R.G : 16/03433
Décision du
Tribunal de Grande Instance de BOURG EN BRESSE
Au fond
du 25 mars 2016
RG : 13/02728
chambre civile
SELARL MJ SYNERGIE
C/
[L]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
1ère chambre civile B
ARRET DU 09 Mai 2017
APPELANTE :
La SELARL MJ SYNERGIE mandataire Judiciaire de la SCI LA MESANGERIE, ès qualité de Liquidateur en suite du jugement du Tribunal de Grande Instance de BOURG EN BRESSE, domicilié en cette qualité,
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocats au barreau de LYON
Assistée le Maître Christophe NEYRET, avocat au barreau de LYON
INTIMEE :
Mme [J] [L]
Chez Mme [L]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par la SCP TUDELA ET ASSOCIES, avocats au barreau de LYON
Assistée de Maître Thierry DUMOULIN, avocat au barreau de LYON
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Date de clôture de l'instruction : 21 Novembre 2016
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 13 Mars 2017
Date de mise à disposition : 09 Mai 2017
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
- Françoise CARRIER, président
- Marie-Pierre GUIGUE, conseiller
- Michel FICAGNA, conseiller
assistés pendant les débats de Fabrice GARNIER, greffier
A l'audience, Françoise CARRIER a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Françoise CARRIER, président, et par Leïla KASMI, greffier placé, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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EXPOSÉ DE L'AFFAIRE
M. [K] [D] et Mme [J] [L] ont vécu en concubinage de 1999 à 2009.
Ils étaient associés et cogérants de la Société Civile Immobilière (SCI) La Mésangerie chacun à hauteur de 50%, laquelle est propriétaire d'un tellement sis [Adresse 3], qu'ils ont utilisé comme domicile familial.
Aux termes d'une ordonnance de référé du 1er décembre 2009, le président du tribunal de grande instance de BOURG-EN-BRESSE, saisi à la demande de Mme [L], a constaté l'accord de M. [D] pour le retrait de Mme [L] de la SCI La Mésangerie et a désigné Mme [E] [Y], expert judiciaire, avec notamment pour mission d'évaluer le bien immobilier et la valeur des parts sociales de Mme [L].
L'expert a déposé son rapport le 9 septembre 2011 concluant à une valeur négative des parts compte tenu de l'endettement de la SCI et du caractère non constructible de la parcelle [Cadastre 1].
Par jugement du 24 décembre 2012, le tribunal de grande instance de BOURG EN BRESSE a ouvert une procédure de redressement judiciaire de la SCI la Mésangerie et désigné Me [N] en qualité d'administrateur de la SELARL MJ SYNERGIE en qualité de mandataire judiciaire.
Le 28 janvier 2013, Mme [L] a déclaré une créance de 1 041 379 € à titre chirographaire.
Par ordonnance du 2 octobre 2013, le juge commissaire a rejeté ses prétentions et fixé sa créance à la somme de 56 111,16 €.
Cette ordonnance a été déférée à la cour qui, par arrêt du 9 octobre 2014, a sursis à statuer dans l'attente d'une décision définitive dans le cadre d'une instance engagée ou à engager par les parties concernant l'étendue de la créance de Mme [J] [L] à l'égard de la SCI La Mésangerie.
Par acte d'huissier du 19 juillet 2013, Mme [J] [L] a fait assigner la SELARL AJ PARTENAIRES MJ devant le tribunal de grande instance de BOURG EN BRESSE à l'effet de voir ordonnée une contre-expertise et de voir déclaré caduc, subsidiairement nul, son retrait de la SCI.
