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21/02/2017 | FRANCE | N°14/02031

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile b, 21 février 2017, 14/02031


R.G : 14/02031









Décision du

Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond

du 27 février 2014



RG : 12/01382

ch n°1





[I]



C/



[N]

[K]

SA LYONNAISE DE BANQUE

SCP [N] [L] [Z] [E]





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile B



ARRET DU 21 Février 2017







APPELANT :



Me [N] [E]

[I]

[Adresse 1]

[Localité 1]



Représenté par la SELARL LAFFLY & ASSOCIES-LEXAVOUE LYON, avocats au barreau de LYON





INTIMES :



Me [P] [N],

[Adresse 2]

[Localité 2]



Représenté par la SELARL COLBERT LYON, avocats au barreau de LYON

Assisté de la SCP KUHN, avocats au ba...

R.G : 14/02031

Décision du

Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond

du 27 février 2014

RG : 12/01382

ch n°1

[I]

C/

[N]

[K]

SA LYONNAISE DE BANQUE

SCP [N] [L] [Z] [E]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRET DU 21 Février 2017

APPELANT :

Me [N] [E] [I]

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représenté par la SELARL LAFFLY & ASSOCIES-LEXAVOUE LYON, avocats au barreau de LYON

INTIMES :

Me [P] [N],

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représenté par la SELARL COLBERT LYON, avocats au barreau de LYON

Assisté de la SCP KUHN, avocats au barreau de PARIS

M. [C] [K]

[Adresse 3]

[Localité 3]

Représenté par Me Laurent PRUDON, avocat au barreau de LYON

Assisté de la SCP COTTEREAU - MEUNIER - BARDON & Associés, avocats au barreau de TOURS

SA LYONNAISE DE BANQUE, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés au siège social sis

[Adresse 4]

[Localité 4]

Représentée par la SCP SCP DESILETS ROBBE ET ROQUEL, avocat au barreau de LYON

SCP [N] [L] [Z] [E], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés au siège social sis

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représentée par la SELARL COLBERT LYON, avocats au barreau de LYON

Assistée de la SCP KUHN, avocats au barreau de PARIS

******

Date de clôture de l'instruction : 10 Janvier 2017, avant l'ouverture des débats.

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 10 Janvier 2017

Date de mise à disposition : 21 Février 2017

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Françoise CARRIER, président

- Marie-Pierre GUIGUE, conseiller

- Michel FICAGNA, conseiller

assistés pendant les débats de Fabrice GARNIER, greffier

A l'audience, Marie-Pierre GUIGUE a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Françoise CARRIER, président, et par Fabrice GARNIER, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

Le 5 décembre 2001, M. [N] [E] [I] a conclu un contrat de réservation portant sur un lot d'un ensemble immobilier inscrit à l'inventaire des Monuments historiques sis à [Localité 5], ensemble à rénover par la société CTMO.

Par acte du 28 décembre 2001, M. [I] s'est porté acquéreur auprès de la société Yveco Finance et Patrimoine d'un plateau, d'une cave et de deux emplacements de parking dans cet ensemble immobilier pour un prix de 55 186,54 euros et la somme de 186 750,05 euros au titre des travaux de rénovation.

L'acte notarié de vente et le règlement de copropriété ont été dressés par Maître [P] [N], notaire associé de la SCP [X] - [N] - [L] - [Z] - [E].

Cette acquisition a été financée par un prêt d'un montant de 241 936,59 euros au taux de 5,90% remboursable en 180 mois, souscrit auprès de la société Lyonnaise de banque.

Pour les besoins de l'opération de rénovation, une association a été créée afin d'être maître de l'ouvrage, l'association syndicale libre du château de Châteauneuf sur Cher (ASL) et une convention a été signée le 27 décembre 2001 entre cette dernière et Monsieur [C] [K], architecte.

Le chantier a été déclaré ouvert le 20 novembre 2002.

Des appels de fonds en acompte sur travaux ont été demandés par l'ASL et par Me [N] courant 2001, 2002 et 2003.

La société CTMO a été placée en liquidation judiciaire en 2007 et la créance de l'ASL a été déclarée au passif de cette dernière.

Suite au retard pris et à l'importance des travaux effectués, une expertise judiciaire a été ordonnée à la demande de tiers afin de vérifier le coût des travaux réalisés, dont le rapport a été déposé en décembre 2010.

Par acte du 20 décembre 2011, M. [I] a fait assigner la société Lyonnaise de banque, Me [N], la SCP [X] - [N] - [L] - [Z] - [E] et Monsieur [K] afin de voir :

- prononcer le nullité du prêt ;

- ordonner la compensation entre le capital prêté, soit 241 936,59 euros, et le montant des intérêts perçus par la banque jusqu'au jour du jugement ;

- à tout le moins, condamner la banque à lui rembourser les intérêts perçus sur le prêt ;

- condamner solidairement la Lyonnaise de banque, Me [N] et la SCP [X] - [N] - [L] - [Z] - [E], in solidum avec Monsieur [K] à lui payer la somme de 186 750 euros au titre du financement des travaux, outre les intérêts au taux légal à compter du jugement et leur capitalisation, les intérêts qu'il a supportés et la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens ;

- ordonner l'exécution provisoire ;

- à titre subsidiaire, ordonner une expertise judiciaire afin de quantifier le coût des travaux restants à réaliser sur son lot et la quote-part à sa charge du coût des travaux à faire dans les parties communes.

