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16/10/2018 | FRANCE | N°16/08929

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile b, 16 octobre 2018, 16/08929


N° RG 16/08929









Décision du

Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond

du 03 mars 2016



RG : 12/01053

1ère chambre





B... Y...



C/



X... F... Y...

Y...

Y...

Y...





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile B



ARRET DU 16 Octobre 2018







APPELANT :



M. Yannis B... Y...
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Chez Mme X...

[...]



Représenté par la SELARL B2R & ASSOCIÉS, avocats au barreau de LYON







INTIMÉS :



Mme Marie Claire Arlette X... veuve Y...

née le [...] à LYON (69)

[...]



Représentée par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocats ...

N° RG 16/08929

Décision du

Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond

du 03 mars 2016

RG : 12/01053

1ère chambre

B... Y...

C/

X... F... Y...

Y...

Y...

Y...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRET DU 16 Octobre 2018

APPELANT :

M. Yannis B... Y...

né le [...] à LYON (69)

Chez Mme X...

[...]

Représenté par la SELARL B2R & ASSOCIÉS, avocats au barreau de LYON

INTIMÉS :

Mme Marie Claire Arlette X... veuve Y...

née le [...] à LYON (69)

[...]

Représentée par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocats au barreau de LYON

M. Frédéric Z... Y...

né le [...] à LYON (69)

[...]

Représenté par la SCP RIEUSSEC & ASSOCIES, avocats au barreau de LYON

Mme Allison Y...

née le [...] à ECULLY (69)

[...]

Représentée par la SCP RIEUSSEC & ASSOCIES, avocats au barreau de LYON

M. Kévin Y...

né le [...] à ECULLY (69)

[...]

Représenté par la SCP RIEUSSEC & ASSOCIES, avocats au barreau de LYON

******

Date de clôture de l'instruction : 07 Juin 2018

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 03 Septembre 2018

Date de mise à disposition : 16 Octobre 2018

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Françoise CARRIER, président

- Michel FICAGNA, conseiller

- Florence PAPIN, conseiller

assistés pendant les débats de Myriam MEUNIER, greffier

A l'audience, Françoise CARRIER a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Françoise CARRIER, président, et par Myriam MEUNIER, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

EXPOSÉ DE L'AFFAIRE

Le 19 février 1955, Roger Y... a épousé Denise A... sans contrat de mariage.

Suivant acte du 25 janvier 1995, les époux ont adopté le régime de la séparation de biens. Cet acte a été homologué par jugement du tribunal de grande instance de Lyon du 9 juin 1995.

Ils n'ont néanmoins pas procédé à la liquidation de la communauté. Sur assignation de M. Roger Y... et par jugement du 27 août 2003, le tribunal de grande instance de LYON a ordonné le partage de l'indivision post-communautaire résultant du changement de régime matrimonial.

Par acte du 4 août 2005, Roger Y... a fait assigner Denise A... épouse Y... en divorce.

Par acte sous seing privé du 27 décembre 2007, Roger Y..., Denise A... et Frédéric Y... ont conclu une convention relative à la propriété et à l'exploitation de l'entreprise 'La Potinière', à la liquidation du régime matrimonial et aux modalités du prononcé du divorce.

Par acte authentique du 14 février 2008, Roger Y... et Denise A... ont procédé à la liquidation du régime matrimonial et au partage de la communauté et de l'indivision post-communautaire conformément à la convention du 27 décembre 2007, sous condition du prononcé du divorce.

Par acte du même jour, M. Roger Y... a donné :

- aux enfants de M. Frédéric Y..., M. Kévin Y... et Mme Allison Y..., la nue-propriété de la moitié indivise d'un bien immobilier sis [...], évaluée à 300 000 €,

- à son fils, M. Frédéric Y..., la nue-propriété de la marque 'La Potinière', avec réserve d'usufruit.

Par jugement du 14 avril 2008, le tribunal de grande instance de LYON a prononcé le divorce entre Roger Y... et Denise A... pour altération définitive du lien conjugal sur conclusions concordantes des parties, reporté les effets du divorce au 1er janvier 1994 et constaté que les époux avaient procédé à la liquidation de leur régime matrimonial par acte notarié du 14 février 2008.

Denise A... est décédée le [...].

Le 8 juillet 2008, Roger Y... a épousé Mme Marie-Claire X....

Par requête du 24 octobre 2008, Roger Y... a entamé une procédure en vue de l'adoption simple de M. Yannis B..., fils de Mme Marie-Claire X... épouse Y.... L'adoption a été prononcée post-mortem, par un arrêt de la cour d'appel de Lyon du 25 janvier 2010, infirmant un jugement du tribunal de grande instance de Lyon du 13 mai 2009.

Roger Y... est décédé le [...], laissant pour lui succéder :

- Mme Marie-Claire X... veuve Y...,

- M. Frédéric Y...,

- M. Yannis B... Y....

Par actes du 25 novembre 2011, M. Frédéric Y... et ses enfants, M. Kévin Y... et Mme Allison Y..., ont renoncé à la succession de Roger Y....

Par acte d'huissier du 12 janvier 2012, M. Yannis B... Y... a fait assigner M. Frédéric Y..., M. Kévin Y... et Mme Allison Y... devant le tribunal de grande instance de LYON aux fins de priver d'effet le partage convenu le 14 février 2008.

Par acte d'huissier du 13 septembre 2012, Mme Marie-Claire X... veuve Y... a été appelée en cause afin que le jugement lui soit déclaré commun et opposable.

