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19/11/2020 | FRANCE | N°19/08475

France | France, Cour d'appel de Lyon, 6ème chambre, 19 novembre 2020, 19/08475


N° RG 19/08475

N° Portalis DBVX-V-B7D-MXVB









Décision du

juge de l'exécution

de Villefranche sur Saône

du 29 novembre 2019



RG : 19/00366







SCP COTESSAT-[R]



C/



[O]





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



6ème Chambre



ARRET DU 19 Novembre 2020







APPELANTE :



SELARL COTESSAT-[R]

[Adresse 2]



[Localité 3]



Représentée par Me Michel DESILETS de la SCP DESILETS ROBBE ROQUEL, avocat au barreau de VILLEFRANCHE-SUR-SAONE





INTIMEE :



Mme [C] [O] épouse [E]

[Adresse 1]

[Localité 4]



Représentée par Me Laurent LIGIER de la SCP ELISABETH LIGIER DE MAUROY & LAUR...

N° RG 19/08475

N° Portalis DBVX-V-B7D-MXVB

Décision du

juge de l'exécution

de Villefranche sur Saône

du 29 novembre 2019

RG : 19/00366

SCP COTESSAT-[R]

C/

[O]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

6ème Chambre

ARRET DU 19 Novembre 2020

APPELANTE :

SELARL COTESSAT-[R]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Michel DESILETS de la SCP DESILETS ROBBE ROQUEL, avocat au barreau de VILLEFRANCHE-SUR-SAONE

INTIMEE :

Mme [C] [O] épouse [E]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Laurent LIGIER de la SCP ELISABETH LIGIER DE MAUROY & LAURENT LIGIER AVOUÉS ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON, toque : 1983

******

Date de clôture de l'instruction : 14 Avril 2020

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 06 Octobre 2020

Date de mise à disposition : 19 Novembre 2020

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Dominique BOISSELET, président

- Evelyne ALLAIS, conseiller

- Magali DELABY, conseiller

assistés pendant les débats de Sylvie GIREL, greffier

A l'audience, Magali DELABY a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Dominique BOISSELET, président, et par Sylvie GIREL, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

FAITS, PROCEDURE ET DEMANDES DES PARTIES

En vertu d'un contrat à durée indéterminée en date du 22 mai 2012, Madame [C] [E] exerçait à compter du 1er juin 2012 en qualité de directrice de cabinet auprès de Maître [S] [R], avocat, au sein de la Selarl Cotessat-[R] située à [Adresse 6].

Par courrier du 3 octobre 2018, son employeur lui notifiait une convocation à un entretien préalable à son licenciement avec mise à pied conservatoire. Madame [E] saisissait alors le conseil des Prud'hommes de Chalon-sur-Saône d'une demande de résiliation judiciaire aux torts de l'employeur.

Le 8 novembre 2018, une transaction était signée entre les parties prévoyant une rupture conventionnelle du contrat de travail de Madame [E] à compter du 31 janvier 2019. Les parties s'accordaient également sur le point que la transaction serait homologuée par le Conseil de Prud'hommes de Chalon sur Saône. C'est ainsi que le 23 novembre 2018, un procès-verbal de conciliation intervenait devant le bureau de conciliation et d'orientation dudit conseil de Prud'hommes.

Les parties convenaient d'une rupture conventionnelle du contrat de travail de Madame [E] à compter du 31 janvier 2019. Cette dernière était dispensée de travailler pour les mois de novembre 2018, décembre 2018 et janvier 2019. Par ailleurs, l'employeur prenait à sa charge les frais des deux avocats de Madame [E] à hauteur de 960 euros pour l'un et 3.000 euros pour l'autre. La Selarl Cotessat-[R] s'engageait également à régler à Madame [E] :

le salaire du mois d'octobre 2018 sous déduction des IJSS perçues

les mois de novembre 2018, décembre 2018 et janvier 2019 rémunérés à la période de paiement mensuel des salaires étant précisé que durant cette période de trois mois, étaient payés par tiers les jours de congés et ses commissions sur les ventes réalisées grâce à son intervention

le 13ème mois à verser sur le mois de décembre 2018

une indemnité forfaitaire et transactionnelle à titre de dommages et intérêts compensant le préjudice subi et versée de manière échelonnée :

* une somme de 25.000 euros le 30/11/18

*une somme de 25.000 euros le 30/12/18

* puis 48 mensualités de 2.639 euros pendant 4 ans à régler par virement du 5/02/19 au 5/01/23.

