N° RG 16/08269 - N° Portalis DBVX-V-B7A-KVW2
Décision du
Juge de l'exécution de BOURG EN BRESSE
Au fond
du 10 novembre 2016
RG : 16/01804
ch n°
SA UFI I GENEVE
C/
[W]
Société [I] et ODOBERT
Société ETAT DE GENEVE
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
6ème Chambre
ARRET DU 05 Novembre 2020
APPELANTE :
SA UFI I
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LAFFLY & ASSOCIES - LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938
assisté de Me FAUCK, avocat au barreau de l'AIN
INTIMES :
M. [V] [W]
né le [Date naissance 5] 1955 à [Localité 9] (Danemark)
[Adresse 8]
[Localité 3] (Suisse)
Représenté par Me Philippe NOUVELLET de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475
assisté de Me Luc PAROVEL, avocat au barreau de l'AIN
SCP CORDIER et ODOBERT
[Adresse 6]
[Localité 1]
Représentée par Me Vincent DE FOURCROY de la SELARL DE FOURCROY AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 1102
ETAT DE GENEVE
[Adresse 7]
[Localité 2]
défaillante
******
Date de clôture de l'instruction : 06 octobre 2020
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 06 Octobre 2020
Date de mise à disposition : 05 Novembre 2020
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
- Dominique BOISSELET, président
- Evelyne ALLAIS, conseiller
- Magali DELABY, conseiller
assistés pendant les débats de Sylvie GIREL, greffier
A l'audience, Dominique BOISSELET a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.
Arrêt Réputé contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Dominique BOISSELET, président, et par Sylvie GIREL, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS, PROCÉDURE ET DEMANDES DES PARTIES
[V] [W], [Y] [L], sa soeur, et [D] [W], son frère, ont des intérêts dans la société de droit suisse UFI I SA Genève (la société UFI), qui exerce une activité de gestion d'immeubles et qui est propriétaire d'immeubles locatifs à Genève (Suisse).
A la suite d'un contrôle fiscal faisant ressortir le paiement par [V] [W] de dépenses personnelles sur les fonds de la société, les associés sont entrés en conflit et diverses procédures civiles et pénales ont été intentées devant les juridictions suisses depuis 2004.
La société UFI s'estimait ainsi spoliée pour environ 1.000.000 francs suisses (CHF), soit environ 920.000 euros, intérêts et frais de justice compris.
Le 11 août 2004, la société UFI a obtenu de l'autorité judiciaire suisse le séquestre des 183 actions de cette société détenues par [V] [W]. (séquestre n°04 233342 R).
***
Par ordonnance du 4 février 2010, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Bourg en Bresse a autorisé la societé UFI à faire saisir à titre conservatoire la somme de 700.000 euros entre les mains de Me [J] [I], notaire à [Localité 1] (Ain), sur la part devant revenir à [V] [W] sur le produit de la vente d'un bien immobilier.
La société UFI a fait procéder à la saisie conservatoire entre les mains de la SCP [I] Odobert par acte d'huissier de justice du 9 février 2010.
La saisie a été dénoncée à M. [W] par acte d'huissier de justice du 10 février 2010.
Par jugement du 2 décembre 2010, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Bourg en Bresse a débouté M. [W] de ses contestations de la saisie conservatoire et l'a condamné à verser à la société UFI la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et l'a condamné aux dépens.
***
Par jugement du 7 mai 2013, le tribunal de première instance de Genève a notamment condamné M. [W] à verser à la société UFI les sommes de
10.800 CHF outre intérêts à 5 % dès le 10 juin 2004,
152.708,65 CHF outre intérêts à 5 % dès le 17 juin 2004,
261.619,88 CHF outre intérêts des le 17 juin 2004,
3.445 CHF outre intérêts à 5 % des le 10 février 2006,
ainsi que la somme de 10.000 CHF au titre de la participation aux honoraires d'avocat de la société UFI.