Par jugement du 3 mars 2016, rectifié par jugement du 22 juin 2016, le tribunal a :

- déclaré recevable l'assignation et l'action de M. Yannis B... Y...,

- dit que le jugement de divorce du 14 avril 2008, par suite de l'acquiescement irrévocable de Roger Y..., a autorité de chose jugée et que la condition suspensive de l'acte de partage dressé le 14 février 2008 étant réalisée, celui-ci avait pris effet,

- débouté M. Yannis B... Y... de sa demande en nullité pour vices de consentement de la convention du 27 décembre 2007 et des actes subséquents, soit le partage notarié de la communauté et de l'indivision post-communautaire entre Denise A... divorcée Y... et Roger Y... du 14 février 2008 ainsi que les donations du 14 février 2008 consenties par ce dernier à son fils, M. Frédéric Y..., et à ses deux petits-enfants, Mme Allison Y... et M. Kévin Y...,

- dit que les donations directes du 14 février 2008 excédaient la quotité disponible et devaient faire l'objet d'une réduction,

- ordonné une expertise et désigné pour y procéder Mme Ketty C... pour évaluer la valeur vénale du bien immobilier au jour du partage, par référence à l'état du bien à l'époque de la donation le 14 février 2008, sis [...] et celle de la marque 'La Potinière' au jour du partage, par référence à celle inscrite au registre national des marques au nom de Roger Y... au moment de la donation du 14 février 2008,

- ordonné les opérations de compte, liquidation et partage du régime matrimonial des époux X... Y... (et non pas du régime matrimonial des époux A... Y... comme mentionné par erreur dans le jugement) et de la succession de Roger Y...,

- désigné Me Xavier D... pour procéder aux opérations de compte, liquidation et partage,

- désigné le juge de la mise en état de la 1ère chambre du tribunal de grande instance de LYON pour surveiller les opérations et faire rapport en cas de difficultés,

- débouté du surplus des demandes,

- ordonné l'exécution provisoire,

- dit que les dépens seraient tirés en frais privilégiés de partage.

Par acte du 23 mars 2016, M. Yannis B... Y... a interjeté appel à l'encontre de M. Frédéric Y..., de Mme Allison Y... et de M. Kevin Y....

Par acte du 19 août 2016, M. Frédéric Y..., M. Kévin Y... et Mme Allison Y... ont formé un appel provoqué à l'encontre de Mme Marie-Claire X... veuve Y....

Au terme de conclusions notifiées le 8 janvier 2018, M. Yannis B... Y... demande à la cour de :

- réformer le jugement déféré, sauf en ce qu'il a dit que l'article 1360 du code de procédure civile n'avait pas vocation à s'appliquer et que l'assignation était recevable, qu'il avait intérêt à agir, que les donations directes du 14 février 2008 excédaient la quotité disponible et devaient faire l'objet d'une réduction, en ce qu'il a ordonné une expertise pour évaluer le tènement immobilier et la marque, et en ce qu'il a désigné Me D..., notaire pour procéder aux opérations de compte, liquidation et partage du régime matrimonial A...-Y... et de la succession de Roger Y...,

- déclarer nul l'acte d'acquiescement au jugement de divorce établi par M. Frédéric Y... qu'aurait signé Roger Y... le 17 avril 2008,

- ordonner une expertise graphologique pour vérifier l'authenticité de la signature de Roger Y... sur l'acte d'acquiescement du 17 avril 2008 et enjoindre à cette fin M. Frédéric Y... de produire l'original de l'acte d'acquiescement qu'il reconnaît détenir,

- dire que la condition suspensive d'homologation par le tribunal stipulée à la convention du 27 décembre 2007 et à l'acte notarié du 14 février 2008 n'a pas été réalisée, rendant sans effet et caduc tant la convention que l'acte de partage et les donations subséquentes,

- dire que le mariage de Denise A... et Roger Y... a été dissous par le décès de Denise A... le [...],

- dire en conséquence que la convention sous seing privé entre époux du 27 décembre 2007 et l'acte notarié de partage de la communauté et de l'indivision post communautaire A.../Y... du 14 février 2008 passé sous la condition suspensive du jugement de divorce l'homologuant, ainsi que les donations du 14 février 2008, sont nuls et privés d'effets, et ne peuvent recevoir exécution au visa de l'article 1451 du code civil,

- annuler les donations consenties suivant acte du 14 février 2008, effectuées en vertu du partage privé d'effets,

subsidiairement,

- dire que la convention sous seing privé du 27 décembre 2007 (et le partage et les donations subséquentes) ne peut être qualifiée de transaction faute de référence à l'article 2052 du code civil et faute de concessions réciproques,

- annuler la convention et le partage et les donations subséquentes, au visa de l'article 2053 du code civil vu les erreurs grossières sur l'objet de la contestation, et pour lésion,

- annuler la convention sous seing privé, le partage et les donations subséquentes qui n'entrent pas dans les prévisions de l'article 265-2 du code civil,

- dire et juger que la transaction-partage ne peut être opposée dès lors que M. Frédéric Y... n'en a pas respecté les conditions,

- annuler pour vices du consentement (violence morale, erreurs substantielles et absence de cause) la convention sous seing privé du 27 décembre 2007, et le partage notarié de la communauté et de l'indivision post communautaire entre Denise A... et Roger Y... du 14 février 2008, ainsi que les donations en découlant du 14 février 2008,

- prononcer la rescision pour lésion du partage et ordonner en conséquence un nouveau partage,

plus subsidiairement,

- qualifier de donations indirectes l'abandon par Roger Y... à Denise A... de ses droits indivis en usufruit sur l'immeuble sis [...], la cession de l'actif immobilier de la SCI LA GLACERIE pour un prix équivalent au passif bancaire, les reconnaissances par Roger Y... de la propriété en propre de Mme Denise A... sur l'entreprise LA POTINIERE et le droit au bail du local sis [...],

- dire que ces donations indirectes excèdent la quotité disponible et doivent faire l'objet d'une réduction,

en toute hypothèse,

- ordonner un nouveau partage du régime matrimonial des époux A... Y...,

- dire que doivent figurer à l'actif des biens à partager par moitié entre les époux, outre les biens indiqués au partage du 14 février 2008 :

' l'entreprise LA POTINIERE,

' le droit au bail du local sis [...],

- ordonner une expertise complémentaire pour déterminer la valeur actuelle de l'entreprise LA POTINIERE initialement inscrite au RCS de LYON sous le n°395 405 335, des parts sociales de la SCI LA GLACERIE, du droit au bail des locaux sis [...], de l'immeuble sis [...], de la marque LA POTINIÈRE, même si ces biens ont été aliénés, aux frais avancés de M. Frédéric Y...,

- condamner M. Frédéric Y... tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentant légal de M. Kevin Y... et de Mme Allison Y..., à restituer les fruits et intérêts perçus au titre de l'attribution des biens (nue propriété de la moitié indivise de l'immeuble sis [...] et nue propriété de la marque "LA POTINIERE"), objets du partage, depuis le 14 février 2008,

- déclarer l'arrêt à intervenir commun et opposable à Mme Marie-Claire X... veuve Y...,

- débouter les consorts Frédéric Y... de toutes leurs prétentions,

- condamner solidairement les consorts Frédéric Y... à lui payer la somme de 10000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens en ce compris les frais d'expertise avec faculté de distraction au profit de la SELARL B2R & ASSOCIES.

Au terme de conclusions, notifiées le 14 mars 2018, M. Frédéric Y..., Mme Allison Y... et M. Kevin Y... demandent à la cour de :

- à titre principal, déclarer irrecevable l'assignation délivrée le 12 janvier 2012 à la requête de M. Yannis B... Y..., réformant ce faisant de ce chef la décision déférée,

- à titre subsidiaire, confirmer le jugement du 3 mars 2016 rectifié le 22 juin 2016 en ce qu'il a :

' dit que le jugement de divorce du 14 avril 2008, par suite de l'acquiescement irrévocable de Roger Y..., avait autorité de la chose jugée et que la condition suspensive de l'acte de partage dressé le 14 février 2008 étant réalisée, celui-ci avait pris effet,

' débouté M. Yannis B... Y... de sa demande en nullité pour vice du consentement de la convention du 27 décembre 2007 et des actes subséquents, soit le partage notarié de la communauté et de l'indivision post-communautaire entre Denise A... et Roger Y... du 14 février 2008 ainsi que les donations du 14 février 2008 consenties par ce dernier à leur profit,

' ordonné les opérations de compte, liquidation et partage du régime matrimonial des époux X... Y... et de la succession de Roger Y... décédé le 27 octobre 2008,

- infirmer le jugement pour le surplus,

- statuant à nouveau, dire n'y avoir lieu en l'état d'ordonner la réduction des donations directes du 14 février 2008, soit la donation de la nue-propriété de la moitié indivise du bien immobilier sis [...] par Roger Y... à Mme Allison Y... et M. Kévin Y... et la donation de la nue-propriété de la marque «LA POTINIERE» par Roger Y... à M. Frédéric Y..., ni d'ordonner une expertise,

- dire que les opérations de compte, liquidation, partage tant du régime matrimonial des époux X... Y... que de la succession de Roger Y... se feront en présence de M. Frédéric Y..., Mme Allison Y... et M. Kevin Y... dûment appelés,

- rejeter toutes autres demandes de M. Yannis B... Y... comme irrecevables ou à tout le moins mal fondées, et l'en débouter,

à titre infiniment subsidiaire, si la cour considérait le mariage des époux Y... A... dissous par décès et non par divorce ou s'il était retenu quelque nullité du partage d'ores et déjà intervenu,

- prononcer la nullité pour erreur de la renonciation à la succession de Roger Y... par M. Frédéric Y... et la nullité subséquente des renonciations à succession de ses enfants,

- dire que M. Frédéric Y... retrouvera dès lors sa faculté d'option héréditaire,

- reporter la date de dissolution de la communauté Y... A... au 1er janvier 1994,

- ordonner la liquidation tant du régime matrimonial des époux Y... A... que des époux Y... X..., et les opérations de compte, liquidation et partage de la succession de M. Roger Y... et désigner tel notaire qu'il plaira pour y procéder,

- donner acte à M. Frédéric Y... qu'il se réserve la faculté de demander que

soient rapportées à succession paternelle les primes manifestement excessives qui auraient pu être versées sur les contrats d'assurance-vie de Roger Y...,

- en tout état de cause, condamner solidairement ou in solidum M. Yannis B... Y... et Mme Marie-Claire X... à payer la somme de 10 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d'appel avec distraction au profit de la SCP RIEUSSEC & Associés.

Au terme de conclusions notifiées le 2 février 2018, Mme Marie-Claire X... veuve Y... demande à la cour de :

- lui donner acte de ce qu'elle entend s'en rapporter à justice,

- débouter M. Frédéric Y..., Mme Allison Y... et M. Kevin Y... de leurs demandes tendant à la voir condamner à leur payer la somme de 10000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, in solidum avec M. Yannis B... Y....

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de l'action de M. Yannis B... Y...

Les consorts Frédéric Y... soulèvent l'irrecevabilité de l'action de l'appelant au visa de l'article 1360 du code civil au motif qu'elle s'analyse en une action mixte, en nullité mais également en partage, et que l'assignation introductive d'instance ne contient pas le descriptif sommaire du patrimoine à partager ni ne précise les intentions du demandeur et les diligences entreprises pour parvenir à un partage amiable, précisions exigées à peine d'irrecevabilité par la disposition susvisée.

L'appelant soutient que son action est recevable puisqu'il ne s'agit pas d'une action en partage et que les dispositions de l'article 1360 du code de procédure civile ne s'appliquent pas, qu'en tout état de cause, l'irrégularité invoquée a pu être régularisée dès lors qu'il a suffisamment décrit le patrimoine à partager et que les propositions de partage amiable n'ont pas abouti.

C'est à bon droit et par de justes motifs, adoptés par la cour, que le premier juge a dit que l'article 1360 n'était pas applicable en l'espèce et rejeté la fin de non recevoir soulevée de ce chef.