Par jugement du 27 février 2014, le tribunal de grande instance de Lyon a :

- débouté M. [I] de l'intégralité de ses demandes;

- condamné M. [I] à payer la somme de 2 000 euros à la Lyonnaise de banque, à Me [N] et la SCP [X] - [N] - [L] à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, et celle de 2 000 euros à la Lyonnaise de banque, Me [N], la SCP [X] - [N] - [L] - [Z] - [E] et Monsieur [K] en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens.

M. [I] a relevé appel aux fins d'infirmation du jugement et demande à la cour, aux termes de ses dernières conclusions n° 10 notifiées le 9 janvier 2017, de:

-prononcer la nullité du contrat de réservation en violation des dispositions relatives au démarchage à domicile et la nullité de l'acte authentique en date du 28 décembre 2001 dressé par Me [N],

-constater que le délai de réflexion de dix jours octroyé à l'emprunteur n'a pas été respecté,

-déclarer nul et de nul effet le contrat de prêt que la Lyonnaise de banque lui a octroyé,

- condamner la société Lyonnaise de banque, en l'état du règlement effectué le 28 décembre 2016 à son profit et sous réserve de l'issue de la procédure en cours, à lui payer la somme de 257 888,63 euros correspondant au montant des intérêts antérieurement perçus par la banque jusqu'à la date de l'arrêt pour un total à l'échéance du prêt de 210 959,02 euros,

- à titre subsidiaire, prononcer la déchéance du droit aux intérêts à l'encontre de la Lyonnaise de banque pour non respect du formalisme lié au délai de dix jours et du caractère erroné du taux effectif global,

- condamner la Lyonnaise de banque à lui rembourser l'ensemble des intérêts perçus sur le prêt jusqu'à l'arrêt à intervenir, soit un total de 241936,59 euros d'une durée de 180 mois au taux de 5,90 % et ce pour la totalité des intérêts perçus jusqu'à l'arrêt à intervenir pour un total au terme du prêt de 210 959,02 euros

- condamner in solidum la Lyonnaise de banque, Me [N], la SCP [X] - [N] - [L] - [Z] - [E] et Monsieur [K], ou qui d'entre eux mieux le devra, à lui payer :

- la somme de 186 750 euros au titre du financement des travaux, outre intérêts de droit à compter de l'arrêt avec capitalisation annuelle de ces intérêts ;

- celle de 152765,93 euros au titre de la part des intérêts découlant du prêt consenti par la Lyonnaise de banque et afférente à la somme de 186 750 euros ;

- celle de 31 005 euros au titre des frais de mise en sécurité de l'immeuble, d'études, de recherches et d'expertise réglés sur l'exercice 2008 ;

- à titre subsidiaire, condamner in solidum la Lyonnaise de banque, Me [N], la SCP [X] - [N] - [L] - [Z] - [E] et Monsieur [K], ou qui d'entre eux mieux le devra, à lui payer les intérêts supportés au titre du prêt contracté auprès la Lyonnaise de banque, sur la somme de 186 750 euros,

- condamner in solidum Me [N] et la SCP [X] - [N] - [L] - [Z] - [E] au paiement de la somme de 60 979,61 euros au titre du premier versement, non autorisé ;

- à titre infiniment subsidiaire, ordonner une expertise judiciaire aux fins de quantifier les travaux restant à réaliser dans son lot privatif, comme pouvant constituer son préjudice, outre la quote part à sa charge du coût des travaux à faire pour les parties communes arrêté à la somme de 2 022 562,60 euros ;

- en toute hypothèse, débouter la Lyonnaise de banque, Me [N], la SCP [X] - [N] - [L] - [Z] - [E] et Monsieur [K] de l'ensemble de leurs demandes ;

- condamner in solidum la Lyonnaise de banque, Me [N], la SCP [X] - [N] - [L] - [Z] - [E] et Monsieur [K], ou qui d'entre eux mieux le devra, à lui payer la somme de 6 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

M.[I] fait valoir:

-que le contrat de réservation conclu le 5 décembre 2001 est nul pour non-respect des dispositions du code de la consommation, applicable aux biens immobiliers en l'absence de disposition spécifique en cas de démarchage à domicile,

-que la nullité du contrat de réservation entraîne de facto celle de l'acte authentique de vente du 28 décembre 2001 dressé par Me [N], notaire, dès lors que ces deux actes forment un unique ensemble, le contrat de réservation étant la cause de l'acte de vente,

-que la nullité des contrats de réservation et de vente entraîne nécessairement l'annulation du contrat de prêt souscrit auprès de la Lyonnaise de banque conformément à l'article L312-12 alinéa 1er du code de la consommation,

-que la demande de nullité du contrat de réservation n'est pas une demande nouvelle puisqu'elle tend à l'obtention de la nullité du contrat de prêt, but déjà poursuivi en première instance,

-que le contrat de prêt souscrit auprès de la Lyonnaise de banque est nul pour non respect du délai de 10 jours devant s'écouler entre l'offre de prêt et son acceptation aux motifs que la banque, sur qui la charge de la preuve de l'envoi de l'offre de prêt repose, ne peut se prévaloir d'un récépissé d'un courrier en date du 9 décembre, alors que seul le cachet de la poste fait foi, conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation, que l'acceptation de l'offre a été reçue par la banque le 26 décembre 2011, et que la réitération de l'acte de vente du bien immobilier en vue duquel le contrat de prêt a été conclu ne peut valider cette situation du fait du défaut de référence expresse au renouvellement de son acceptation de l'offre,

