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09/05/2017 | FRANCE | N°16/00694

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile b, 09 mai 2017, 16/00694


R.G : 16/00694









Décision du

Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond

du 08 décembre 2015



RG : 12/10319

ch n°10





SCI SINE



C/



SELARL BOWLING STAR





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile B



ARRÊT DU 09 Mai 2017







APPELANTE :



La SCI SINE, prise en la personne de son représentant lég

al en exercice, domicilié de droit audit siège

[Adresse 1]

[Localité 1]



Représentée par la SELARL DREZET- PELET, avocat s au barreau de LYON







INTIMÉE :



SELARL BOWLING STAR PORTE DE LYON, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicil...

R.G : 16/00694

Décision du

Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond

du 08 décembre 2015

RG : 12/10319

ch n°10

SCI SINE

C/

SELARL BOWLING STAR

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRÊT DU 09 Mai 2017

APPELANTE :

La SCI SINE, prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié de droit audit siège

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par la SELARL DREZET- PELET, avocat s au barreau de LYON

INTIMÉE :

SELARL BOWLING STAR PORTE DE LYON, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié es-qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représentée par la SELARL CABINET CHAUPLANNAZ AVOCATS ET ASSOCIES, avocats au barreau de LYON

Assistée de Maître Valentin ESCALÉ, avocat au barreau de MONTPELLIER

******

Date de clôture de l'instruction : 06 Octobre 2016

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 14 Mars 2017

Date de mise à disposition : 09 Mai 2017

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Françoise CARRIER, président

- Marie-Pierre GUIGUE, conseiller

- Michel FICAGNA, conseiller

assistés pendant les débats de Fabrice GARNIER, greffier

À l'audience, Michel FICAGNA a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Françoise CARRIER, président, et par Leïla KASMI, greffier placé, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

EXPOSÉ DE L'AFFAIRE

Courant 2012, la société civile immobilière Sine, propriétaire de locaux professionnels situés [Adresse 3] et la société Bowling Star Porte de Lyon (ci-après Bowling star) sont entrées en pourparlers en vue de la conclusion d'un bail commercial.

Par courriel du 29 mars 2012, la société Bowling Star a indiqué à la société Sine :

«Suite à nos différents contacts, nous vous confirmons que nous prenons en location le local que vous nous avez présenté

[Adresse 4]

Il ressort de nos discussions :

Mise en place d'un bail commercial habituel 3-6-9 ans

Prix du loyer HT du mètre carré par an

40 € la première année, 45 € deux années suivantes, 50 € ensuite

Ces tarifs suivront l'indexation du marché de la construction des locaux commerciaux

La société preneuse paiera une caution correspondant à 3 mois de loyers HT

Le paiement des loyers débutera lors de la mise à disposition du bâtiment après travaux

Le bailleur prend à sa charge la réfection du sol et du toit du bâtiment

Ce courrier électronique a valeur d'engagement»

La société Sine a alors rédigé un projet d'acte qu'elle a transmis à la société Bowling Star et qui a fait l'objet de diverses corrections ensuite d'un échange de messages électroniques intervenu entre les parties le 24 avril 2012.

Par courriel en date du 25 avril 2012, la société Bowling Star a notifié à la société Sine qu'elle ne donnait pas suite au projet faisant valoir les investissements nécessaires et l'absence de visibilité de l'évolution du quartier à courte ou moyenne échéance.

Par acte du 10 août 2012, la société Sine a assigné la société Bowling Star Porte de Lyon devant le tribunal de grande instance de Lyon aux fins :

- à titre principal, de condamnation à signer le contrat de bail tel qu'il a été conclu entre les parties suivant échange de mails des 29 mars 2012 et 24 avril 2012 et paiement des loyers dus entre la période du 27 avril 2012 et du 26 juin 2014, à parfaire ainsi que du dépôt de garantie,

- à titre subsidiaire, de paiement d'une somme de 120 000 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive des pourparlers, perte d'exploitation et immobilisation de son bien.

La société Bowling Star Porte de Lyon a conclu au rejet de l'ensemble des demandes, soutenant l'absence de contrat et l'absence de faute dans la rupture des pourparlers.

