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15/10/2019 | FRANCE | N°18/04215

France | France, Cour d'appel de Lyon, Protection sociale, 15 octobre 2019, 18/04215


AFFAIRE DU CONTENTIEUX DE LA PROTECTION SOCIALE





DOUBLE RAPPORTEURS





R.G : N° RG 18/04215 - N° Portalis DBVX-V-B7C-LYAV





SAS COIRO



C/

URSSAF RHÔNE ALPES







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LYON

du 31 Janvier 2017

RG : 20122173















































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COUR D'APPEL DE LYON



Protection sociale



ARRÊT DU 15 OCTOBRE 2019













APPELANTE :



SAS COIRO

[Adresse 1]

[Localité 1]



représentée par Me Bruno DEGUERRY de la SELARL DEGUERRY, PERRIN ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON







INTIMEE :



URSSAF RHÔNE ALPES

[Adresse 2]

[Localité 2]


...

AFFAIRE DU CONTENTIEUX DE LA PROTECTION SOCIALE

DOUBLE RAPPORTEURS

R.G : N° RG 18/04215 - N° Portalis DBVX-V-B7C-LYAV

SAS COIRO

C/

URSSAF RHÔNE ALPES

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LYON

du 31 Janvier 2017

RG : 20122173

COUR D'APPEL DE LYON

Protection sociale

ARRÊT DU 15 OCTOBRE 2019

APPELANTE :

SAS COIRO

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Bruno DEGUERRY de la SELARL DEGUERRY, PERRIN ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

URSSAF RHÔNE ALPES

[Adresse 2]

[Localité 2]

représenté par Mme [S] [F] en vertu d'un pouvoir spécial

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 25 Juin 2019

Présidée par Elizabeth POLLE-SENANEUCH, président et Laurence BERTHIER, Conseiller, magistrats rapporteurs (sans opposition des parties dûment avisées) qui en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistés pendant les débats de Malika CHINOUNE, greffier

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

- Elizabeth POLLE-SENANEUCH, président

- Laurence BERTHIER, conseiller

- Rose-Marie PLAKSINE, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 15 Octobre 2019 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Elizabeth POLLE-SENANEUCH, Président, et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

La société COIRO, entreprise spécialisée dans la réalisation de travaux de terrassement, a fait l'objet d'un contrôle de cotisations concernant la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre

2010.

À l'issue du contrôle, l'URSSAF a notifié à l'entreprise le 2 février 2012, une lettre d'observations portant sur huit chefs de redressement à savoir :

- la déduction forfaitaire spécifique pour les frais de repas ;

- l'attribution de bons d'achat ;

- le remboursement de frais professionnels au titre de déplacements "moyens" ;

- la mise à disposition permanente de véhicule ;

- les frais de téléphone exposés par certains salariés ;

- le remboursement de frais professionnels au titre des déplacements effectués par le salarié ; - l'allocation complémentaire d'indemnités journalières de sécurité sociale ;

- les frais d'entreprise.

Après réponse de la société par lettre du 9 mars 2012 à la lettre d'observations, l'URSSAF a informé la société COIRO du maintien de sa position puis a notifié une mise en demeure en date du 12 juin 2012.

La société COIRO a saisi la Commission de Recours Amiable en contestation de cinq des huit chefs de redressement notifiés et la Commission a rejeté implicitement le recours.

La société COIRO a alors saisi le Tribunal des Affaires de la Sécurité Sociale par requête en date du 13 novembre 2012 en contestation de la décision implicite de rejet de la Commission de Recours Amiable .

La Commission de Recours Amiable a in fine confirmé la décision de rejet implicite du recours par décision du 25 septembre 2013 notifiée le 17 octobre 2013.