-qu'il a versé les sommes dues au titre du prêt arrivé à échéance le 28 décembre 2016, soit 257 888,63 euros, somme qui devra lui être restituée dans le cadre de l'annulation du contrat de prêt,

-que la mention erronée de la date de l'offre dans le but d'établir le respect du délai de 10 jours est une violation d'une règle de forme sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts,

-que l'action n'est pas prescrite puisqu'elle est soumise la prescription décennale, conformément à l'article L110-4 du code de commerce,

-que la déchéance des intérêts est également justifiée au regard de la mention d'un TEG différent dans l'acte de vente et dans le contrat de prêt,

-que cette demande est recevable aux motifs qu'elle n'est ni nouvelle puisqu'elle tend à l'obtention de la déchéance des intérêts, déjà sollicitée en première instance, ni prescrite, le délai de 10 ans n'étant pas écoulé au jour de l'assignation,

-que la société Lyonnaise de banque a engagé sa responsabilité contractuelle en remettant des fonds empruntés en l'absence de toute justification de la réalisation des travaux, en violation des dispositions de l'offre de prêt souscrite, la mention de l'acte de vente selon laquelle 'il en fait son affaire personnelle' ne visant pas à décharger la banque de cette obligation, ce qui justifie l'octroi des sommes de 120979,61 euros et de 65 770,39 euros à titre de dommages et intérêts ;

-qu'il n'a pas signé l'accusé de réception du projet d'acte délivré par Me [N] le 20 décembre 2001, aucune régularisation n'est intervenue puisqu'au jour de la signature de l'acte authentique, et le délai de rétraction de sept jours courrait toujours, ce qui constitue une faute du notaire,

-que Me [N] est tenu d'un devoir d'information et de conseil à son égard, devoir qu'il n'a pas respecté en n'attirant pas son attention sur les risques des modalités de paiement du prix de vente alors qu'il est intervenu pour l'ensemble des actes qui lui ont été soumis et que sa qualité d'avocat est totalement indifférente,

-que Me [N] a demandé à la banque, en connaissance de cause, de débloquer les fonds avant le commencement des travaux et sans lui demander une autorisation, ce qui ressort de la procédure pénale en cours,

-que cette faute du notaire est la cause de son préjudice, certain, puisque le bien ne peut être ni achevé, ni revendu en l'état, ce qui justifie que Me [N], solidairement avec la SCP [X] - [N] - [L] - [Z] - [E], soit condamné à lui rembourser les sommes indûment versées, soit 186 750,05 euros, outre les intérêts du prêt payés si la déchéance du droit aux intérêts n'est pas prononcée ;

-que M. [K], architecte engage sa responsabilité du fait de l'inexécution de sa mission de surveillance, de contrôle et de maîtrise des coûts du chantier, comme l'indique le rapport d'expertise sollicité par un copropriétaire qui souligne la faiblesse des alertes données et la légèreté dans l'exécution de la mission,

-que le contrat d'architecte prévoit d'ailleurs que M. [K] est présumé responsable dans le cadre de l'exercice de sa mission, en l'absence de preuve de l'existence d'une cause étrangère,

-que le comportement de Monsieur [K] est à l'origine du préjudice qu'il subi puisque l'exercice correct de sa mission aurait permis de mettre fin à cette situation plus rapidement et de ne débloquer que les sommes nécessaires aux travaux réellement accomplis,

-que la condamnation in solidum avec les autres intimés est justifiée par le fait qu'ils ont tous contribué à la réalisation du même dommage, à savoir la libération des fonds sans la contrepartie de travaux,

-que l'action n'est pas abusive dès lors qu'il serait illusoire de chercher à agir contre des sociétés placées en liquidation judiciaire, que l'ASL a inscrit sa créance à la procédure et que la responsabilité des intimés est caractérisée.

M. [C] [K] conclut à la confirmation du jugement entrepris et demande à la cour de débouter M. [I] de son appel et de le condamner à lui payer la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts pour appel abusif et celle de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Il soutient:

-que la demande relative au remboursement des frais de mise en sécurité de l'immeuble, d'études, de recherches et d'expertise réglés sur l'exercice 2008 constitue une demande nouvelle à hauteur d'appel, la rendant irrecevable,

-que les demandes de condamnation in solidum sont irrecevables puisque les manquements qu'il lui reproche sont dépourvus de lien avec les préjudices dont il est demandé réparation à la banque et au notaire et que, conformément à la jurisprudence, en cas de pluralité de régime de responsabilité mis en cause, le recours doit être divisé entre les divers responsables allégués,

-que le rapport d'expertise de 2010 impute un certain nombre de malfaçons et de non-façons au directeur et président de l'ASL ainsi qu'à l'entrepreneur principal, véritables responsables, et indique qu'il ne bénéficiait pas de 'tous les moyens nécessaires pour mener à bien sa mission',

-que M. [I] en sa qualité de membre de l'ASL avait accès aux différents documents comptables et a donc une part de responsabilité dans son préjudice,

-que M. [I] n'a pas fait assigner les responsables désignés par l'expert,

-que sa responsabilité dans le préjudice subi n'est pas démontrée et l'argumentation relative à la faute invoquée ou à l'existence du lien de causalité n'ayant pas évolué, l'appel est abusif.