Par arrêt du 23 mai 2014, la Cour de justice de Genève a notamment :
- déclaré recevables les appels de la société UFI et de M. [W] contre le jugement rendu le 7 mai 2013,
- annulé les chefs 3 et 4 de ce jugement et statuant à nouveau,
- déclaré irrecevables les conclusions en [paiement de] 39.466 CHF liées au contrat de bail à loyer portant sur les locaux sis à [Adresse 10] ;
- transmis la cause à la Commission de conciliation en matière de baux et loyers pour raison de compétence ;
- condamné M. [W] à verser à la société UFI la somme de 22.044 CHF plus intérêts à 5 % dès le 10 février 2006 ;
- prononcé la mainlevée définitive de l'opposition formée au commandement de payer, poursuite n°04 233342 R, à concurrence de :
- 10.800 CHF plus intérêts à 5 % dès le 10 juin 2004,
- 152.708,65 CHF plus intérêts à 5 % dès le 17 juin 2004
- et 261.619,88 CHF plus intérêts à 5 % dès le 17 juin 2004 ;
- validé le séquestre n° 04 070246 U exécuté le 11 août 2005 à concurrence de ces mêmes montants ;
- condamné M. [W] aux deux tiers des dépens de première instance de la societe UFI, qui comprennent une indemnité de procédure de 43.350 CHF, déduction d'un tiers déjà opérée, valant participation aux honoraires d'avocat de la societe UFI ;
- condamné la société UFI au tiers des dépens de première instance de M. [W] qui comprennent une indemnité de procédure de 15.000 CHF, déduction de deux tiers déjà opérée, valent participation aux honoraires d'avocat de M. [W] ;
- confirmé le jugement pour le surplus.
Par arrêt du 14 octobre 2014, le Tribunal fédéral suisse a rejeté le recours présenté par M. [W] contre l'arrêt du 23 mai 2014.
***
La cause transmise à la Commission de conciliation en matière de baux et loyers a donné lieu à un arrêt de la Cour de justice de Genève du 23 mai 2016 (Chambre des Baux et Loyers), qui a confirmé un jugement du tribunal des baux et loyers du 6 juillet 2015 condamnant [V] [W] à payer à la société UFI la somme de 39.466 CHF plus intérêts au taux de 5 % l'an dès le 31 mars 2005.
Cet arrêt est passé en force de chose jugée selon certificat du 15 septembre 2016.
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A la suite de la validation du séquestre par l'arrêt du 23 mai 2014, les actions détenues par [V] [W] dans la société UFI ont fait l'objet d'une vente aux enchères forcées le 24 octobre 2017 par l'Office des poursuites de Genève, pour le prix de 90.000 CHF.
Au préalable, [V] [W] avait contesté le procès-verbal d'estimation et de fixation des conditions de vente établi le 23 février 2017 par l'Office des poursuites.
Sa plainte a été rejetée le 3 août 2017 par la Chambre de surveillance des Offices de poursuite et faillites de la Cour de justice de Genève.
Le recours formé par [V] [W] contre cette décision a été rejeté par arrêt du 11 janvier 2018 du Tribunal fédéral suisse.
La contestation de l'adjudication par [V] [W] a été rejetée par décision du 3 mai 2018 de la Chambre de surveillance des Offices de poursuite et faillites de la Cour de justice de Genève.
Le recours formé par [V] [W] contre cette décision a été déclaré irrecevable par arrêt du Tribunal fédéral suisse du 31 mai 2018.
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Sur requête déposée au greffe le 17 mai 2016, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Bourg en Bresse a, par ordonnance du 20 mai 2016, autorisé [V] [W] à assigner la société UFI, l'Etat de Genève et la SCP de notaires [I] Odobert (devenue [I] [J] et Odobert) à l'audience du 9 juin 2016.
Par actes d'huissíers de justice du 26 mai 2016, [V] [W] a fait assigner la société UFI, l'Etat de Genève et la SCP [I] Odobert devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Bourg en Bresse aux fins de voir :
- ordonner à la SCP Cordier Vincent et Odobert de se libérer des sommes saisies entre ses mains à la requête de la société UFI et d'adresser l'équivalent en euros de la somme de 676.035,35 CHF à l'Office des poursuites du canton de Genève, outre éventuellement et jusqu'à concurrence de la somme de 700.000 euros saisie, les intérêts et frais décomptés par l'Office des poursuites à la date où sera rendu le jugement à intervenir,
- dire opposable le jugement à intervenir à la société UFI et à l'Etat de Genève représenté par son Office des poursuites,
- condamner la société UFI à payer et porter à M. [W] l'équivalent en euros de la somme de 248.080,10 CHF, montant des intérêts et frais courus entre l'offre de règlement présentée par Me [P] [B] à Me [R] [S] le 20 novembre 2014 et le montant actualisé au 29 février 2016 réclamé par l'Office des poursuites, ainsi que toute majoration des sommes dues en intérêts et frais qui auront couru jusqu'à la décision à intervenir,
- condamner la société UFI à payer et porter à M. [W] la somme de 42.613,34 euros au titre des pertes de change supportées au 29 février 2016, outre mémoire à la date de libération des sommes saisies et sequestrées et qui seront remises entre les mains de I'Office des poursuites de Genève,
- condamner la société UFI à payer et porter à M. [W] la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société UFI en tous les dépens.
Par jugement en date du 10 novembre 2016, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Bourg en Bresse a :
- constaté la régularité de la procédure,
- dit que la juridiction française est compétente pour connaître du litige,
- dit que la loi française est applicable au litige,
- rejeté l'exception de nullité de l'assignation soulevée par la société UFI,
- débouté [V] [W] de sa demande tendant à ordonner à [I] [J] et Odobert de se libérer des sommes saisies entre ses mains et d'adresser l'équivalent en euros de la somme de 687.727,35 CHF à l'Office des poursuites du canton de Genève, outre intérêts et frais actualisés,
- dit que le refus de la société UFI de procéder à la conversion de la saisie conservatoire en saisie attribution sur le fondement de l'arrêt de la cour de justice de Genève du 23 mai 2014 est fautif,
- condamné la société UFI à payer à [V] [W] la somme correspondant au montant des intérêts échus sur les sommes dues en principal entre le 20 novembre 2014 et la date de prononcé du jugement, ainsi que les frais exposés pendant la même période,
- condamné la société UFI à payer à [V] [W] la somme de 37.734,12 euros au titre de la perte de change sur les sommes dues en capital, arrêtée au 29 février 2016,
- condamné la société UFI à payer à [V] [W] la somme correspondant à la perte de change, arrêtée au 29 février 2016, sur les intérêts échus au 20 novembre 2014, sur la base d'un taux de change d'1 CHF = 0,83196 euro au 20 novembre 2014 et d'1 CHF = 0,92051 euro au 29 février 2016,
- débouté la société UFI de sa demande reconventionnelle de dommages-intérêts pour procédure abusive,
- déclaré ce jugement opposable à l'Etat de Genève,
- dit n'y avoir lieu de prononcer l'exécution provisoire du jugement,
- débouté les parties de leurs demandes d'indemnité judiciaire,
- laissé à chaque partie la charge de ses propres dépens,
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
La société UFI I Genève a relevé appel de cette décision par déclaration reçue au greffe de la Cour le 23 novembre 2016.
Dans le cadre de la procédure d'appel, [V] [W] a formé une demande reconventionnelle nouvelle visant à l'indemnisation, à hauteur de 1.838.783,00 CHF, du préjudice qu'il estime avoir subi du fait de la vente forcée de ses titres le 24 octobre 2017 par l'Office des poursuites de Genève.
Par arrêt du 28 février 2019, auquel il convient de se reporter pour l'exposé de ses motifs, la Cour de céans a :
- rejeté la fin de non recevoir soulevée par la SA UFI I Genève au titre du non respect du contradictoire,
- réformé le jugement prononcé le 10 novembre 2016 par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Lyon en ce qu'il a :
- condamné la société UFI I Genève à payer à [V] [W] la somme correspondant au montant des intérêts échus sur les sommes dues en principal entre le 20 novembre 2014 et la date de prononcé du jugement, ainsi que les frais exposés pendant la même période,
- condamné la société UFI I Genève à payer à [V] [W] la somme de 37.734,12 euros au titre de la perte de change sur les sommes dues en capital, arrêtée au 29 février 2016,
- condamné la société UFI I Genève à payer à [V] [W] la somme correspondant à la perte de change, arrêtée au 29 février 2016, sur les intérêts échus au 20 novembre 2014, sur la base d'un taux de change d'1 CHF = 0,83196 euro au 20 novembre 2014 et d'1 CHF = 0,92051 euro au 29 février 2016,
statuant à nouveau,
- condamné la société UFI I Genève à payer à [V] [W] les intérêts échus sur les sommes dues en principal au titre de l'arrêt de la Cour de justice de Genève du 23 mai 2014, à compter du 15 janvier 2015 jusqu'à la date de l'arrêt,
- condamné la société UFI I Genève à payer à [V] [W] les intérêts échus sur la somme due en principal au titre de l'arrêt de la Cour de justice de Genève (Chambre des Baux et Loyers) du 23 mai 2016, à compter du 24 septembre 2016 jusqu'à la date de l'arrêt,
- dit que ces sommes se compensent de plein droit avec les créances de la société UFI I Genève à l'encontre de [V] [W] au titre des décisions de justice précitées,
- débouté [V] [W] de sa demande indemnitaire au titre de la perte de change,
- confirmé le jugement attaqué en ses autres dispositions,
- déclaré cet arrêt opposable à l'Etat de Genève,
y ajoutant,
avant dire droit sur la demande de [V] [W] en paiement de la somme de 1.838.783,00 CHF au titre de la vente forcée de ses titres,
- ordonné la réouverture des débats,
- invité la SA UFI I Genève et [V] [W] à présenter leurs observations sur la compétence de la présente juridiction,
- mis hors de cause la SCP Cordier Vincent et Odobert pour la suite de la procédure,
- renvoyé l'affaire à l'audience de mise en état du 7 mai 2019 à 9h30,
- condamné [V] [W] à payer à la SCP Cordier Vincent et Odobert les dépens qu'elle a exposés en cause d'appel ainsi que la somme de 1.500 euros au titre de ses frais irrépétibles,
- ordonné un sursis à statuer sur les dépens et frais irrépétibles exposés par la SA UFI I Genève et [V] [W] en appel.
Le 6 septembre 2019, la SA UFI I Genève a fait signifier à la SCP de notaires [I] & Odobert un acte de conversion de saisie conservatoire de créance avec demande de paiement de la somme totale de 683.973,69 euros.
En ses dernières conclusions du 9 mars 2020, la société UFI I Genève demande à la Cour ce qui suit, au visa de la convention de Lugano du 30 octobre 2007 et du Règlement « Rome II » :
- se déclarer incompétente pour statuer sur la demande indemnitaire de M. [W] au titre de la vente forcée de ses titres,
- juger que les juridictions suisses sont seules compétentes et que l'application de la législation suisse s'impose,
subsidiairement et en tout état de cause,
- juger que la vente forcée des titres appartenant à M. [W] était justifiée par l'absence de règlement des diverses créances détenues à son encontre par la société UFI I SA Genève,
- juger que la demande indemnitaire de M. [W] au titre de la vente forcée de ses titres est parfaitement infondée,
en conséquence,
- débouter M. [W] de l'intégralité de ses demandes,
- condamner M. [W] aux entiers dépens d'instance et d'appel, ces derniers distraits au profit de la SELARL Laffly et Associés, Lexavoué Lyon.