Par jugement du 25 mars 2016, le tribunal a :
- constaté l'intervention volontaire de la SELARL MJ SYNERGIE en qualité de liquidateur judiciaire de la Sci la Mésangerie,
- déclaré l'action de Mme [J] [L] recevable,
- rejeté la demande de Mme [J] [L] de sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pénale initiée par sa plainte avec constitution de partie civile du 4 décembre 2013 entre les mains du doyen des juges d'instruction du tribunal de grande instance de BOURG-EN-BRESSE,
- débouté Mme [J] [L] de sa demande de contre-expertise judiciaire, de sa demande tendant à entendre constater, dire et juger que son retrait du capital de la société la Mésangerie était caduc, de sa demande tendant à voir prononcer la nullité de son retrait pour erreur sur la substance, abolition de son consentement par la contrainte, défaut de cause et/ou fausse cause,
- dit qu'il n'existait aucune délibération de l'assemblée générale de la SCI La Mésangerie ayant décidé de la réduction du capital social de 1 000 € à 500 €, et ayant révoqué Mme [J] [L] de ses fonctions de gérante,
- dit que le capital social de la SCI La Mésangerie était de 1 000 €, que Mme [L] était détentrice dans ce capital de 50% des parts sociales et qu'elle était cogérante de la SCI La Mésangerie,
- dit n'y avoir lieu à ordonner la publication du présent jugement au Registre du Commerce et des Sociétés de BOURG-EN-BRESSE avec rectification des mentions erronées,
- rejeté la demande de Mme [J] [L] tendant à voir fixer sa créance dans les opérations de redressement judiciaire de la SCI La Mésangerie à titre chirographaire à la somme de 748 340,80 € et à titre privilégié, à la somme de 293 038, 38 €, soit un total de 1 041 379, 18 €,
- dit que la valeur des droits sociaux de Mme [J] [L] dans le capital de la SCI La Mésangerie s'élevait à la somme de 196 965 € et que le solde de son compte courant d'associé s'élevait à la somme de 287 924,72€,
- débouté les défenderesses de leur demande en paiement de la somme de 20 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure dilatoire et abusive,
- dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire du jugement,
- dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties,
- condamné Mme [J] [L] aux entiers dépens.
Par déclaration au greffe en date du 4 mai 2016, la SELARL MJ SYNERGIE a interjeté appel de ce jugement.
Au terme de conclusions notifiées le 3 août 2016, elle demande à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré l'action de Mme [L] recevable,
- rejeter la demande de sursis à statuer,
- débouter Mme [L] de sa demande de contre-expertise, de sa demande tendant à voir déclarer son retrait du capital de la SCI caduc ou à en voir prononcer la nullité,
- rejeter sa demande tendant à voir fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire à la somme de 748 340,80 € à titre chirographaire et à la somme de 293 038,38 € à titre privilégié soit au total 1 041 379,18 €,
- réformer le jugement en ce qu'il a dit que la valeur des droits sociaux de Mme [L] s'élevait à 196 965 € et que le solde de son compte courant d'associé s'élevait à la somme de 287 924,72 €, en ce qu'il a dit qu'il n'existait aucune délibération de l'assemblée générale ayant décidé la réduction du capital social à 500 € et ayant révoqué Mme [L] de ses fonctions, que le capital social était de 1 000 €, que Mme [L] était détentrice de 50 % des parts sociales et qu'elle était la co-gérante de la SCI,
- condamner Mme [L] à verser à la SELARL MJ SYNERGIE la somme de 20 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure dilatoire et abusive, celle de 10 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Elle fait valoir :
- que Mme [Y] a été désignée conformément à l'article 1843-4 du code civil de sorte que les parties ont fait leur loi de l'estimation de l'expert qui ne peut être remise en cause que par la preuve d'une erreur grossière constituant un motif de nullité du rapport,