Me [N] et la SCP [X] - [N] - [L] - [Z] - [E] concluent à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il les met hors de cause et demandent à la cour de :débouter M. [I] de l'ensemble de ses demandes et de le condamner à payer à Me [N] :

- la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et vexatoire,

- celle de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Ils font valoir:

-que la cause exclusive du préjudice de Monsieur [I] est la défaillance de la société CTMO,

-que Me [N] n'est intervenu qu'après l'établissement d'une promesse unilatérale de vente valant vente en dehors de toute réitération, rendant inutile son devoir d'information et de conseil,

-que la qualité d'avocat de M. [I] doit être prise en compte,

-qu'aucune sanction n'est prévue en cas de non respect des dispositions relatives à la notification du projet d'acte, d'autant qu'il a en toute hypothèse renoncé à se rétracter par la régularisation de la procuration afin d'acquérir le bien immobilier,

-que le contrat de réservation n'est pas nul puisqu'il relève du code de la construction et de l'habitation et non du code de la consommation, qu'il ne s'agit pas d'un démarchage et qu'en toute hypothèse, sa nullité n'aurait aucun effet sur la validité de l'acte de vente et l'acte de prêt, parfaitement autonome,

-qu'aucune faute n'est démontrée puisqu'il n'existe aucun risque spécifique attaché à ce type d'opération, que les fonds ont été virés sur le compte de l'ASL, maître de l'ouvrage en charge des travaux, qu'aucune obligation de vérification de l'avancement des travaux ne pesait sur le notaire et qu'aucune vérification n'était nécessaire en l'absence de virement direct aux entreprises,

-que M. [I] a expressément autorisé Me [N] à procéder au versement des sommes litigieuses , soit 60 979,61 euros le 21 décembre 2001, 33 934,58 euros le 31 décembre 2002, 53 644,02 euros le 29 décembre 2003,

-que l'erreur dans le montant versé a été immédiatement corrigée, ne causant aucun préjudice à M.[I],

-que le versement de sommes avant l'ouverture du chantier est normal dans le cas de monuments historiques,

-que l'acte rédigé par Me [N] présente toutes les garanties nécessaires pour que les fonds soient débloqués en toute sécurité dès lors qu'un appel de fonds de l'ASL et l'autorisation expresse de l'investisseur étaient requis,

-que les préjudices subis par M. [I] sont étrangers à Me [N],

-que les demandes de M.[I] excèdent l'avantage qu'il aurait pu retirer de l'opération, qu'il sollicite le remboursement du coût des travaux alors que ceux-ci ont bien été effectués, qu'il ne peut solliciter le remboursement des intérêts d'emprunt tout en conservant le bénéfice de la défiscalisation, ce qui démontre le caractère abusif de cette procédure.

La société Lyonnaise de banque conclut à la confirmation du jugement dans toutes ses dispositions et demande à la cour de :

- débouter Monsieur [I] de l'ensemble de ses moyens, fins et prétentions ;

- à titre subsidiaire :

- dire et juger prescrite la demande en nullité du prêt,

- dire et juger irrecevables et mal fondées les demandes en remboursement des intérêts du prêt,

- déclarer irrecevable la demande en déchéance du droit aux intérêts,

- dire et juger irrecevable et mal fondée la demande de dommages et intérêts formulée à son encontre,

- à titre infiniment subsidiaire, dire et juger qu'elle sera relevée et garantie par Me [N], solidairement avec la SCP [X] - [N] - [L] - [Z] - [E] en cas de condamnation à son encontre,

- en tout état de cause :

- condamner Monsieur [I] à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour appel abusif,

- le condamner à lui payer la somme de 10 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens.

La société Lyonnaise de Banque soutient :

-que la demande de nullité du contrat de réservation est irrecevable aux motifs qu'il s'agit d'une prétention nouvelle, que le vendeur n'a pas été mis en cause, et que la prescription quinquennale de l'action en nullité est acquise depuis le 5 décembre 2006,

-qu'en toute hypothèse, la nullité du contrat de réservation n'entraîne pas celle du contrat de vente et du contrat de prêt,

-que la déchéance du droit aux intérêts est une sanction distincte de la nullité et est inapplicable en cas de méconnaissance du délai de 10 jours qui n'est sanctionnée que par la nullité relative,

-que la demande de nullité du contrat de prêt du fait du non respect du délai de 10 jours est prescrite puisque l'assignation est intervenue plus de 5 ans après l'acceptation de l'offre de prêt, ce qui rend la demande irrecevable,

-que la banque a démontré avoir respecté le formalisme de l'envoi de l'offre par la production du récépissé complété par l'appelant, et qu'en tout état de cause, M.[I] a renoncé à invoquer ce moyen en reconnaissant avoir reçu l'offre par voie postale le 9 décembre 2001 en remplissant ledit récépissé d'offre,

-que l'offre de crédit a été réitérée par l'acte notarié qui mentionne son envoi par la poste, ce qui suffit à établir l'envoi de l'offre par voie postale,

-que la demande relative à la déchéance du droit aux intérêts est irrecevable en l'absence d'irrégularité de forme, qu'il ne s'agit que d'une faculté laissée à l'appréciation des juges qui apparaît inopportune en l'absence d'intention frauduleuse et qui ne concerne que les intérêts conventionnels,

-que la demande de déchéance du droit aux intérêts fondée sur l'erreur dans la mention du TEG est irrecevable aux motifs qu'il s'agit d'une prétention nouvelle, qu'elle est prescrite du fait de l'écoulement du délai de cinq ans, l'appelant, avocat, ayant pu prendre connaissance de cette erreur dès la lecture de l'acte, et que cette erreur n'est pas démontrée,