En outre, le contrat de travail était revalorisé au coefficient 560 pour les 12 derniers mois de salaire avec paiement du salaire afférent, ce coût étant payé par tiers les mois de novembre 2018, décembre 2018 et janvier 2019. Enfin, l'employeur et Madame [E] s'engageaient à la confidentialité totale sur les termes de l'accord, à la bienveillance la plus absolue et à l'absence de toute plainte pénale ou toute dénonciation l'un vis-à-vis de l'autre.

* * * * *

Par acte d'huissier du 14 mars 2019 dénoncé le 21 mars 2019, Madame [E] faisait pratiquer sur le fondement de ce procès-verbal de conciliation une saisie-attribution des avoirs de la Selarl Cotessat-[R] entre les mains de la Banque Rhône-Alpes pour la somme de 34.905,51 euros ainsi décomposée :

31.864,34 euros intitulé 'Salaire Net janvier 2019 selon fiche de paie'

2.639 euros intitulé ' forfait transactionnel. Mensualité janvier 2019'

87,77 euros intitulé 'signification du 11 mars 2019'

314,40 euros intitulé 'le coût du présent acte'.

Suivant exploit d'huissier en date du 10 avril 2019, la Selarl Cotessat-[R] faisait assigner Madame [E] devant le juge de l'exécution de Villefranche sur Saône aux fins d'obtenir la mainlevée de cette saisie attribution.

L'audience se tenait le 25 juin 2019 et par jugement avant dire droit en date du 27 août 2019, le juge de l'exécution constatait la régularité de la procédure de contestation de la saisie-attribution introduite par la Selarl Cotessat-[R], ordonnait la réouverture des débats et invitait Madame [E] à produire le procès-verbal de conciliation du 23 novembre 2018 revêtu de la formule exécutoire et une fiche de paie du mois de janvier 2019. Une nouvelle audience se tenait le 24 septembre 2019.

Par jugement du 29 novembre 2019, le juge de l'exécution de Villefranche sur Saône ordonnait :

-le maintien des effets du procès-verbal de saisie-attribution du 14/03/2019 pratiquée sur les comptes bancaires de la Selarl Cotessat-[R] ouverts au sein de la Banque Rhône Alpes sur le fondement du procès-verbal de conciliation devant le Bureau de conciliation du conseil de prud'hommes de Chalon-sur-Saône en date du 23 novembre 2018 à hauteur de la somme de 11.703,34 euros,

-la mainlevée de la dite saisie pour le surplus.

Sur la question de la qualité de titre exécutoire du procès-verbal de conciliation,le juge considérait en effet qu'au regard de l'article L.111-3 du Code des procédures civiles d'exécution, le titre sur lequel se fondait Madame [E] à savoir un procès-verbal de conciliation signé devant le Bureau de conciliation et d'orientation du Conseil des Prud'hommes de Chalon-sur-Saône le 23 novembre 2018 constituait un titre exécutoire qui était en outre revêtu de la formule exécutoire comme en justifiait Madame [E]. Le juge relevait que si la Selarl Cotessat-[R] justifiait avoir saisi le Conseil de prud'hommes en nullité de la transaction constatée dans ce procès-verbal, aucune décision de justice n'était intervenue au jour du jugement de sorte que le procès-verbal de conciliation conservait sa force exécutoire.

Sur les sommes saisies, le juge notait que la Selarl Cotessat-[R] avait payé à Madame [E] les sommes dues au titre des salaires, congés payés, commissions sur vente et 13ème mois ainsi que les sommes dues au titre de l'indemnité transactionnelle, pour les mois de novembre et décembre 2018. Il retenait que Madame [E] avait fait pratiquer une saisie-attribution au titre des salaires dus au mois de janvier selon une fiche de paie qu'elle produisait ainsi qu'au titre de l'indemnité transactionnelle du mois de janvier 2019.

Le juge estimait que l'indemnité de rupture conventionnelle à hauteur de 22.800 euros telle qu'elle résultait de la fiche de paie produite n'était pas exigible à la date du procès-verbal de saisie. Il prenait dès lors uniquement en compte deux sommes exigibles à cette date pour un total de 11.703,34 euros ainsi décomposé :

-la somme de 2.639 euros, échéance exigible au 5/02/19 que le juge disait prévu au procès-verbal de conciliation

-et la somme de 9.064,34 euros correspondant aux sommes dues au titre des salaires, congés payés, commissions sur vente et 13ème mois calculées après impôts.