Par jugement du 31 janvier 2017, le tribunal des affaires de sécurité sociale de LYON ( devenu Pôle social du tribunal de grande instance de LYON) a :

- Confirmé la décision de la Commission de Recours Amiable notifiée le 17 octobre 2013 ;

- Déclaré irrecevable le recours de la société COIRO tendant à la reconnaissance de l'existence d'un accord amiable sur les chefs de redressements n° 1,4 et 5 non contestés sur le fond ;

Sur les chefs de redressement ( points n° 2,3,6, et 8 de la lettre d'observations) :

- Débouté la société COIRO de l' ensemble de ses demandes ;

- Condamné en conséquence la société COIRO au paiement à l' URSSAF de la somme de 103 366,00 €au titre des cotisations restant dû outre 14 457,00 € au titre des majorations de retard pour les reprises correspondant à la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010;

- Débouté la société COIRO du surplus de ses demandes ;

- Statué sans frais ni dépens.

La société COIRO a régulièrement interjeté appel de ce jugement .

Elle demande à la Cour, en l'état de ses dernières écritures reprises oralement lors de l'audience :

d'infirmer la décision dont appel,

à titre principal,

constater l'existence d'un accord tacite sur chacun des chefs de redressement contestés,

à titre subsidiaire,

annuler les redressements, mise en demeure et décision de rejet du présent recours,

ordonner à l'URSSAF Rhône-Alpes de procéder à la répétition des sommes de

+ 2144,48 € pour l'année 2009,

+ 1178,04 € pour l'année 2010,

condamner l'URSSAF Rhône-Alpes au paiement de la somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

la condamner aux entiers dépens.

L'URSSAF Rhône-Alpes demande à la Cour, en l'état de ses dernières écritures reprises oralement lors de l'audience :

- de confirmer la décision dont appel,

- de débouter la société COIRO de l'ensemble de ses demandes,

- de la condamner au paiement de la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé, pour un plus ample exposé des moyens des parties, aux conclusions qu'elles ont soutenues lors de l'audience.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'existence d'un accord tacite .

La société COIRO fait valoir au visa des dispositions de l'article R. 243 -59 du Code de la Sécurité , qu'elle a fait l'objet le 16 avril 2008 d'un contrôle de cotisations pour la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2007 à l'issue duquel l'inspecteur du recouvrement n' a mis en évidence que quatre chefs de redressement à savoir :

- " CSG-CRDS sur la part patronale au régime de prévoyance complémentaire avant et à compter du 24 août 2003 ..." ,

- " CSG-CRDS sur la part patronale retraite complémentaire à cotisations définies non légalement obligatoires à compter du 24 août 2003 ..." ,

- " ... taxe prévoyance : contribution au fonds de solidarité vieillesse ..." , -

- " ... avantages en nature voyage ..." ;

et que le contrôle qui a donné lieu à redressement, a fait naître un accord implicite de l'URSSAF s'agissant de l'ensemble des pratiques de l'employeur et qui sont aujourd'hui remises en cause ; de sorte qu'elle estime qu'est démontrée la réalité de l'accord implicite dont elle se prévaut . Elle soutient qu'il suffit de se reporter aux termes mêmes de la lettre d'observations du février 2012 et aux conditions mêmes dans lesquelles les deux contrôles sont intervenus pour retenir qu'est démontré l'accord tacite qu'elle allègue.

Ainsi, en l'absence d'observations sur les huit chefs de redressements évoqués lors du dernier contrôle, elle considère que les pratiques de l'employeur avaient donc nécessairement fait l'objet d'un accord tacite lequel fait obstacle à la notification d'un redressement sur ces mêmes chefs .

Sur l'accord tacite dont se prévaut la société COIRO, l'URSSAF rappelle les dispositions du code de la sécurité sociale et fait valoir :qu'en l'espèce, aucun accord tacite tiré d'un précédent contrôle ne peut être invoqué ;

L'URSSAF rappelle par ailleurs que la preuve de l'accord tacite incombe à l'employeur qui doit ainsi démontrer :

-une identité de situation(objet, personnes contrôlées, législation) entre le précédent contrôle et le contrôle contesté,

- que l'URSSAF s'est prononcée en toute connaissance de cause sur les pratiques concernées ;

- que le silence gardé par l'organisme ne doit pas résulter d'une simple tolérance mais doit être circonstancié et qu'il appartient au juge du fond de se prononcer sur l'existence ou non d'un tel accord .