Par jugement du 8 décembre 2015, le tribunal de grande instance de Lyon a :

- débouté la société Sine de l'ensemble de ses demandes,

- condamné la société Sine à verser à la société Bowling Star Porte de Lyon une somme de 1 800 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamne la société Sine aux dépens, distraits au profit de Maître Chauplannaz,

- dit n'y avoir lieu d'assortir le présent jugement de l'exécution provisoire.

La société Sine a relevé appel de ce jugement.

Elle demande à la cour :

Vu les articles 1134 et suivants du code civil, 1714 et suivants du code civil, 1129 et suivants du code civil, Vu les articles 1382 et suivants du code civil, Vu l'article 700 du code de procédure civile,

- d'infirmer dans toutes ses dispositions le jugement déféré,

à titre principal,

- de dire et juger que le contrat de bail commercial du local sis [Adresse 3] a été conclu entre les parties dès le 29 mars 2012 s'agissant d'un accord sur le prix, la nature et sur les éléments essentiels du contrat, objet, prix, durée.

en conséquence,

- de condamner la société Bowling Star à lui payer la somme de 859 545 € TTC correspondant aux loyers dus entre la période du 28 juin 2012 au 28 juin 2015,

- de condamner la société Bowling Star à lui payer la somme de 63 669,99 € au titre du dépôt de garantie tel que stipulée dans le contrat de bail conclu entre les parties,

à titre subsidiaire, et si par extraordinaire le Tribunal considère que le bail n'est pas né entre les parties,

- de condamner la société Bowling Star à lui payer la somme de 120 000 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive des pourparlers, perte d'exploitation et immobilisation de son bien,

- de condamner la société Bowling Star à lui payer la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner la société Bowling Star en tous les dépens de l'instance,

- d'ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir.

Elle soutient :

- que la promesse d'un bail commercial vaut bail lorsqu'il y a accord sur la chose et sur le prix,

- qu'en l'espèce, il résulte du mail du 29 mars 2012 un véritable engagement de la société Bowling Star pour l'intégralité de la surface du local sis [Adresse 1] soit 6 367 m2,

- qu'à aucun moment elle n'a indiqué au vu du projet de bail ne plus vouloir conclure le contrat de bail compte-tenu de la prétendue modification des surfaces qui avaient fait l'objet de l'accord entre les parties,

- que la chose, soit le local donné à bail, était parfaitement déterminée ainsi que le prix, et les conditions générales,

- à titre subsidiaire, qu' il s'agit à tout le moins d'une rupture abusive des pourparlers qui ont perduré plusieurs mois,

- que la société Bowling Star, dans le cadre de sa lettre de rupture, indiqué explicitement les raisons pour lesquelles elle entendait rompre les pourparlers, à savoir que cette décision aurait été prise par sa commission de développement, non pas en raison des engagements ni du contrat de bail, mais de l'absence de certitude de développement de son activité dans le secteur de [Localité 1].

La société Bowling Star Porte de Lyon demande à la cour :

Vu les dispositions des anciens articles 1134 et 1382 du code civil,

- de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

- de condamner la société Sine à lui payer la somme de 3 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner la société Sine aux entiers dépens.

Elle soutient :

- qu'à la lecture du projet de bail, elle a eu la surprise de constater que la société Sine avait purement et simplement modifié la surface de l'immeuble objet du contrat, et que le montant du loyer au m² restait inchangé, entraînant, inévitablement, une augmentation notable du loyer,

- que la société Sine entendait lui imposer de lui donner en location, la totalité de la superficie de l'immeuble, dans la mesure où la société GIGAGYM aurait finalement renoncé à louer la surface de 700 m2, qui lui était destinée,

- qu'elle n'a jamais donné son accord sur une telle modification de la surface et sur la possibilité, en contrepartie, de sous-louer le local,

- que la rencontre des consentements, nécessaire à la formation du contrat, n'est pas intervenue,

- que la rupture des pourparlers est imputable à la faute de la société Sine qui a modifié les termes des pourparlers en changeant la surface louée, sans en référer à la société Bowling Star Porte de Lyon,

- que la société Sine demandait dans le cadre de son assignation non pas la somme de 120 000 € mais 80 000 €,

- qu'elle ne donne aucune explication sur cette augmentation, et n'apporte aucun élément permettant d'identifier l'existence des préjudices qu'elle prétend avoir subi ni d'en évaluer leur quantum.

MOTIFS

Dans son courriel du 29 mars 2012, la société Bowling Star s'est engagée à prendre en location les lieux présentés, sans précision de surface.

La société Sine n'a pas confirmé son accord sur les bases indiquées dans ce message.

Elle a adressé un projet de bail qui a fait l'objet d'un mail en réponse de la société Bowling Star en date du 24 avril 2012.

Aux termes de ce message, cette société a demandé des amendements sur les articles 4, 7, 10, 11, 12, 18, 19, 20,23 25, 26, 28, 29, 30, et 32.

Par message du même jour, la société Sine a répondu positivement à l'intégralité des remarques de la société Bowling Star.

À propos de l'article 25 du contrat, qui indique :

«Les biens immobiliers donnés à bail sont situés : [Adresse 3].

Ils comprennent : bureau et atelier pour une superficie totale de 6 367 m2».

la société Bowling Star a demandé dans le courriel sus-énoncé :

«article 25 : la superficie énoncée prend elle en compte la surface souhaitée par la salle de fitness».

La société Sine a répondu a précisé :

«La superficie énoncée ne prend pas en compte la surface souhaitée par la salle de fitness (700 m²). Compte tenu de la non réponse à ce jour de la Gigagym, et conscient que la superficie est légèrement supérieure à celle initialement prévue et afin de vous faciliter dans votre gestion, nous vous proposons de modifier l'article 13 en vous donnant la possibilité de sous-location».

Ainsi, il apparaît qu'à ce stade les parties n'étaient pas pleinement d'accord sur la surface à louer et donc sur le prix.

Dès lors, le jugement sera confirmé en ce qu'il a jugé que le bail n'était pas valablement conclu, faute de rencontre des volontés des cocontractants sur un élément déterminant du contrat.

Sur la rupture abusive des pourparlers

La société Bowling Star a justifié la rupture des pourparlers de la manière suivante :

«Après réunion de notre Commission de développement et devant les investissements nécessaires et l'absence de visibilité de l'évolution du quartier à courte ou moyenne échéance, nous ne donnons pas suite au projet d'installation d'un bowling et des activités connexes dans le bâtiment proposé [Adresse 1]».

Elle ne fait aucunement référence à un quelconque désaccord sur les conditions du bail.

Cette rupture est intervenue dès le 25 avril, sans demande d'explications complémentaires et sans tentative d'obtenir que le bail soit conclu pour la superficie convenue initialement ou pour un prix fixé en fonction de cette seule superficie.

Force est de constater que la société Bowling Star s'est bornée à évoquer des contingences internes.

Compte-tenu du message du 29 mars 2012 annonçant un engagement de prendre à bail, la rupture des pourparlers n'est pas intervenue de bonne foi.

Il appartenait à la société Bowling Star de réunir sa «commission de développement» avant de s'engager.

Cette rupture a donc été abusive et a occasionné à la société Sine un préjudice constitué par une perte d'exploitation et l'immobilisation du bien pendant toute cette période et même au-delà puisque cette société a pu légitiment penser que la société Bowling Star était valablement et définitivement engagée.

Compte tenu de la valeur du bail (226 680 € par an la première année, sur la base de la surface réduite) et de la durée des pourparlers qui sera évaluée à 2 mois, le préjudice doit être évalué à la somme de 50 000 €.

Il convient de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

- Confirme le jugement déféré en ce qu'il a jugé que le contrat de bail n'était pas valablement intervenu entre les parties,

Réformant le jugement déféré pour le surplus,

- Déclare la société Bowling Star Porte de Lyon responsable du préjudice subi par la société Sine du fait de la rupture abusive des pourparlers à propos de la location des locaux situés [Adresse 1],

- Condamne la société Bowling Star Porte de Lyon à payer à la société Sine la somme de 50 000 € de dommages et intérêts, outre celle de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamne la société Bowling Star Porte de Lyon aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile b
Numéro d'arrêt : 16/00694
Date de la décision : 09/05/2017

Références :

Cour d'appel de Lyon 1B, arrêt n°16/00694 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-05-09;16.00694 ?
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