-que sa responsabilité ne saurait être engagée dès lors qu'elle n'a commis aucune faute en respectant les conditions de versement des fonds, qu'elle n'a aucune obligation de vérification de la bonne exécution des travaux, conformément au principe de non-immixtion lui interdisant de solliciter des justificatifs avant la libération des fonds, et à la volonté de l'appelant qui souhaitait en faire 'son affaire personnelle',

-que subsidiairement, l'appelant ne justifie pas du lien de causalité entre le préjudice invoqué et son action,

-qu'en tout état de cause, les demandes de condamnation in solidum sont irrecevables puisque la solidarité doit être prouvée et qu'il n'existe aucun lien entre les obligations du notaire ou de l'architecte et les siennes,

-que les demandes apparaissent fortement disproportionnées et sont dirigées contre les mauvaises personnes,

-que l'appelant fait preuve de mauvaise foi puisqu'il a volontairement omis d'appeler dans la cause les responsables des malfaçons des travaux et formulé des demandes irrecevables, ce qui justifie sa condamnation pour procédure abusive.

MOTIFS

Sur la procédure

Par ordonnance du 5 janvier 2017, l'ordonnance de clôture a été révoquée pour acceptation des pièces et conclusions faisant état du remboursement de la somme de 257 888, 63 euros représentant le montant du prêt in fine arrivé à échéance le 28 décembre 2016.

L'ordonnance de clôture a été prononcée à l'ouverture des débats devant la cour à l'audience du 10 janvier 2017.

Par courriers des 10 et 17 janvier 2017, adressés postérieurement à l'audience de plaidoiries, M.[I] a remis à la cour des explications et pièces concernant l'état de l'immeuble.

Ces éléments, qui n'avaient pas été sollicités par la cour, doivent être déclarés irrecevables en application de l'article 783 du code de procédure civile.

Sur les demandes en nullité des contrats de réservation et de vente

Dans le dispositif de ses dernières conclusions n°10, M.[I] demande à la cour de prononcer la nullité du contrat de réservation et la nullité de l'acte authentique de vente conclu le 28 décembre 2001 avec la société Yveco Participation. Il ne s'agit donc pas de moyens nouveaux.

Les demandes en nullité du contrat de réservation et de vente ne constituent pas l'accessoire, la conséquence ou le complément de la demande en nullité du prêt soumise au premier juge puisque l'annulation du prêt est demandée en appel par voie de conséquence de la nullité du contrat de vente, elle-même conséquence de la nullité du contrat de réservation.

La faculté prévue par l'article 565 du code de procédure civile de soumettre aux juges d'appel des demandes tendant aux mêmes fins que celles portées devant les premiers juges implique qu'une demande ait été formée devant ces derniers.

Ces demandes d'annulation du contrat de réservation et de vente d'immeuble constituent des prétentions nouvelles, formulées pour la première fois en appel, devant être dirigées contre une personne qui n'a pas été assignée en première instance et n'est pas partie à l'instance d'appel, et doivent être déclarées irrecevables.

Sur la demande en nullité du contrat de prêt souscrit avec la société Lyonnaise de Banque

M. [I] demande à la cour de déclarer nul le prêt octroyé par la société Lyonnaise de Banque pour non-respect du délai de réflexion de dix jours selon les dispositions de l'article L.312-10 du code de la consommation.

Il ressort des dispositions combinées des articles L.312-10 et L.312-33 du code de la consommation et 1304 du code civil que si l'inobservation des règles de forme relatives aux modalités d'acceptation de l'offre de prêt immobilier est sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts, la méconnaissance du délai d'acceptation de dix jours est sanctionnée par la nullité relative du contrat qui se prescrit par cinq ans à compter de l'acceptation de l'offre, laquelle doit être donnée par lettre, le cachet de la poste faisant foi.

L'acceptation de l'offre de prêt a été retournée à la banque le 21 décembre 2001, ce qui n'est pas discuté par M.[I], qui le précise en page 16 de ses conclusions invoquant sa pièce 8.

Dès lors, la prescription était acquise lorsque l'action a été engagée par assignation délivrée le 20 décembre 2011.

La demande de M.[I] en nullité du prêt doit être déclarée irrecevable.

Sur la demande de déchéance des intérêts au titre du prêt consenti par la société Lyonnaise de Banque fondée sur l'article L.312-10 du code de la consommation

L'article L.312-10 du code de la consommation dispose que l'emprunteur ne peut accepter l'offre que dix jours après l'avoir reçue. L'acceptation doit être donnée par lettre, le cachet de la poste faisant foi.

L'inobservation des règles de forme n'est sanctionnée que par la déchéance facultative du droit aux intérêts.

M.[I] invoque le non-respect des conditions d'acceptation de l'offre par voie postale au motif que l'envoi de l'offre est du 21 décembre 2001 mais que l'offre mentionne une date erronée du 7 décembre 2001.

La pièce 7 invoquée par l'appelant est une enveloppe vide Chronopost envoyée par la société Lyonnaise de Banque à M. [I] le 21 décembre 2001 sans mention de l'envoi de l'offre de prêt. L'acte notarié contenant prêt indique la date de l'offre et la date d'acceptation, avec reconnaissance par M.[I] de la réception de l'offre par voie postale le 9 décembre 2001 et son acceptation le 21 décembre 2001, ce qui n'est pas contredit par les pièces produites.

Le non-respect du formalisme de l'article L.312-10 relatif à l'envoi de l'offre par le prêteur et la fraude reprochée à la société Lyonnaise de Banque ne sont pas démontrés.

