La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/04/2017 | FRANCE | N°15/05222

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile b, 04 avril 2017, 15/05222


R.G : 15/05222









Décisions :



- Tribunal de Grande Instance de SAINT-ETIENNE

Au fond

du 11 mai 2011



RG : 2004/1731

ch n°1



- Cour d'Appel de LYON

du 15 janvier 2013

RG 11/05298

8e chambre



- Cour de Cassation - Civ.3

Du 11 juin 2014

Pourvoi n°F 13-17.238

arrêt n° 761 F-D









SARL ETUDES ET CONSEILS POUR L'INVESTISSEMENT PATRIMONIAL



C/



SELARL D'ARCHITECTURE R.FEASSON-G.G

AGNAL ET R.GOULOIS





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile B



ARRET DU 04 Avril 2017



statuant sur renvoi après cassation







APPELANTE :



La SARL ETUDES ET CONSEILS POU...

R.G : 15/05222

Décisions :

- Tribunal de Grande Instance de SAINT-ETIENNE

Au fond

du 11 mai 2011

RG : 2004/1731

ch n°1

- Cour d'Appel de LYON

du 15 janvier 2013

RG 11/05298

8e chambre

- Cour de Cassation - Civ.3

Du 11 juin 2014

Pourvoi n°F 13-17.238

arrêt n° 761 F-D

SARL ETUDES ET CONSEILS POUR L'INVESTISSEMENT PATRIMONIAL

C/

SELARL D'ARCHITECTURE R.FEASSON-G.GAGNAL ET R.GOULOIS

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRET DU 04 Avril 2017

statuant sur renvoi après cassation

APPELANTE :

La SARL ETUDES ET CONSEILS POUR L'INVESTISSEMENT PATRIMONIAL (ECIP), prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés au siège social sis

[Adresse 1]

[Adresse 2]

Représentée par la SELARL CABINET CHAUPLANNAZ AVOCATS ET ASSOCIES, avocats au barreau de LYON

INTIMEE :

La SELARL D'ARCHITECTURE R.FEASSON G.GAGNAL ET R.GOULOIS anciennement SCP FEASSON GAGNAL GOULOIS, pris en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Adresse 4]

Représentée par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocats au barreau de LYON

Assistée de la SELARL CLERGUE ABRIAL, avocats au barreau de SAINT ETIENNE

******

Date de clôture de l'instruction : 22 Septembre 2016

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 21 Février 2017

Date de mise à disposition : 04 Avril 2017

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Françoise CARRIER, président

- Marie-Pierre GUIGUE, conseiller

- Michel FICAGNA, conseiller

assistés pendant les débats de Fabrice GARNIER, greffier

A l'audience, Michel FICAGNA a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Françoise CARRIER, président, et par Fabrice GARNIER, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

M. [R] [F], dirigeant de la société ECIP ( Etudes et conseils pour l'investissement patrimonial) a acquis à [Localité 1] ( 42 140) un tènement immobilier comprenant un bâtiment classé monument historique, construit au 18 ème siècle, dénommé «château [Établissement 1]», dans le but d'y aménager un certains nombre de logements destinés à la revente.

M. [F] a donné à la société ECIP un mandat de commercialisation.

M. [R] [F], après avoir consulté l'association « Travaux Projets Etudes», qui est un organisme constitué d'étudiants de l'Ecole Nationale des Travaux Publics de l'Etat et de l'Ecole d'architecture de Lyon, puis M. [L] architecte, a consulté M. [Q] [G], architecte du patrimoine, associé au sein de la société Féasson Gagnal [G].

Le 17 octobre 2000, M. [G] a indiqué que suite aux différents entretiens il était en mesure de confirmer le montant de ses honoraires au taux de 10 % HT pour une mission complète de maîtrise d'oeuvre ( projet- consultation des entreprises- suivi de chantier - comptabilité de chantier - assistance à la réception de travaux) étant entendu qu'il devait « faire l'avance du travail jusqu'au tournant de l'année 2000» .

M. [G] a débuté son travail sur la base des travaux déjà réalisés par les précédents intervenants, en y affectant deux salariés, sans qu'un contrat d'architecte n'ait été formalisé.

Des difficultés sont intervenues entre les parties, M. [F] faisant grief à M. [G] de ses erreurs et de ses retards.

Fin 2002, M. [G] a constitué un dossier de permis de construire et a adressé le 24 décembre 2012 un projet de contrat d'architecte et une note d'honoraire d'un montant de 99.569,76 €.

