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16/05/2017 | FRANCE | N°16/00867

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile b, 16 mai 2017, 16/00867


R.G : 16/00867









Décision du

Tribunal de Grande Instance de Lyon

Au fond

du 17 décembre 2015



RG : 12/03871

ch n°1





[M]



C/



[M]

[M]





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile B



ARRÊT DU 16 Mai 2017







APPELANTE :



Mme [T] [G] [N] veuve [M]

[Adresse 1]

[Localité 1]
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Représentée par Maître Arnaud CUCHE, avocat au barreau de LYON









INTIMES :



Mme [Q] [M]

[Adresse 2]

[Localité 2]



Représentée par la SELARL COLBERT LYON, avocats au barreau de LYON





M. [K] [M]

[Adresse 3]

[Localité 3]



Représenté par la SELARL COLBERT LYON, avocat...

R.G : 16/00867

Décision du

Tribunal de Grande Instance de Lyon

Au fond

du 17 décembre 2015

RG : 12/03871

ch n°1

[M]

C/

[M]

[M]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRÊT DU 16 Mai 2017

APPELANTE :

Mme [T] [G] [N] veuve [M]

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par Maître Arnaud CUCHE, avocat au barreau de LYON

INTIMES :

Mme [Q] [M]

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représentée par la SELARL COLBERT LYON, avocats au barreau de LYON

M. [K] [M]

[Adresse 3]

[Localité 3]

Représenté par la SELARL COLBERT LYON, avocats au barreau de LYON

******

Date de clôture de l'instruction : 06 Octobre 2016

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 21 Mars 2017

Date de mise à disposition : 16 Mai 2017

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Françoise CARRIER, président

- Marie-Pierre GUIGUE, conseiller

- Michel FICAGNA, conseiller

assistés pendant les débats de Fabrice GARNIER, greffier

A l'audience, Michel FICAGNA a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Françoise CARRIER, président, et par Leïla KASMI, greffier placé, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

EXPOSÉ DE L'AFFAIRE

M. [I] [M] [M] est décédé à [Localité 4] le [Date décès 1] 2009 laissant pour lui succéder

- [T] [N], son épouse en seconde noces, avec qui il était marié sous le régime de la séparation de biens depuis le 23 janvier 1993, donataire de la plus large quotité disponible, ayant opté pour 1/4 en usufruit et 3/4 en nue-propriété,

- ses deux enfants nés de sa précédente union : [Q] et [K] [M].

Par acte en date du 21 février 2012, [Q] et [K] [M] ont assigné [T] [M] devant le tribunal de grande instance de Lyon aux fins de voir ordonner l'ouverture des opérations de compte liquidation et partage, de constater l'existence de donations déguisées et de voir appliquer les sanctions du recel successoral.

Mme [T] [M] a conclu au débouté des demandeurs de l'ensemble de leurs demandes.

Par jugement du 17 décembre 2015, le tribunal de grande instance de Lyon a :

- débouté Mme [T] [M] de sa demande de nullité de l'assignation,

- dit que Mme [T] [M] a bénéficié d'une donation déguisée correspondant à la valeur du bien sis [Adresse 1] lot [Cadastre 1] (anciennement [Cadastre 2]), d'environ 50m2,

- dit que la valeur de ce bien au jour du décès de M. [I] [M] doit être réintégrée dans la masse active de la succession,

En conséquence, avant dire-droit,

- ordonné une mesure d'expertise et commis M. [A] [E] aux fins de déterminer la valeur du bien,

sur le fond,

- débouté Mme [Q] [M] et M. [K] [M] de leur demande tendant à dire que Mme [T] [M] ne peut prétendre à aucune part sur le montant réintégré dans l'actif de succession à ce titre en sanction d'un recel successoral,