Or, selon l'URSSAF, la société COIRO ne rapporte pas la preuve d'une identité de situation, puisqu'elle n' apporte aucun élément ni document justifiant que lors du précédent contrôle, l'employeur versait déjà des bons d'achat à la place du comité d'entreprise ni même que le comité d'entreprise existait déjà ni que les indemnités de déplacements moyens et heures de trajet étaient déjà versées, et exclues de l'assiette des cotisations .

Enfin, elle soutient que la société ne rapporte pas la preuve que l'éventuel silence de l'union ne résulte pas d'une simple tolérance .

Aux termes de l'article R.243-59 dernier alinéa du code de la sécurité sociale, l'absence d'observations vaut accord tacite concernant les pratiques ayant donné lieu à vérification, dès lors que l'organisme de recouvrement a eu les moyens de se prononcer en toute connaissance de cause. Le redressement ne peut porter sur des éléments qui, ayant fait l'objet d'un précédent contrôle dans la même entreprise ou le même établissement, n'ont pas donné lieu à observations de la part de cet organisme.

La preuve d'une décision implicite de l'URSSAF incombe à celui qui l'invoque. La simple possibilité pour l'URSSAF de connaître la pratique antérieure et le simple silence gardé lors d'un précédent contrôle ne suffisent pas à caractériser une telle décision implicite.

En l'espèce, c'est par des motifs pertinents que la cour adopte que les premiers juges ont retenu, en analysant le redressement litigieux et le redressement précédemment effectué par l'URSSAF, ainsi que les lettres d'observations produites aux débats, que la société COIRO ne démontrait pas que le contrôle effectué en 2008 par l'URSSAF a porté sur les mêmes éléments ayant donné lieu aux redressements contestés par la société en 2012 et ne démontrait pas davantage que lors du premier contrôle, l'URSSAF aurait admis les pratiques revendiquées, dès lors que les éléments versés aux débats par la société sont insuffisamment probants pour caractériser l'admission par l'URSSAF de ces pratiques ou à tout le moins une tolérance de l'organisme social .

Ainsi, il résulte des documents consultés, tel que le grand livre, que, contrairement à ce qu'affirme la société COIRO, l'URSSAF n'a pu vérifier effectivement la pratique des bons d'achat lors du précédent contrôle, ce d'autant que cette pratique a été décidé par le Comité d'entreprise postérieurement à ce contrôle; il en est de même concernant les indemnités de déplacement moyen, dès lors que la seule consultation du livre de paie ne peut permettre de retenir que l'inspecteur aurait pu vérifier ce point lors du précédent contrôle ou encore concernant le chef du redressement n°6 qui vise des salariés (messieurs [V] et [T]) qui n'étaient pas présents dans l'entreprise lors du précédent contrôle.

Il résulte également de la comparaison des contrôles effectués que l'URSSAF a consulté un plus grand nombre de documents lors du contrôle litigieux qui portait sur un plus grand nombre de points que le premier contrôle, lequel portait essentiellement sur les cotisations patronales au régime de prévoyance complémentaire.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la société COIRO n'établit pas en l'espèce, l'existence d' une décision implicite de l'URSSAF qui ne lui aurait pas permis de procéder au redressement litigieux.

La décision déférée sera confirmée en ce qu'elle a rejeté la contestation de la société COIRO relative à l'existence d'un accord tacite.

Sur les chefs de redressement.

Sur l'attribution de bons d'achat du Comité d' Entreprise ( point n°2) :

La société COIRO soutient que les prestations en espèces ou en nature qui se rattachent directement aux activités sociales et culturelles des comités d'entreprise ne sont pas assujetties aux cotisations de sécurité sociale .