Par dernières conclusions du 10 janvier 2020, [V] [W] demande à la Cour de statuer comme suit, en visant notamment la convention de Lugano du 23 octobre 2017 ratifiée par la France et la Suisse, les articles 1240 et 1241 nouveaux du code civil, l'article L.213-6 du code de l'organisation judiciaire,
vu l'inaction délibérée et dans l'intention de nuire de la société UFI I SA Genève quant à la conversion de la saisie conservatoire qu'elIe avait diligentée en saisie-exécution,
vu sa carence fautive persistante démontrant l'intention de nuire,
- se déclarer compétente pour juger de l'entier litige soumis à la Cour et visant l'indemnisation des préjudices subis par M. [W] ;
- rejeter comme injustifié et non fondé l'appel formé par la société UFI I SA Genève ;
- faire droit à l'appel incident formé par M. [W] ;
pour permettre l'exécution en son état actuel de l'arrêt rendu par la cour d'appel de Lyon le 28 février 2019,
- ordonner que la SA UFI I devra justifier et produire entre les mains de la SCP Cordier - Odobert le décompte d'intérêts et frais de ses créances, tel que fixé par l'Office des poursuites de Genève :
- sur les condamnations de l'arrêt de la Cour de justice de Genève du 23 mai 2014 à compter du 15 janvier 2015 jusqu'au 28 février 2019,
- sur les condamnations de l'arrêt de la Cour de justice de Genève du 23 mai 2016 entre le 26 septembre 2016 et le 28 février 2019,
complétant après réouverture des débats arrêt du 28 février 2019,
- se déclarer compétente pour juger du préjudice subi par M. [W] au titre de la vente forcée de ses titres ;
ajoutant à l'arrêt du 28 février 2019,
- condamner la société UFI l SA Genève à payer et porter à M. [W] l'équivalent en euros de la somme de 1.838.783.00 CHF, représentant ses pertes sur vente forcée de ses titres ;
- au regard de l'intention de nuire à nouveau manifestée par UFI l dans sa demande de conversion de saisie conservatoire avant même que la Cour ait statué sur la totalité des préjudices de M. [W] et leur compensation, condamner UFI I à payer et porter en outre à M. [W] la somme de 5.000 euros de dommages et intérêts ;
- ordonner la compensation entre les créances réciproques ;
vu les pertes subies sur la vente forcée des titres de M. [W],
- dire qu'il en ressort pour le moins un solde de 1.261.543,70 euros au cours actuel de 0,918 CHF pour 1 euro, outre éventuelle évolution du taux de change lors du paiement effectif, et outre mémoires à produire sur les intérêts et frais supportés tels qu'ils seront arrêtés par l'Office des poursuites de Genève entre les dates fixées par l'arrêt du 28 février 2019, soit :
- sur les condamnations de l'arrêt de la Cour de Justice de Genève du 23 mai 2014, à compter du 15 janvier 2015 jusqu'au 28 février 2019,
- sur les condamnations prononcées par l'arrêt de la Cour de Justice de Genève du 23 mai 2016 entre le 26 septembre 2016 et le 28 février 2019,
- condamner la société UFI I SA Genève à payer et porter lesdites sommes à M. [W] ;
- dire que les sommes restant dues par la société UFI l à M. [W], aprés compensation, absorbent la saisie conservatoire de 700.000 euros ;
- ordonner en conséquence la main levée totale de ladite saisie autorisée par ordonnance du 2 décembre 2010 du juge de l'exécution de Bourg en Bresse et la libération des fonds séquestrés à l'étude [I] - [J] - Odobert entre les mains de M. [W] ;
- débouter la société UFI l SA Genève de ses demandes en dommages et intérêts pour procédure abusive et en indemnités judiciaires ;
- dire au contraire inéquitable la charge des frais de défense supportés par M. [W] et, réformant sur ce point, condamner la société UFI I SA Genève à payer et porter à M. [W] la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- dire opposable l'arrêt à intervenir à la société UFI I SA Genève, à l'État de Genève représenté par son Office des poursuites, et à la SCP Cordier - Vincent - Odobert ;
- condamner la societé UFI I SA Genève en tous les dépens de première instance et d'appel distraits au profit de la SCP Aguiraud Nouvellet, avocats en la cause.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 juin 2020.