- que l'expert a valorisé l'immeuble à 743 299 € compte tenu de la présence d'un beau jardin de 5 140 m² correspondant aux parcelles [Cadastre 2] et [Cadastre 1] et à la somme de 1 268 200 € au cas où la parcelle [Cadastre 1] deviendrait constructible, qu'il a retenu un compte courant de 281 762 € pour M. [D] et de 287 424,58 € pour Mme [L], et valorisé l'actif net à la somme de -131 069,40 € de sorte que les droits sociaux de Mme [L] n'avaient pas de valeur sauf si la parcelle [Cadastre 1] devenait constructible, ce qui n'était pas le cas à la date du dépôt de son rapport,
- que Mme [L] ne peut revendiquer aucun prix pour la valorisation de ses parts sociales,
- que la valorisation des parts sociales s'analyse à un instant T en fonction de la consistance de l'immeuble détenu par la SCI et qu'il n'y a pas lieu de prendre en compte la valorisation actuelle du terrain devenu constructible,
- que selon l'article 6-2-1 des statuts de la SCI, le retrait d'un associé prend effet à la clôture de l'exercice en cours au jour de la notification de la demande de retrait, en l'espèce le 31 décembre 2009,
- que l'associé qui demande le retrait judiciaire perd sa qualité d'associé après remboursement de la valeur de ses droits sociaux,
- que, dès lors que l'expert a considéré que cette valeur était négative, le retrait devait être comptabilisé à la date de l'ordonnance ayant entériné le principe du retrait soit le 1er décembre 2009, que l'absence de valeur des parts est sans incidence sur la validité du retrait et que Mme [L] n'a plus la qualité d'associé depuis la date du rapport d'expertise de Mme [Y], soit au mois de septembre 2011,
- que, dès lors, la constatation par décision du 2 août 2012 de l'annulation des parts sociales, la révocation du mandat de gérante de Mme [L] et la réduction corrélative du capital social sont régulières,
- que contrairement à ce que soutient Mme [L], le retrait n'était pas conditionné par le versement d'une somme de 300 000 €, que l'offre transactionnelle faite en ce sens n'a pas abouti,
- que l'erreur d'appréciation économique portant sur la valeur ou la rentabilité de l'objet du contrat ne constitue pas une cause de nullité de l'engagement, qu'il en va de même de l'erreur sur les conséquences juridiques d'un acte,
- que la cause du retrait est la mésentente entre les associés de sorte qu'il y a bien une cause au retrait, que la valorisation des parts n'a pas pu constituer une cause du retrait puisqu'elle était inconnue,
- que la créance alléguée par Mme [L] à l'encontre de M. [D] est étrangère à la SCI La Mésangerie et n'a pas à être inscrite au passif de cette dernière et que sa créance au titre de son compte courant d'associé doit être fixée à 56 000 €.
Au terme de ses dernières conclusions notifiées le 31 août 2016, Mme [J] [L] demande à la cour de :
- ordonner une contre-expertise à l'effet d'évaluer ses droits sociaux, l'expert devant s'adjoindre un sapiteur pour déterminer la valeur locative de l'immeuble et sa valeur,
- déclarer son retrait de la SCI caduc et en prononcer la nullité pour erreur sur la substance et abolition du consentement par la contrainte ou encore pour défaut de cause ou fausse cause,
- dire que la délibération du 2 août 2012 n'existe pas, subsidiairement qu'elle est nulle, et confirmer le jugement en ce qu'il a dit que le capital était de 1 000 €, qu'elle était détentrice de 50% des droits sociaux et qu'elle était co-gérante de la SCI,
- ordonner la publication du jugement au RCS avec rectification des mentions erronées,
- subsidiairement, fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire à titre chirographaire à 748 340,80 € et à titre privilégié à 293 038,38 € soit au total 1 041 379,18 €,
- plus subsidiairement, fixer sa créance à 196 965 € à titre chirographaire et à 287 924,72 € à titre privilégié,
- condamner la SCI La Mésangerie à lui payer la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens avec faculté de distraction au profit de Me [P] (sic).
