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10/09/2019 | FRANCE | N°18/03835

France | France, Cour d'appel de Lyon, Protection sociale, 10 septembre 2019, 18/03835


AFFAIRE DU CONTENTIEUX DE LA PROTECTION SOCIALE





RAPPORTEUR





R.G : N° RG 18/03835 - N° Portalis DBVX-V-B7C-LXD3





URSSAF RHÔNE ALPES



C/

SAS SIGVARIS







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de SAINT-ETIENNE

du 23 Avril 2018

RG : 20170205














































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COUR D'APPEL DE LYON



Protection sociale



ARRÊT DU 10 SEPTEMBRE 2019









APPELANTE :



URSSAF RHÔNE ALPES

[Adresse 1]

[Adresse 1]



représentée, par Me Pierre-luc NISOL de la SELARL ACO, avocat au barreau de LYON, substitué par Maître Emmanuel CLEMENT, avocat au même barreau







INTIMEE :...

AFFAIRE DU CONTENTIEUX DE LA PROTECTION SOCIALE

RAPPORTEUR

R.G : N° RG 18/03835 - N° Portalis DBVX-V-B7C-LXD3

URSSAF RHÔNE ALPES

C/

SAS SIGVARIS

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de SAINT-ETIENNE

du 23 Avril 2018

RG : 20170205

COUR D'APPEL DE LYON

Protection sociale

ARRÊT DU 10 SEPTEMBRE 2019

APPELANTE :

URSSAF RHÔNE ALPES

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée, par Me Pierre-luc NISOL de la SELARL ACO, avocat au barreau de LYON, substitué par Maître Emmanuel CLEMENT, avocat au même barreau

INTIMEE :

SAS SIGVARIS

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Charlotte BERTRAND de la SCP FROMONT BRIENS, avocat au barreau de PARIS

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 14 Mai 2019

Présidée par Elizabeth POLLE-SENANEUCH, Président, magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffier

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

- Elizabeth POLLE-SENANEUCH, président

- Laurence BERTHIER, conseiller

- Rose-Marie PLAKSINE, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 10 Septembre 2019 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Elizabeth POLLE-SENANEUCH, Président, et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

La société SIGVARIS a fait l'objet d'un contrôle au titre de l'application de la législation de la sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires par l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Rhône-Alpes (URSSAF ci-dessous) pour la période courant du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015.

La lettre d'observations notifiée le 27 septembre 2016 prévoit un redressement de 108 470 euros de cotisations.

Par courrier du 27 octobre 2016, la société SIGVARIS a fait part de ses observations à l'Inspecteur qui a maintenu son redressement dans son entier montant.

Le 5 décembre 2016, l'URSSAF a adressé une mise en demeure à la société SIGVARIS pour un montant de 108 470 euros de cotisations avec 17 382 euros de majorations de retard.

Le 14 décembre 2016, la société SIGVARIS a procédé au paiement du montant total du redressement et a sollicité la remise gracieuse des majorations de retard y afférentes.

Par courrier du 13 janvier 2017, l'URSSAF a accordé à la société SIGVARIS une remise partielle de ces majorations.

Le 6 janvier 2017, la société SIGVARIS a saisi la Commission de recours amiable afin de contester ce redressement.

Sans réponse au 5 avril 2017, la société ayant considéré sa demande comme implicitement rejetée a saisi le Tribunal des affaires de sécurité sociale de Saint-Etienne.

Par décision du 19 mai 2017, notifiée le 29 juin 2017, la Commission de recours amiable a rejeté la requête de la société SIGVARIS.

Cette dernière a de nouveau saisi le Tribunal des affaires de sécurité sociale le 27 juillet 2017.

Par jugement du 23 avril 2018, le Tribunal des affaires de sécurité sociale de Saint-Etienne a :

- Ordonné la jonction des recours 20170205 et 20170517 et dit que l'affaire se poursuivra sous le numéro unique 20170205 ;

- Annulé le chef de redressement numéro 5 (annualisation de la réduction générale des cotisations: détermination du coefficient) porté par la lettre d'observations du 27 septembre 2016 à la société SIGVARIS ;

- Condamné l'URSSAF Rhône-Alpes à rembourser à la société SIGVARIS la somme de 68 693 euros outre majorations afférentes ;

- Débouté la société SIGVARIS de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de la procédure civile.

L'URSSAF Rhône-Alpes a régulièrement interjeté appel de ce jugement le 24 mai 2018.

Elle demande à la Cour, en l'état de ses dernières écritures reprise oralement lors de l'audience de :

- Infirmer le jugement entrepris ;

- Dire et juger que le redressement contesté est maintenu ;

- Débouter la société SIGVARIS de l'ensemble de ses demandes, principales et accessoires.

