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11/09/2018 | FRANCE | N°17/04864

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile b, 11 septembre 2018, 17/04864


N° RG 17/04864














Décision du


Tribunal de Grande Instance de LYON


Au fond


du 28 mars 2017





RG : 16/01250


ch n°








SA ALLIADE HABITAT





C/





X...








RÉPUBLIQUE FRANÇAISE


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS








COUR D'APPEL DE LYON





1ère chambre civile B





ARRET DU 11 Septembre 2018











APPELANTE :





La SA D'HLM ALLIADE HABITAT, Prise en la personne de son représentant légal domicilié [...]





Représentée par la SELARL BRUMM & ASSOCIES SPE D'AVOCATS ET D'EXPERTS-COMPTAB LES, avocats au barreau de LYON














INTIMÉ :





M. Laurent X...


né le [...] à LYON (69)


[...]





dé...

N° RG 17/04864

Décision du

Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond

du 28 mars 2017

RG : 16/01250

ch n°

SA ALLIADE HABITAT

C/

X...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRET DU 11 Septembre 2018

APPELANTE :

La SA D'HLM ALLIADE HABITAT, Prise en la personne de son représentant légal domicilié [...]

Représentée par la SELARL BRUMM & ASSOCIES SPE D'AVOCATS ET D'EXPERTS-COMPTAB LES, avocats au barreau de LYON

INTIMÉ :

M. Laurent X...

né le [...] à LYON (69)

[...]

défaillant

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 15 Février 2018

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 18 Juin 2018

Date de mise à disposition : 11 Septembre 2018

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Françoise CARRIER, président

- Michel FICAGNA, conseiller

- Florence PAPIN, conseiller

assistés pendant les débats de CHRISTOPHE GARNAUD, greffier

A l'audience, Françoise CARRIER a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Arrêt rendu par défaut rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Françoise CARRIER, président, et par Myriam MEUNIER, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DE L'AFFAIRE

La société ALLIADE HABITAT a acquis le 19 avril 2012 un tènement immobilier situé [...] cadastré [...] , précédemment acquis par la Communauté Urbaine de LYON suite à un arrêté de péril en date du 23 septembre 2011, à l'effet d'y entreprendre des travaux de rénovation et d'y créer des logements sociaux.

Elle a obtenu le 25 avril 2013 un permis de construire qui l'a autorisée à réhabiliter et à surélever l'immeuble.

M. Laurent X... a formé un recours gracieux contre cet arrêté qui a été rejeté. Par requête enregistrée le 24 octobre 2013, il a alors saisi le tribunal administratif de LYON aux fins d'annulation du permis de construire.

Par jugement du 2 juillet 2015, le tribunal administratif a rejeté son recours et a rejeté les conclusions indemnitaires de la société d'HLM ALLIADE HABITAT formulées sur le fondement de l'article 600-7 du code de l'urbanisme.

Dans l'intervalle, la société ALLIADE HABITAT avait demandé et obtenu le 6 mars 2014 un permis modificatif.

Par acte d'huissier en date du 8 décembre 2015, la société d'HLM ALLIADE HABITAT a fait assigner M. Laurent X... devant le tribunal de grande instance de LYON en réparation de son dommage financier résultant du recours abusif de celui-ci contre l'arrêté lui ayant accordé le permis de construire.

Le défendeur n'ayant pas comparu, le juge a soulevé d'office la fin de non recevoir de l'autorité de la chose jugée de la décision administrative rejetant la demande indemnitaire de la société ALLIADE HABITAT.

Par jugement réputé contradictoire du 28 mars 2017, il a déclaré la demande formée par la société d'HLM ALLIADE HABITAT contre Laurent X... irrecevable et l'a condamnée aux dépens.

La société ALLIADE HABITAT a interjeté appel de ce jugement.

Au terme de conclusions signifiées le 5 septembre 2017, elle demande à la cour de réformer le jugement, de déclarer M. Laurent X... responsable, sur le fondement de l'article 1382 (devenu 1240) du code civil, des préjudices financiers subis du fait de la suspension des travaux et de condamner l'intimé à lui payer la somme de 88 092,84 € à titre de dommages et intérêts, celle de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.

M. Laurent X..., régulièrement assigné par acte du 5 septembre 2017 remis à l'étude d'huissier, n'a pas constitué avocat.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'autorité de la chose jugée

Selon l'article 1355 du code civil, l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité.

La société d'HLM ALLIADE HABITAT fait valoir :

- que sa demande est recevable dans la mesure où l'article L.600-7 du code de l'urbanisme, qui permet au juge administratif d'indemniser les conséquences d'un recours abusif dirigé contre un permis de construire, ne prive pas le pétitionnaire de porter ensuite sa demande indemnitaire devant le juge judiciaire,

- que le fondement édicté par le code de l'urbanisme est distinct de toute autre demande et que la décision rendue par le juge administratif sur ce fondement ne peut pas avoir autorité de la chose jugée dans le cadre d'une demande fondée sur un autre fondement devant le juge judiciaire,

- que sa demande est nouvelle en ce qu'elle repose sur une règle de droit qui n'a pas été invoquée dans le cadre de la procédure administrative,

- que la demande qu'elle a formée devant le juge administratif visait à obtenir des dommages et intérêts en raison d'un préjudice excessif lié au recours contre-le-permis de construire, alors qu'elle demande devant le juge judiciaire l'indemnisation du préjudice en lien de causalité avec la faute reprochée à Laurent X....