Elle invoque notamment diverses circulaires diffusées par le Ministère et par l'ACOSS qui dressent la liste des tolérances dérogeant aux principes jurisprudentiels d' assujettissement et soutient que tel est le cas des bons d'achat et cadeaux attribués aux salariés au cours d'une année civile lorsque le montant global de ces avantages n'excède pas 5 % du plafond mensuel de la sécurité sociale et que trois conditions sont réunies à savoir l'attribution de chèques cadeaux en relation avec un événement visé par la lettre circulaire ACOSS du 3 décembre 1996, l' utilisation déterminée des chèques en relation avec l'événement, la conformité du montant de la prestation aux usages , ces trois conditions étant réunies en l'espèce.

Elle conteste donc que le redressement soit intervenu au motif que l'entreprise s'était substituée au comité d'entreprise dans le cadre de ses attributions sociales et culturelles alors que c'est le comité d'entreprise lui-même qui a sollicité l'employeur à ce titre, lequel a agi en simple exécutant .

L'URSSAF soutient que le redressement est justifié en application de l'article L. 242-1 du Code de la Sécurité Sociale ainsi que de l'instruction ministérielle du 17 avril 1985 et qu'en l'espèce, l'employeur verse des bons d'achat aux salariés en fin d'année alors que l'entreprise est pourvue d'un comité d'entreprises auquel l'employeur ne peut se substituer pour les 'uvres sociales, de sorte les bons d'achat attribués par le comité d'entreprise aux salariés en raison de cette qualité et à l'occasion du travail entrent dans l'assiette des cotisations sauf dans le cas des cadeaux attribués à l'occasion d'un événement particulier ou des bons d'achat dont l'utilisation est déterminée lorsque leur importance est conforme aux usages .

L'URSSAF soutient encore que la tolérance instituée par l'instruction ministérielle du 17 avril 1985 est d'application stricte et que la reprise est donc justifiée .

En application de l'article L. 242-1 du Code de la Sécurité Sociale, tout avantage en nature ou en argent versé en contrepartie ou à l'occasion du travail doit être soumis à cotisations. Il en est ainsi des bons d'achat ou cadeaux alloués par l'employeur à ses salariés .

Par dérogation à ce principe, les bons d'achat ou cadeaux peuvent être exclus de l'assiette de cotisations dès lors qu'ils sont attribués au personnel par le comité d'entreprise ou le comité des 'uvres sociales , conformément aux instructions ministérielles du 17 avril 1985 et 12 décembre 1988 et que le montant global par année civile ne dépasse pas le seuil de 5% du plafond mensuel de la sécurité sociale .

Si cette limite est dépassée, les bons d'achat ou cadeaux attribués aux salariés peuvent être versés en franchise de cotisations sous réserve qu'ils soient attribués à l'occasion d'un événement particulier (mariage, naissance , noël des enfants ) pour une valeur conforme aux usages et pour une utilisation déterminée s'agissant des bons d'achat.

En l'espèce, le seul fait que la société COIRO affirme avoir procédé à la distribution des bons cadeaux au personnel à la demande du Comité d'entreprise, affirmation que l'appelant ne confirme par aucune pièce, ne suffit pas pour appliquer la tolérance ci-dessus rappelée, de sorte qu'ainsi qu'en ont décidé les premiers juges, il convient de confirmer le redressement de ce chef.

Sur le remboursement des frais professionnels au titre des déplacements moyens" ( point n°3) :

La société COIRO soutient que ces indemnités représentent des frais correspondant à une réalité professionnelle en ce qu'ils sont effectivement réalisés par des salariés de l'entreprise qui se rendent soit de leur domicile vers des chantiers, soit de chantiers en chantiers ( avec application du barème de calcul diffusé par PRO BTP) .

Pour l'URSSAF, il résulte des articles 1 et 2 de l'arrêté du 20 décembre 2002 modifié par l'arrêté du 27 janvier 2005, que la déduction des allocations forfaitaires pour frais professionnels de l'assiette des cotisations est subordonnée à la preuve, par l'employeur, d'une utilisation de ces dernières conformes à leur objet, c'est-à-dire pour compenser une dépense supplémentaire engagée par le salarié dans le cadre de son activité professionnelle;

Elle considère que les indemnités versées à ses salariés en franchise de charges sociales pour les "déplacements moyens"et "heures de trajet" ne sont pas représentatives de frais professionnels mais compensent le temps de déplacement des salariés .

Elle ajoute que dans le cadre de la convention collective nationale du BTP, il convient de distinguer les indemnités de déplacement des indemnités de trajet, ces dernières constituant une rémunération, étant souligné que l'inspecteur du recouvrement lors du contrôle a relevé que les salariés percevaient des indemnités de transport pour couvrir les frais professionnels de déplacements domicile/chantier inters chantier distinctes des sommes faisant l'objet du présent redressement .

En application de l'article L. 242-1 du Code de la Sécurité Sociale, tout avantage en nature ou en argent versé en contrepartie ou à l'occasion du travail doit être soumis à cotisations à l'exclusion des sommes représentatives de fi-ais professionnels, dans les conditions et limites fixées par arrêté interministériel.

En l'espèce, l'inspecteur du recouvrement a réintégré dans l'assiette des cotisations les indemnités versées par l'entreprise dites de " déplacement moyen" et " heures de trajet".

En effet, l'inspecteur a constaté qu'en plus des sommes faisant l'objet du redressement, les salariés percevaient également des indemnités destinées à couvrir les frais de déplacement de domicile à chantier ou de chantier à chantier.

Dans ces conditions, c'est à juste titre qu'un redressement a été effectué de ce chef, dès lors, qu'au regard des constatations de l'inspecteur du recouvrement qui font foi jusqu'à preuve contraire que la société COIRO n'apporte pas ici, les sommes visées par le redressement apparaissent comme étant une rémunération d'un temps de travail et ne peuvent donc recevoir la qualification de frais professionnels, de sorte qu'elles sont bien soumises à cotisations sociales.

Sur les remboursements de frais professionnels au titre des déplacements effectués par Messieurs [T] et [V]( point n°6) .

La société COIRO conteste la reprise en soutenant que les salariés effectuent des déplacements au moyen de leur véhicule personnel dans le cadre de leur mission puisqu'ils se déplacent quotidiennement soit auprès de particuliers, soit auprès de professionnels, afin d'effectuer une étude technique sur site avant la réalisation de travaux de branchements.

La société indique qu'elle est en mesure de justifier des études réalisées par le suivi de la facturation.

L'URSSAF soutient que l'employeur doit justifier du caractère professionnel des frais engagés en établissant les circonstances de fait ayant généré ces dépenses, se sorte qu'il doit apporter la preuve des déplacements professionnels réalisés en produisant les justificatifs relatifs au moyen de transport utilisé, à la puissance fiscale du véhicule, à la distance effectuée et au nombre de trajets indemnisés.

En application de l'article L. 242-1 du Code de la Sécurité Sociale, tout avantage en nature ou en argent versé en contrepartie ou à l'occasion du travail doit être soumis à cotisations-à l'exclusion des sommes représentatives de frais professionnels, dans les conditions et limites fixées par arrêté interministériel.

Ainsi, selon l'arrêté du 20 décembre 2002, les sommes à déduire de l'assiette des cotisations s'entendent des sommes versées aux travailleurs salariés pour les couvrir des charges de caractère spécial inhérentes à la fonction ou à l'emploi, l'indemnisation s'effectuant sous la forme de remboursement des dépenses réelles ou d'allocations forfaitaires. Dans ce cas, la déduction est subordonnée à l'utilisation effective des allocations conformément à leur objet.

En l'espèce, l'inspecteur du recouvrement a constaté que deux salariés ( Messieurs [T] et [V]) avaient perçu des frais de déplacement sous forme d'indemnités kilométriques.

Toutefois, l'inspecteur du recouvrement indique que les documents présentés par l'employeur, sont insuffisamment détaillés et ne permettent pas de vérifier la réalité des déplacements ainsi que l' utilisation des sommes versées conformément à leur objet.

A hauteur d'appel, si la société COIRO produit les contrats de travail des deux salariés qui mentionnent leur qualification et définissent leur mission impliquant des déplacements sur les chantiers et chez les clients pour lesquels le salarié "sera amené à utiliser son véhicule personnel", en l'absence de justificatifs précis permettant à l'inspecteur du recouvrement d'abord, puis ensuite, aux premiers juges comme à la cour, de vérifier les kilométrages effectués par les deux salariés dans le cadre de leurs déplacements professionnels ainsi que l' utilisation par eux des frais afférents aux déplacements, les frais invoqués ne sauraient être exclus de l'assiette des cotisations.

Le redressement opéré par l' URSSAF de ce chef sera donc confirmé.

Sur l'allocation complémentaire des indemnités journalières de sécurité sociale- BTP ( point n°7:

La société COIRO dans sa réponse à la lettre d'observations n'a pas contesté le principe du redressement sur l'allocation complémentaire des indemnités journalières sécurité sociale mais a simplement estimé qu'elle avait trop versé de cotisations pour les années 2009 et

2010.

L' URSSAF précise dans la lettre d'observations que lorsque l'entreprise adhère au régime de prévoyance (arrêts de travail supérieurs à 90 jours), mais qu'elle n' adhère pas au contrat de mensualisation ( arrêts inférieurs à 90 jours), les allocations complémentaires versées par la CNPO ( PRO-BTP ou SMA-BTP) au titre des arrêts de travail de plus de 90 jours sont à soumettre à cotisations au prorata de la participation patronale financement du régime pour les salariés.

Estimant que les allocations complémentaires versées par PRO- BTP au titre des arrêts de travail de plus de 90 jours au titre de arrêts de travail de plus de 90 jours devaient être soumises à cotisations, l' inspecteur du recouvrement a donc effectué des vérifications et il a constaté que l'employeur avait fait sa déclaration sur le tableau récapitulatif de fin d'année sans établir de bulletins de salaire, prenant alors en charge les cotisations ouvrières en lieu et place des salariés.Il a donc réintégré l'allocation complémentaire aux IJSS versées par PRO-BTP.

En l'espèce, il apparaît que la société COIRO a soumis à charges sociales les allocations complémentaires aux IJSS au prorata du financement patronal de la prévoyance complémentaire, mais, aucun bulletin de salaire n'ayant été établi, a pris en charge les cotisations ouvrières incombant normalement aux salariés, de sorte que cette prise en charge constitue bien un avantage en nature soumis à cotisations conformément à l'article L 242-1 du code de la sécurité sociale.

Dans ces conditions, le redressement opéré est justifié.

Par ailleurs, faute pour la société COIRO de justifier d'un trop-versé de cotisations en 2009 et 2010, il n'est justifié d'aucun crédit dégagé à son profit et elle sera en conséquence déboutée de sa demande de répétition des sommes de 2144,48 € pour l'année 2009 et 1178,04 € pour l'année 2010, par confirmation de la décision déférée.

Sur les frais d'entreprise ( voyages. abonnements sportifs, spectacles...) (point n°8):

La société COIRO conteste la réintégration de ces avantages dans l'assiette des cotisations au motif que les dépenses engagées sont justifiées par le développement de la politique commerciale de l'entreprise depuis de nombreuses années.

En outre, elle fait valoir que la position de l'URSSAF consistant à déduire de l'absence des noms des clients ou fournisseurs que les cadeaux ont profité aux salariés n'est pas recevable, car l'URSSAF n'est pas en mesure d'établir objectivement que des salariés ont profité de ces avantages. Elle invoque à cet égard un arrêt de la cour de cassation du 14 septembre 2006.

L'URSSAF considère que lorsque les frais n'ont pas été exposés à raison de charges inhérentes aux fonctions des salariés, exercées dans l'intérêt de l'entreprise, leur prise en charge par l'employeur constitue des avantages en nature et qu'en l'espèce, la société COIRO ne fournit aucune pièce pour justifier l'organisation des séjours, le programme de travail ou encore l'identité des bénéficiaires des billets, permettant de retenir une prise en charge réalisée dans l'intérêt de l'entreprise.

En application de l'alinéa 1 de l'article L. 242-1 du Code de la Sécurité Sociale , tout avantage en espèces ou en nature versée en contrepartie ou à l'occasion du travail doit être soumis à cotisations. Il en est ainsi de l'avantage résultant de la prise en charge par l'employeur de frais de voyage lorsque ces voyages n'ont pas le caractère de frais entreprise.

Des précisions ont été apportées par la jurisprudence sur la définition des avantages en nature.

De même, la circulaire interministérielle du 7 juillet 2003 a précisé les conditions permettant l'exonération de charges sociales des frais d'entreprise, l'employeur, à qui incombe la charge de la preuve devant alors démontrer que les frais qu'il souhaite voir exclure de l'assiette des cotisations ont un caractère de frais d'entreprise, en produisant notamment les programmes de travail relatif aux voyages pris en charge.

En l'espèce, l'inspecteur du recouvrement a constaté la comptabilisation par la société COIRO, de factures relatives à des " cadeaux clients" , l'examen des factures faisant apparaître que certaines concernaient notamment des achats de billets de spectacles ou de sports, des voyages, des abonnements à des compétitions sportives .

La société COIRO n'a pas pu justifier auprès de l'inspecteur du recouvrement de l'usage à des fins commerciales des avantages octroyés par l'entreprise.

Elle ne justifie pas devant la Cour, pas plus qu'elle ne l'avait fait en première instance, des noms des clients ou des fournisseurs auquel les avantages ont été attribués. Ni des programmes de travail ou des conditions dans lesquelles les salariés étaient amenés à participer aux voyages ne correspondant pas à l'exercice habituel de sa profession.

Dans ces conditions, la société COIRO ne démontre pas que les divers avantages versés présentent le caractère de frais d'entreprise pouvant être exclus de l'assiette des cotisations.

Le redressement opéré par l'URSSAF sera donc sur ce dernier point et la décision déférée confirmée de ce chef.

Sur la demande de remboursement au titre des réductions Fillon.

Les premiers juges ont considéré que cette demande ne pouvait être accueillie concernant l'année 2010, dès lors qu'aucune décision n'était intervenue de ce chef .La société COIRO soutient cependant cette demande de remboursement à hauteur d'appel.

L'URSSAF souligne que la demande de remboursement relative à la réduction FILLON pour l'année 2010 laquelle a bien été validée pour 28 774 € n'est pas l'objet du présent litige et ne saurait avoir une quelconque incidence sur la décision de la Cour. Elle réitère son invitation à la société COIRO pour la déduction d'office de cette somme de ses cotisations à venir.

En l'espèce, il apparaît ainsi que l'ont justement dit les premiers juges, que cette demande de remboursement au titre de la réduction FILLON pour l'année 2010 n'est pas recevable en l'absence de saisine préalable de la commission de recours amiable;

Sur les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société COIRO succombant dans son appel sera déboutée de sa demande de ce chef et condamnée à payer à l'URSSAF Rhône-Alpes la somme de 1500 €.

Il convient de statuer sur les dépens, conformément à l'article 696 du code de procédure civile, l'article R 144-10 du code de la sécurité sociale, prévoyant la gratuité en la matière ayant en effet été abrogé à compter du 1er janvier 2019, par la décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré,

CONFIRME la décision déférée en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

DÉBOUTE la société COIRO de sa demande formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

LA CONDAMNE de ce chef à payer à l'URSSAF Rhône-Alpes la somme de 1500 €,

LA CONDAMNE aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRELA PRESIDENTE

Malika CHINOUNE Elizabeth POLLE-SENANEUCH


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Protection sociale
Numéro d'arrêt : 18/04215
Date de la décision : 15/10/2019

Références :

Cour d'appel de Lyon 51, arrêt n°18/04215 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-10-15;18.04215 ?
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