La société SIGVARIS demande à la Cour, en l'état de ses dernières écritures reprises oralement lors de l'audience de :

Déclarer L'URSSAF Rhône-Alpes mal fondée en son recours et, ce faisant :

- Confirmer le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Saint-Etienne du 23 avril 2018 en ce qu'il a annulé le redressement opéré par L'URSSAF Rhône-Alpes au titre du chef de redressement n°5 relatif à la réduction 'Fillon' et condamné L'URSSAF Rhône-Alpes à rembourser la somme de 68 693 euros ainsi que les majorations de retard y afférentes, à la société SIGVARIS ;

- Condamner L'URSSAF Rhône-Alpes à payer la somme de 2.000 euros à la société SIGVARIS au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé, pour un plus ample exposé des moyens des parties, aux conclusions qu'elles ont soutenues lors de l'audience.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L'URSSAF soutient que la législation relative à la réduction Fillon a connu une évolution importante le 1er janvier 2011 avec l'entrée en vigueur de l'annualisation du calcul du coefficient de la réduction Fillon. Les modalités de calcul de la réduction Fillon et la législation applicable ayant évolué, l'URSSAF estime alors que la société SIGVARIS ne peut se prévaloir d'un accord tacite.

Elle soutient que cet accord tacite ne peut résulter que d'une position de l'URSSAF prise en toute connaissance de cause ce qui suppose que les pratiques litigieuses ont bien été vérifiées lors du précédent contrôle.

La société SIGVARIS soutient que ce redressement porte sur une pratique ayant recueilli l'accord tacite de l'URSSAF lors du précédent contrôle.

Elle estime que bien que la version de l'article L.241-13 du code de la sécurité sociale, fondement juridique de la réduction 'Fillon', applicable en 2009 n'est pas, dans son ensemble, strictement identique à sa version applicable en 2013, la définition de la rémunération brute figurant au dénominateur du coefficient et plus particulièrement le principe de neutralisation des temps de pause, d'habillage et de déshabillage, point sur lequel porte le litige, sont demeurés parfaitement inchangés.

L'article R.243-59 du code de la sécurité sociale, en vigueur lors du contrôle, dispose que l'absence d'observations vaut accord tacite concernant les pratiques ayant donné lieu à vérification, dès ors que l'organisme de recouvrement a eu les moyens de se prononcer en toute connaissance de cause. Le redressement ne peut porter sur des éléments qui, ayant fait l'objet d'un précédent contrôle dans la même entreprise ou le même établissement, n'ont pas donné lieu à observations de la part de cet organisme.

La charge de la preuve de l'existence d'une décision antérieure implicite de l'URSSAF pèse sur l'employeur.

La preuve d'une décision antérieure de l'organisme de recouvrement incombe à celui qui l'invoque. La simple référence à une possibilité de connaître la pratique de l'employeur et au silence gardé par l'URSSAF lors du règlement des cotisations en suffit pas à caractériser l'existence d'une décision implicite admettant en connaissance de cause la pratique litigieuse.

En l'espèce, dans le cadre d'un contrôle, l'URSSAF a effectué un redressement sur 'l'annualisation de la réduction générale des cotisations : détermination du coefficient' pour la période du courant du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015.

La lettre d'observations du 27 septembre 2016 notifiée à la société SIGVARIS énonce que 'des divergences ont été constatées dans le calcul du coefficient de réduction Fillon pour les 2 motifs suivants :

- Neutralisation à tort pour 2013 et 2014 de la rémunération brute à prendre en compte de la 'prime vêtement' ne respectant pas les fondements juridiques précités

° mise en place par accord d'entreprise du 14/01/2003 (non étendu) pour compenser le temps d'habillage et de déshabillage et entretien d'un moment de 0.50 euros/jour travaillé

° revalorisée à 1 euro/jour par accord salarial 2009 du 19/12/2008

- Proratisation du SMIC en cas de salaires bruts négatifs (zones grisées)

° SMIC retenu à 0 pour ces mois alors que le SMIC retenu aurait dû être négatif au prorata du salaire normal.'

Un précédent contrôle a été effectué par l'organisme de recouvrement pour la période courant du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2009.

L'URSSAF estime que la condition selon laquelle l'accord tacite ne peut résulter que d'une position de l'organisme prise en toute connaissance de cause, supposant que les pratiques litigieuses ont bien été vérifiées lors du précédent contrôle, n'est pas remplie si la législation applicable a été modifiée dans l'intervalle ou si l'employeur a modifié ses pratiques.

La société SIGVARIS soutient que lors de cette période contrôlée, elle pratiquait déjà la 'neutralisation' de la 'prime de vêtement', prévue par les accords collectifs du 14 janvier 2003 et 19 décembre 2008, pour calculer la rémunération brute en matière de réduction Fillon.

En l'espèce, dans la lettre de réponse du 27 octobre 2016, en contestation du redressement, la société SIGVARIS indique que lors du précédent contrôle opéré au sein de leur établissement par l'URSSAF qui portait sur les années 2007 à 2009, un redressement a déjà été opéré sur les modalités de calcul de cet allégement Fillon et qu'il s'agit d'une période sur laquelle une grande majorité de ses salariés bénéficiait déjà de la 'prime de vêtements' qui a été exclue de la rémunération brute servant de base au calcul du coefficient de l'allégement Fillon.

Elle y indique aussi que l'inspecteur a nécessairement contrôlé le traitement de la 'prime de vêtements' dans la mesure où environ 78% des salariés des établissements concernés assujettis à l'allégement Fillon bénéficient de cette prime de vêtements et que l'inspecteur du recouvrement avait nécessairement connaissance du fait que la 'prime de vêtements' était exclue de la base de calcul du coefficient de l'allégement Fillon et que c'est donc en connaissance de cause qu'il n'a pas redressé la société sur ce point.

La société SIGVARIS verse aux débats un tableau comparatif des modalités de calcul de la réduction 'Fillon' avec ou sans 'neutralisation' de la 'prime de vêtement', datant de 2009.

La société produit également des bulletins de salaire de salariés de 2009 faisant apparaître le montant brut mensuel de la prime vêtement ainsi que la réduction Fillon correspondant au premier mode de calcul du tableau évoqué ci-dessus et démontrant ainsi la neutralisation effective de la 'prime de vêtement' sur cette période.

Il convient de constater que ces documents ont été consultés par l'URSSAF lors du premier contrôle puisque la lettre d'observations du 7 juillet 2010 mentionne les états justificatifs des réductions sur les bas salaires parmi la liste des documents consultés.

De plus, cette lettre énonce qu'aucune irrégularité n'a été relevée au vu des documents consultés au titre de l'application des législations de sécurité sociale.

En ce qui concerne la modification de la législation, l'article L.241-13 du code de la sécurité sociale, dans sa version en vigueur du 1er janvier 2009 au 1er janvier 2010 mentionnait : ' [... la rémunération mensuelle du salarié telle que définie à l'article L.242-1, hors rémunération des heures complémentaires et supplémentaires dans la limite, en ce qui concerne la majoration salariale correspondante, des taux de 25% ou 50%, selon le cas, prévus au I de l'article L.212-5 du code du travail et à l'article L.713-6 du code rural et hors rémunération des temps de pause, d'habillage et de déshabillage versée en application d'une convention ou d'un accord collectif étendu en vigueur au 11 octobre 2007.'

Dans sa version en vigueur du 1er janvier 2013 au 1er janvier 2015, ce même article mentionnait:

'[...] la rémunération annuelle du salarié telle que définie à l'article L.242-1, hors rémunération des temps de pause, d'habillage et de déshabillage versée en application d'une convention ou d'un accord collectif étendue en vigueur au 11 octobre 2007 [...]'

Il convient de constater que, comme l'ont relevé les premiers juges à juste titre, s'il est établi qu'entre les deux contrôles, le calcul de la réduction (précédemment mensuel) est devenu annuel, les dispositions anciennes et nouvelles de l'article L.241-13 du code de la sécurité sociale n'ont pas été modifiées s'agissant des exceptions prévues pour les temps de pause, d'habillage et déshabillage.

Par ailleurs, l'URSSAF reproche en substance à la société SIGVARIS de se baser sur la lettre d'observations notifiée à la SAS Ganzoni France pour invoquer l'accord tacite sans démontrer qu'il s'agit de la même personne morale qui est contrôlée.

Or, il convient de constater que le numéro SIREN figurant sur les lettres d'observations du 7 juillet 2010 et du 27 septembre 2016, à savoir 384 137 857, est identique pour la société Ganzoni France et la société SIGVARIS, ce qui démontre que les deux contrôles ont bien été effectués au sein de la même structure sociale nonobstant la différence de dénomination.

Il résulte de ces éléments l'existence d'un accord tacite.

En conséquence, il convient de confirmer la décision déférée en ce qu'elle a annulé le redressement opéré par l'URSSAF Rhône-Alpes au titre du chef de redressement n°5 porté par la lettre d'observations du 27 septembre 2016 et a condamné l'URSSAF à rembourser à la société SIGVARIS la somme de 68 693 euros, outre majorations de retard afférentes.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la société SIGVARIS la totalité des frais non recouvrables qu'elle a dus exposer en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré,

Confirme le jugement rendu par le Tribunal des affaires de sécurité sociale de Saint-Etienne le 23 avril 2018,

Condamne L'URSSAF RÔNE ALPES à payer à la société SIGVARIS la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne l'URSSAF Rhône-Alpes aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRESIDENTE

Malika CHINOUNE Elizabeth POLLE-SENANEUCH


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Protection sociale
Numéro d'arrêt : 18/03835
Date de la décision : 10/09/2019

Références :

Cour d'appel de Lyon 51, arrêt n°18/03835 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-09-10;18.03835 ?
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