- constaté que M. [I] [M] a financé pour le compte de Mme [T] [M] des travaux sur ses biens à raison de 10 671 € et dit en conséquence, que la somme de 10 671 € doit être réintégrée dans la masse active de la succession, et débouté Mme [Q] [M] et M. [K] [M] de leur demande tendant à ce que Mme [T] [M] ne puisse prétendre à aucune part sur le montant réintégré dans l'actif de succession à ce titre en sanction d'un recel successoral,

- constaté que Mme [T] [M] a prélevé à tort la somme de 19 476,22 € sur les comptes de M. [I] [M], peu avant son décès et condamné en conséquence, Mme [T] [M] à rapporter cette somme à la succession en deniers ou quittance et débouté Mme [Q] [M] et M. [K] [M] de leur demande tendant à priver Mme [T] [M] de tout droit sur cette somme en application de la sanction du recel,

- débouté Mme [Q] [M] et M. [K] [M] de leur demande tendant à ce qu'il soit enjoint à Mme [T] [M] de justifier de l'origine des fonds déposés sur son compte de dépôt ouvert au Crédit Mutuel au mois de septembre 2009 et de production de relevés bancaires pour les deux années antérieures

- débouté Mme [Q] [M] et M. [K] [M] de leur demande relative au rapport à la succession de sommes relatives à des travaux qui auraient été effectués dans la résidence secondaire de Mme [T] [M] pour un montant de 14 524€,

- dit n'y avoir lieu à partage en l'état,

- ordonné l'ouverture des opérations de comptes et liquidation de la succession de M. [I] [M],

- désigné Maître [N] [U] notaire à [Localité 1] afin de procéder à la détermination de l'indemnité de réduction due par Mme [T] [M] et plus généralement de procéder aux opérations de comptes et liquidation de la succession, une fois l'expertise rendue,

- désigné le juge de la mise en état de la 1ère chambre du tribunal de grande instance de Lyon pour surveiller les opérations de comptes et liquidation de la succession,

- dit que ces notaire et juge pourront être remplacés en cas d'empêchement par ordonnance rendue sur requête,

- dit irrecevable la demande de Mme [Q] [M] et M. [K] [M] tendant à faire inscrire une hypothèque judiciaire sur un bien immobilier situé à [Localité 4] appartenant à Mme [T] [M] afin de garantir leurs droits dans la succession de leur père

- condamné Mme [T] [M] à payer à Mme [Q] [M] et M. [K] [M] la somme de 2 500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Mme [T] [M] aux entiers dépens de l'instance qui seront distraits au profit de la société Colbert représentée par Maître de Belval, avocats, sur son affirmation de droit.

Mme [T] [N] demande à la cour :

Réformant partiellement le jugement,

- de dire et juger que Mme [Q] [M] et M. [K] [M] ne démontrent pas que M. [I] [M] lui aurait fait une quelconque donation pouvant être réintégrée à l'actif successoral,

Subsidiairement,

s'agissant des éventuelles donations effectuées avant le mariage,

- de dire et juger qu'elles ne pourraient faire l'objet que d'une réduction en valeur nominale en l'absence de preuve de ce que ces sommes d'argent aient servi à financer l'appartement acquis par Mme [T] [M],

s'agissant des éventuelles donations effectuées après le mariage

à titre principal,

- de dire et juger qu'en présence d'une clause dans le contrat de mariage interdisant les comptes entre époux, il ne pourra avoir lieu à rapport,

à titre subsidiaire,

- dire et juger que l'ensemble des éventuelles donations de sommes d'argent ne pourraient faire l'objet que d'un rapport en valeur nominale en l'absence de preuve de ce que ces sommes d'argent aient servi à financer l'appartement acquis par elle,

à titre infiniment subsidiaire, si la cour estimait que ces donations avaient servi à financer son appartement,

- de dire et juger qu'il n'y aura pas rapport, ces donations ayant alors servi à financer de manière partielle l'appartement familial, et constituant en tout état de cause une contribution de M. [M] aux charges du mariage,

s'agissant des prétendus travaux effectués dans l'appartement :

- dire et juger que Mme [Q] [M] et M. [K] [M] n'apportent pas la preuve de la réalisation de travaux dans le bien litigieux,

subsidiairement, si cette preuve était rapportée,

- de dire et juger que le financement de ces travaux s'analyse comme une contribution aux charges du mariage, s'agissant de travaux qui auraient été effectués dans le logement familial,

- de confirmer le jugement pour le reste,

- de rejeter toutes autres demandes contraires qui pourraient être formulées par Mme [Q] [M] et M. [K] [M],

- de condamner Mme [Q] [M] et M. [K] [M] à lui payer la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens, distraits au profit de Maître Cuche avocat, sur son affirmation de droit.