Sur le caractère définitif du jugement de divorce

L'appelant soutient :

- que l'acquiescement au divorce signé le 17 avril 2008 est équivoque et nul dès lors que celui-ci a été obtenu dans la précipitation, alors que Roger Y... était malade et affaibli, avant que le jugement de divorce ne soit notifié, sans que Roger Y... puisse consulter son avocat, sans qu'il se fasse remettre de copie et sans comprendre la portée de l'acte signé,

- que Roger Y... n'a par la suite pas cessé de contester l'acte signé, se considérant toujours comme 'veuf et non divorcé',

- que Denise A... a jugé nécessaire de faire signifier le jugement de divorce pour faire courir le délai d'appel, que la signature apposée sur l'acte diffère de celle de Roger Y...,

- que le virement de 1 500 € reçu sur son compte au titre de la redevance de la marque 'La Potinière' ne constitue pas un acte positif, volontaire et non équivoque, que la concession de la marque 'La Potinière' ne se réfère qu'au décès de Denise A... et non au divorce, de sorte que le jugement de divorce n'avait pas force de chose jugée à la date du décès de Mme Denis A... et que Roger Y... était veuf lors de son remariage.

Les consorts Frédéric Y... soutiennent :

- que l'acte d'acquiescement de Roger Y... est valable puisque M. Yannis B... Y... ne démontre l'existence d'aucune contrainte physique ou pression morale déterminante du consentement de Roger Y...,

- que si la détérioration de l'état de santé de Roger Y... et de Denise A... a conduit à accélérer la procédure de divorce à leur demande, leurs facultés mentales n'ont pas été affectées,

- que la signature de l'acte d'acquiescement de Roger Y... est similaire aux spécimens produits et Roger Y... reconnaît lui-même avoir effectivement signé l'acte, ce qui rend inutile toute expertise graphologique,

- que Roger Y... avait conscience de la portée de l'acte d'acquiescement, comme le démontre sa lettre par laquelle il dit renoncer à son acte d'acquiescement,

- qu'en tout état de cause, l'erreur sur la portée juridique d'un acte ne peut entraîner la nullité de ce dernier,

- que la présence de l'avocat de Roger Y... lors de la signature de l'acte d'acquiescement litigieux n'était pas requise, d'autant que celui-ci constitue l'aboutissement d'une procédure d'accord entre les parties au cours de laquelle celles-ci ont pu bénéficier du conseil de professionnels,

- que M. Yannis B... Y... ne démontre pas l'existence d'une contrainte exercée à l'encontre de Roger Y...,

- que l'acquiescement de Roger Y... est exprès et sans équivoque, renforcé par des actes valant acquiescement implicite au jugement de divorce, et irrévocable.

Selon l'article 409 du code de procédure civile, l'acquiescement au jugement emporte soumission aux chefs de celui-ci et renonciation aux voies de recours. L'acquiescement est irrévocable et il n'est pas possible d'y renoncer de sorte que le courrier de M. Roger Y... en date du 25 avril 2008 par lequel il indique renoncer à son acquiescement est dépourvu de tout effet.

Néanmoins, s'agissant d'un acte juridique, l'acquiescement doit être exempt de tout vice du consentement et sa validité peut être remise en cause sur le fondement du dol, de la violence ou de l'erreur.

Selon l'article 287 du code de procédure civile, si l'une des parties déclare ne pas reconnaître l'écriture qui est attribuée à son auteur, le juge vérifie l'écrit contesté.

En l'espèce, il résulte des spécimens de signatures figurant sur des actes contemporains de l'acte d'acquiescement, convention du 27 décembre 2007, concession de la marque La Potinière en date du 30 mai 2008, mais également sur de multiples documents produits par l'appelant, en particulier la lettre datée du 6 octobre 2008 par laquelle M. Roger Y... demande que sa paternité sur Yannis B... soit reconnue officiellement, que la signature figurant sur l'acte d'acquiescement est bien celle de M. Roger Y... de sorte que cet acte fait foi.

Aucune disposition légale ne subordonne la validité d'un acte d'acquiescement à sa signature en présence d'un avocat.

La signification de la décision n'a pas pour effet de rendre inefficace l'acte d'acquiescement.

Selon l'article 1109 (devenu 1130) du code civil, l'erreur et la contrainte constituent une cause de nullité des engagements. L'erreur n'est une cause de nullité que si elle est excusable.

Selon l'article 489 devenu 414-1 du code civil, pour faire un acte valable, il faut être sain d'esprit et c'est à ceux qui agissent en nullité pour cette cause de prouver l'existence d'un trouble mental au moment de l'acte.

En l'espèce, l'appelant ne produit aucun élément susceptible de faire la preuve que M. Roger Y... aurait signé l'acte d'acquiescement sous l'empire d'un trouble mental, d'une contrainte physique ou d'une pression morale, étant relevé que le jugement auquel il a acquiescé constitue l'aboutissement d'une procédure d'accord entre les parties au cours de laquelle celles-ci ont bénéficié du conseil de professionnels et qu'il ressort de ses écrits contemporains de l'acte d'acquiescement que, s'il était affaibli par la maladie, les facultés intellectuelles de M. Y... étaient intactes.

L'acte d'acquiescement litigieux porte la mention manuscrite 'bon pour acquiescement au jugement' de sorte que M. Roger Y... n'a pas pu se méprendre sur le sens de l'acte, ce d'autant que celui-ci était dans la parfaite logique de l'accord qui constituait l'unique fondement de la décision, cette décision concluant une procédure dont M. Y... avait seul pris l'initiative plusieurs années auparavant.

C'est dès lors à bon droit et par de justes et pertinents motifs, adoptés par la cour, que le tribunal a retenu que le jugement de divorce avait acquis l'autorité de la chose jugée avant le décès de Mme A... survenu le [...].

Sur l'homologation de l'acte de partage

M. Yannis B... Y... fait valoir que la condition suspensive de l'acte de partage du 14 février 2008 n'a pas été réalisée puisque le partage n'a pas été homologué mais seulement constaté par le juge.

Les consorts Frédéric Y... soutiennent en réponse :

- que l'homologation de l'acte notarié du 14 février 2008 n'est ni nécessaire ni obligatoire, si bien que le seul fait que le juge aux affaires familiales ait prononcé le divorce suffit à réaliser la condition suspensive, la référence à l'homologation n'étant qu'une clause de style, ce qui ressort de la commune intention de Roger Y... et de Denise A...,

- que le divorce ayant été prononcé le 14 avril 2008, l'acte de partage a valablement produit ses effets,

- que seule la convention conclue le 27 décembre 2007 a un objet plus large que la seule liquidation du régime matrimonial, ce qui n'est pas le cas de l'acte notarié du 14 février 2008 qui ne mentionne la prestation compensatoire, les dommages et intérêts et le protocole régularisé avec M. Frédéric Y... qu'au titre de l'exposé.

Le jugement de divorce du 14 avril 2018 prononce la dissolution du régime matrimonial ayant existé entre les époux et constate que les époux ont procédé dans les conditions des articles 265-2 et 1451 à la liquidation de leur régime matrimonial ayant donné lieu à un acte de partage dressé le 14 février 2008 par Me E..., notaire à OULLINS, et dit en conséquence n'y avoir lieu à désignation d'un notaire.

L'article 265-2 du code civil édicte que les époux peuvent, pendant l'instance en divorce, passer toutes conventions pour la liquidation et le partage de leur régime matrimonial. Ce texte n'impose pas pour la validité du partage une homologation par le juge.

L'article 1451 prévoit, s'agissant des régimes communautaires, que les conventions passées en application de l'article 265-2 sont suspendues, quant à leurs effets, jusqu'au prononcé du divorce et qu'elles ne peuvent être exécutées, même dans les rapports entre époux, que

lorsque le jugement a pris force de chose jugée. Les époux séparés de biens disposent quant à eux de toute latitude pour procéder à la liquidation et au partage de leurs biens y compris en dehors de toute procédure de divorce.

L'article 1175 prévoit que toute condition doit être accomplie de la manière que les parties ont vraisemblablement voulu et entendu qu'elle le fût.

En l'espèce, l'acte de partage prévoyait qu'il était conclu 'sous condition suspensive du prononcé du divorce' et que la convention prendrait effet par son homologation par le juge aux affaires familiales dans les termes des articles 232 du code civil et 1099 du code de procédure civile devenue définitive. Or le renvoi à ces dispositions est erroné dès lors qu'elles sont relatives au seul divorce par consentement mutuel et que la procédure suivie par les époux était celle du divorce pour altération définitive du lien conjugal.

En tout état de cause, cet acte n'érige en condition suspensive que le prononcé de divorce. Les parties ont elles-mêmes fait cette interprétation de l'acte en indiquant dans leurs conclusions concordantes qu'elles avaient procédé au partage sous condition suspensive du prononcé du divorce de leur régime matrimonial et demandaient de la même manière qu'il soit constaté que la liquidation avait d'ores et déjà été opérée sous réserve du jugement à intervenir au moyen de l'acte de Me E....

La condition suspensive s'étant réalisée, la convention du 14 février 2008 a pris effet par le prononcé du divorce devenu irrévocable par l'acquiescement des époux.

Sur l'action en rescision pour lésion

M. Yannis B... Y... soutient que conformément à l'article 887 de l'ancien code civil applicable à l'espèce, le partage peut être rescindé pour lésion de plus du quart sur la part de Roger Y..., action recevable car tendant aux mêmes fins que l'action en nullité et dont le délai de prescription a été interrompu par l'assignation du 12 janvier 2012.

Les consorts Frédéric Y... font valoir que la loi du 23 juin 2006 entrée en vigueur au 1er janvier 2007 s'applique en l'espèce puisque l'instance relative au partage n'a été introduite que postérieurement, si bien que l'action en rescision pour lésion ne peut être exercée ; qu'en outre, l'action en complément de part est prescrite.

Selon l'article 47 II de la loi n°2006-728 du 23 juin 2006, entrée en vigueur le 1er janvier 2007, "Les dispositions des articles 2, 3, 4, 7 et 8 de la présente loi ainsi que les articles 116, 466, 515-6 et 813 à 814-1 du code civil, tels qu'ils résultent de la présente loi, sont applicables, dès l'entrée en vigueur de la présente loi, aux indivisions existantes et aux successions ouvertes non encore partagées à cette date.

Par dérogation à l'alinéa précédent, lorsque l'instance a été introduite avant l'entrée en vigueur de la présente loi, l'action est poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne.

Cette loi s'applique également en appel et en cassation.'

L'article 4 de la loi de juin 2006 comporte les dispositions du code civil régissant le partage judiciaire (art. 840 à 842 dans leur rédaction de 2006).

En l'espèce, le partage de l'indivision post-communautaire a été ordonné par jugement du 27 août 2003 mais au 1er janvier 2007, l'indivision était existante et non encore partagée. Toutefois, l'instance en partage a pris fin par le jugement de divorce.

La dérogation édictée par le deuxième alinéa de l'article 47 II susvisé visait uniquement à éviter un basculement normatif au cours d'une même instance.

L'instance visant à contester le partage n'a pas été introduite avant l'entrée en vigueur de la loi du 23 juin 2006 de sorte qu'elle est soumise à ladite loi.

L'article 889 du code civil, dans sa rédaction issue de ladite loi, édicte que, lorsque l'un des copartageants établit avoir subi une lésion de plus du quart, le complément de sa part lui est fourni, au choix du défendeur, soit en numéraire, soit en nature.

Il en résulte que l'action en rescision pour lésion permettant l'anéantissement du partage a disparu suite à la réforme de 2006 et que le copartageant lésé ne dispose que d'une action en complément de part, distincte de l'action en nullité pour vice du consentement.

Selon l'article 889 alinéa 2, l'action en complément de part se prescrit par deux ans à compter du partage.

L'action ayant été introduite plus de deux ans après le partage, M. Yannis B... Y... serait irrecevable à agir en complément de part.

Sur l'action en nullité pour vices du consentement

Sur la recevabilité

Les consorts Frédéric Y... soutiennent que M. Yannis B... Y... est privé de tout intérêt à agir en nullité des actes contestés dès lors qu'au cours de la procédure d'adoption, il avait affirmé que l'adoption ne changerait rien à la liquidation de la succession de Roger Y....

C'est par de justes motifs, adoptés par la cour, que le premier juge a retenu qu'il ne ressortait pas de ces propos la renonciation non équivoque à l'exercice de toute action en contestation du partage et que l'intéressé était recevable à agir.

Sur la nullité pour erreur

L'appelant fait valoir :

- que c'est par erreur que M. Roger Y... a reconnu que le bail afférent aux locaux commerciaux sis rue Jean de Tournes avait été régularisé à son nom alors qu'il aurait dû l'être à celui de Mme A... et que l'entreprise LA POTINIERE dépendait du patrimoine propre de Mme A... alors qu'elle dépendait de l'indivision post communautaire,

- que cette erreur entache la validité de la convention de partage,

- que Roger Y... a également commis une erreur sur l'existence et la quotité des droits au motif que les biens figurant à l'acte de partage sont sous-évalués, en particulier celles de l'immeuble sis [...], la marque LA POTINIERE, et qu'une erreur sur la valeur 'qualitative' d'une chose constitue une erreur sur la substance,

- que la convention du 27 décembre 2007 ne vise pas l'article 2052 du code civil et qu'elle ne fait état d'aucune concession réciproque ni d'aucun différend de sorte qu'elle ne peut être qualifiée de transaction,

- que Mme A... n'a concédé aucune concession, qu'il n'est pas justifié qu'elle ait travaillé pendant 45 ans avec son mari sans être rémunérée,

- que le poste de frais de l'indivision post communautaire n'est ni détaillé ni justifié et sans commune mesure en valeur avec les multiples abandons de droits par M. Roger Y...,

- que l'indemnité de 46 000 € est dérisoire, qu'il n'est pas justifié de son règlement et qu'elle ne saurait s'analyser en une concession,

- que la redevance à titre viager sa vie durant de 1 500 € mensuels n'a été payée qu'une fois de sorte que la transaction n'a pas été exécutée,

- que le partage est également nul pour absence de cause dès lors qu'un bien appartenant en propre à l'un des copartageants a été compris par erreur dans la masse partageable, que les abandons des droits par M. Roger Y... n'ont aucune contrepartie proportionnelle et ne reposent sur aucune cause objective.

Les consorts Y... font valoir en réponse :

- qu'en application de l'article 887 du code civil, l'erreur n'est admise que si elle porte sur la propriété de biens compris dans la masse partageable,

- que la convention du 27 décembre 2007 et l'acte authentique du 14 février 2008 ne peuvent être attaqués pour erreur de droit, ayant un caractère transactionnel,

- que la nullité de la convention du 27 décembre 2007 et de l'acte notarié du 14 février 2008 ne peut être invoquée au motif que postérieurement au partage, Roger Y... a aliéné son lot,

- que l'erreur ne peut être admise dès lors que ce n'est pas à tort que le bail commercial n'a pas été inclus dans la masse partageable,

- que le partage étant transactionnel, il ne peut être remis en cause pour erreur, peu important que les actes ne mentionnent pas expressément l'article 2052 du code civil,

- que le caractère transactionnel du partage n'est pas contestable au regard de l'existence du différend relatif au divorce et de l'existence de concessions réciproques, en particulier pécuniaires,

- que la réalité des erreurs invoquées n'est pas démontrée, alors que Roger Y... avait connaissance de la composition du patrimoine à partager et qu'il a pu bénéficier de conseils de professionnels,

- qu'en toute hypothèse, l'erreur est couverte par l'exécution volontaire de la convention litigieuse résultant de la perception des redevances mensuelles relatives à l'usage de la marque 'LA POTINIERE' par Roger Y...,

- que l'absence de cause ne peut être invoquée que sous l'angle de l'erreur, laquelle ne peut être revendiquée.

Selon l'article 887 alinéa 2 du code civil, dans sa rédaction issue de la loi du 23 juin 2006, le partage peut être annulé pour cause d'erreur, si celle-ci a porté sur l'existence ou la quotité des droits des copartageants ou sur la propriété des biens compris dans la masse partageable.

En l'espèce, les erreurs alléguées portent sur des biens exclus de la masse partageable de sorte qu'aucune erreur sur les biens compris dans la masse partageable n'est alléguée ni démontrée et qu'il ne saurait y avoir nullité de ce chef.

Les erreurs sur l'existence et la quotité des droits invoquées par M. Yannis B... Y... recouvrent en fait une erreur sur la valeur des biens partagés, cette erreur tenant non pas aux qualités substantielles desdits biens ('erreur qualitative') mais à une valorisation inférieure à leur valeur de marché, de sorte qu'il s'agit purement et simplement d'erreurs sur la valeur non susceptibles de constituer une cause de nullité en application de l'article 887-2.

De même, la cause objective d'un partage n'est pas la contre-prestation mais la recherche de son effet déclaratif permettant aux indivisaires de substituer à des droits indivis des droits privatifs de sorte que l'absence de contrepartie proportionnelle aux abandons des droits de M. Roger Y... ne caractérise pas une absence de cause.

Selon l'article 2044 du code civil, la transaction est un contrat par lequel les parties terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître. La transaction suppose l'existence de concessions réciproques qu'il convient de caractériser.

La convention du 27 décembre 2007 prévoit :

- la reconnaissance par M. Roger Y... que Mme Denise Y... est la seule et unique propriétaire en propre et à titre personnel de l'entreprise LA POTINIERE,

- la reconnaissance par M. Roger Y... que le bail du 1er octobre 2005 portant sur la boutique [...] (2°) appartenant à l'entreprise LA POTINIERE a été inscrit à son nom par erreur et sa renonciation à toute revendication sur la titularité comme l'usage de ce bail en contrepartie du règlement forfaitaire par Mme Denise A... d'une somme de 46 000 €,

- la reconnaissance par Mme Denise A... que M. Roger Y... est le seul propriétaire en propre et à titre personnel de la marque "LA POTINIERE",

- la donation par Roger Y... à Frédéric Y..., par préciput et hors part, de ses droits de la nue-propriété de la marque LA POTINIERE,

- l'accord de M. Roger Y... et M. Frédéric Y..., pour consentir une concession de la marque pour 30 ans à l'entreprise LA POTINIERE moyennant une redevance fixe et définitive de 1 500 € mensuelle qui sera réglée à Roger Y... en sa qualité d'usufruitier et sa vie durant,

- l'abandon par M. Roger Y... à Mme Denise A... de ses droits indivis en usufruit sur l'appartement sis [...],

- la donation par M. Roger Y... à ses deux petits enfants (Allison et Kevin Y..., enfants de Frédéric Y...) de ses droits indivis en nue-propriété sur l'appartement sis [...] (6°),

- la reconnaissance par M. Roger Y... que Mme Denise A... est pleinement propriétaire de la moitié indivise restante de cet appartement,

- la démission de M. Roger Y... de la gérance de la SCI LA GLACERIE au profit de Mme Denise A... qui mandate M. Frédéric Y... dans la mission de négocier avec le CRÉDIT LYONNAIS l'apurement de sa créance sur la SCI, M. Frédéric Y... devant régler la créance avec le produit de la cession de l'actif immobilier de la SCI LA GLACERIE à son profit à concurrence d'un prix de cession égal au montant négocié avec le CRÉDIT LYONNAIS,

- la renonciation à toute demande dans le cadre de la procédure de divorce autre que le prononcé du divorce, la transcription de la décision, l'homologation de l'acte de partage et l'autorisation de Madame à continuer à porter le nom de l'époux, chaque partie conservant la charge de ses frais et dépens.

C'est par de justes motifs, adoptés par la cour, que les premiers juges ont retenu que l'absence de mention de l'article 2052 du code civil dans l'acte ne le privait pas de la qualification de transaction.

S'agissant de l'existence de concessions réciproques, il est incontestable que les parties ont entendu mettre un terme à plusieurs litiges à savoir le partage de l'indivision post communautaire qui perdurait depuis plus de 10 ans, le jugement du 27 août 2003 étant resté lettre morte, et à la procédure de divorce pendante [...] mais sur fond d'une séparation remontant à plus de dix ans également.

Cette analyse est en tant que de besoin confirmée par le courrier adressé par M. Roger Y... à Mme A... le 19 décembre 2005 au terme duquel il invitait son épouse à régler leurs différends 'amicalement, efficacement et définitivement et cela dans le plus bref délai' en rappelant 'le temps joue contre nous' et 'les affaires réglées, le climat familial s'en trouvera allégé'.

Cette transaction a été discutée par les parties qui étaient assistées chacune de leur conseil et leur permettait de sortir de la situation inextricable qui s'était créée sur le plan patrimonial au cours de 10 ans de séparation.

Il est d'autre part incontestable que les parties, toutes deux en mauvaise santé, souhaitaient parvenir à une solution rapide de leurs litiges, preuve en étant que leurs conseils respectifs ont demandé de façon concordante la fixation de l'audience de divorce dès la transaction conclue et que M. Roger Y..., qui souhaitait refaire sa vie, a épousé Mme X... moins de trois mois après le prononcé du divorce. Ainsi, est établie l'existence d'une contrepartie morale à la transaction.

M. Roger Y... a renoncé à toute revendication sur la titularité et l'usage du bail commercial du 1er octobre 2005 sur les locaux sis rue Jean de Tourne en contrepartie du versement par Mme A... d'une indemnité de 46 000 € versée entre les mains du Trésor Public en paiement de dettes fiscales de M. Roger Y.... L'acte en a donné quittance à Mme A... de sorte que M. B... Y..., qui supporte la charge de la preuve, n'est pas fondé à soutenir que la preuve de l'exécution de cet engagement n'est pas rapportée.

Il ne saurait d'autre part être prétendu que cette contrepartie serait dérisoire alors que M. Roger Y... n'était plus inscrit au registre du commerce depuis le mois de février 1994, que, ne pouvant prétendre au bénéfice du statut des baux commerciaux réservé aux commerçants inscrit au RCS, il n'avait aucun titre à obtenir le renouvellement du bail à son nom en 2005, que Mme A..., régulièrement inscrite au registre du commerce, était la seule exploitante du fonds sis dans les locaux et qu'elle payait seule le loyer. Il convient de relever que M. Roger Y... lui-même rappelait à Mme A..., dans son courrier précité du 19 décembre 2005, qu'elle était entièrement responsable des dettes de l'entreprise et qu'étant en séparation de biens, il n'était pas concerné.

Mme A... s'est également acquittée des frais de l'indivision post communautaire s'agissant de l'ancien domicile conjugal, charges de copropriété, assurance habitation, taxes foncières de sorte que la compensation entre cette créance et l'indemnité due par elle pour l'occupation de l'immeuble n'est pas sans contrepartie.

Mme A... a enfin renoncé à un divorce pour faute dans le cadre duquel elle pouvait prétendre à dommages et intérêts, M. Roger Y... l'ayant quittée pour une autre femme, et le divorce a été prononcé pour altération définitive du lien conjugal comme le demandait l'époux.

Il ressort en outre de son relevé de carrière ORGANIC que Mme A... n'a bénéficié d'aucun trimestre de retraite entre 1956 et 1995 et qu'elle n'a cotisé que pendant dix ans à compter de cette date de sorte que sa prétention à une prestation compensatoire sous forme d'abandon de droits du mari dans l'appartement du boulevard des Belges et de l'indemnité due pour son occupation privative de celui-ci était sérieuse au regard de la disparité prévisible dans les conditions de vie des époux à l'âge de la retraite.

Dans le cadre d'un divorce pour faute, M. Roger Y... n'avait en tout état de cause aucune chance de percevoir une quelconque prestation compensatoire, la procédure de divorce ayant été introduite avant le 1er janvier 2005, de sorte qu'il y a bien eu concessions de la part de l'épouse.

S'agissant de la marque LA POTINIERE, M. Roger Y... ayant consenti la donation de la nue propriété de la marque, il ne disposait plus que de l'usufruit qui est par hypothèse viager de sorte qu'il ne pouvait prétendre à la redevance correspondant à la concession de la jouissance de ladite marque que sa vie durant, sans que la notion d'aléa ait lieu d'interférer. Aucun élément n'est produit permettant d'affirmer que la redevance mensuelle convenue de 1500 € serait dérisoire.

Un ensemble de concessions réciproques non dépourvues de contrepartie s'agissant de celles consenties par M. Roger Y... est ainsi caractérisé et c'est par une exacte analyse que le tribunal a retenu l'existence d'une transaction.

Selon l'article 2052 du code civil, les transactions ont, entre les parties, autorité de la chose jugée en dernier ressort. Elles ne peuvent être attaquées ni pour cause d'erreur ni pour cause de lésion.

L'exclusion de l'erreur de droit a pour fondement l'idée que celui qui a renoncé à certaines prétentions dans le cadre d'une transaction ne peut la remettre en cause au prétexte qu'il s'est mépris sur l'existence ou la portée de la règle de droit applicable.

Les erreurs invoquées par Yannis B... Y... quant à la propriété des biens sont des erreurs de droit. Elles portent sur les droits objet de la contestation que la transaction avait pour but de terminer de sorte qu'elle ne sauraient constituer une cause de nullité de la transaction et que c'est à bon droit que le premier juge a écarté ce chef de contestation en application de la disposition susvisée.

Sur la nullité pour violence

L'appelant soutient que l'acte de partage du 14 février 2008 et les donations subséquentes ont été consentis par M. Roger Y... qui était alors affaibli par la maladie sous l'effet d'une violence morale et en veut pour preuve des courriers de M. Frédéric Y... à son père, l'un en date du 26 juillet 2006 indiquant 'il est bien évident que tout le patrimoine de Denise Y... ainsi que celui de Roger Y... est en première ligne (appartement, dette fiscale à payer, magasins etc) [...] Je vais passer la journée d'aujourd'hui à monter les dossiers et les plaintes avec les avocats pour qu'ils puissent être déposés demain matin', l'autre en date du 28 novembre 2007 exigeant 'un accord de principe avant le 7 décembre' et menaçant M. Roger Y..., à défaut, de procédures judiciaires concernant ses affaires des 25 dernières années, ainsi que des courriels de M. Roger Y..., l'un à son fils en date du 8 mai 2007 reprochant à celui-ci d'entretenir le conflit avec un 'chantage odieux' avec un esprit de 'haine', un autre courriel du 5 juin 2008 intitulé 'je lâche tout', dans lequel il indique à son conseil, 'Frédéric a gagné, il ramasse le pactole' et une attestation de M. Maurice Y..., déclarant que son frère Roger, vu au mois de juin 2008, lui avait expliqué 'tout ce qu'il avait entrepris comme démarches pour tenter de défendre ses intérêts et ceux de ses proches dont son fils Yannis'.

C'est par de justes et pertinents motifs, adoptés par la cour, que le premier juge a rejeté la demande de nullité de la convention du 27 décembre 2007 et des actes authentiques de partage et donation du 14 février 2008 pour violence morale.

Sur l'action en réduction des donations

L'appelant soutient :

- que la succession de Roger Y... ne comportant pas d'actif, que la donation du bien immobilier sis boulevard des Belges et celle de la marque la Potinière portent atteinte à la réserve de sorte qu'elles doivent donner lieu à réduction en application des articles 913 et 922 du code civil,

- que l'abandon par M. Roger Y... de ses droits en usufruit sur l'immeuble du boulevard des Belges, sa renonciation à ses droits dans l'entreprise LA POTINIERE, au droit au bail du local sis [...] et de ses droits dans la SCI LA GLACERIE constituent des donations indirectes également soumises à réduction,

- que l'action en réduction des donations est recevable dès lors que l'actif de la succession de M. Roger Y... n'était que de 19 669,72 € et que les consorts Frédéric Y... ne produisent aucun élément faisant apparaître l'existence de primes excessives versées sur de prétendus contrats d'assurance vie ni sur l'acquisition d'un domicile par Mme X....

Les consorts Frédéric Y... font valoir :

- que les abandons consentis dans le cadre du partage ont des contreparties et qu'ils n'ont pas été dictés par une intention libérale de sorte qu'ils ne sauraient être qualifiés de donation,

- que l'action en réduction est irrecevable comme prématurée dès lors qu'aucun inventaire des actifs ni aucune déclaration de la succession n'a été réalisé et que l'existence d'une atteinte à la réserve est à tout le moins incertaine.

C'est par une exacte analyse que le premier juge a écarté l'existence de donations indirectes s'agissant de concessions consenties dans le cadre d'une transaction excluant, par hypothèse, une intention libérale.

Il est prématuré de dire que les donations consenties par acte du 14 février 2008 excèdent la quotité disponible alors que l'actif et le passif de la succession n'ont pas été arrêtés de façon définitive et que l'atteinte à la réserve n'est pas caractérisée. Le jugement sera en conséquence réformé en ce qu'il a dit que les donations excédaient la quotité disponible et qu'elles devaient faire l'objet d'une réduction.

La détermination de la valeur des biens donnés étant nécessaire à la détermination de l'actif de la succession, la décision déférée sera confirmée en ce qu'elle a ordonné une expertise.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Réforme le jugement déféré en ce qu'il a dit que les donations directes du 14 février 2008 excédaient la quotité disponible et devaient faire l'objet d'une réduction ;

Statuant à nouveau,

Dit que la demande de réduction des donations directes du 14 février 2008 à savoir la donation de la nue-propriété de la moitié indivise du bien immobilier sis [...] par M. Roger Y... à Alisson et Kevin Y... et la donation de la nue-propriété de la marque 'LA POTINIERE' par M. Roger Y... à M. Frédéric Y... est prématurée et que ces donations donneront lieu à réduction si elles excèdent la quotité disponible ;

Confirme le jugement déféré en toutes ses autres dispositions ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage.

LE GREFFIERLA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile b
Numéro d'arrêt : 16/08929
Date de la décision : 16/10/2018

Références :

Cour d'appel de Lyon 1B, arrêt n°16/08929 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-10-16;16.08929 ?
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