Enfin, le juge de l'exécution :

-rejetait la demande de dommages et intérêts à l'encontre de Madame [E] pour procédure abusive dans la mesure où la saisie était partiellement justifiée,

-rejetait les demandes reconventionnelles de Madame [E] d'exigibilité immédiate de l'indemnité transactionnelle et de dommages et intérêts ne s'estimant pas compétent en ces matières,

-condamnait Madame [E] à payer à la Selarl Cotessat-[R] la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens,

-rappelait que le jugement bénéficiait de l'exécution provisoire de droit.

Par déclaration en date du 11 décembre 2019, la SELARL Cotessat [R] interjetait appel de la décision du 29 novembre 2019.

* * * * *

Dans ses dernières conclusions du 15 avril 2020, au visa des articles L.211-1 et R.211-10 et suivants du Code des procédures civiles d'exécution, la Selarl Cotessat [R] sollicite :

à titre principal :

-de déclarer recevable et bien fondée la contestation à saisie-attribution

-de constater la caducité du procès-verbal de transaction du 23/11/2018 pour non respect de I'articIe 1er et de |'articIe 5 qui étaient des éléments essentiels du consentement des parties (article 1186 du code civiI);

L'appelant précise que le 1er février 2019, Madame [E] a repris son poste de travail contre la volonté de son employeur et que cela a été constaté par huissier suivant procès-verbal du même jour. Il a engagé une procédure pour faute lourde et Madame [E] a été licenciée pour ce motif le 22 février 2019 ce qui a entraîné la rupture définitive du contrat de travail sans indemnité.

Madame [E] ne peut donc demander l'exécution forcée d'une transaction qu'elle n'a pas respectée car :

-la rupture conventionnelle du 31/01/19 n'est pas intervenue alors que c'était la base de la transaction (article 1er du procès-verbal)

-son comportement a violé l'article 5 du procès-verbal de conciliation prévoyant que les parties s'engageaient à une bienveillance la plus absolue.

subsidiairement :

-de dire bien fondé l'employeur à soulever l'exception d'inexécution au regard des articles 1217 et 1219 du code civil

très subsidiairement :

-de constater que le procès-verbal du 23/11/2018 ne constate aucune créance liquide et exigible que ce soit au titre du salaire de janvier 2019 ou au titre d'un forfait transactionnel, mensualité janvier 2019 et que les conditions prévues par l'article L 211-1 du code des procédures civiles d'exécution ne sont pas réunies.

La Selarl Cotessat-[R] soutient que la lecture du procès-verbal de conciliation permet de constater qu'il n'y a aucun montant identifiable concernant le salaire de janvier 2019 et que la somme de 31.864,34 euros visée dans le procès-verbal de saisie-attribution n'est pas mentionnée dans le procès-verbal de conciliation.

De même, le procès-verbal de conciliation ne prévoit aucun forfait transactionnel mensualité janvier 2019.

Elle précise que le bulletin de salaire de janvier 2019 transmis au juge par Madame [E] est une simulation dérobée par celle-ci et qui n'a jamais été validée par l'employeur. L'appelante ajoute que le seul bulletin de salaire valable de janvier 2019 est celui adressé le 8 février 2019 pour un montant de 26,63 euros dont la salariée a reçu paiement par compensation.

à titre infiniment subsidiairement :

-de constater que le salaire de janvier 2019 d'un montant de 26,63 euros a été payé et que l'action en annulation du titre suspend sa force exécutoire.

La Selarl Cotessat-[R] demande en conséquence à la Cour :

-de réformer le jugement du 29 novembre 2019 du juge de l'exécution de Villefranche sur Saone,

-de prononcer la mainlevée totale de la saisie-attribution,

-de condamner Madame [E] à lui payer :

* la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive

* la somme de 3.000 euros pour frais irrépétibles en cause d'appel sur le fondement de l'artic|e 700 du code de procédure civile

-de déclarer irrecevable l'appel incident de Mme [E] et subsidiairement de la débouter de toutes ses réclamations

-de condamner Madame [E] aux entiers dépens de la procédure d'appe|, dans lesquels seront compris les frais de la procédure de saisie- attribution.

* * * * *

Par conclusions du 3 février 2020, Madame [C] [E] explique que le procès-verbal de conciliation signé entre les parties et homologué par les juges prud'homaux et le greffier a force exécutoire. Elle affirme l'avoir parfaitement exécuté dès lors qu'elle n'a fait qu'attendre des décomptes réguliers pour ses commissions de transactions immobilières et une lettre de recommandation. Quand tous les éléments ont été réunis, la Direccte a procédé à l'homologation de la rupture conventionnelle le 2 avril 2019. Le procès-verbal de conciliation doit donc recevoir application.