Après échanges de correspondances entre les parties, il a été mis fin aux relations contractuelles à l'initiative de la société ECIP au cours d'une réunion du 28 février 2003.

Aucun accord n'ayant pu intervenir entre les parties et aucune somme n'ayant été versée à la société Feasson Gagnal [G], celle-ci a adressé, à la société ECIP le 1er décembre 2003, sa facture définitive remplaçant sa demande d'honoraires du 24 décembre 2002 et correspondant aux travaux exécutés soit 130.301,17 € TTC.

Dans la cadre d'une tentative de conciliation devant l'ordre des architectes, M. [G] a proposé de ramener ses honoraires à la somme de 38 000 € soit 75 % de l'APS.

Faute de paiement et d'accord, la société Feasson Gagnal [G] a assigné a société ECIP , devant le tribunal de grande instance de Saint-Etienne en mai et juin 2004 aux fins d'obtenir paiement de la somme de 130.301,17 € TTC.

La société ECIP a été déclarée en redressement judiciaire par jugement rendu par le tribunal de commerce de Lyon le 18 octobre 2005, désignant maître [R] en qualité de représentant des créanciers et maître [C] en qualité d'administrateur.

Un plan de redressement a été arrêté le 2 mai 2006 au cours duquel la société Feasson Gagnal [G] a opté pour un paiement de sa créance à hauteur de 30%.

Par jugement du 19 décembre 2007, le tribunal de grande instance de Saint-Etienne a ordonné la comparution personnelle de M. [G] et de M. [F] et a désigné M. [E] architecte en qualité de consultant pour assister à cette comparution et donner tous éclaircissements sur les données du litige.

M. [E] a établi un compte rendu aux termes duquel il a conclu que l'estimation proposée par M. [G] devant l'ordre des architectes semblait correspondre à la réalité du travail fourni.

Par jugement du 23 mars 2011, le tribunal de grande instance de Saint-Etienne a :

Vu le jugement avant dire droit du 19 décembre 2007.

Vu le procès-verbal d'audition des parties du 20 février 2008.

Vu le rapport du consultant déposé le 7 avril 2009.

- fixé la créance d'honoraires de la société d'architecture [K]-[G], ayant pour représentant des créanciers Me [R] et pour commissaire à l'exécution du plan de continuation maître [C], à la somme de 38 000 €, outre intérêts de droit à compter de ce jour,

- débouté de la société ECIP de sa demande reconventionnelle.

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement.

- condamné la société ECIP, ayant Me [R] pour représentant des créanciers et maître [C] en qualité de commissaire à l'exécution du plan de continuation, aux dépens qui comprendront notamment les frais de la mesure de consultation et seront distraits au profit de la société CLERGUE- ABRIAL, avocat, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

La société ECIP a relevé appel de ce jugement.

La société ECIP a demandé à la cour, réformant le jugement entrepris,

à titre principal :

- de débouter la société Feasson Gagnal [G] de sa demande en paiement d'une somme de 130.300,17 €,

à titre subsidiaire, si une somme était mise à sa charge :

- de fixer sa créance, aucune condamnation ne pouvant avoir lieu s'agissant d'une créance dont l'origine est antérieure à l'ouverture de son redressement judiciaire,

- de constater que dans le cadre du plan de redressement, la société Feasson Gagnal [G] a accepté d'être payée à 30 %,

- de condamner la société Feasson Gagnal [G] à lui payer la somme de 888.241,94 € en réparation du préjudice subi du fait des erreurs et des retards de M. [G],

La société Feasson Gagnal [G] a demandé à la cour :

- de retenir l'existence d'un contrat de maîtrise d'oeuvre entre elle-même et la société ECIP et l'interruption de la mission par cette dernière,

- de confirmer le jugement critiqué sauf à fixer sa créance à la somme de 130.301,17 € TTC outre intérêts au taux légal à compter du 24 décembre 2002, à régler suivant les modalités du plan de continuation de la société ECIP,

- de débouter la société ECIP de sa demande reconventionnelle,

Par arrêt du 15 janvier 2013, la cour d'appel de Lyon a statué en ces termes :

- Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

- Déboute les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Dit que chacune des parties gardera à sa charge les dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, par ceux des mandataires des parties qui en ont fait la demande.

Par arrêt du 11 juin 2014, la Cour de cassation, statuant sur le pourvoi formé par la société ECI a cassé et annulé cet arrêt dans toutes ses dispositions et a renvoyé la cause et les parties devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée.

La Cour a jugé au visa de l'article 1147 du code civil:

- que pour fixer la créance d'honoraires de la société au passif de la société ECIP à la somme de 38 000 €, l'arrêt retient que le fait que M. [G] ait accepté la mission de maîtrise d'oeuvre sans exiger un relevé d'état des lieux doit conduire à réduire le montant des honoraires dus à la société malgré l'importance du travail fourni ;

- qu'en statuant ainsi, tout en relevant que le travail de M. [G] était inutile et inexploitable, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé,

- que pour débouter la société ECIP de sa demande reconventionnelle, l'arrêt retient que la perte de chance d'obtenir les gains escomptés subie par la société ECIP n'est pas directement liée à la rupture des relations contractuelles entre la société ECIP et la société mais qu'elle est la conséquence de la vente de l'immeuble en un seul lot,

- qu'en statuant ainsi, tout en relevant que la société ECIP avait été contrainte de vendre l'immeuble entièrement en un seul lot fin décembre 2005, dans des conditions beaucoup moins avantageuses que s'il avait été vendu par appartements, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé.

La société Etudes et Conseils pour l'investissement Patrimonial (ECIP), demande à la cour de renvoi :

Vu l'article 1147 du code civil ;

- de constater que la société d'architecture Feasson Gagnal et [G] a accepté une mission de maîtrise d'oeuvre complète en vue de la réalisation d'un projet de création d'appartements au sein du [Adresse 5] ;

- de constater que le travail de la société d'architecture Féasson Gagnal et [G] a duré près de quatre ans au lieu de moins d'un an et qu'il a in fine été inutile et inexploitable ;

- de constater que la durée anormalement longue et l'inutilité du travail de la société d'architecture Féasson Gagnal et [G] ont directement contraint la société ECIP a abandonné le projet envisagé et connu de la société d'architecture Féasson Gagnal et [G], puisqu'elle avait justement été missionnée pour la réalisation de ce projet ;

En conséquence :

- de réformer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 11 mai 2011 par le tribunal de grande instance de Saint-Etienne ;

et, statuant à nouveau,

- de dire et juger que la société d'architecture Féasson Gagnal et [G] n'a droit à aucune rémunération ;

- de débouter la société d'architecture Féasson Gagnal et [G] de l'intégralité de ses demandes, fins et moyens ;

à titre subsidiaire, dans l'hypothèse cependant où par impossible une condamnation quelconque serait prononcée à son encontre,

- en vertu de l'article L 621-41, de fixer le montant des honoraires mais sans prononcer de condamnation, aucune condamnation en paiement de sa part ne pouvant avoir lieu s'agissant d'une créance dont l'origine est antérieure à l'ouverture de son redressement judiciaire,

- de constater que dans le cadre du plan de redressement, la société d'architecture a accepté d'être payée à hauteur de 30%;

En tout état de cause,

- de condamner la société d'architecture Féasson Gagnal et [G] à lui payer la somme de 888 241,94 € en réparation des préjudices qu'elle lui a causé par ses erreurs et ses retards;

- de condamner la société d'architecture Féasson Gagnal et [G] au paiement d'une somme de 20 000 € en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de la société Chauplannaz & Associés, avocats associés, sur ses affirmations de droit.

Elle soutient :

- que le tribunal a homologué les conclusions de M. [E] alors qu'elles sont infiniment discutables,

- que c'était à M. [G] qui était le professionnel d'apprécier si une étude de faisabilité préalable était nécessaire ou non, étant rappelé qu'il avait accepté une mission de maîtrise d'oeuvre complète,

- que M. [G] ne saurait lui réclamer des honoraires pour un travail absolument inutilisable et donc sans intérêt pour elle,

- que M. [E] a relevé de « notables insuffisances », en réalité le travail de M. [G] n'a été qu'une invraisemblable accumulation d'erreurs :

- que M.[G] lui a en tout état de cause causé un énorme préjudice,

- que dès le début de l'opération, il avait été formellement convenu que la réalisation des premières ventes devait permettre de régler à M. [G] ou plus précisément à la société d'architecture la fraction de ses honoraires exigibles au dépôt du permis de construire, et M. [G] avait formellement accepté de reconnaître qu'il devait faire l'avance de son travail jusqu'à la fin de l'année 2000,

- qu'il ne saurait donc prétendre qu'elle n'a pas tenu ses engagements au point de vue du paiement des honoraires,

- qu'elle a dû faire refaire les plans par un autre architecte, M. [A],

- que par contre, le retard considérable apporté à la réalisation de ce travail et sa mauvaise qualité l'ont empêchée de concrétiser la commercialisation par lots de copropriété l'immeuble appartenant à M. [F],

- que pendant des années, elle a travaillé sur ce programme et n'a perçu aucune rémunération puisqu'il était convenu avec M. [F] qu'elle était payée en fonction du chiffre d'affaires que rapporterait la commercialisation des appartements.

- qu'elle a perdu son temps sur près de 4 ans, commercialisation, constitution d'une SCI d'attribution pour vendre l'aile droite et avait fait procéder à la rédaction de statuts très complexes pour répondre aux exigences de la nouvelle loi SRU, énorme travail de contrôle de tous ses envois de plans sans cesse erronés fournis par M. [G], nombreuses démarches auprès de la DDE et de la Mairie, discrédit total auprès des cabinets de professionnels qu'elle n'a pu surmonter depuis,

- qu'elle se borne à demander le préjudice résultant de la perte de ses commissions, c'est-à-dire les rémunérations qui devaient lui être versées si l'immeuble était vendu par lots de copropriété, ce qui malheureusement n'a pas été le cas,

- que M. [F] a été contraint de vendre l'immeuble en un seul bloc à un professionnel fin décembre 2005, la banque lui ayant accordé un crédit pour son acquisition jusqu'à fin décembre 2002 seulement, date limite prévue pour la commercialisation par lots et n'ayant pas voulu prolonger ce crédit après trois années supplémentaires,

- qu'elle ne peut se livrer qu'à une approximation du montant exact de son préjudice résultant de la perte des commissions,

- que les honoraires qu'elle aurait perçus se seraient montés à 735 096, 78 €, calculés en fonction d'une marge de 18% selon le mandat de commercialisation,

- que si on y ajoute le montant des honoraires d'ingénierie, sa perte est de 888 241,94 €, à partir de la répartition figurant sur le tableau et explicité par M. [Q] président de la Sté d'Expertise comptable SAFIR des ventes faite pour 20% directement par elle, 40% par les cabinets de gestion de patrimoine indépendants et 40% par les Centrales de ventes pour un total de 29 appartements,

- que ce ne sont pas uniquement les multiples erreurs, pourtant importantes et constituant de graves fautes professionnelles pour plusieurs d'entre-elles, commises par M. [G] qui constituent la cause unique de son préjudice, mais il s'agit avant tout de la faute ayant consisté à mettre près de quatre années, au lieu de 8 à 9 mois, pour fournir un dossier de permis de construire (d'une qualité déplorable de surcroît).

La société d'architecture R. Feasson G.Gagnal et R. [G] demande à la cour :

Vu l'article 1134 du Code Civil

à titre principal,

- de confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Saint-Etienne du 11 mai 2011 sauf sur le quantum des sommes allouées à la société Féasson Gagnal [G],

- de fixer sa créance à la somme de 130.301,17 € TTC outre intérêts de droit à compter du 24 décembre 2002, à régler suivant les modalités du plan de continuation de la Sté ECIP

à titre subsidiaire,

- de fixer sa créance à la somme de 38 000 € TTC outre intérêts de droit à compter du 24 décembre 2002, à régler suivant les modalités du plan de continuation de la Sté ECIP

- de la débouter de sa demande reconventionnelle

- de condamner la Sté ECIP à lui payer la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- de la condamner enfin aux entiers dépens de l'instance distraits au profit de la société Aguiraud Nouvellet avocats, sur son affirmation de droit

Elle soutient :

- que compte tenu de l'arrêt de la mission par le maître de l'ouvrage en décembre 2002, c'est donc à juste titre qu'elle est en droit de prétendre au règlement des honoraires correspondants à la mission qu'elle a d'ores et déjà accomplie et résumée dans la note d'honoraires définitive adressée, soit le règlement de la somme de 130.301,17 € TTC outre intérêts de droit à compter de la première mise en demeure, soit le 24 décembre 2002,

- qu'il résulte du rapport du consultant que le maître de l'ouvrage ne s'est pas

donné les moyens d'une étude sérieuse de faisabilité comprenant notamment

un état des lieux correct,

- que cette demande de permis de construire ne pouvait être que partielle, puisque à cette époque, le programme d'utilisation du bâtiment principal a été remis en cause par le maître d'ouvrage,

- que c'est à tort que le tribunal a retenu que le travail qu'elle a accompli se limitait à l'avant-projet sommaire (APS) alors que ces travaux allaient bien jusqu'au dossier de permis de construire, puisque dans le cadre de la décision, il est même souligné que les nombreux plans étaient destinés à l'obtention de ce permis,

- que l'acquisition du bâtiment faite par Mr [F] gérant de la Sté ECIP, date de 1999, que les pourparlers concernant la fixation des honoraires dus au maître d'oeuvre ont débuté en avril 2000 pour aboutir en novembre 2000 à un accord dans le cadre duquel, la société Feasson Gagnal [G] acceptait de faire l'avance de son travail, jusqu'à la fin du mois de décembre suivant, soit un mois et demi et non 8 à 9 mois comme le prétend de manière mensongère, la Sté ECIP,

- que ce n'est que lors d'une réunion entre les parties en date du 7 novembre 2000 qu'elle a transmis à la société Feasson Gagnal [G], les documents graphiques établis préalablement,

- qu'il était manifestement impossible et la Sté ECIP ne saurait faire croire à la Cour à la véracité de ses propos, que le projet puisse être terminé à la fin du mois de décembre 2000, dans la mesure où le travail à fournir par le maître d'oeuvre était d'une grande importance : conversion sur informatique des plans d'état des lieux et avant-projet sommaire fournis par la Sté ECIP avec nécessité de pourvoir aux imprécisions les concernant, établissement de l'intégralité du projet et préparation du dossier de demande de permis de construire,

- que cette dernière ne saurait se plaindre d'un retard apporté au projet immobilier, pour justifier l'absence de règlement de tout honoraire au maître d'oeuvre,

- que les retards qui lui sont prétendument imputés ne sont que le pur fruit de l'imagination de la Sté ECIP, puisqu'elle prévoyait elle-même un dépôt du permis de construire en décembre 2002,

- qu'à cette date elle a légitimement sollicité le règlement d'un acompte sur honoraires, alors qu'elle avait travaillé depuis deux ans sans percevoir le moindre centime,

- que la Sté ECIP s'est trouvée dans l'impossibilité, compte tenu des règles déontologiques applicables, de trouver dans les plus brefs délais, un architecte susceptible de reprendre l'opération,

- que seul M.[A], à l'encontre duquel elle se réserve la faculté d'entreprendre des démarches auprès de l'ordre des architectes, a effectué des prestations pour le compte de la Sté ECIP au mépris de toute règle déontologique de son ordre,

- que l'on peut légitimement s'interroger sur les raisons ayant conduit la Sté ECIP à abandonner son projet et vendre le bien immobilier en décembre 2004, soit, comme on l'a vu, plus de deux ans après la rupture du contrat d'architecte, et ce alors même qu'elle avait mandaté un nouvel architecte en la personne de M. [A]...

- que c'est à juste titre et à bon droit que le tribunal a donc considéré, sur cette demande reconventionnelle, qu'un tel préjudice, à supposer au préalable en lien direct établi avec une faute de l'architecte, est totalement hypothétique et n'est étayé que par des documents prévisionnels établis par la société ECIP elle-même, de sorte qu'elle doit en être déboutée.

MOTIFS

Sur la demande de la société Féasson Gagnal [G] en paiement de ses honoraires

Il n'est pas contesté qu'une mission a été confiée dans le courant du premier semestre de l'année 2000 par la société ECIP à la société d'architecture Feasson Gagnal [G] pour la rénovation et l'aménagement du château [Établissement 1] de-Boisset.

Il apparaît que M. [F], dirigeant de la société ECIP, marchand de bien, indiquant avoir réalisé déjà de nombreuses opérations de même type, a convaincu la société d'architectes de faire l'avance de son travail sans rémunération et sans concrétiser de contrat.

M. [E], consultant désigné par le tribunal de grande instance de Saint-Etienne, a indiqué que le contexte contractuel était vicié et devait conduire inéluctablement l'opération à l'échec ou à de sérieux déboires, et que le maître d'ouvrage réel ne s'est pas donné les moyens d'une sérieuse étude de faisabilité, laquelle n'avait pas été confiée à M. [G].

Les relations entre les parties ont été interrompues d'un commun accord le 28 février 2003 à l'issue d'une réunion.

Il appartient dès lors au juge d'apprécier l'importance et la valeur du travail réalisé par l'architecte ainsi que le bien-fondé des griefs qui lui sont faits par le maître de l'ouvrage qui conclut à l'absence de toute rémunération en raison des erreurs commises.

Il résulte cependant du compte-rendu de M. [E], consultant désigné par le tribunal de grande instance pour assister à la comparution personnelle des parties, que pour l'opération de restructuration et d'aménagement d'un château de 2780 m² la mission de maîtrise d'oeuvre complète pouvait être estimée à 350 000 € payable à hauteur de 50 000 € au niveau de l'avant-projet sommaire.

Un premier architecte consulté par M. [F] avait établi des relevés succincts ne permettant pas la numérisation souhaitable des documents d'études et des esquisses d'aménagement et certains travaux réalisées par la junior entreprise de l'école nationale des TPB, démontraient une incompréhension des contraintes du bâtiment.

M. [E] a conclu que les études produites par M. [G] étaient d'un niveau APS mais avec de nombreuses insuffisances, de sorte que l'estimation proposée par M.[G] lors de la phase de conciliation semblait correspondre à la réalité du travail fourni.

M. [A] architecte ayant succédé à M. [G], a déclaré dans une attestation du 9 janvier 2006, produite par la société ECIP, avoir établi « bon nombre de plans, entre autres, plans d'état des lieux, et des façades suivant documents ECIP (..)», ce qui démontre que le travail de M. [G] n'était pas inexploitable.

Une rémunération de 38 000 € telle que proposée par M. [E] est conforme aux usages compte-tenu de l'état d'avancement de ces travaux et de leur qualité.

En conséquence la créance de la société d'architecture Feasson Gagnal [G] au passif du redressement judiciaire de la société ECIP doit être fixée à la somme de 38 000 € avec intérêts de droit à compter du présent jugement.

Sur la demande reconventionnelle en paiement de la somme de 888 241,94 €à titre de dommages-intérêts

La société ECIP sollicite le paiement de cette somme représentant le montant «approximatif» des honoraires de la commission perdue au titre de la commercialisation.

Elle produit un mandat de vente exclusif portant sur les lots de copropriété du [Adresse 6], moyennant une commission de 18 % .

N'ayant perçu aucune rémunération et ne pouvant en percevoir aucune en application des dispositions de la loi dite Hoguet régissant les activités d'agent immobilier, elle prétend en obtenir le règlement sous forme de dommages et intérêts à l'encontre de l'architecte en charge de la phase préalable des travaux.

Il convient de relever que la société ECIP, dont la gérante apparaît alors être Mme [F] [C], a selon les termes de M. [F] lors de la comparution personnelle des parties «débordé le cadre de son mandat» (et de ses activités), pour prendre en main de fait, sous la direction de M. [F] qui a signé tous les courriers, la maîtrise d'ouvrage.

La société ECIP ne peut ainsi prétendre à réparation d'un préjudice résultant d'une activité qui ne relevaient pas de sa mission et de ses compétences.

D'ailleurs, M. [G] s'est plaint de n'avoir jamais su qui était réellement le maître d'ouvrage et même le propriétaire du château...

D'autre part, postérieurement à la rupture de ses relations avec la société Féasson-Gagnal-Goulois, le 28 février 2003, la société ECIP, via M. [F], est entrée en relation courant 2003 avec M. [A] architecte qui a déclaré dans une attestation du 9 janvier 2006 que sa collaboration avec M. [F] a été plus effective à compter de 2004, au cours de laquelle, il a établi « bon nombre de plans, entre autres, plans d'état des lieux, et des façades suivant document ECIP, plan de commercialisation lot par lot, plans de combles ...) et effectué quelques relevés sur place.»

Dans cette attestation M. [A] indique avoir été rémunéré pour son travail et n'évoque à aucun moment une quelconque urgence ou pression tenant au retard pris par le projet.

La société ECIP soutient que M. [F] aurait été «contraint» de revendre le bien en 2005 dans la précipitation en un seul lot : cependant, aucune pièce n'est produite à cet égard.

Le lien de causalité entre l'abandon du projet et les «insuffisances» du travail de M. [G] n'est donc nullement établi.

En conséquence la défenderesse sera déboutée de cette demande.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

Attendu que l'équité commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

- confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, la créance étant majorée des intérêts échus avant la procédure de redressement judiciaire et devant être réglée suivant les modalités du plan de continuation de la société ECIP,

- condamne la société ECIP à payer à la société Feasson Gagnal [G] la somme de 4.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

- condamne la société ECIP aux entiers dépens d'appel, distraits au profit de la société Aguiraud Nouvellet avocats, sur son affirmation de droit.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile b
Numéro d'arrêt : 15/05222
Date de la décision : 04/04/2017

Références :

Cour d'appel de Lyon 1B, arrêt n°15/05222 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-04-04;15.05222 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award