Il est expressément renvoyé aux dernières conclusions des parties pour l'exposé exhaustif de leurs moyens et prétentions.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la demande de M. [W] visant à l'exécution de l'arrêt du 28 février 2019
La demande de M. [W], visant à enjoindre à la SA UFI I Genève de justifier et produire entre les mains de la SCP Cordier - Odobert le décompte de ses intérêts et frais, outre qu'elle est nouvelle en cause d'appel, est irrecevable en ce qu'elle tend à l'exécution de la précédente décision de la Cour de céans.
Sur la demande indemnitaire de M. [W] à raison de la vente forcée de ses titres
En son arrêt précité du 28 février 2019, la Cour de céans a soulevé la question de sa compétence dans les termes suivants :
' Il s'agit d'une demande nouvelle en cause d'appel mais elle est recevable au regard des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile, dès lors qu'elle se fonde sur la survenance d'un fait postérieur au jugement attaqué, à savoir la vente forcée des actions détenues par M. [W] dans la société UFI effectuée le 24 octobre 2017 par l'Office des poursuites de Genève et qu'il est allégué que ce préjudice est consécutif au même fait générateur, à savoir la carence fautive du créancier déjà soumise au premier juge.
Monsieur [W] soutient que cette vente, qui s'est effectuée au profit de sa soeur [Y] [L], adjudicataire, pour un prix dérisoire (90.000 CHF) au regard de la valeur estimée des titres (1.928.783 CHF), n'aurait pas eu lieu si la société UFI s'était fait régler de sa créance par la saisie-attribution des fonds bloqués par la saisie conservatoire, l'Office des poursuites agissant sur la saisine de la société UFI.
Il verse aux débats un rapport d'évaluation de la société UFI, en date du 17 janvier 2017, établi par la fiduciaire Bonnefous & Cie, cabinet d'expertise comptable genevois mandaté par l'Office des poursuites de Genève, estimant la valeur par action à 10.520 euros.
Selon le placard de vente, la vente aux enchères du 24 octobre 2017 a porté sur 4 certificats d'action représentant au total 183 actions, soit une valeur théorique de 183 x 10.520 = 1.925.160 CHF.
Il n'est allégué d'aucun événement particulier de nature à avoir causé la baisse de la valeur des actions entre le 17 janvier 2017, date de l'évaluation, et le 24 octobre 2017, date de la vente. Dans la mesure où celle-ci est intervenue pour le prix de 90.000 CHF, il s'en déduit que M. [W] peut se prétendre lésé de 1.925.160 - 90.000 = 1.835.160 CHF.
Il résulte des termes de l'arrêt rendu le 11 janvier 2018 par le Tribunal Fédéral suisse que la vente est intervenue sur la requête de la société UFI du 30 novembre 2015, laquelle faisait suite à la validation du séquestre des titres par l'arrêt du 23 mai 2014 de la Cour de justice de Genève, confirmé par l'arrêt du 14 octobre 2014 du Tribunal Fédéral suisse.
Il ressort ainsi des diverses décisions de la justice suisse communiquées aux débats que le séquestre suivi de la vente des titres avait pour seul objet le recouvrement de la créance reconnue par l'arrêt du 23 mai 2014 de la Cour de justice de Genève.
En requérant cette vente alors qu'elle pouvait être intégralement réglée de cette créance par la saisie-attribution d'une partie des fonds bloqués dans le cadre de la saisie conservatoire du 9 février 2010, la société UFI aurait commis une faute qui a conduit à la spoliation de [V] [W] de la propriété de ses titres.
Le fait générateur du préjudice allégué serait consécutif à l'inertie de la société UFI quant à l'attribution des fonds saisis en France, d'une part, et à sa requête pour vente des titres auprès de l'Office des poursuites relevant de l'autorité judiciaire suisse, d'autre part.
Sur le premier point, comme il a été dit, la juridiction française a pleine compétence pour apprécier les éléments du litige relatifs à la saisie conservatoire. Mais, sur le second point, se pose la question de la compétence de la juridiction française, dès lors que la vente des titres est intervenue en Suisse, dans le cadre de la procédure suisse, et concerne une société de droit suisse et M. [W], lui-même de nationalités suisse, danoise et israëlienne, selon ses conclusions.