La demande de M.[I] de ce chef n'est pas fondée.

Sur la demande de déchéance des intérêts au titre du prêt consenti par la société Lyonnaise de Banque fondée sur l'article L.313-13 du code de la consommation

M. [I] a formé une demande de déchéance des intérêts dès l'introduction de l'instance. Il soumet en appel un moyen nouveau tiré d'une 'erreur de calcul du TEG'. Cette demande ne constitue pas une demande nouvelle en appel.

M. [I] soutient que le TEG est manifestement erroné dans la mesure où il est fixé hors assurances à 5,952 % sur l'offre de prêt et à 5,90 % sur l'acte de vente et de prêt. Il ajoute que le taux mentionné dans l'offre de prêt ne contient ni le coût de l'assurance, ni celui de la prise de garantie et des frais d'acte.

La discordance du montant du taux résulte de la simple lecture des actes et il est également précisé explicitement dans l'offre et l'acte de prêt que le taux effectif global ne mentionne pas la prime d'assurance facultative, que seuls les frais de dossier de 800 euros sont connus mais que les frais d'acte de vente et prise de garantie ne sont pas déterminés.

Il en résulte que les irrégularités alléguées étaient immédiatement décelables par un emprunteur normalement attentif et que le délai de prescription de cinq ans tel que nouvellement fixé par la loi du 17 juin 2008 était acquis le 17 juin 2015, date à laquelle le moyen a été soulevé pour la première fois.

Il convient de déclarer prescrite la demande de ce chef.

Sur la responsabilité de la société Lyonnaise de Banque à l'occasion de la libération des fonds

Sauf disposition légale, le banquier n'est obligé de contrôler l'utilisation des fonds que s'il s'y est contractuellement engagé. Dans le cas contraire, la banque n'est pas tenue de surveiller la destination des fonds prêtés, alors même que les crédits sont affectés, ce qui est une conséquence du principe de non-immixtion du banquier dans les affaires de son client.

M. [I] reproche à la banque d'avoir manqué à son obligation de contrôler la réalisation des travaux lors de la libération des fonds prêtés.

Il ne justifie pas de l'allégation selon laquelle la banque était le partenaire récurrent du promoteur immobilier ni qu'elle aurait été informée de ce que les sociétés du promoteur ponctionnaient l'ASL constituée sans contrepartie de travaux. La pièce 41, ordonnance de renvoi et non-lieu partiel, ne contient aucun élément concernant la participation de la société Lyonnaise de banque aux agissements du promoteur.

En page 10 de l'acte de vente du 28 décembre 2001, auquel est intervenue la société Lyonnaise de Banque, il est prévu que le prêt sera réalisé en deux parties avec l'affectation suivante:

-la somme de 55 185,54 euros destinée à l'acquisition et garantie du prêteur de deniers,

-la somme de 186 750,05 euros destinée au financement des travaux et garantie par une hypothèque.

En page 24 de l'acte de vente, M. [I] déclare être parfaitement informé qu'il doit être décidé par une prochaine assemblée des copropriétaires les travaux de rénovation de l'ensemble immobilier dont dépendent les lots vendus. 'Il déclare vouloir en faire son affaire personnelle'.

Le contrat de prêt conclu entre la société Lyonnaise de Banque et M. [I] stipule que le montant du prêt sera mis à disposition:

'-à la signature de l'acte notarié,

-à la justification de la réalisation des travaux'.

Le premier versement de la banque à hauteur de 152 982, 59 euros est intervenu le 26 décembre 2001 à la demande de la SCP notariale. Il porte sur le montant de l'acquisition du foncier mais également sur le montant de l'appel de fonds pour les travaux de 2001 à hauteur de 88420,43 euros. M.[I] avait déclaré en faire son affaire personnelle en sa qualité de membre de l'ASL et a donné un accord écrit de règlement le 24 décembre 2001 pièce 2 de la Scp notariale.

Le règlement par la banque de la facture de 1 375,40 euros le 6 mai 2002 est également intervenu à la demande de la SCP notariale s'agissant des frais de conseil fiscal.

La libération des fonds par la société Lyonnaise de Banque au titre des règlements des appels de fonds travaux 2002 et 2003 de l'ASL est intervenue entre les mains du notaire pour le compte de M.[I]. Ces fonds ont été débloqués avec l'accord écrit de M. [I], pièces 3 et 4 de la Scp notariale, mentionné sur les documents d'appels de fonds de l'ASL.

La pièce 5 de la SCP notariale, compte individuel de M.[I] du 27 décembre 2011, établit qu'il n'y a pas eu de règlement à l'ASL au titre des appels de fonds 2004 contrairement aux prétentions en appel de M.[I] et que le trop-versé de 27 440,22 euros, remboursé par l'ASL le 14 juin 2002, a bien été crédité.

M.[I] ne peut donc se prévaloir, au détriment du prêteur, d'un manquement fautif au titre de la vérification de la réalité des travaux et de l'utilisation des fonds.

Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a débouté M. [I] de son action en responsabilité contre la société Lyonnaise de Banque.

Sur la responsabilité de Me [N] et de la SCP notariale

M.[I] prétend n'avoir pas signé l'accusé de réception de la lettre lui notifiant le projet d'acte conformément à l'article L.271-1 du code de la construction et de l'habitation et reproche au notaire de ne pas avoir vérifié la signature figurant sur cet accusé de réception et qu'il avait bien bénéficié du délai de rétractation de sept jours, qui n'était pas écoulé à la date d'authentification de la vente le 28 décembre 2001.

Il est cependant produit un accusé de réception du 20 décembre 2001 comportant une signature à l'adresse qui demeure dans la présente procédure celle du domicile de l'emprunteur. Aux termes de l'acte authentifiant la vente, M.[I] a expressément reconnu avoir eu connaissance du projet d'acte notifié par l'envoi de la lettre recommandée du 17 décembre 2001 et a signé, en connaissance de cause l'acte authentique sans réserves renonçant ainsi à se prévaloir de la purge du délai de rétractation de sept jours après avoir signé dans ce délai les 21 et 27 décembre 2001 procuration donnée dans les mêmes formes authentiques de signer l'acte authentique d'acquisition ainsi qu'il ressort des énonciations de l'acte en page 9. Le grief n'est pas fondé.

Au regard des éléments de la procédure pénale versés au dossier, l'argumentation développée par l'appelant sur les détournements de fonds opérés par le dirigeant du groupe Quarante et ses sociétés et sur la cavalerie mise en place au préjudice de particuliers investisseurs est inopérante dès lors que les poursuites devant le tribunal correctionnel ne visent pas Me [N] et la SCP notariale.

M. [I] reproche à Me [N] un manquement à son devoir d'information et de conseil concernant les risques afférents à l'opération, ressortant des modalités de paiement des travaux.

Le notaire doit veiller à l'utilité et à l'efficacité de l'acte à l'établissement duquel il prête son concours et est tenu, à l'égard de toutes les parties, quelles que soient leurs compétences personnelles, à une obligation de conseil et, le cas échéant, de mise en garde, en ce qui concerne notamment les conséquences et les risques des stipulations convenues.

La circonstance de la profession d'avocat de M.[I] ne dispensait pas Me [N] de son devoir de conseil.

Il est exact que M.[I] a signé un document de réservation, hors la présence du notaire mais il ne résulte pas de l'acte authentique de vente que le notaire agissait en réitération d'un compromis.

Contrairement à ce qu'indique Me [N], le notaire était encore en situation de satisfaire à ses obligations lorsqu'il a notifié le projet d'acte de vente le 17 décembre 2001 et a notifié à M.[I] l'existence du délai de réflexion en application de l'article L.271-1 du code de la construction et de l'habitation.

Par ailleurs, il ressort des déclarations de Me [N], pièce 41 de l'appelant ordonnance de renvoi et non lieu partiel page 21, qu'il était le notaire habituel du groupe Quarante dans le cadre des opérations immobilières réalisées dans la France entière afin de proposer des placements défiscalisés Loi Malraux.

En l'espèce, Me [N] a reçu la vente de l'immeuble le 19 octobre 2001 lors de son acquisition par la société Yveco Finance des biens appartenant à la famille de [C], a reçu le 22 novembre 2001 l'état descriptif de division et le règlement de copropriété de l'ensemble immobilier ayant constitué le château [Établissement 1], a reçu l'acte de vente de l'appartement de M.[I], l'ensemble des parties à cet acte étant représentées par des clercs de son étude.

Il ressort par ailleurs de la pièce 27 de l'appelant, procès-verbal d'assemblée générale de l'ASL du 11 mai 2006 que les comptes-séquestre en l'étude de Me [N] fonctionnaient avec quatre signatures dont celle de M.[F], président de la société continentale TMO chargée des travaux et dirigeant des sociétés du groupe Quarante ainsi que celle du directeur de l'ASL, par ailleurs salarié du groupe Quarante.

Me [N] ne peut prétendre avoir ignoré l'objectif de défiscalisation des investisseurs dans le cadre de l'opération 'Château [Établissement 1]' prévue à cet effet pour commercialiser les biens au bénéfice des avantages fiscaux de la loi Malraux.

Or cet investissement présentait des risques particuliers pouvant compromettre le but recherché par les investisseurs en ce qu'elle consistait en la réhabilitation complète d'un site historique par de lourds travaux de sorte que si les travaux n'étaient pas menés à leur achèvement, les investisseurs se trouvaient propriétaires d'un bien de faible valeur, en ayant contracté des engagements de crédits importants, même s'ils avaient bénéficié de l'avantage immédiat de déduction du montant des travaux du revenu imposable, sous réserve de redressement fiscal ultérieur si les travaux ne sont pas justifiés.

Et il ressort du dossier que sous couvert de la mise en place d'une ASL nécessaire à la conduite des travaux, aucun contrôle indépendant de l'emploi des appels de fonds n'était mis en place pour garantir les propriétaires de leur bonne utilisation pendant la période de libération complète des fonds dans les deux années suivant la vente en raison de la dépendance de l'ASL par rapport au Groupe Quarante que ne pouvait ignorer le notaire

Me [N] s'est chargé de demander la libération des fonds auprès du prêteur avant même le commencement des travaux sur demande de l'ASL, juridiquement en charge des travaux et de leur contrôle, mais qui avait mise en place alors que la société Yveco Finance et patrimoine était propriétaire de la majorité des lots, ce qui avait permis de nommer en qualité de directeur de cette association, un salarié investi de tous les pouvoirs, M.[A], syndic provisoire ainsi qu'il ressort de l'acte de vente à M. [I] p 24.

S'il est exact que les fonds ont été payés par Me [N] à la demande de l'ASL et virés sur le compte de cette association sur le compte séquestre sus-décrit et que le notaire tenait une comptabilité individuelle des sommes transitant dans son étude au nom du particulier investisseur, Me [N] ne prouve pas s'être assuré que M.[I], particulier investisseur, avait conscience de la dépendance totale de l'opération à l'égard du groupe Quarante dont l'une des sociétés était chargée de la réalisation des travaux alors que l'acte de vente rédigé par le notaire stipulait que le client faisait son affaire personnelle des travaux de rénovation engagés par l'ASL, dirigée par un représentant du promoteur pendant toute la phase de libération des fonds issus du prêt.

Le fait que M.[I] ait confirmé par écrit son accord pour le versement des fonds puisqu'il souhaitait bénéficier de la déduction fiscale sur les revenus dès l'année 2001 ne dispensait pas Me [N] de son devoir d'information et de conseil à l'occasion de la vente sur la nécessité de surveiller l'état d'avancement des travaux compte tenu des risques de l'opération menée par le groupe de sociétés et dépourvue de garantie particulière.

Le jugement doit être infirmé en ce qu'il a écarté la responsabilité de Me [N].

Le manquement de Me [N] à son devoir de conseil a fait perdre à M.[I] une chance de renoncer à la vente que la cour évalue à 15 % en tenant compte du fait qu'aucune preuve n'est rapportée concernant une situation défavorable du groupe Quarante en 2001 et que l'investissement dans le cadre de la loi Malraux présentait un intérêt fiscal de déduction des travaux particulièrement attractif pour l'investisseur.

Il ressort du débat et des pièces produites que le chantier a été définitivement abandonné suite à la liquidation judiciaire.

Il ne peut toutefois être considéré, sans justification, que la valeur du bien acquis est nulle, dès lors que l'opération n'est pas dénouée par l'achèvement des travaux ou la revente de l'appartement.

Il convient à tout le moins de prendre en considération le montant des travaux de 186 750,05 euros et la charge financière du financement des travaux par l'emprunt réglée en pure perte, soit 152 765,93 euros, dont il conviendrait de déduire la valeur actuelle du bien et le montant des avantages fiscaux acquis par M. [I].

Ces derniers éléments à la charge de l'appelant n'étant pas déterminés, la cour retient comme base de calcul la somme de 239 516 euros.

En conséquence, il convient d'allouer à M.[I] une indemnité de 35 927 euros.

Les frais de mise en sécurité de l'immeuble, d'études, de recherche et d'expertise réalisés en 2008 ne présentent pas de lien de causalité avec la faute du notaire.

Sur la responsabilité de l'architecte

Il résulte de l'expertise judiciaire ordonnée à la demande de tiers que les travaux contrôlés par l'architecte n'ont pas posé de difficultés particulières, même s'il peut lui être reproché de n'avoir pas fait de comptes-rendus plus fréquents.

Le préjudice allégué par M.[I] ne présente pas de lien de causalité direct et certain avec le manquement de l'architecte dans la surveillance du chantier puisqu'il résulte du défaut d'achèvement de l'ouvrage en raison de la défaillance de l'entreprise générale placée en liquidation judiciaire en 2007.

Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a débouté M.[I] de ses demandes à l'égard de l'architecte et de sa demande subsidiaire d'expertise.

Sur les demandes d'indemnisation pour procédure abusive

L'action en justice, comme l'exercice du droit d'appel ne dégénère en abus de nature à justifier l'allocation de dommages-intérêts qu'en cas d'une attitude fautive génératrice d'un dommage. Une telle preuve n'est pas rapportée à l'encontre de M.[I]. Les demandes de dommages-intérêts de la société Lyonnaise de Banque, de M.[K], de Me [N] et de la Scp notariale doivent être rejetées.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Déclare irrecevables les explications et pièces transmises par M.[I] postérieurement à la clôture prononcée à l'ouverture des débats devant la cour à l'audience du 10 janvier 2017,

Confirme le jugement en ce qu'il a débouté M.[I] de son action en responsabilité contre la société Lyonnaise de Banque et M.[K] et leur a alloué une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Infirme le jugement entrepris pour le surplus de ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Déclare irrecevables les demandes d'annulation du contrat de réservation et de vente d'immeubles,

Déclare prescrite la demande en nullité du prêt,

Déboute M.[I] de la demande de déchéance des intérêts au titre du prêt consenti par la société Lyonnaise de Banque fondée sur l'article L.312-10 du code de la consommation,

Déclare prescrite la demande de déchéance des intérêts au titre du prêt consenti par la société Lyonnaise de Banque fondée sur l'article L.313-13 du code de la consommation,

Condamne in solidum Me [N] et la SCP [X]-[N]-[L]-[Z] et [E] à payer à M.[I]':

- la somme de 35 927 euros de dommages et intérêts,

- la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens engagés en première instance et en appel à leur encontre,

Déboute M.[I] de ses autres demandes plus amples ou contraires,

Déboute la société Lyonnaise de Banque, M.[K], Me [N] et la Scp notariale de leurs demandes de dommages et intérêts pour procédure et appel abusif,

Condamne M.[I] à payer à la société Lyonnaise de Banque et à M. [K], chacun la somme supplémentaire de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Laisse à la charge de M.[I] les dépens de la procédure de première instance et d'appel engagée à l'encontre de la société Lyonnaise de Banque et de M.[K],

Dit que les dépens d'appel seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par ceux des mandataires des parties qui en ont fait la demande.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile b
Numéro d'arrêt : 14/02031
Date de la décision : 21/02/2017

Références :

Cour d'appel de Lyon 1B, arrêt n°14/02031 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-02-21;14.02031 ?
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