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23/06/2020 | FRANCE | N°19/01740

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile b, 23 juin 2020, 19/01740


N° RG 19/01740 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MHWU









Décision du

Tribunal de Grande Instance de BOURG EN BRESSE

Au fond du 24 janvier 2019



RG : 17/01307

chambre civile









[W]

[W]

[W]



C/



[P]





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile B



ARRET DU 23 Juin 2020







APPELANTS :



M.

[Y] [V] [W]

né le [Date naissance 3] 1937 à [Localité 13] (74)

[Adresse 12]

[Adresse 12]

[Localité 9]



Représenté par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocats au barreau de LYON, toque : 475

Assisté de Me François-Philippe GARNIER, avocat au barreau de BONNEVI...

N° RG 19/01740 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MHWU

Décision du

Tribunal de Grande Instance de BOURG EN BRESSE

Au fond du 24 janvier 2019

RG : 17/01307

chambre civile

[W]

[W]

[W]

C/

[P]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRET DU 23 Juin 2020

APPELANTS :

M. [Y] [V] [W]

né le [Date naissance 3] 1937 à [Localité 13] (74)

[Adresse 12]

[Adresse 12]

[Localité 9]

Représenté par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocats au barreau de LYON, toque : 475

Assisté de Me François-Philippe GARNIER, avocat au barreau de BONNEVILLE ET DES PAYS DU MONT BLANC

M. [L] [I] [W]

né le [Date naissance 7] 1967 à [Localité 10] (01)

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représenté par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocats au barreau de LYON, toque : 475

Assisté de Me François-Philippe GARNIER, avocat au barreau de BONNEVILLE ET DES PAYS DU MONT BLANC

M. [T] [H] [W]

né le [Date naissance 6] 1962 à [Localité 10] (01)

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représenté par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocats au barreau de LYON, toque : 475

Assisté de Me François-Philippe GARNIER, avocat au barreau de BONNEVILLE ET DES PAYS DU MONT BLANC

INTIMÉ :

Me [G] [P] notaire associé de la SCP ANDREE [P] ET PATRICE MANDRAN

[Adresse 8]

[Localité 1]

Représenté par la SCP TACHET, AVOCAT, avocats au barreau de LYON, toque : 609

******

Date de clôture de l'instruction : 16 Janvier 2020

Date de mise à disposition : 23 Juin 2020

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Françoise CARRIER, président

- Florence PAPIN, conseiller

- Laurence VALETTE, conseiller

DÉCISION RENDUE SANS AUDIENCE

Vu l'état d'urgence sanitaire, la présente décision est rendue sans audience et en application de l'article 8 de l'ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale ;

La décision est portée à la connaissance des parties par le greffe par tout moyen en application de l'article 10 de l'ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale, tel que précisé par l'article 2.i de la circulaire du 26 mars 2020 CIV/02/20 - C3/DP/202030000319/FC.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées par tout moyen,

Signé par Florence PAPIN, conseiller, faisant fonction de président, en remplacement du président légitimement empêché et par Myriam MEUNIER, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

EXPOSÉ DE L'AFFAIRE

Suivant acte reçu par Maître [Z], notaire à [Localité 11], le 22 novembre 2013 avec la participation de Maître [P], la SNC EDMOND et [Y] [W] et M. [L] [W] ont vendu à la société ICADE PROMOTION deux parcelles de terrain situées sur la commune de [Localité 14] comportant un bâtiment à démolir au prix de 850'000 euros réparti entre M. [W] (246'000 euros.) et la société (604'000 euros).

La société a fait l'objet d'une dissolution anticipée suivant assemblée générale du 31 mars 2014.

Dans le cadre de la déclaration de ses résultats, elle a mentionné plusieurs plus-values dont une plus-value à long terme qu'elle a considérée comme exonérée en raison de la durée de détention.

L'administration fiscale a procédé à la vérification des comptes et déclarations établis pour la période du 1er avril 2013 au 31 mars 2014 et considéré que la société ne pouvait pas se prévaloir de l'exonération prévue par l'article 151 septies B, pour durée de détention dès lors que l'acquisition réalisée par la société ICADE PROMOTION avait été réalisée sous le régime de l'article 1594 - 0 G.

Faisant valoir qu'elle n'aurait pas procédé à la vente de son terrain dans les mêmes conditions si elle avait été informée du montant de la fiscalité accompagnant cette vente, elle a assigné le notaire, Maître [P], devant le tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse aux fins d'indemnisation.

Les anciens associés, Messieurs [Y], [L], et [T] [W], sont intervenus volontairement à la procédure.

Par jugement en date du 24 janvier 2019, le tribunal de grande instance de BOURG EN BRESSE a :

- déclaré irrecevable l'action de la SNC EDMOND et [Y] [W] - AU BELIER,

- déclaré Me [G] [P] responsable du préjudice subi par Messieurs [Y], [L], et [T] [W],

- l'a condamnée à leur payer la somme de 3 000 euros de dommages et intérêts avec capitalisation des intérêts ainsi que la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- l'a condamnée aux dépens.

Messieurs [Y], [L], et [T] [W] ont interjeté appel de cette décision.

Ils demandent à la cour aux termes de leurs conclusions d'infirmer la décision en ce qui concerne le quantum des dommages et intérêts et statuant à nouveau de condamner le notaire à payer à Messieurs [L] et [T] [W] la somme de 30'030 euros chacun à titre de dommages-intérêts augmentés des intérêts au taux légal à compter du 3 mai 2018 date de leur intervention volontaire et à M. [Y] [W] la somme de 85'716 euros à titre de dommages-intérêts augmentés des intérêts au taux légal à compter du 3 mai 2018.

Ils sollicitent également la somme de 9 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que la condamnation du notaire aux dépens recouvrés par leur conseil.

Ils font valoir :

- que la présence de deux notaires ne dispensait pas Maître [P] de son devoir de conseil et que le notaire est tenu d'une indemnité égale au montant de l'imposition acquittée, le préjudice découlant du paiement de l'impôt auquel le contribuable a été tenu,

- qu'ils n'ont reçu aucune information concernant cette fiscalité et ont été privés de la possibilité de renoncer à l'opération, leur préjudice étant entier et non limité à une perte de chance.

Aux termes de ses dernières conclusions, le notaire sollicite que la décision déférée soit infirmée et les appelants principaux déboutés de leurs demandes en l'absence de démonstration d'un manquement de sa part au devoir de conseil attaché à l'acte comme de la perte d'une chance d'avoir pu effectivement échapper aux conséquences de la taxation des plus-values à long terme générées par la cession et d'un préjudice résultant du paiement des intérêts de retard et des pénalités dont était assorti le redressement.

Le notaire sollicite également la condamnation de Messieurs [Y], [L], et [T] [W] aux dépens et à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700.

Le notaire fait valoir que :

- il n'est pas tenu de procéder à l'examen de la situation fiscale de la société venderesse du moment que celle-ci ressort d'une déclaration ultérieure (la déclaration annuelle de résultats après la clôture de l'exercice le 31 mars 2014) qui relève de l'expert-comptable, la société SEGECO, qui a défini la situation de la plus-value au regard des règles applicables,

- cette dernière a établi une note le 28 septembre 2011, avant la signature de la promesse unilatérale de vente, indiquant explicitement que la plus-value à long terme n'était pas taxable en application de l'article 151 du code général des impôts,

- les conséquences fiscales de la plus-value se situent hors du champ du devoir de conseil du notaire,

- la société était engagée par la promesse et ne pouvait plus refuser la vente au regard de la clause d'exécution forcée donc l'argument selon lequel elle aurait pu renoncer à la vente ne repose sur aucun fondement,

- dès lors la perte de chance est inexistante,

- les intérêts de retard ne sont pas un préjudice indemnisable,

- s'agissant des pénalités, elles trouvent leur origine dans la déclaration de résultat et non dans l'acte notarié.

En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile il est expressément renvoyé pour les faits, prétentions et arguments des parties aux conclusions récapitulatives déposées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'étendue de la saisine :

Attendu qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne doit statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif ;

Attendu que ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de

procédure civile les demandes des parties tendant à voir 'constater' ou 'donner acte' et qu'il n'y sera par conséquent pas répondu par la cour ;

Sur le fond :

Attendu que l'ensemble de la mission officielle du notaire agissant soit en vertu de son devoir de conseil, soit en vertu de son devoir d'authentification, se situe dans le contexte général des principes de la responsabilité délictuelle ou quasi délictuelle,

Attendu que le notaire est tenu d'informer et d'éclairer les parties, de manière complète et circonstanciée, sur la portée et les effets, notamment quant aux incidences fiscales, de l'acte auquel il prête son concours,

Attendu que Me [P] ne rapporte pas la preuve d'avoir informé la SNC EDMOND ET [Y] [W] des conséquences fiscales de l'acte litigieux et notamment concernant l'imposition de la plus value, le premier juge ayant retenu à juste titre que l'information figurant à l'acte était très parcellaire et dès lors insuffisante, le notaire ne pouvant s'exonérer de son obligation de conseil au motif que les parties à l'acte avaient un expert comptable,

Attendu que le préjudice consécutif à la faute du notaire au titre du devoir de conseil doit s'analyser en une perte d'une chance,

Attendu que cependant la reconnaissance d'une perte de chance indemnisable suppose que celle-ci soit sérieuse afin de ne pas indemniser un préjudice purement hypothétique.

Attendu qu'il appartient aux appelants de prouver de manière certaine qu'en étant plus amplement informés, ils n'auraient pas contracté, alors qu'ils étaient tenus par la promesse de vente assortie d'une clause d'exécution forcée (page 4),

Attendu que Messieurs [Y], [L], et [T] [W] sont défaillants à rapporter cette preuve,

Attendu que la décision déférée est confirmée en ce qu'elle a retenu que seule la pénalité de 3 752 euros était en lien avec la faute du notaire, et condamné ce dernier à payer à Messieurs [Y], [L], et [T] [W] la somme de 3 000 euros au titre de la perte de chance, de l'ordre de 80%, en effectuant une déclaration conforme, de ne pas payer cette somme à l'administration fiscale,

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

Attendu que Messieurs [Y], [L], et [T] [W] sont condamnés aux dépens de l'appel, et à payer à Me [P] une indemnité de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Confirme en toutes ses dispositions la décision entreprise,

Y ajoutant,

Condamne Messieurs [Y], [L], et [T] [W] à verser à Me [P] une indemnité de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Messieurs [Y], [L], et [T] [W] aux dépens de l'appel qui seront recouvrés par le conseil de la partie adverse conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

Déboute les parties de toutes demandes plus amples ou contraires.

LE GREFFIERPour LA PRÉSIDENTE empêchée


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile b
Numéro d'arrêt : 19/01740
Date de la décision : 23/06/2020

Références :

Cour d'appel de Lyon 1B, arrêt n°19/01740 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-06-23;19.01740 ?
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