Elle fait valoir :
- que M. [D] n'a jamais fourni de pièce prouvant la réalité de ses apports qui ont été retenus sans fondement pour 488 181 € par l'expert,
- que Mme [Y] a pris pour argent comptant la comptabilité fournie par M. [D], alors que celle-ci n'a jamais été approuvée par l'assemblée générale,
- que cet expert a omis de reconstituer la comptabilité de la SCI,
- que le montant de son compte courant est validé par M. [O], que la valorisation du bien dont elle se prévaut correspond à celle de M. [G] soit 1 150 000 €, les intéressés étant tous deux experts judiciaires,
- que la CEGC a, dans le cadre d'un litige l'opposant à M. [D], produit un avis de valeur des parts sociales de la SCI entre 612 et 684 K€,
- que 'sous le double effet des faux bilans produits par M. [D] qui augmentent sa créance dans les livres de la SCI La Mésangerie et d'une sous évaluation manifeste de l'immeuble par l'expert judiciaire', elle est victime d'une 'véritable spoliation',
- que le rapport de Mme [Y] est dénué de toute pertinence et de toute valeur probante,
- qu'elle n'a jamais démissionné de ses fonctions de gérante ni voté une réduction du capital,
- que la demande de retrait a été faite sous la contrainte par suite de son expulsion du logement familial sans argent pour se reloger,
- que la demande de retrait était conditionnée par le versement d'une somme de 300 000 €, qu'elle n'aurait jamais demandé le retrait si elle avait su que ses parts n'avaient aucune valeur,
- qu'elle a été victime d'une erreur sur la substance,
- que la demande de retrait est nulle pour fausse cause ou défaut de cause, l'absence de valeur rendant sans cause le retrait,
- qu'elle n'a pas perdu sa qualité d'associé à la date du dépôt du rapport de l'expert,
- subsidiairement, que la cour fixera sa créance au passif du 'redressement judiciaire' (sic) de la SCI comme le prévoit son arrêt du 9 octobre 2014,
- que sa créance chirographaire est constituée de la valeur de ses droits sociaux soit 600 000 €, des frais de justice d'un montant de 60 000 € et d'une créance au titre d'une saisie-attribution diligentée contre M. [D] de 88 340 €,
- que sa créance privilégiée correspondant au montant de son compte courant auquel s'ajoutent les frais d'inscription d'hypothèque et les indemnités au titre de l'article 700 du code de procédure civile soit 293 038,38 €.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la demande de contre-expertise
L'article 1869 du code civil dispose que sans préjudice des droits des tiers, un associé peut se retirer totalement ou partiellement de la société, dans les conditions prévues par les statuts ou, à défaut, après autorisation donnée par une décision unanime des autres associés. Ce retrait peut également être autorisé pour justes motifs par une décision de justice. A, moins qu'il ne soit fait application de l'article 1844-9 (3° alinéa), l'associé qui se retire a droit au remboursement de la valeur de ses droits sociaux, fixée, à défaut d'accord amiable, conformément à l'article 1843-4.
Les frais et honoraires de l'expertise sont à la charge du retrayant.
En l'espèce, l'expert a retenu un passif à hauteur de 874 269, 40 euros correspondant au capital restant dû sur les emprunts et aux comptes courants de chacun des associés pour un actif, représenté par l'actif immobilier, de 743 200 euros, et a conclu à une valeur négative de -131 069,40 euros de la SCI.
C'est par de justes motifs, que la cour adopte, que le premier juge a retenu que Mme [L] n'était fondée à réclamer l'organisation d'une contre-expertise qu'à la condition de démontrer que l'expert judiciaire avait commis une erreur grossière dans l'évaluation des parts sociales.
Il a d'autre part exactement retenu que l'expert, qui ne les vise pas parmi les pièces analysées et qui n'en fait à aucun moment état dans son rapport, ne s'était pas fondé sur la comptabilité 'apocryphe' de M. [D] ou sur les bilans établis par M. [T], expert comptable à LYON, que Mme [L] argue de faux.
Il a également justement souligné que les parties avaient validé la méthodologie exposée par l'expert ayant consisté, en l'absence de comptabilité, à rechercher les apports des associés dans le financement du bien et des travaux qui y avaient été entrepris, de sorte que le reproche de n'avoir pas 'rétabli la comptabilité de la SCI' est sans fondement.
La réalité des apports réalisés par M. [D] a été vérifiée par le croisement des factures et des justificatifs bancaires produits ce qui suffit à en faire la preuve. Le fait que Mme [L] conteste la qualification donnée par Mme [Y] à certaines sommes en ne les considérant notamment pas comme des créances contre la SCI ne justifie pas l'instauration d'une contre-expertise.
S'agissant de l'estimation du bien immobilier, l'expert a réservé l'hypothèse de la constructibilité de la parcelle [Cadastre 1], et déterminé la valeur de la parcelle [Cadastre 2] regard de l'état actuel des constructions qui s'y trouvent et des transactions portant sur des biens comparables de sorte que son évaluation n'est manifestement pas entachée d'une quelconque erreur grossière.
S'agissant de la constructibilité de la parcelle [Cadastre 1] à la date de l'expertise, il est acquis qu'elle était alors située en zone 1 AU interdisant les constructions à usage d'habitation et d'activité économique ne s'inscrivant pas dans une opération d'aménagement d'ensemble.