Elle soutient :

- qu'il n'est pas démontré qu'elle a bénéficié du virement de 120 000 francs, ni d'une intention libérale,

- que les enfants de M. [M] ne justifient pas du maintien du virement permanent de 1 400 francs par mois, tout au long du remboursement du prêt,

- subsidiairement que les sommes éventuellement versées ne peuvent faire l'objet que d'une réduction et non d'un rapport, s'agissant de sommes versées avant le mariage, l'article 846 du code civil, excluant le rapport des sommes versées à un non successible, la réduction ne pouvant porter que sur le montant nominal des sommes versées, soit 129 800 francs (120 000 + 9 800), soit 19 786 56 €,

- que les règlements opérés par l'un des époux et relatifs à des emprunts qui financent partiellement l'acquisition, par l'autre, d'un appartement constituant le logement de la famille participent de l'exécution de son obligation de contribuer aux charges du mariage.

- que les sommes qu'elle aurait reçu avant le mariage, ne pourraient en tout état de cause pas être concernées par le recel, dans la mesure où l'appelante n'était pas héritière présomptive,

- que pour la période postérieure au mariage, il n'y a aucune mauvaise foi de sa part n'ayant jamais eu l'intention de dissimuler une quelconque donation,

- qu'il appartient à Mme [Q] [M] et à M. [K] [M] de produire l'ensemble des factures dont ils pourraient disposer, et de justifier que les travaux ne concernaient pas l'appartement dont était propriétaire M. [M] dans le même immeuble et qu'il possédait au même moment,

- que lorsqu'un époux réalise des travaux sur un bien personnel de son conjoint, il ne fait que participer aux charges du mariage,

- que M. [M] a vécu dans son appartement pendant 17 ans,

- que dès lors, les éventuelles dépenses qu'il aurait effectuées sont des dépenses d'équipement qui n'ont pas à être rapportées,

- sur les travaux sur sa résidence secondaire, que les intimés n'apportent aucune preuve quant à l'usage des fonds, qui ont parfaitement pu servir à M. [M] pour un usage personnel,

- qu'il s'agirait d'une évidente contribution aux charges du mariage, dans la mesure où il avait profité de ce bien,

- sur les sommes d'argents retirées des comptes bancaires, que c'est M. [I] [M] lui-même, qui, se sachant condamné, lui a demandé de retirer ces sommes et d'établir ces chèques afin qu'elle ne manque de rien, et qu'elle ait suffisamment de fonds pour organiser les obsèques, et en prévision des difficultés financières que son décès entraînerait pour son épouse (comme en terme d'impôts),

- que l'intention frauduleuse n'étant pas caractérisée par les enfants de M. [M], il ne peut y avoir recel,

- qu'il y a eu restitution spontanée,

- qu'il ne lui appartient pas de suppléer à la carence des intimés, dans l'administration de la preuve.

Mme [Q] [M] et M. [K] [M] demandent à la cour :

Vu les articles 778, 815 et suivants, 921 et suivants du code civil,

- de confirmer le jugement déféré sauf en ce qu'il débouté les concluants,

statuant à nouveau,

- de faire droit à l'intégralité de leurs demandes,

en tout état de cause, avant dire-droit,

- de faire sommation à Mme [N], veuve [M] d'indiquer si elle a été « oui » ou « non » bénéficiaire du virement de feu M. [I] [M] de la somme de 1 400 F par mois entre 1992 et 2002, et de communiquer les avis d'imposition du couple dans la période de mariage afin d'apprécier les revenus de chacun,

- de constater que M. [I] [M] a totalement financé l'acquisition par Mme [T] [M] d'un appartement sis [Adresse 1] lot [Cadastre 1] (anciennement [Cadastre 2]), d'environ 50m2,

- de dire et juger en conséquence, que Mme [T] [M] a bénéficié d'une donation déguisée de ce bien,

- de dire et juger que la valeur de ce bien au jour du décès de M. [I] [M] doit être réintégrée dans la masse active de la succession,

- d'ordonner en tant que de besoin une expertise afin de déterminer la valeur de ce bien au jour de l'ouverture de la succession et au jour le plus proche du partage,

- de dire et juger que Mme [T] [M] ne peut prétendre à aucune part sur le montant réintégré dans l'actif de succession à ce titre en sanction du recel successoral,

- de constater que M. [I] [M] a financé pour le compte de Mme [T] [M] des travaux sur ses biens à raison de 39 123 €,

- de dire et juger en conséquence, que la somme de 39 123 € doit être réintégrée dans la masse active de la succession,

- de dire et juger Mme [T] [M] ne peut prétendre à aucune part sur le montant réintégré dans l'actif de succession à ce titre en sanction du recel successoral,

- de constater que Mme [T] [M] a prélevé frauduleusement la somme de 19 476,22 € sur les comptes de M. [I] [M], peu avant son décès,

- de condamner en conséquence, Mme [T] [M] à rapporter cette somme à la succession et la priver de tout droit sur cette somme en application de la sanction du recel,

- d'enjoindre Mme [T] [M] de justifier de l'origine des fonds déposés sur son compte de dépôt ouvert au Crédit Mutuel au mois de septembre 2009 et plus généralement de verser aux débats l'ensemble de ses relevés bancaires ouverts dans les livres du Crédit Mutuel et du Crédit Lyonnais dans les deux ans précédents le décès de M. [I] [M] soit à compter du mois d'octobre 2007,

- de constater que M. [I] [M] a financé des travaux sur la résidence secondaire de son épouse pour un montant de 14 524€,

- de condamner en conséquence, Mme [T] [M] à rapporter cette somme à la succession et la priver de tout droit sur cette somme en application de la sanction du recel,

- de désigner M. le président de la chambre des notaires du Rhône es qualités, sauf à confirmer Me [N] [U], afin de procéder à la détermination de l'indemnité de réduction due par Mme [T] [M] et plus généralement de procéder aux opérations de comptes, liquidation et de partage de la succession, une fois l'expertise rendue,

- de désigner un juge de la cour chargé de surveiller les opérations de comptes, liquidation et de partage de la succession,

- de les autoriser à faire inscrire une hypothèque judiciaire afin de garantir leurs droits dans la succession de leur père à hauteur de 150 000 €, sur le bien de Mme [T] [M] sis à [Localité 4] [Adresse 4], cadastré CK [Cadastre 3], lot [Cadastre 4] bâtiment A, ou du montant que la cour voudra fixer,

- de condamner Mme [T] [M] à payer la somme de 5 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner la même aux entiers dépens de l'instance qui seront distraits au profit de la société Colbert représentée par Maître de Belval avocats, sur son affirmation de droit.

Ils soutiennent :

- qu'ils se basent sur la notion de réduction des donations et non sur le rapport,

- que c'est M. [I] [M] qui a réglé l'intégralité du bien immobilier, au moyen d'un virement de 120 000 € et d'un prêt ,

- que le prêt ne correspond pas à une contribution aux charges familiales puisque M. [M] n'était pas marié, et puisqu'il est démontré par les relevés du compte de M. [M] qu'il contribuait par ailleurs pour une très large part aux charges courantes : taxes d'habitation, les frais de transport (achat de véhicule, carburant, péage) pour que le couple se rende dans ses deux résidences secondaires, l'alimentaire, l'ensemble des assurances des logements de son épouse ([Localité 4], [Localité 1], Espagne), la totalité des impôts sur le revenus, les abonnements Canal +, TPS, téléphone, et s'occupait des plus grosses dépenses ménagères...,

- qu'il appartient à Mme [T] [M] de prouver que le virement permanent a été interrompu avant son échéance,

- que Mme [T] [M] a volontairement caché l'existence de la donation, soustraite à l'actif successoral, empêchant de déterminer les droits de chacun des héritiers et tentant de les priver de leurs droits,

- qu'ils sont en mesure de démontrer que leur père a également financé les travaux d'aménagements,

- qu'ils ont retrouvé l'offre préalable de prêt souscrite par M. [I] [M] afin de bénéficier de 70.000Frs en vue de l'aménagement de son habitation principale, qui a été réalisée le 23 avril 1992, soit 2 jours après l'acquisition par Mme [M] de son appartement,

- que les travaux visaient à réhabiliter et rénover entièrement un bien propre de la défenderesse et non de parer à son usure et assurer son entretien,

- que ces travaux ne peuvent être assimilés à une contribution aux charges du mariage,

- que leur père a souscrit entre autre un prêt immobilier en date du 9.01.2002 auprès du Crédit Agricole d'un montant de 14 524€. afin de financer des travaux sur la résidence secondaire qui appartient en propre à Mme [T] [M], M. [M] ne disposant d'aucun patrimoine immobilier depuis 1998,

- qu'il ne peut s'agir d'une contribution aux charges du mariage,

- que Mme [M] a prélevé des liquidités entre le 30 septembre et le [Date décès 1] 2009, veille du décès de M. [M] à hauteur de 19 476,22 €,

- qu'elle a d'ores et déjà restitué au notaire en charge de la succession la somme de 17 000 € en juin 2010, soit plus de 9 mois après le décès de son époux,

- qu'elle reste redevable à la succession de la somme de 2 476,22€ qu'elle refuse toujours de restituer,

- que les frais d'obsèques ont été réglés avec les propres fonds du défunt, recel,

- que Mme [T] [M] n'est pas de bonne foi,

- qu'il apparaît qu'au 7 septembre 2009, Mme [T] [M] disposait d'une somme de 16 039,94€ sur son compte de dépôt n°[Compte bancaire 1], alors qu'elle ne perçoit pourtant qu'une retraite de base mensuelle de 1 076,13€ outre une retraite trimestrielle complémentaire de 1.119,34€ soit une moyenne de 1 419€ par mois,

- qu'afin de permettre de vérifier que Mme [T] [M] n'a pas bénéficié d'autres donations de son époux, il est fait sommation à cette dernière de justifier l'origine des fonds existant sur son compte au mois de septembre 2009, de verser aux débats l'ensemble de ses relevés bancaires ouverts dans les livres du Crédit Mutuel et du Crédit Lyonnais dans les deux ans précédents le décès de M. [I] [M] soit à compter du mois d'octobre 2007,

- qu'ils sont bien fondés à solliciter le partage de la nue-propriété afin de recueillir chacun leur part,

- qu'ils ont toutes les raisons de craindre que Mme [T] [M] fasse disparaître l'actif qu'elle doit recueillir dans le cadre de son usufruit et qu'ils ne leur restent rien, si ce n'est au décès de cette dernière, une dette de succession qui ne pourrait être recouvrée si ses héritiers étaient amenés à renoncer à la succession,

- que conformément aux dispositions de l'article 2412 et suivants du code civil, les requérants sollicitent de pouvoir inscrire une hypothèque judiciaire sur la propriété de [Localité 4] de Mme [T] [M] en garantie de leur créance.

MOTIFS

Rappel des textes

L'article 843 du code civil dispose : « Tout héritier, même ayant accepté à concurrence de l'actif venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu'il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement ; il ne peut retenir les dons à lui faits par le défunt, à moins qu'ils ne lui aient été faits expressément hors part successorale ».

L'article 924 du code civil dispose : « Lorsque la libéralité excède la quotité disponible, le gratifié, successible ou non successible, doit indemniser les héritiers réservataires à concurrence de la portion excessive de la libéralité, quel que soit cet excédent.»

Selon l'article 924-2 du code civil : « Le montant de l'indemnité de réduction se calcule d'après la valeur des biens donnés ou légués à l'époque du partage ou de leur aliénation par le gratifié et en fonction de leur état au jour où la libéralité a pris effet. S'il y a eu subrogation, le calcul de l'indemnité de réduction tient compte de la valeur des nouveaux biens à l'époque du partage, d'après leur état à l'époque de l'acquisition. Toutefois, si la dépréciation des nouveaux biens était, en raison de leur nature, inéluctable au jour de leur acquisition, il n'est pas tenu compte de la subrogation ».

Sur l'acquisition de l'appartement sis [Adresse 1]

C'est par de justes motifs adoptés par la cour que le premier juge a retenu qu'il était établi par les pièces produites que M. [I] [M] avait financé intégralement l'appartement sis [Adresse 1], acquis au nom de Mme [T] [N], par un virement de 120.000 francs effectué au crédit du compte de celle-ci et par la mise en place d'un virement permanent d'un montant de 1 400 francs soit le montant arrondi des mensualités du prêt, ce virement étant exécutable jusqu'au 29 avril 2002, date de fin du prêt.

Mme [M] se borne à soutenir que la preuve de ces transferts de fonds n'est pas rapportée et subsidiairement que ces fonds correspondraient à la contribution de M. [M] aux charges du mariage puisqu'il a habité dans cet appartement pendant 17 ans.

Mais en réalité, c'est bien Mme [T] [M] qui a vécu dans un appartement qui lui a été offert par M. [M]. Ces moyens sont donc mal fondés.

Le bien immobilier ayant été subrogé aux fonds remis par M. [M], la donation déguisée sera évaluée conformément aux dispositions de l'article 924 -2 du code civil, en cas de subrogation.

Le jugement sera donc confirmé intégralement de ce chef , y compris en ce qu'il a ordonné une expertise à l'effet d'évaluer le bien immobilier.

Sur les travaux de l'appartement de [Localité 1]

C'est par de justes motifs que la cour adopte que le premier juge a retenu que les enfants [M] ont justifié que leur père avaient souscrit un prêt pour un montant de 70.000 francs , selon demande du 23 avril 1992, pour des travaux en vue de l'aménagement de son habitation personnelle et principale sise [Adresse 1] (Rhône), lequel ne pouvait correspondre alors qu'à l'appartement acquis par Mme [T] [M].

En revanche, s'agissant d'une opération globale «acquisition + rénovation» simultanée et compte-tenu du remploi des fonds dans la rénovation du bien, l'évaluation se fera sur la base de la valeur de l'appartement à l'époque du partage, en fonction de son état, travaux compris.

Sur le prêt relatif à une résidence secondaire

C'est par de justes motifs que la cour adopte que le premier juge a estimé que le prêt du 9 janvier 2002 souscrit par M. [M] et ayant pour objet : "aménagement d'un appartement à titre de résidence secondaire du propriétaire", d'un montant de 14 524 € a nécessairement été affecté à la rénovation de la résidence secondaire de Mme [M], puisque M. [M] n'était plus propriétaire d'aucun bien immobilier, mais que cette somme plutôt modeste, pouvait correspondre à la contrepartie du bénéfice que M. [M] en a retiré en y séjournant et pouvait être considéré, comme une contribution du mari aux charges du mariage.

Sur les liquidités

a) sur la période du 30 septembre 2009 au [Date décès 1] 2009 (date du décès de [I] [M])

Le premier juge a justement indiqué que Mme [T] [M] devait rapporter à la succession la somme de 19 476,22 € en deniers ou quittances, correspondant à des prélèvements de sommes d'argent sur les comptes de [I] [M], et dont elle ne peut justifier l'utilisation.

b) pour la période antérieure au 30 septembre 2009 (demande de production de relevés de comptes et de justificatifs pour les deux années antérieures) :

Mme [Q] [M] et M. [K] [M] ne produisent pas d'éléments suffisants pouvant faire présumer l'existence d'autres donations déguisées et pouvant justifier de telles investigations.

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.

Sur le recel successoral

Le recel successoral suppose une intention de dissimulation.

Or en l'espèce, [Q] et [K] [M] ne justifient d'aucune pièce démontrant de fausses déclarations, des manoeuvres de dissimulation ou des réticences de la part de Mme [T] [M] à compter de l'ouverture de la succession.

En conséquence, le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur la liquidation et le partage de la succession de M. [I] [M]

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a ordonné l'ouverture des opérations de comptes et liquidation de la succession et commis un notaire sous la surveillance d'un juge commis.

En revanche, il convient également d'ordonner le partage judiciaire, dès lors que les enfants [M] sont indivis entre eux sur la nue-propriété d'une partie de l'actif.

Sur la demande d'hypothèque judiciaire

C'est par de justes motifs que la cour adopte que le premier juge a débouté Mme [Q] [M] et M. [K] [M] de leur demande, alors que leur créance dépend du montant de la quotité disponible qui n'est pas encore évaluée.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

Il serait inéquitable de laisser à la charge de Mme [Q] [M] et M. [K] [M] les frais irrépétibles qu'ils ont été contraints d'engager pour faire valoir leur droit en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

- Confirme le jugement en ce qu'il a :

. condamné Mme [T] [M] à rapporter la somme de 19 476,22 € prélevée sur le comptes du défunt à la succession, en deniers ou quittances,

. ordonné une expertise,

. débouté Mme [Q] [M] et M. [K] [M] de leur demande au titre du recel successoral,

. débouté Mme [Q] [M] et M. [K] [M] de leur demande tendant à ce qu'il soit enjoint à Mme [T] [M] de justifier de l'origine des fonds déposés sur son compte de dépôt ouvert au Crédit Mutuel au mois de septembre 2009 et de production de relevés bancaires pour les deux années antérieures,

. débouté Mme [Q] [M] et M. [K] [M] de leur demande relative au rapport à la succession de sommes relatives à des travaux qui auraient été effectués dans la résidence secondaire de Mme [T] [M] pour un montant de 14 524€,

. condamné Mme [T] [M] à payer à Mme [Q] [M] et M. [K] [M] la somme de 2 500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

. condamné Mme [T] [M] aux entiers dépens de l'instance qui seront distraits au profit de la société Colbert représentée par Maître de Belval, avocats, sur son affirmation de droit.

le réformant partiellement et y ajoutant,

- Dit que Mme [T] [M] a bénéficié d'une donation déguisée de sommes d'argent, remployées et subrogées dans l'acquisition et la rénovation d'un bien sis [Adresse 1] lot [Cadastre 1] (anciennement [Cadastre 2]), d'environ 50m2,

- Dit que le calcul de l'indemnité de réduction en résultant tiendra compte de la valeur du bien immobilier à l'époque du partage, d'après son état à l'époque de l'acquisition après rénovation,

- Ordonne l'ouverture des opérations de liquidation, comptes et partage judiciaire de l'indivision existant entre [Q] et [K] [M],

- Déboute Mme [Q] [M] et M. [K] [M] de leur demande tendant à faire inscrire une hypothèque judiciaire,

- Condamne Mme [T] [M] à payer à Mme [Q] [M] et M. [K] [M] la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

- Condamne Mme [T] [M] aux entiers dépens de l'instance qui seront distraits au profit de la société Colbert représentée par Maître de Belval, avocats, sur son affirmation de droit.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile b
Numéro d'arrêt : 16/00867
Date de la décision : 16/05/2017

Références :

Cour d'appel de Lyon 1B, arrêt n°16/00867 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-05-16;16.00867 ?
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