Le principe du respect du contradictoire impose à la Cour de réouvrir les débats afin que les parties présentent leurs observations sur la compétence de la présente juridiction.'
La SA UFI I Genève soutient que la demande indemnitaire de M. [W] est fondée sur sa responsabilité délictuelle et, au regard de l'article 3 de la convention de Lugano du 30 octobre 2007, ressort de la juridiction suisse à raison du lieu du fait dommageable qui serait la vente forcée des titres intervenue à Genève.
Elle ajoute que, même si l'on considère que la compétence devrait se définir par rapport au lieu d'exécution de la décision de vente forcée, selon l'article 22 .5 de la même convention, la juridiction suisse reste seule compétente.
M. [W] répond que la vente forcée de ses titres est la conséquence de l'inaction fautive reprochée à la société UFI I Genève et non le fait générateur du préjudice subi en ce qu'elle a empêché l'apurement de la dette.
Sur ce, il résulte des dispositions combinées des articles 3 et 5.3 de la convention de Lugano que les personnes domiciliées sur le territoire d'un Etat lié par cette convention ne peuvent être attraites devant le tribunal d'un autre Etat en matière délictuelle ou quasi délictuelle que si celui-ci est le lieu du fait dommageable.
Sans qu'il y ait lieu de débattre de la pertinence de l'affirmation selon laquelle la conversion de la saisie conservatoire en saisie-attribution aurait permis l'apurement de la dette et, par conséquent, interdit la vente forcée des titres, la Cour relève que les décisions de la justice suisse versées aux débats font ressortir que la vente aux enchères a nécessairement été tenue sur la requête de la société UFI I Genève.
Le fait dommageable, générateur du préjudice allégué, est donc bien la vente forcée tenue en Suisse, sur la demande de la société UFI I Genève à l'Office des poursuites de Genève.
Par ailleurs, l'article 22.5 de la même convention prévoit que sont seuls compétents en matière d'exécution des décisions, les tribunaux de l'Etat du lieu d'exécution.
Cette vente forcée est en bien intervenue en Suisse, en exécution de décisions de juridictions de ce pays.
En conséquence, la juridiction française n'a aucun chef de compétence pour statuer sur ce litige qui est sans rapport direct avec la mesure de saisie conservatoire débattue devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Bourg en Bresse et la présente Cour.
Il n'y a donc pas lieu de statuer sur les demandes de M. [W] visant à l'indemnisation du préjudice subi par la vente forcée de ses titres, la compensation avec la créance de la société UFI I Genève et la condamnation de celle-ci au paiement du différentiel.
Sur les autres demandes
Les demandes de mainlevée de la saisie-attribution et de libération des fonds séquestrés entre les mains de l'étude [I] - [J] - Odobert sont à la fois irrecevables comme étant nouvelles en cause d'appel et infondées en l'état, à défaut de reconnaissance d'une créance de M. [W] venant en compensation de celle de la société UFI I Genève.
La demande de M. [W] visant à rendre opposable le présent arrêt à l'Etat de Genève est rejetée à défaut de justification de la signification à celui-ci de l'arrêt du 28 février 2019 et des conclusions subséquentes des parties.
Il en va de même pour la demande d'opposabilité à la SCP [I] - [J] - Odobert, dont il est rappelé qu'elle a été mise hors de cause par l'arrêt précité.
Il convient que chaque partie supporte les dépens et les frais irrépétibles qu'elle a exposés.
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Déclare [V] [W] irrecevable en sa demande visant à ordonner que la SA UFI I Genève devra justifier et produire entre les mains de la SCP Cordier - Odobert le décompte d'intérêts et frais de ses créances,
Se déclare incompétente à connaître des demandes de [V] [W] tendant à l'indemnisation du préjudice subi à raison de la vente forcée de ses titres et à la compensation de l'indemnité avec les créances de la SA UFI I Genève à son encontre,
Renvoie [V] [W] à mieux se pourvoir ;
Laisse à chaque partie la charge des dépens et frais irrépétibles qu'elle a exposés en appel ;
Déboute [V] [W] du surplus de ses demandes.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT