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12/05/2020 | FRANCE | N°18/08351

France | France, Cour d'appel de Lyon, Protection sociale, 12 mai 2020, 18/08351


AFFAIRE DU CONTENTIEUX DE LA PROTECTION SOCIALE





RAPPORTEUR





R.G : N° RG 18/08351 - N° Portalis DBVX-V-B7C-MB5Q





[R]



C/

Mutuelle MSA







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LYON

du 06 Novembre 2018

RG : 20172474



















































COUR

D'APPEL DE LYON



Protection sociale



ARRÊT DU 12 MAI 2020













APPELANT :



[G] [R]

[Adresse 1]

[Adresse 1]



comparante en personne, assisté de Monsieur [O], Président de TALESS





INTIMEE :



MSA Ain-Rhône

[Adresse 2]

[Adresse 2]



non comparante









DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 03 Mars 2...

AFFAIRE DU CONTENTIEUX DE LA PROTECTION SOCIALE

RAPPORTEUR

R.G : N° RG 18/08351 - N° Portalis DBVX-V-B7C-MB5Q

[R]

C/

Mutuelle MSA

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LYON

du 06 Novembre 2018

RG : 20172474

COUR D'APPEL DE LYON

Protection sociale

ARRÊT DU 12 MAI 2020

APPELANT :

[G] [R]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

comparante en personne, assisté de Monsieur [O], Président de TALESS

INTIMEE :

MSA Ain-Rhône

[Adresse 2]

[Adresse 2]

non comparante

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 03 Mars 2020

Présidée par Laurence BERTHIER, Conseiller, magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffier

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

- Elizabeth POLLE-SENANEUCH, président

- Laurence BERTHIER, conseiller

- Bénédicte LECHARNY, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Vu l'état d'urgence sanitaire, la décision prorogée est rendue le 12 mai 2020.

La notification du présent arrêt est opérée par tout moyen en application de l'article 10 de l'ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale, tel que précisé par l'article 2.i de la circulaire du 26 mars 2020 CIV/02/20 - C3/DP/2020030000319/FC

Signé par Elizabeth POLLE-SENANEUCH, Président, et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCEDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La Mutualité Sociale Agricole (MSA) Ain-Rhône a adressé à Monsieur [G] [R], trois mises en demeure concernant les cotisations et majorations de retard dues au titre des années 2013, 2014 et 2015, les 23 mai 2014 pour 6 962,68 Euros, le 27 février 2015 pour un montant de 5 441,20 Euros et le 4 mai 2016 pour un montant de 15 521,21 Euros.

Une contrainte a été émise le 16 août 2016 par la MSA et signifiée le 22 août 2016 à Monsieur [R], portant sur la somme de 25 548,58 Euros, correspondant à des cotisations et majorations de retard afférentes aux années 2013, 2014 et 2015.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 1er septembre 2016, Monsieur [R] a fait opposition à cette contrainte devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Lyon.

Par jugement du 6 novembre 2018, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Lyon a :

- Validé la contrainte signifiée le 22 août 2016 pour son entier montant de 25 548,58 Euros, soit 24 184,16 Euros en cotisations et 1 364,42 Euros en majorations retard, afférentes aux années 2013, 2014 et 2015 ;

- Condamné Monsieur [R] au paiement des frais de signification d'un montant de

72,13 Euros ;

- Condamné Monsieur [R] à payer à la MSA Ain-Rhône la somme de 500 Euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Condamné Monsieur [R] à payer la somme de 1 532,91 Euros en application de l'article R.144-10 du code de la sécurité sociale ;

- Débouté Monsieur [R] du surplus de ses demandes.

Monsieur [R] a régulièrement interjeté appel du jugement le 29 novembre 2018.

Par ses dernières conclusions reprises oralement lors de l'audience, il demande à la Cour :

A titre principal, de :

- Débouter la MSA de ses demandes et annuler les mises en demeure et contraintes à son encontre.

- A titre subsidiaire,

- Enjoindre aux caisses AVA, CANAM et ORGANIC de justifier avoir accompli les démarches à leur inscription au registre prévu à l'article L.411-1 du code de la mutualité

- Enjoindre à la MSA de justifier de son immatriculation auprès du conseil supérieur de la mutualité.

A défaut,

- Déclarer la MSA irrecevable à agir.

- Dire que le tribunal des affaires de sécurité sociale est incompétent pour connaître ratione materiae du contentieux relevant du droit de la consommation

- Dire que la MSA n'a aucune existence légale.

- Condamner la MSA à l'intégralité des frais.

- Condamner la MSA à payer la somme de 1 500 Euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ses dernières conclusions reprises oralement lors de l'audience, la MSA demande à la Cour de confirmer le jugement et de condamner Monsieur [R] à lui verser la somme de 2 000 Euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et le débouter de ses demandes.

Oralement, en réponse aux écritures déposées par le syndicat TALESS lors de l'audience, elle demande à la cour de déclarer irrecevables les prétentions du syndicat TALESS, conformément à la jurisprudence de la cour d'appel de Lyon.

Par conclusions déposées lors de l'audience, le syndicat des travailleurs assurés librement en Europe pour leur sécurité sociale (TALESS) indique intervenir volontairement à l'audience à titre principal et il demande à la Cour de :

- Déclarer le syndicat TALESS intervenant volontaire recevable en la forme en son intervention, par application de l'article 68 du Code de procédure civile ;

- Le déclarer recevable, par application des articles 325 et 329, alinéa 2, du Code de procédure civile, comme ayant intérêt et qualité pour agir ;

Et statuant sur le fond de la présente demande, la déclarer bien fondée ;

En conséquence :

'Dire que le syndicat TALESS est ballotté par des décisions contradictoires et incompatibles qui tantôt lui dénient son droit de représenter ses adhérents en justice, tantôt le lui reconnaissent, ce qui est de nature à créer une situation d'insécurité juridique

- Dire qu'en déniant à un syndicat régulièrement enregistré et qui justifie au moyen des actes administratifs qu'il produit et qui lui ont été délivrés, d'être un syndicat, revient à dénier la validité et la légalité de ces actes administratifs dont l'appréciation échappe à la compétence du juge judiciaire qui doit décliner sa compétence en vertu de l'article 81 du code de procédure civile

- Dire que le syndicat TALESS ne peut être écarté des procédures dans lesquelles il intervient pour ses adhérents , sans jamais avoir été attrait en justice, appelé ou entendu et sans bénéficier de son droit à présenter ses observations, moyens et arguments de défense dans le respect du principe de la contradiction

- Dire que le procédé par lequel le syndicat TALESS est ainsi réduit au silence constitue un excès de pouvoir et une violation de l'article 6-1 de la convention européenne des droits de l'homme, lui portant préjudice ainsi qu'à ses adhérents,

- Dire que si le législateur a prévu dans son article R 142-20 du code de la sécurité sociale, le droit pour l'adhérent d'un syndicat d'être représenté par ledit syndicat, ce droit ne peut lui être ôté et aucune disposition légale ne prévoit de lui imposer un défenseur désigné ou une catégorie de défenseurs désignés ce qui attenterait au principe de la liberté de choix d'un défenseur, droit relevant d'une liberté fondamentale consacré par le Conseil constitutionnel et les juridictions supranationales,

- Dire que la juridiction de l'ordre judiciaire doit surseoir à statuer sur la demande initiale dont elle est saisie et interroger son homologue de l'ordre administratif dans le cadre d'une « question préjudicielle» en appréciation de la légalité des actes administratifs concernés.

- Surseoir à statuer sine die, dans l'attente que soit tranchée la question préjudicielle portée devant la juridiction de l'ordre administratif,

- Ordonner la transmission de la procédure à la juridiction compétente'.

*

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens des parties, à leurs conclusions écrites précitées, qu'elles ont fait viser par le greffier lors de l'audience de plaidoiries et qu'elles ont à cette occasion expressément maintenues et soutenues oralement en indiquant n'avoir rien à y ajouter ou retrancher.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'intervention volontaire du syndicat TALESS

Le syndicat TALESS indique intervenir volontairement au litige 'à titre principal'. Il

expose qu'il a été régulièrement créé le 1er octobre 2018 suivant des statuts transmis au procureur de la République et qu'il est formé de travailleurs et d'employeurs défendant le libre choix de ses adhérents de leur régime d'assurance maladie et retraite, dans divers secteurs d'activité professionnelle.

Il rappelle les textes nationaux et internationaux autorisant la constitution de syndicats et assure que ses statuts l'autorisent à représenter en justice ses adhérents en vertu de l'article R.142-20 3° du code de la sécurité sociale. Ainsi son intervention volontaire à titre principal est justifiée et il demande à la cour de surseoir à statuer et d'interroger son homologue de l'ordre administratif dans le cadre d'une question préjudicielle en appréciation de la légalité des actes administratifs ayant validé le syndicat TALESS et de surseoir à statuer dans cette attente.

La MSA oppose oralement l'irrecevabilité de l'intervention et prétentions du syndicat TALESS, en se référant à la jurisprudence de la cour d'appel de Lyon.

*

L'article 66 du code de procédure civile définie l'intervention comme la demande dont l'objet est de rendre un tiers partie au procès engagé entre les parties originaires. Elle est volontaire lorsque la demande émane du tiers. Elle est forcée lorsque le tiers est mis en cause par une partie. Ces deux formes sont régies en appel aux articles 554 et 555 du code de procédure civile.

Pour que l'intervention volontaire soit recevable, deux conditions doivent être remplies. Il faut d'abord que l'intervenant ait la qualité de tiers. Il faut ensuite que son intervention soit justifiée par un intérêt personnel.

Aux termes de l'article 329 du code de procédure civile, l'intervention volontaire est principale lorsqu'elle élève une prétention au profit de celui qui la forme.

En l'espèce, le syndicat TALESS expose en substance dans ses écritures qu'il entend intervenir aux côtés de Monsieur [R] pour assurer sa défense et être reconnu dans ce droit en tant que syndicat.

Toutefois, cette demande ne constitue pas une prétention personnelle au syndicat TALESS qui n'entend pas exercer un droit propre né d'une obligation ou d'un contrat auquel il a été partie.

Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que son intervention volontaire formée à titre principal n'a pas lieu d'être et de mettre par conséquent hors de cause le syndicat TALESS.

Au surplus, il sera observé que la demande de sursis à statuer que formule le syndicat TALESS, dans l'attente d'une décision du juge administratif sur la question de la légalité d'un acte administratif est sans objet puisque cette question de légalité n'est pas posée au litige et ne vise manifestement qu'à en retarder l'issue.

Sur l'assistance de Monsieur [R] par le syndicat Taless

Monsieur [R] a comparu à l'audience assisté de Monsieur [O], président du syndicat TALESS.

La MSA soutient que Monsieur [O], président du syndicat des travailleurs assurés librement en Europe ne peut pas valablement assister ou représenter Monsieur [R] car il n'est ni un travailleur salarié ni un employeur et qu'il ne peut faire valoir un mandat de président du syndicat TALESS, lequel rassemble des personnes qui souhaitent quitter le régime obligatoire de sécurité sociale sans représenter aucune profession.

*

Aux termes de l'article L.142-9 du Code de la sécurité sociale 'les parties peuvent comparaître personnellement ou se faire représenter par :

3° Suivant le cas, un travailleur salarié ou un employeur ou un travailleur indépendant exerçant la même profession ou un représentant qualifié des organisations syndicales de salariés ou d'employeurs'.

La personne qui prétend représenter une partie devant une juridiction de sécurité sociale doit justifier non seulement de sa qualité entrant dans l'énumération limitative de l'article sus-mentionné, mais également, si elle n'est avocat, du mandat spécial qu'elle a reçu.

En l'espèce, Monsieur [R] entend être assisté par Monsieur [O], président du syndicat TALESS. Il ne justifie cependant par aucune pièce d'une qualité d'employeur ou de salarié et ne prétend pas l'être et il peut donc être représenté que par un travailleur indépendant exerçant la même profession.

Le syndicat TALESS qui se présente comme un syndicat des travailleurs assurés librement en Europe pour leur sécurité sociale n'entre donc dans aucune des catégories énumérées à l'article L.142-9 du code de la sécurité sociale et ne peut représenter ou assister Monsieur [R].

Il y a lieu de dire par conséquent que le Syndicat TALESS ne peut ni représenter, ni assister Monsieur [R].

Ce dernier, comparant à l'audience, a néanmoins indiqué s'en remettre à ses conclusions écrites qui doivent donc être retenues en ce qu'elles ne portent pas des demandes présentées par le syndicat TALESS.

Sur la compétence du Tribunal des affaires de sécurité sociale

Monsieur [R] soutient que le litige touche à 'l'existence d'un contrat' qui relève du code de la consommation dont l'examen ressort de la compétence du 'tribunal de grande instance' et non du tribunal des affaires de sécurité sociale qui doit donc décliner sa compétence, en vertu de l'arrêt de la Cour de justice de l'union européenne du 3 octobre 2013 qui a retenu que la directive 2005/29/CE du 11 mai 2005 sur les pratiques commerciales déloyales s'appliquait à un organisme de droit public en charge d'une mission d'intérêt général, directive transposée en droit français par la loi du 3 janvier 2008 dite loi Chatel.

*

Toutefois, il est constant que le recouvrement, selon les règles d'ordre public fixées par le code rural et de la pêche maritime, des cotisations et contributions dues par une personne assujettie à titre obligatoire au régime de protection sociale des travailleurs non salariés agricoles ne revêt pas le caractère d'une pratique commerciale au sens des dispositions de la directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur, et n'entre pas, dès lors, dans le champ d'application de la directive, ce que n'ignore pas Monsieur [R] qui cite lui-même dans ses écritures (en partie) l'arrêt de la Cour de Cassation du 18 juin 2015 (Civ.2e 14-18.049).

Le moyen soulevé est donc inopérant en ce qu'il soutient qu'il résulterait de l'arrêt rendu par la Cour de justice de l'Union européenne le 3 octobre 2013 (C-59/12) que les organismes en charge de la gestion d'un régime de sécurité sociale sont des entreprises entrant dans le champ d'application de la directive 2005/29 et que les affiliés à un régime de sécurité sociale sont des consommateurs, au sens de cette directive, qui, en tant que tels, bénéficient d'une liberté de prestation services active sans être contraints de s'affilier à un régime de sécurité sociale déterminé.

Les considérations complémentaires de Monsieur [R] tenant à la nécessité de souscrire avec la MSA un contrat qui relèverait du code de la consommation sont donc dépourvues de fondement, de même que celles tenant à la compétence du tribunal judiciaire (anciennement tribunal de grande instance) pour examiner le litige.

Sur la capacité à agir de la MSA

Monsieur [R] demande à titre principal que la MSA soit déboutée de ses demandes et pose à titre subsidiaire la question de la capacité à agir de la MSA.

Il soutient que la MSA est une mutuelle régie par le code de la mutualité et qu'elle est donc soumise à une obligation d'immatriculation, en vertu des dispositions de l'article L.111-1 du code de la mutualité, rendues applicables par le fait que la MSA soutient qu'elle n'est ni une entreprise, ni une société civile ou commerciale. Dès lors, faute de justifier d'une inscription des 'caisses initiales' sur le registre national des mutuelles et d'une demande d'immatriculation auprès du secrétaire général du conseil supérieur de la mutualité, la MSA ne dispose pas du droit d'agir, quand bien même seraient produits ses statuts et les décisions d'approbation du Préfet de région.

Partant, les contraintes émises par la MSA sont entachées de nullité de forme et causent un grief pour l'organisation de la défense et le respect du principe de loyauté, selon les articles 648 et 114 du code de procédure civile.

La MSA fait valoir en réponse que les caisses de mutualité sociale agricole au rang desquelles figure la MSA Ain-Rhône sont des organismes privés chargés de la gestion d'un service public, qualité qu'elles tiennent de la loi et reconnue par la Cour de Cassation et le Conseil d'Etat. Elles disposent à ce titre, de plein droit, de la personnalité juridique et peuvent ester en justice. Elles ne peuvent être assimilées à des mutuelles comme le prétend Monsieur [R].

La MSA indique verser aux débats ses statuts et l'arrêté d'approbation de ceux-ci bien qu'elle n'y soit pas tenue.

Elle ajoute que la Cour de Cassation a déjà rappelé que le régime de protection sociale des non salariés des professions agricoles est un statut légal qui ne peut être ni aménagé ni modifié par la volonté des parties et que par ailleurs une jurisprudence constante de la cour de justice des communautés européennes considère que les directives 92/49 et 92/96 du 18 juin 1992 et du 10 novembre 1992 transposées en droit français par l'ordonnance du 19 avril 2001 ne sont pas applicables aux régimes de sécurité sociale obligatoire.

*

Il convient, logiquement, d'examiner en premier lieu la question de la capacité à agir de la caisse.

Le tribunal a exactement rappelé dans son jugement à la lecture duquel il est renvoyé, les termes des articles L. 723-1 et suivants et L.725-2 et suivants du code rural et de la pêche maritime.

Il est constant qu'en vertu de ces dispositions, les organismes de sécurité sociale et de mutualité sociale tirent donc à la fois leur existence, leur capacité juridique et leurs prérogatives des dispositions législatives et réglementaires qui les instituent, ainsi que l'a déjà rappelé la Cour de Cassation.

S'agissant de l'incidence prétendue des dispositions de l'ordonnance n° 2001-350 du 19 avril 2001 portant code de la mutualité et transposant les directives communautaires des 18 juin et 10 novembre 1992 en matière d'assurances, il est constant également que celles-ci ne sont pas applicables aux organismes de sécurité sociale ainsi que la deuxième chambre civile de la Cour de Cassation l'a déjà énoncé dans un arrêt rendu le 6 décembre 2006 confirmé par la suite.

Le jugement doit par conséquent être confirmé en ce qu'il a rejeté le moyen tiré du défaut de capacité et du pouvoir à agir.

*

Monsieur [R] demande à la cour 'd'enjoindre aux caisses AVA, CANAM et ORGANIC de justifier avoir accompli les démarches à leur inscription au registre prévu à l'article L.411-1 du code de la mutualité' (sic). Cette demande est sans fondement et ne concerne pas des parties au litige. Elle sera par conséquent rejetée.

Sur la demande de nullité de la contrainte

Monsieur [R] reprenant les mêmes moyens que précédemment et notamment l'absence de production des statuts de la caisse justifiant de sa personnalité juridique, soutient que la contrainte est affectée d'une nullité de fond.

Il ressort toutefois des motifs qui précèdent que la MSA dispose de la capacité légale à agir en justice.

Il y a lieu d'observer que la MSA a au demeurant communiqué des statuts dès la première instance et que ses moyens de ce chef sont inopérants.

*

Monsieur [R] soutient qu'il n'est pas justifié de la délégation qui aurait été consentie aux fins de recouvrement contentieux par la caisse nationale de la MSA, au visa de l'article R. 631-2 du code de la sécurité sociale, ni si une habilitation a été délivrée au signataire. Il ajoute que le prénom du directeur 'Monsieur [H]' n'est pas mentionné et que l'arrêté de nomination de 'Monsieur [H]' n'est pas produit. Il ajoute que la signature portée sur la contrainte est scannée et qu'elle ne permet pas de s'assurer de l'auteur de sorte que la validité de l'acte est donc affectée.

Monsieur [R] prétend aussi que la contrainte n'est pas motivée de telle sorte qu'il n'est pas en mesure d'apprécier la nature, la cause et l'étendue de son obligation. Il précise ainsi que 'les décomptes sont contradictoires' et ne lui permettent pas de connaître les cotisations réellement dues.

La MSA réplique que la contrainte émise à l'encontre de Monsieur [R] est régulière, que ce dernier invoque une contrainte qui n'est pas celle afférente au litige puisqu'elle ne comporte pas le nom de 'Monsieur [H]' qui n'est du reste pas connu de la MSA Ain-Rhône. Elle précise au demeurant que Monsieur [R] n'invoque pas le grief causé par l'irrégularité de forme tirée de la signature scannée du directeur de la caisse. Par ailleurs, la contrainte est précise, elle contient les mentions obligatoires et fait référence aux mises en demeure. Elle permet donc à Monsieur [R] de connaître la nature, la cause et l'étendue de son obligation et elle est donc valable.

*

L'article R.631-2 du code de la sécurité sociale qu'invoque Monsieur [R] est relatif au Régime Social des Indépendants et n'est pas applicable au présent litige. Il a au demeurant été abrogé par suite de la suppression de cet organisme.

Aux termes de l'alinéa 1 de l'article L. 244-9 du code de la sécurité sociale, la contrainte décernée par le directeur d'un organisme de sécurité sociale pour le recouvrement des cotisations et majorations de retard comporte, à défaut d'opposition du débiteur devant le tribunal des affaires de sécurité sociale, dans les délais et selon des conditions fixés par décret, tous les effets d'un jugement et confère notamment le bénéfice de l'hypothèque judiciaire.

L'article R.133-4 du code de la sécurité sociale prévoit que la contrainte doit être délivrée par le directeur de l'organisme social.

Il ressort de la combinaison de ces textes que la contrainte doit être signée par le directeur de l'organisme de sécurité sociale ou par la personne à qui il a délégué spécialement une partie de ses pouvoirs ou sa signature, la personne délégataire devant alors justifier d'une délégation de pouvoir ou de signature concomitante ou antérieure à la date à laquelle la contrainte a été établie.

Force est de constater en l'espèce que la contrainte litigieuse du 16 août 2016 mentionne l'organisme social dont elle émane et la signature manuscrite de son directeur dont il n'est pas contestée qu'elle a été scannée.

Cette contrainte a été signée par le 'directeur' (et non par 'le directeur ou par délégation' comme le soutient Monsieur [R]), qui par cette seule qualité, sans nécessité de délégation, avait le pouvoir de la décerner.

Les considérations de Monsieur [R] quant au nom de 'Monsieur [H]' qui figurerait sur la contrainte sans le prénom, sont sans portées, puisque le nom de 'Monsieur [H]' n'apparaît pas sur la contrainte litigieuse, les conclusions de Monsieur [R] étant manifestement établies par le biais d'une trame, sans adaptation au cas d'espèce.

Par ailleurs, si l'article L.212-1 du code des relations entre le public et l'administration énonce que toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci, il n'a assorti ces obligations d'aucune sanction et il n'est allégué en l'espèce d'aucun grief, Monsieur [R] ayant été en mesure d'exercer l'intégralité de ses droits, tant dans la connaissance des cotisations qui lui étaient demandées que dans la possibilité de former sans difficulté particulière opposition par une procédure devant la juridiction.

La contrainte en cause reprend les références des mises en demeure et leurs dates, les périodes sur lesquelles elles portent et le montant réclamé en cotisations, majorations de retard et déductions (acomptes). Les mises en demeure délivrées sont détaillées, ainsi que l'ont relevé les premiers juges de telle sorte que Monsieur [R] a pu avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation. Le moyen n'apparaît pas fondé.

Sur les mises en demeures

Monsieur [R] fait valoir ensuite que les accusés de réception des mises en demeure délivrées sur 'un de ses lieux de travail', ne comportent pas sa signature mais celle d'une personne inconnue et sans pouvoir et qu'ainsi elles n'ont été délivrées ni à domicile, ni à personne, ce qui lui a causé grief puisqu'il n'a pas été averti de l'étendue de ses obligations.

Toutefois, la MSA réplique à juste titre que les mises en demeure ont toutes été envoyées à l'adresse personnelle de Monsieur [R] à MIONS, [Adresse 3], que celui-ci a signé l'avis de réception de la mise en demeure du 27 février 2015 et que les deux autres sont revenues avec la mention 'pli avisé et non réclamé' et ne souffrent donc d'aucune irrégularité.

Sur le fond

Monsieur [R] soutient que les cotisations du 2e trimestre 2018 réclamées par la caisse à hauteur de 3 895 Euros ne sont pas en corrélation avec ses déclarations fiscales et que la créance alléguée n'est pas justifiée, puisqu'en outre la base de calcul n'est pas donnée par la caisse.

La MSA fait valoir en réponse que la contrainte décernée à Monsieur [R] ne porte pas sur les cotisations de l'année 2018 mais sur des cotisations personnelles et non de salaires, et qu'aucune cotisation n'est réclamée pour l'année 2018 puisque Monsieur [R] a été radié au 7 décembre 2017.

Elle précise que ce dernier n'a effectué aucun paiement depuis le 15 juillet 2014 et qu'il est redevable de la somme de 25 620,71 Euros.

*

Les moyens développés par Monsieur [R] sont sans objet, aucune cotisation n'étant réclamée pour l'année 2018 suivant les pièces de la procédure, mais plutôt les sommes de :

- 15 525,21 Euros au titre de l'année 2015

- 5 441,20 Euros au titre de l'année 2014

- 4 586,17 Euros au titre de l'année 2016.

Total : 25 548,58 Euros.

Il ressort des motifs qui précèdent que Monsieur [R] a été avisé de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation et il doit donc être condamné au paiement de ces sommes ainsi que l'a dit le tribunal dont le jugement sera confirmé, ainsi qu'au titre des frais de signification.

Sur l'amende civile, les frais et dépens

Les premiers juges ont exactement relevé, sur le fondement de l'article R144-10 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction alors applicable, que la procédure engagée par Monsieur [R] pour remettre en cause le monopole de la sécurité sociale était manifestement dilatoire et abusif. Les moyens développés par Monsieur [R] en cause d'appel, outre les demandes ne concernant même pas pour certaines, la cause et les parties, attestent de sa persévérance à jouer de malice et il est ainsi justifié, sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile, que l'amende civile soit confirmée.

Le jugement sera confirmé du chef de l'indemnité procédurale.

L'article R144-10 du code de la sécurité sociale ayant été abrogé à effet du 1er janvier 2019, il y a lieu de statuer à hauteur d'appel sur les dépens sur le fondement de l'article 696 du code de procédure civile.

Monsieur [R] qui succombe sera condamné aux dépens d'appel et au versement d'une indemnité procédurale de 500 Euros au titre des frais irrépétibles d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

Met hors de cause le syndicat TALESS.

Dit que Monsieur [G] [R] ne peut être représenté ou assisté par le syndicat TALESS.

Confirme le jugement en toutes ses dispositions.

Y ajoutant, déboute Monsieur [G] [R] de ses demandes nouvelles en cause d'appel.

Condamne Monsieur [G] [R] à verser à la Mutualité Sociale Agricole (MSA) Ain Rhône la somme de 500 Euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel.

Le condamne aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRESIDENTE

Malika CHINOUNE Elizabeth POLLE-SENANEUCH


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Protection sociale
Numéro d'arrêt : 18/08351
Date de la décision : 12/05/2020

Références :

Cour d'appel de Lyon 51, arrêt n°18/08351 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-05-12;18.08351 ?
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