Cette opération devait porter sur une superficie minimal de 10 000 m² et garantir que les équipements d'infrastructure nécessaires seraient opérationnels lors de la mise en service des constructions.
Il est acquis que le projet d'aménagement ayant fait l'objet d'un protocole transactionnel en date du 8 juillet 2009 invoqué par Mme [L] au cours des opérations d'expertise a fait l'objet d'un arrêté de refus en date du 29 novembre 2010.
C'est dès lors sans erreur grossière que l'expert a retenu que la parcelle n'était pas alors constructible. Ce n'est que par l'approbation du nouveau PLU, devenu définitif, en date du 14 mars 2014 que la parcelle [Cadastre 1] est devenue constructible.
Le jugement déféré sera en conséquence confirmé en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à contre-expertise.
Sur la demande de caducité/nullité du retrait
Le premier juge a justement retenu que Mme [L] ne rapportait pas la preuve que son retrait était conditionné par le versement d'une somme de 300 000 €, la convention de cession de parts alléguée n'étant pas produite.
La recherche d'un accord, qui n'a en tout état de cause pas abouti, sur une valorisation à 300 000 € des droits sociaux de Mme [L] ne saurait s'analyser en une condition préalable au retrait.
Il ne saurait dès lors y avoir lieu à constater la caducité du retrait de Mme [L].
Selon les articles 1109 et 1110 (devenus respectivement 1130 et 1131) du code civil, l'erreur ou la violence ne vicient le consentement et ne sont une cause de nullité du contrat que lorsque, sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes. Leur caractère déterminant s'apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné.
L'erreur sur la valeur résultant d'une appréciation économique inexacte n'est pas une cause de nullité du contrat.
C'est à celui qui se prévaut d'un vice de son consentement d'en rapporter la preuve.
Mme [L] ne rapporte pas la preuve que la valeur des parts ait eu un rôle causal dans sa décision de retrait alors qu'à la date de celui-ci, en l'absence de toute comptabilité, elle ne pouvait qu'ignorer la valeur des dites parts. Il résulte d'autre part des termes de son assignation du 9 octobre 2009, ainsi que l'a justement retenu le premier juge, que son retrait avait pour cause déterminante la mésentente entre associés et la charge du prêt qu'elle continuait à régler à hauteur de 900 € par mois la plaçant dans l'impossibilité de se reloger de sorte que le remboursement des parts sociales est la conséquence du retrait et non sa cause.
Elle ne rapporte pas la preuve que M. [D] lui aurait imposé de consentir au retrait par une quelconque violence, étant relevé que l'assignation en référé en date du 10 novembre 2009 tendant à voir évaluer ses droits sociaux suite à sa décision de se retirer dément que cette décision ait été prise sous la violence ou la contrainte.
Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté Mme [L] de sa demande de nullité.
Sur la validité des délibérations de l'assemblée générale du 2 août 2012
Par une délibération du 2 août 2012, l'assemblée générale, réunie sans convocation de Mme [L], a constaté l'annulation des parts sociales de Mme [L], la réduction à due concurrence du capital social de la SCI La Mésangerie, que la SCI n'avait plus qu'un associé unique en la personne de M. [D] et a révoqué Mme [L] de ses fonctions de co-gérante.
L'article 6-1-0 des statuts prévoit qu'un associé peut se retirer de la société après autorisation donnée par une décision unanime des autres associés. L'article 6-1-2 prévoit que le retrait de l'associé prend effet à la clôture de l'exercice en cours au jour de la notification de la demande de retrait
L'associé qui demande le retrait judiciaire ne perd sa qualité d'associé qu'après le remboursement de la valeur de ses droits sociaux.
En l'espèce, il ressort des termes de l'assignation en référé expertise en date du 6 octobre 2009 la reconnaissance expresse par Mme [L] que M. [D] avait donné son accord à son retrait et que le litige ne portait que sur la valeur des parts, de sorte que l'unanimité requise par les statuts était obtenue.
Le retrait ne saurait dès lors s'analyser en un retrait judiciaire et ce sont les dispositions statutaires qui doivent trouver application concernant la date d'effet du retrait.