Madame [E] souhaite que la Cour déclare la Selarl [R] mal fondée en son appel et l'en déboute et qu'elle constate la force exécutoire du procès-verbal de conciliation totale signé devant le Conseil de prud'hommes de Chalon sur Saône du 23 Novembre 2018.

Elle estime que le juge a fait une exacte application du protocole en indiquant que toutes les sommes salariales prévues au bulletin de paie de janvier 2019 sont dues et exigibles. Elle demande donc à la Cour :

-de constater le défaut de paiement des 12 premières échéances du protocole

-de prononcer l'exigibilité immédiate des 48 échéances de 2.639 euros soit la somme de 126.672 euros.

De plus, Madame [E] précise que l'indemnité de rupture est expressément prévue sur le bulletin de paie de janvier 2019 pour un montant de 22.800 euros. Elle estime que le juge ne peut l'en priver même si la rupture a eu lieu le 2 avril 2019 dans la mesure où aucune date limite de signature à peine de déchéance de ce droit n'a été validée. Dès lors, Madame [E] demande à la Cour :

-de réformer le jugement en ce qu'il a indiqué que l'indemnité conventionnelle de licenciement de Madame [E] n'était pas exigible faute d'homologation avant le 31 janvier 2019

-de valider la saisie pour la somme de 22.800 euros de l'indemnité de rupture conventionnelle

-de condamner la Selarl [R] au paiement :

* de la somme de 10.000 euros de dommages intérêts pour résistance abusive

* de la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

* de tous les dépens de première instance et d'appel avec distraction pour ces derniers au profit de la SCP Ligier avocat.

Il est expressément renvoyé aux dernières conclusions déposées par les parties pour l'exposé exhaustif de leurs moyens et prétentions.

Par ordonnance du 13 décembre 2019, le Président de la chambre, faisant application des dispositions des articles 905 du code de procédure civile et R.121-20 alinéa 2 du code des procédures civiles d'exécution, a fixé l'examen de l'affaire à l'audience du 14 avril 2020 à 13 heures 30. Cette audience n'a pu se tenir en raison de l'état d'urgence sanitaire lié à la période de confinement. Madame [E] souhaitant que son dossier soit plaidé, l'affaire a fait l'objet d'un renvoi à l'audience du 6 octobre 2020. La décision a été mise en délibéré au 12 novembre 2020 et prorogé à ce jour.

MOTIFS

Sur la demande aux fins de caducité du procès-verbal de transaction du 23 novembre 2018 :

L'article L.211-1 du code des procédures civiles d'exécution précise que tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, pour en obtenir le paiement, saisir entre les mains d'un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d'argent, sous réserve des dispositions particulières à la saisie des rémunérations prévue par le Code du travail. L'article L.111-3 3° du même code reconnait la qualité de titre exécutoire les extraits de procès-verbaux de conciliation signés par le juge et les parties.

En l'espèce, par acte d'huissier du 14 mars 2019 dénoncé le 21 mars 2019, Madame [E] a fait pratiquer une saisie-attribution des avoirs de la Selarl Cotessat-[R] entre les mains de la Banque Rhône-Alpes pour la somme de 34.905,51 euros sur le fondement d'un procès verbal de conciliation signé devant le Bureau de conciliation et d'orientation du Conseil de Prud'hommes de Chalon-sur-Saône le 23 novembre 2018. Ce document a été signé par les parties en présence de Madame [E] et de Monsieur [S] [R] représentant la Selarl Cotessat-[R], ainsi que par le président du bureau de conciliation et le greffier.

Cependant, il résulte des dispositions combinées des articles L.1237-12, L.1237-13 et L.1237-14 du code du travail que lorsque les parties au contrat conviennent du principe d'une rupture conventionnelle, la convention de rupture définit les conditions de celle-ci, notamment le montant de l'indemnité spécifique de rupture conventionnelle et la date de rupture du contrat de travail qui ne peut intervenir avant le lendemain du jour de l'homologation. A compter de la date de sa signature par les deux parties, chacune d'entre elles dispose d'un délai de quinze jours calendaires pour exercer son droit de rétractation. A l'issue du délai de rétractation, la partie la plus diligente adresse une demande d'homologation à l'autorité administrative avec un exemplaire de la convention de rupture. L'autorité administrative dispose d'un délai d'instruction de quinze jours ouvrables, à compter de la réception de la demande, pour s'assurer notamment de la liberté de consentement des parties. La validité de la convention est subordonnée à son homologation.