Aux termes de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme : 'Lorsque le droit de former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager est mis en oeuvre dans des conditions qui excèdent la défense des intérêts légitimes du requérant et qui causent un préjudice excessif au bénéficiaire du permis, celui-ci peut demander, par un mémoire distinct, au juge administratif saisi du recours de condamner l'auteur de celui-ci à lui allouer des dommages et intérêts'.

Ce texte vient déroger au principe d'irrecevabilité des demandes reconventionnelles en matière de recours en annulation devant le juge administratif, en autorisant le bénéficiaire d'un permis de construire à réclamer des dommages et intérêts devant le juge administratif saisi d'un recours pour excès de pouvoir contre ce permis de construire.

La voie nouvelle ainsi instaurée devant le juge administratif en matière de contentieux de l'excès de pouvoir est strictement encadrée par les conditions de sa mise en oeuvre qui n'ont ni pour objet ni pour effet de priver le bénéficiaire du permis de rechercher la responsabilité du requérant et d'obtenir l'indemnisation intégrale de son préjudice sur le fondement des dispositions de droit commun devant la juridiction civile.

Il en résulte que l'action en indemnisation instaurée par l'article L.600-7, permettant une indemnisation spéciale et limitée devant le juge administratif, n'a ni le même objet ni la même cause que l'action en responsabilité quasi délictuelle de droit commun.

En outre, l'autorité de la chose jugée ne s'attache qu'à ce qui se trouve au dispositif et les motifs, seraient ils le soutien nécessaire du dispositif, n'ont pas autorité de chose jugée.

Il en résulte que la décision de rejet de la demande indemnitaire de la société ALLIADE HABITAT par la juridiction administrative n'a pas autorité de la chose jugée et que l'action indemnitaire de l'appelante devant la juridiction judiciaire est recevable.

Sur le caractère abusif du recours de M. X...

La société ALLIADE HABITAT fait valoir :

- que le recours de M. Laurent X... contre le permis de construire n'avait pas pour objet de défendre ses intérêts légitimes ainsi que le démontrent le fait que celui-ci lui a opposé un refus de constat amiable des existants ce qui l'a contrainte à introduire un référé préventif et l'inanité des moyens présentés à l'appui de sa requête en annulation,

- que M. X... a introduit son recours pour éviter d'avoir à côté de son immeuble des logements sociaux,

- qu'elle a déposé un permis modificatif affiché dès le 28 mai 2014 purgeant toutes les prétendues irrégularités du permis mentionnées dans le recours de M. X... de sorte que celui-ci aurait dû se désister sans délai de son recours, devenu sans objet, alors que le jugement de rejet a été rendu deux ans après l'obtention de l'arrêté de permis de construire,

- que son préjudice est d'autant plus important que le permis de construire avait pour objet la création de logements sociaux et la rénovation d'un immeuble menaçant ruine,

- que M. X... travaille pour une des sociétés du groupe AMALLIA dont elle fait partie de sorte qu'il disposait des informations sur le projet de construction litigieux et en particulier sur sa vocation sociale,

- que le comportement de M. X... lui a occasionné un préjudice en retardant le chantier, sous la forme d'un retard de commercialisation des lots, d'une indemnisation de l'entreprise de travaux à sa charge, de frais de consommables et de sécurisation supplémentaires.

Selon l'article 1382 (devenu 1240) du code civil, celui qui par sa faute cause à autrui un dommage s'oblige à le réparer.

L'exercice d'une action en justice constitue un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que si le demandeur a agi dans l'intention de nuire, de mauvaise foi ou encore avec une légèreté blâmable.

En l'espèce, pour justifier de l'abus de droit qu'elle impute à M. X..., la société ALLIADE HABITAT se contente de produire le jugement du tribunal administratif.

Elle ne produit aucun élément faisant apparaître que M. Laurent X... aurait introduit son recours contre l'arrêté de permis de construire à d'autres fins que celle de la défense de ses intérêts légitimes en sa qualité de voisin du projet ni qu'il aurait fondé sa demande sur des moyens dépourvus de toute pertinence alors qu'au vu des contestations soulevées, elle a elle-même estimé devoir obtenir un permis modificatif.

L'inconsistance des moyens soulevés par M. Laurent X... n'est pas démontrée par le seul fait que le tribunal administratif les a rejetés de sorte que le fait pour M. X... d'avoir maintenu son recours nonobstant les modificatifs apportés au projet ne saurait caractériser un abus de droit.

Il convient en conséquence de débouter la société ALLIADE HABITAT de ses demandes.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Réforme le jugement déféré en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action de la société ALLIADE HABITAT ;

Statuant à nouveau,

Déclarer la société ALLIADE HABITAT recevable en son action mais l'en déboute ;

Confirme le jugement déféré en toutes ses autres dispositions ;

Condamne la société ALLIADE HABITAT aux dépens.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile b
Numéro d'arrêt : 17/04864
Date de la décision : 11/09/2018

Références :

Cour d'appel de Lyon 1B, arrêt n°17/04864 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-09-11;17.04864 ?
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