plusieurs reprises, situation qui s'est encore aggravée, depuis qu'elle a été victime d'un accident vasculaire cérébral, au mois d'avril 2022.
Le médecin du travail a ainsi constaté qu'elle n'était plus en capacité de reprendre son poste de travail, mais elle précise qu'elle ne sera pas placée en invalidité.
Elle est en situation de surendettement depuis 2014. Le juge a réduit le montant de la mensualité et a par ailleurs constaté que les créances de Mme [H], de l'OPAC 38 et du SIP [Localité 26] étaient soldées.
Elle fait valoir que le traitement de Mme [P] sera diminué, de moitié après le 19 novembre 2022, fin de la prolongation de son congé longue maladie, ne pouvant reprendre son activité. Cette activité, au sein de la fonction publique, ne lui permettra pas de pouvoir bénéficier d'une pension d'invalidité et son reclassement s'avère impossible. Compte tenu de la diminution de ses ressources et avec des charges toujours importantes, elle ne pourra pas disposer de capacité de remboursement. En outre, lorsqu'elle pourra solliciter ses droits à la retraite, cette dernière sera nécessairement très faible, en raison d'un temps d'activité réduit, ne dépassant pas douze ans, ce qui lui permettrait de percevoir une somme de l'ordre de 200 euros par mois.
Les autres parties ne comparaissent pas ni ne font valoir de prétentions dans les formes prévues par l'article R.713-4 du code de la consommation.
Cependant, par courrier reçu au greffe le 31 décembre 2021, [16] a indiqué souhaiter la confirmation de la décision rendue.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Les parties intimées défaillantes, ayant signé l'accusé de réception de leur lettre de convocation, la présente décision sera réputée contradictoire en application de l'article 474 du code de procédure civile.
Aux termes de l'article L.733-13 du code de la consommation, le juge saisi de la contestation prévue à l'article L. 733-10 prend tout ou partie des mesures définies aux articles L. 733-1, L. 733-4 et L. 733-7. Dans tous les cas, la part des ressources nécessaires aux dépenses courantes du ménage est déterminée dans les conditions prévues à l'article L. 731-2. Elle est mentionnée dans la décision. Lorsqu'il statue en application de l'article L. 733-12, le juge peut en outre prononcer un redressement personnel sans liquidation judiciaire.
Le premier juge a retenu que Mme [P], âgée de 50 ans, avait la situation financière suivante :
- des ressources mensuelles d'un montant total de 2.021 euros, constituées de :
* salaire moyen : 1.660 euros
* allocation de soutien familial : 115 euros
* prime d'activité : 197 euros
* APL : 49 euros
- des charges mensuelles d'un montant total de 1.914 euros, se décomposant comme suit :
* forfait charges courantes : 1.004 euros
* loyer : 645 euros
* mutuelle : 121 euros
* frais de scolarité : 132 euros
* taxe d'habitation : 12 euros
soit une différence de 110 euros entre les ressources et les charges, somme retenue pour fixer la mensualité.
A l'audience devant la Cour, Mme [P] justifie par les pièces produites aux débats de la situation suivante :
- des ressources mensuelles suivantes :
* salaire mensuel : 1.024 euros (congé longue maladie)
* complément prévoyance : 841,20 euros
* allocations CAF (allocation de soutien familial 118,20 euros et prime d'activité : 319 euros) : 437,06 euros
* APL : 237,48
soit un total de 2.539,74 euros par mois.
- des charges mensuelles constituées de :
* forfait de base (actualisé pour 2022) : 774 euros
* charges courantes : 148 euros
* forfait chauffage : 134 euros
* mutuelle : 121 euros
* loyer (appartement et garage) : 501,15 euros
* redevance audiovisuelle : 11,50 euros
* frais de scolarité :112,85 euros (1.230 euros sur 10 mois donc 102,5 par mois sur l'année et assurance scolaire)
soit un total de 1.802,50 euros.
Il convient de rappeler que les frais d'eau, de chauffage, d'électricité et de téléphonie sont déjà inclus dans les forfaits de la banque de France, de sorte que les sommes arguées à ce titre par Mme [P] ne peuvent être prises en compte en plus du forfait déjà précité.
Elle évoque également des soins dentaires, mais ne justifie pas du remboursement le cas échéant de sa mutuelle, de sorte qu'il ne peut être retenu de somme au titre de charges exceptionnelles.
A l'appui de sa demande de rétablissement personnel, Mme [P] argue de la prolongation de son congé longue maladie et de son impossibilité à l'issue de reprendre son activité professionnelle ou de bénéficier d'un reclassement.
Elle indique qu'elle ne pourra pas prétendre à une pension d'invalidité et que ses ressources vont diminuer de moitié, avant d'attendre la retraite. Elle aura alors une diminution encore plus sensible de ses revenus, exposant avoir eu une durée d'activité réduite.
Il importe d'observer qu'elle produit à l'appui de ses allégations un certificat du docteur [K], médecin agréé, constatant une maladie, mettant l'agent dans l'impossibilté d'exercer ses fonctions et prolongeant le congé longue maladie à compter du 20 mai 2022, pour une durée de 6 mois, soit jusqu'au 19 novembre 2022.
Elle joint un courrier de la direction des ressources humaines de son employeur, reprenant ces éléments et l'informant de ce que ces droits au congé de longue maladie arrivent à échéance le 19 novembre 2022. 'En conséquence, si votre état de santé ne vous permet pas de reprendre votre service, avant cette date vous serez placée en disponibilité d'office, pour raison de santé, conformément à la réglementation en vigueur.
Dans cette position administrative :
- vous bénéficiez a minima du maintien de votre seul demi-traitement indiciaire,
- vous ne cotisez plus pour la retraite et ne constituez plus de droit à pension.
Je vous invite à contacter votre prévoyance pour connaître les modalités de prise en charge de votre contrat relatif à votre complément de salaire dans cette situation'.
Or, Mme [P] en déduit qu'elle percevra nécessairement un demi traitement à compter du mois de novembre 2022. Si le médecin indique qu'elle a une maladie ne lui permettant pas d'exercer ses fonctions actuellement, ce seul certificat ne permet pas de déterminer qu'elle ne pourra plus exercer cette activité professionnelle à terme ou bénéficier d'un reclassement, permettant d'obtenir des revenus. En outre, si elle affirme qu'elle ne bénéficiera plus de versement de la prévoyance, elle ne produit aucune pièce de cet organisme justifiant qu'aucun versement n'aura lieu après le 19 novembre 2022, si elle était dans l'impossibilité d'exercer des fonctions.
De plus, concernant les droits à la retraite, elle les évalue de manière approximative, ne produisant là encore aucune pièce justificative.
Il résulte de ces éléments, contrairement à ce que soutient Mme [P], que sa situation financière après le 19 novembre 2022 n'apparaît ni certaine, ni hautement probable, de sorte que son argumentation ne peut prospérer.
En conséquence, en l'absence d'élément nouveau permettant de considérer que ses revenus vont avec certitude diminuer de manière sensible dans les mois à venir et de droits ultérieurs à la retraite imprécis, il ne peut être considéré qu'elle se trouve dans une situation irrémédiablement compromise justifiant l'octroi d'une procédure de rétablissement personnel.
Elle dispose en effet d'une capacité de remboursement.
Dans ces conditions, il convient de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions.
Il appartiendra à Mme [P] de ressaisir le cas échéant la commission lorsqu'elle disposera d'éléments précis et actualisés sur sa situation financière.
PAR CES MOTIFS,
La Cour,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Laisse les dépens à la charge du Trésor public.
LE GREFFIER LE PRESIDENT