En l'espèce, il résulte d'un courrier de la Direction Régionale des Entreprises, de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de l'Emploi de Bourgogne-Franche-Comté (DIRECCTE) que cette autorité administrative a reçu le 2 avril 2019 la demande d'homologation de la rupture conventionnelle entre Madame [E] et la Selarl Cotessat-[R]. Elle précise que l'homologation est intervenue le jour même soit le 2 avril 2019 et rappelle que 'le contrat de travail ne doit pas être rompu avant, au plus tôt, le lendemain du jour de l'homologation' soit en conséquence le 3 avril 2019.

Force est donc de constater que contrairement à ce qui est indiqué dans l'article 1er du procès verbal de conciliation qui fixe la rupture du contrat de travail au 31 janvier 2019, cette rupture n'est réellement intervenue que le 3 avril 2019.

D'ailleurs, les deux parties l'ont manifestement admis puisque :

-d'une part, la Selarl Cotessat-[R] a convoqué Madame [E] le 14 février 2019 pour un entretien préalable à son licenciement pour faute lourde et lui a notifié ce licenciement le 22 février 2019,

-d'autre part, Madame [E] a repris son poste au sein de la Selarl Cotessat-[R] le 1er février 2019 comme l'a constaté un procès-verbal de constat d'huissier rédigé le même jour par Maître [X] [P], huissier de justice à [Localité 7].

L'article 1186 al.1er du code civil prévoit qu'un contrat valablement formé devient caduc si l'un de ses éléments essentiels disparaît. Le protocole d'accord, dont la rupture conventionnelle du contrat de travail entre Madame [E] et la Selarl Cotessat-[R] était un élément déterminant, est caduc.

L'article 1187 du même code précise que la caducité met fin au contrat. Il s'en suit que le procès-verbal de conciliation du 23 novembre 2018 ne constitue pas un titre exécutoire de nature à permettre à Madame [E] de procéder à une saisie des rémunérations. En conséquence, la Cour, constatant la caducité du procès-verbal de conciliation signé par les parties le 23 novembre 2018, infirme le jugement du 29 novembre 2019 et ordonne la mainlevée de la saisie attribution pratiquée.

Sur la demande de dommages et intérêts :

L'article L.121-2 code des procédures civiles d'exécution dispose que le juge de l'exécution a le pouvoir d'ordonner la mainlevée de toute mesure inutile ou abusive et de condamner le créancier à des dommages-intérêts en cas d'abus de saisie.

La Selarl Cotessat-[R] ne démontre pas l'existence d'un préjudice spécifique causé par la procédure de saisie-attribution mise en oeuvre par Madame [E]. Elle sera donc déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

Sur les demandes reconventionnelles d'exigibilité immédiate de l'indemnité transactionnelle et de dommages et intérêts :

C'est à bon droit que le juge de |'exécution de Villefranche sur Saône a relevé qu'il n'est pas compétent pour prononcer l'exigibilité immédiate d'une créance échelonnée. ll n'est pas non plus compétent pour allouer des dommages et intérêts au titre d'une résistance abusive à exécuter une obligation de paiement. Madame [E] sera donc déboutée de ses demandes reconventionnelles.

Sur les demandes accessoires :

Madame [E], partie perdante, supporte les dépens de première instance et d'appel. Elle conserve la charge des frais irrépétibles qu'elle a exposés et doit indemniser la Selarl Cotessat-[R] de ses propres frais à concurrence de 2.200 euros, en sus de l'indemnité allouée par le premier juge.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Réforme le jugement prononcé le 29 novembre 2019 par le juge de l'exécution du tribunal d'instance de Villefranche-sur-Saône, sauf en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens,

Statuant à nouveau,

Constate la caducité du procès-verbal de conciliation passé devant le Bureau de conciliation du conseil de prud'hommes de Chalon-sur-Saône en date du 23 novembre 2018,

Ordonne la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée par acte de Maître [T], huissier de justice à [Localité 5] du 14 mars 2019 sur les avoirs de la Selarl Cotessat-[R] à hauteur de la somme de 34.905,51 euros,

Déboute la Selarl Cotessat-[R] de sa demande en dommages et intérêts,

Déboute Madame [E] de ses demandes reconventionnelles,

Condamne Madame [E] aux dépens d'appel,

Condamne Madame [E] à payer à la Selarl Cotessat-[R] la somme de 2.200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19/08475
Date de la décision : 19/11/2020

Références :

Cour d'appel de Lyon 06, arrêt n°19/08475 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-11-19;19.08475 ?
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