Il en résulte que Mme [L] a perdu sa qualité d'associée le 31 décembre 2009, date de la clôture de l'exercice au cours duquel elle a formulé sa demande de retrait, de sorte que les décisions de l'assemblée générale du 2 août 2012 tirant les conséquences de cette situation, n'ont pas lieu d'être annulées. Le jugement sera en conséquence réformé sur ce point.
Dès lors que c'est à la date d'effet du retrait qu'il faut se situer pour évaluer la valeur des droits sociaux de Mme [L], celle-ci n'est pas fondée à se prévaloir de la fluctuation de la valeur des parts postérieurement à cette date. Il résulte du rapport d'expertise judiciaire, qui fait la loi des parties, qu'à cette date, la valeur des parts était négative de sorte que Mme [L] ne dispose d'aucune créance contre la SCI La Mésangerie de ce chef.
Le jugement sera réformé en ce qu'il a dit que Mme [L] disposait d'une créance contre la SCI La Mésangerie au titre de ses droits sociaux.
Sur les autres prétentions de Mme [L]
Mme [L] est irrecevable à voir inscrire au passif de la liquidation judiciaire de la SCI les frais exposés pour le recouvrement d'une condamnation prononcée contre M. [D] et ayant donné lieu à une procédure de saisie des parts sociales de ce dernier, s'agissant d'une créance contre M. [D] et non pas contre la SCI.
Sa demande est également irrecevable s'agissant des sommes objet de la saisie attribution pratiquée par acte du 18 octobre 2012 à l'encontre de M. [D] entre les mains de la SCI, en l'absence de décision du juge de l'exécution ayant déclaré la SCI débitrice des dites sommes dans les termes des articles R.211-5 et R.211-9 du code des procédures civiles d'exécution.
Il est acquis que, par ordonnance du 4 septembre 2012, le juge des référés a condamné provisionnellement la SCI La Mésangerie à payer à Mme [L] la somme de 287 924,72 € avec intérêts au taux légal à compter du 11 juin 2012 au titre du solde de son compte courant, ce outre la somme de 1 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens ; que cette ordonnance a été signifiée à la SCI La Mésangerie par acte du 24 septembre 2012 ; que Mme [L] a vainement tenté une saisie-attribution par acte du 12 octobre 2012 ainsi qu'une saisie-vente transformée en procès-verbal de carence par acte du 18 octobre 2012 ; qu'elle a fait inscrire une hypothèque provisoire sur l'immeuble.
Le montant du compte courant de Mme [L] tel qu'arrêté par l'expert soit 287 924,72 € n'est pas discuté pas plus que les frais et accessoires d'un montant de 5 113,66 € dus en vertu de l'ordonnance de référé du 4 septembre 2012 de sorte qu'il y a lieu de fixer la créance au titre du solde du compte courant à la somme de 293 038,38 € à titre privilégié.
Sur la demande de dommages et intérêts
C'est par de justes motifs, que la cour adopte, que le premier juge a débouté la SELARL MJ SYNERGIE de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
REFORME le jugement déféré en ce qu'il a :
- dit qu'il n'existait aucune délibération de l'assemblée générale de la SCI La Mésangerie ayant décidé de la réduction du capital social de 1 000 € à 500 € et ayant révoqué Mme [J] [L] de ses fonctions de gérante, que le capital social de la SCI La Mésangerie était de 1000 €, que Mme [L] était détentrice dans ce capital de 50% des parts sociales et qu'elle était cogérante de la SCI La Mésangerie,
- dit que la valeur des droits sociaux de Mme [J] [L] dans le capital de la SCI La Mésangerie s'élevait à la somme de 196 965 € et que le solde de son compte courant d'associé s'élevait à la somme de 287 924,72€ ;
Statuant à nouveau,
VALIDE les délibérations de l'assemblée générale du 2 août 2012 ayant décidé la réduction du capital social de la SCI La Mésangerie à 500 € et révoqué Mme [L] de ses fonctions de co-gérante ;
FIXE la créance de Mme [J] [L] au passif de la liquidation judiciaire de la SCI La Mésangerie au titre du solde de son compte courant à la somme de 293 038,38 € à titre privilégié ;
CONFIRME le jugement déféré en toutes ses autres dispositions ;
Y ajoutant,
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Mme [J] [L] aux dépens.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE