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14/02/2017 | FRANCE | N°15/05166

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile b, 14 février 2017, 15/05166


R.G : 15/05166









Décision du

Tribunal de Grande Instance de ST ETIENNE

Au fond

du 26 mai 2015



RG : 11/00995

ch n°1





SA CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE LOIRE DROME ARDE CHE



C/



[C]

[R]

SA CNP ASSURANCES





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile B



ARRET DU 14 Février 2017







APPELANTE :>


LA CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE LOIRE DROME ARDE CHE, SA coopérative, représentée par ses dirigeants locaux en exercice, domiciliés de droit en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représentée par la SELARL BOST-AVRIL, avocats au barreau de...

R.G : 15/05166

Décision du

Tribunal de Grande Instance de ST ETIENNE

Au fond

du 26 mai 2015

RG : 11/00995

ch n°1

SA CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE LOIRE DROME ARDE CHE

C/

[C]

[R]

SA CNP ASSURANCES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRET DU 14 Février 2017

APPELANTE :

LA CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE LOIRE DROME ARDE CHE, SA coopérative, représentée par ses dirigeants locaux en exercice, domiciliés de droit en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par la SELARL BOST-AVRIL, avocats au barreau de SAINT-ETIENNE

INTIMES :

M. [C] [C]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté par la SCP PUTIGNIER-MARFAING, avocats au barreau de SAINT-ETIENNE

Mme [O] [R] épouse [C]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par la SCP PUTIGNIER-MARFAING, avocats au barreau de SAINT-ETIENNE

LA CNP ASSURANCES, SA, entreprise régie par le Codes des Assurances, prise en ses représentants légaux domiciliés audit siège

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par la SCP BONIFACE-HORDOT-FUMAT-MALLON, avocats au barreau de SAINT-ETIENNE

******

Date de clôture de l'instruction : 26 Mai 2016

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 03 Janvier 2017

Date de mise à disposition : 14 Février 2017

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Françoise CARRIER, président

- Marie-Pierre GUIGUE, conseiller

- Michel FICAGNA, conseiller

assistés pendant les débats de Fabrice GARNIER, greffier

A l'audience, Françoise CARRIER a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Françoise CARRIER, président, et par Fabrice GARNIER, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

EXPOSE DE L'AFFAIRE

Suivant offres acceptées le 16 août 2001, M. [C] [C] a souscrit auprès de la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE LOIRE DROME ARDÈCHE deux prêts destinés à financer des acquisitions immobilières locatives à savoir :

- suivant contrat n°3554318, prêt d'un montant de 167 700 € remboursable en 180 mensualités de 1 394,45 €, destiné à financer l'acquisition

- suivant contrat n°35554312, prêt d'un montant de 106 700 € remboursable en 180 mensualités de 887,23 €.

Il a adhéré pour ces prêts aux garanties décès et IPA (invalidité permanente absolue) du contrat d'assurance groupe souscrit par la CAISSE D'ÉPARGNE auprès de la société CNP ASSURANCES.

Il a en outre souscrit avec son épouse, Mme [O] [R] deux autres prêts immobiliers à savoir :

- le 26 décembre 2001, suivant contrat n°3598619, prêt d'un montant de 30 490 € remboursable en 180 mensualités de 252,72 €, pour lequel il a adhéré aux garanties décès, IPA et ITT (incapacité totale de travail) du contrat d'assurance groupe CNP ASSURANCES souscrit par la CAISSE D'ÉPARGNE,

- le 4 mars 2003, suivant contrat n°3598619, prêt d'un montant de 61 150 € remboursable en 180 mensualités de 498,62 €, pour lequel il a adhéré aux garanties décès PTIA (perte totale irréversible d'autonomie) et ITT du contrat d'assurance groupe souscrit par la CAISSE D'ÉPARGNE auprès de la société CNP ASSURANCES.

A compter du 14 février 2009, M. [C] a été placé en arrêt de travail avant d'être reconnu en 'incapacité au métier' par le RSI à compter du 16 mai 2010 et jusqu'à ses soixante ans avec le bénéfice d'une pension d'invalidité.

Il a demandé à la CNP de prendre en charge les échéances des quatre prêts au titre de la garantie ITT.

Par courrier des 6 juillet et 6 octobre 2010, la société CNP ASSURANCES lui a opposé un refus de prise en charge des échéances des prêts du 16 août 2001 au motif qu'il n'avait pas souscrit la garantie ITT.

Elle a par contre pris en charge les échéances des prêts des 26 décembre 2001 et 4 mars 2003 à compter du 20 janvier 2010 mais a opposé à M. [C] sa déclaration tardive s'agissant des échéances antérieures. Cette prise en charge s'est poursuivie jusqu'au 14 février 2011, date du soixantième anniversaire de M. [C] et de la cessation corrélative de la pension d'invalidité.

Par acte du 22 février 2011, M. [C] et Mme [R] épouse [C] ont fait assigner la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE LOIRE DROME ARDÈCHE ainsi que la société CNP ASSURANCES devant le tribunal de grande instance de SAINT-ETIENNE à l'effet d'obtenir la prise en charge des échéances des 4 prêts à compter de mai 2009 déduction faite des sommes déjà versées.

Par jugement du 26 mai 2015, le tribunal a :

- déclaré régulière, recevable et partiellement fondée la demande de M. [C] et de Mme [R] épouse [C],

- dit que la société CNP Assurances n'avait pas manqué à son devoir d'information à leur égard,

- dit que la situation de M. [C] ne permettait pas la prise en charge au titre de la garantie ITT des échéances des crédits n°3598619 et 3557346,

- débouté les demandeurs de leurs prétentions à l'encontre de la société CNP ASSURANCES,

- dit que la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE LOIRE DROME ARDÈCHE avait manqué à son obligation de conseil lors de l'adhésion de M. [C] au contrat d'assurance pour les crédits contractés le 16 août 2001,

- condamné la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE LOIRE DROME ARDÈCHE à lui verser le montant des échéances des prêts n°3554318 et 3554323 entre mai 2009 et février 2016, soit la somme de 187 097,76 €,

- débouté les demandeurs de leurs prétentions à l'encontre de la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE LOIRE DROME ARDÈCHE relatives aux crédits n°3598619 et 3557346,

- condamné la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE LOIRE DROME ARDÈCHE à verser à M. [C] la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts et celle de 5 000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté M. [C] et Mme [R] épouse [C] de leur demande relative aux intérêts ainsi qu'à l'exécution provisoire,

- débouté la société CNP ASSURANCES de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE LOIRE DROME ARDÈCHE aux dépens.

Par acte du 24 juin 2015, la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE LOIRE DROME ARDÈCHE a interjeté appel de cette décision.

Au terme de conclusions notifiées le 9 décembre 2015, elle demande à la cour de réformer partiellement le jugement déféré et de :

- débouter M. [C] et Mme [R] épouse [C] de leurs demandes, fins et conclusions,

- les condamner, ou à qui mieux le devra, à lui verser la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens avec faculté de distraction au profit de la SELARL BOST AVRIL.

Elle fait valoir :

- que du fait de l'effet relatif du contrat, la demande des époux [C] tendant au paiement des mensualités des 4 contrats de prêt pour la période de mai 2009 à février 2016 ne peut être dirigée qu'à l'encontre de leur cocontractant, c'est-à-dire la société CNP ASSURANCES,

- que, s'agissant des 2 contrats de prêt conclus le 16 août 2001 pour lesquels la garantie ITT n'a pas été souscrite, elle ne saurait se voir reprocher un manquement à son obligation de conseil et d'information aux motifs qu'elle a remis la notice d'information délivrée par l'assureur, que cette garantie ne se justifiait pas au regard de la situation de M. [C], alors sans activité professionnelle, et de la finalité des prêts (achat d'immeubles à des fins locatives), que M. [C] en sa qualité de professionnel de l'immobilier n'est pas un profane, et qu'il a librement choisi les garanties dont il souhaitait bénéficier,

- que M. [C] et Mme [R] épouse [C] n'établissent pas avoir subi un préjudice certain, le juge de première instance évoquant d'ailleurs une perte de chance, ce qui rend injustifiée une condamnation au paiement de l'ensemble des mensualités correspondant à une réparation intégrale,

- que, s'agissant des 2 contrats de prêts conclus le 26 décembre 2001 et le 4 mars 2003 pour lesquels la garantie ITT a été souscrite, la société CNP Assurances n'a indemnisé M. [C] et Mme [R] épouse [C] que pour la période allant du 20 janvier 2010 au 14 octobre 2010 du fait du défaut de communication par M. [C] des documents exigés en application du contrat d'assurance, manquement dont elle ne saurait être tenue responsable,

- qu'au titre de ces 2 derniers contrats, seule la société CNP ASSURANCES pourrait être recherchée en vertu des garanties souscrites.

Au terme de conclusions notifiées le 17 mars 2016, M. [C] et Mme [R] épouse [C] demandent à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE LOIRE DROME ARDÈCHE à leur payer la somme de 187 097,76€ au titre des mensualités de mai 2009 à février 2016 des deux contrats de prêt souscrits le 16 août 2001, ainsi que la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts,

- réformer le jugement déféré en ce qu'il les a déboutés de leurs demandes à l'encontre de la société CNP ASSURANCES et cette dernière à leur payer :

*la somme de 187 097,76 €, solidairement avec la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE LOIRE DROME ARDÈCHE, pour manquement à ses obligations,

* la somme de 2 274,48 € au titre des mensualités du contrat de prêt souscrit le 26 décembre 2001, pour la période du 14 mai 2009 au 20 janvier 2010,

* la somme de 4 487, 58 € au titre des mensualités du contrat de prêt souscrit le 4 mars 2003, pour la période du 14 mai 2009 au 20 janvier 2010,

- prononcer le droit aux intérêts au taux légal pour ces sommes, outre leur capitalisation,

- condamner solidairement ou in solidum la société CNP ASSURANCES et la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE LOIRE DROME ARDÈCHE à verser à M. [C] la somme de 6 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Ils font valoir :

- qu'ils souhaitaient bénéficier de l'ensemble des garanties décès, IPA et ITT pour les 4 contrats de prêt souscrits, d'où l'emploi de formulaires strictement identiques,

- que M. [C] n'a pas déclaré ne souhaiter bénéficier que des garanties décès et IPA pour les contrats souscrits le 16 août 2001, que le bulletin d'adhésion n'a pas été complété de sa main, qu'il a toujours été employé d'immeuble,

- que la banque a manqué à son devoir d'information et de conseil aux motifs qu'elle connaissait la situation de M. [C], notamment le fait qu'il ne bénéficiait d'aucune garantie chômage, qu'elle aurait donc dû être particulièrement vigilante et attirer son attention sur la nécessité de bénéficier de l'ensemble des garanties, notamment ITT, ce qui correspondait mieux à sa situation,

- que la seule remise de la notice de l'assureur est insuffisante à la libérer de son devoir de conseil, et que la Banque aurait dû lui fournir des informations sur l'effectivité des garanties souscrites,

- que M. [C] est un profane n'ayant aucune compétence particulière en matière bancaire ou d'assurance,

- que l'absence de prise en charge des mensualités de tous les prêts par l'assurance est imputable à la Banque qui, par son manquement à son devoir de conseil, l'a privé du bénéfice d'une assurance adaptée, ce qui lui cause un préjudice puisqu'il a été contraint, malgré sa situation difficile, de payer les mensualités,

- que la société CNP ASSURANCES a également manqué à son devoir d'information et de conseil en ne cherchant pas à contacter l'assuré au vu du bulletin d'adhésion rempli par le souscripteur et de l'absence de mention de son identité, ainsi que du caractère inadapté de l'assurance souscrite, les garanties différant alors que les emprunts sont identiques,

- que les documents justificatifs exigés ont été communiqués à l'assureur, rendant infondé son refus de l'indemniser pour la période antérieure au 20 janvier 2010.

Au terme de conclusions notifiées le 20 avril 2016, la société CNP ASSURANCES demande à la cour de confirmer le jugement déféré dans toutes ses dispositions et de condamner la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE LOIRE DROME ARDÈCHE aux dépens avec faculté de recouvrement au profit de la SCP BONIFACE HORDOT FUMAT MALLON..

Elle fait valoir :

- que M. [C] ne peut solliciter le bénéfice de la garantie ITT alors que celle-ci n'a pas été souscrite pour les contrats de prêt conclus le 16 août 2001,

- que la garantie ITT intervient lorsque l'assuré est obligé d'interrompre toute activité professionnelle et qu'il justifie de cet état par la transmission de documents en attestant, ce que M. [C] n'a pas fait pour la période allant du 14 mai 2009 au 20 janvier 2010 ainsi que pour celle du 14 mai 2011 au 14 février 2016, ce qui justifie son refus de l'indemniser,

- que, dans le cadre d'un contrat d'assurance de groupe, le devoir d'information et de conseil incombe au souscripteur, en l'espèce la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE LOIRE DROME ARDÈCHE, l'assureur ne pouvant être tenu d'un tel devoir alors qu'il n'est pas amené à avoir un quelconque contact avec l'assuré,

- que M. [C] a été valablement informé de l'étendue des garanties souscrites par la remise de la notice, conformément aux prescriptions légales.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur les manquements reprochés à l'assureur

Selon l'article 1134 du code civil, le contrat fait la loi des parties.

La lecture des demandes d'adhésion destinées à garantir les prêts 3554318 et 3554223 fait apparaître que la garantie ITT n'a pas été sollicitée de sorte que la CNP ASSURANCES n'avait pas à la proposer et que c'est sans faute qu'elle n'a accordé que les garanties décès-invalidité.

Le fait que M. [C] ait omis de mentionner son nom à la suite de 'je soussigné' au paragraphe final du bulletin de demande d'adhésion (rubrique 11), n'était pas de nature à faire douter l'assureur de la volonté de l'intéressé de bénéficier des garanties accordées dès lors qu'il avait apposé sa signature au pied de l'acte et qu'il était identifiable puisque son identité et sa signature figuraient déjà à la première page du document.

La CNP n'avait pas à mettre en cohérence des adhésions souscrites à des dates différentes pour des contrats différents, étant relevé que les deux contrats souscrits le 16 août 2001 comportaient les mêmes garanties de sorte qu'il n'existait entre eux aucune incohérence.

C'est par conséquent à bon droit que le premier juge a débouté les demandeurs de leur demande de prise en charge des échéances des dits prêts au titre de la garantie ITT.

S'agissant des deux autres prêts, il est acquis que la garantie ITT a été sollicitée et accordée.

L'article 2 des conditions générales définit la garantie incapacité totale de travail ainsi : 'l'assuré est en état d'ITT lorsque, à l'expiration d'une période d'interruption continue d'activité de 90 jours (dite délai de carence), il se trouve à la suite d'une maladie ou d'un accident, dans l'obligation d'interrompre totalement toute activité professionnelle (ou, s'il n'exerce pas ou plus d'activité professionnelle, d'observer un repos complet le contraignant à interrompre ses activités habituelles)'.

L'article 9 dispose que l'assuré doit transmettre les documents justificatifs de l'arrêt de travail permettant de bénéficier de la prise en charge au plus tard dans les 180 jours et que, ce délai dépassé, la date de prise en charge est celle de la réception du dossier par l'assureur.

M. [C], qui a la charge de la preuve, ne démontre pas avoir fait parvenir à l'assureur les pièces justificatives de sa situation d'incapacité totale de travail en temps utile pour permettre la prise en charge des échéances de la période du 14 mai 2009 au 20 janvier 2010.

Le jugement déféré sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté les époux [C] de leurs demandes dirigées contre la société CNP ASSURANCES.

Sur les manquements reprochés à la Banque

En application des articles L.141-1 à L.141-6 du code des assurances, le souscripteur d'un contrat d'assurance de groupe est tenu d'une obligation légale d'information, laquelle consiste en la remise d'une notice détaillée définissant les garanties prévues par la convention et leurs modalités d'application.

Le prêteur de deniers est en outre tenu, lorsqu'il propose à l'emprunteur d'adhérer au contrat d'assurance de groupe auquel il a lui-même souscrit, d'une obligation d'information et de conseil, laquelle consiste à éclairer l'emprunteur sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle.

M. [C] a été valablement informé de l'étendue et des conditions de mise en oeuvre des garanties souscrites par la remise de la notice, conformément aux prescriptions légales. Le contrat n'étant entaché d'aucune irrégularité susceptible de le rendre inefficace, il n'est pas fondé à reprocher à la Banque de ne pas lui avoir fourni d'informations sur 'l'effectivité' des garanties souscrites.

D'autre part, la Banque, qui n'est pas assureur ni courtier en assurance, n'avait pas à lui fournir d'autres informations que celles relatives au contrat assurance groupe dont elle était titulaire ni à le conseiller sur l'opportunité de souscrire une autre assurance éventuellement mieux adaptée.

Le devoir d'information du prêteur en matière d'assurance bénéficie à tous les emprunteurs, fussent-ils avertis, et s'impose indépendamment de tout risque d'endettement excessif, la souscription d'une assurance destinée à garantir le remboursement d'un prêt n'étant pas déterminée par le niveau d'endettement de l'emprunteur mais par la perspective d'un risque dont la couverture apparaît opportune lors de la souscription du prêt.

En l'espèce, s'agissant des deux prêts souscrits le 16 août 2001, il ressort des bulletins de demande d'adhésion souscrits le 4 juillet 2001 que M. [C] a apposé sa signature sous la mention indiquant par une croix dans la case de réponse 'oui' qu'il choisissait en sa qualité de 'co-emprunteur sans activité professionnelle, de n'être couvert que pour les garanties décès-IPA'.

Si M. [C] s'est présenté dans les actes authentiques régularisant les ventes financées au moyen des deux prêts du 16 août 2001 comme 'employé d'immeuble', les extraits du RCS et documents comptables produits par la Banque démontrent qu'il exerçait depuis plusieurs années déjà des activités de rénovation et de location de logements sous forme d'entreprise personnelle et d'EURL et qu'il était versé dans les affaires de sorte qu'il apparaît peu plausible qu'il ait pu ne pas saisir qu'il ne souscrivait pas la garantie ITT.

Il convient de relever à cet égard qu'il a apposé sa signature le 16 août 2001 en dernière page des bulletins de demande d'adhésion au niveau de la rubrique 'garanties accordées' dont seules les cases DC et IPA étaient cochées, la case ITT restant vide.

Il a ainsi nécessairement validé les mentions litigieuses, qui sont de surcroît cohérentes entre elles, en apposant sa signature à proximité de chacune d'elles et ne produit aucun élément susceptible de faire apparaître qu'il aurait été trompé.

Le fait qu'il ait souscrit la garantie ITT dans des contrats postérieurs ne saurait constituer une preuve de sa volonté à la date de souscription des prêts en cause.

Les fiches 'assurances du crédit' extraites des fichiers de la Banque que M. [C] invoque au soutien de ses allégations, outre qu'elles indiquent qu'elles n'ont pas de caractère contractuel, ont été émises le 3 décembre 2010, postérieurement à la souscription des prêts litigieux, de sorte qu'elles n'ont pas pu d'une quelconque façon contribuer à le tromper lors de la souscription des garanties.

La garantie ITT telle que définie à la police ne se limite pas aux emplois salariés et bénéficie également aux artisans et travailleurs indépendants de sorte que M. [C] n'était pas dépourvu d'intérêt à la souscrire.

Le fait que les crédits aient eu pour objet de financer l'acquisition d'immeubles destinés à procurer des revenus locatifs susceptibles de couvrir la charge des emprunts n'était pas de nature à faire disparaître totalement l'intérêt d'adhérer à la garantie incapacité totale de travail s'agissant d'un investissement non dépourvu d'aléas.

La Banque, qui a la charge de la preuve de l'exécution de son obligation de conseil, ne démontre pas avoir attiré l'attention de l'emprunteur sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle de sorte que sa responsabilité est engagée.

Dès lors qu'il n'est pas certain que s'il avait été dûment informé, M. [C] aurait souscrit la garantie ITT, son préjudice s'analyse en une perte de chance de souscrire ladite garantie.

La perte de chance doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée de sorte que le préjudice de M. [C] ne saurait être égal à l'avantage que lui aurait procuré la garantie s'il l'avait souscrite.

Si la garantie avait été souscrite, M [C] aurait bénéficié de la même prise en charge que les échéances des prêts bénéficiant de la garantie soit celles de janvier 2010 à février 2011, le montant des échéances correspondantes avoisinant 30 000€.

La cour dispose d'éléments suffisant pour estimer cette perte de chance à 50% de sorte qu'il convient de faire droit à la demande à hauteur de 15 000 €.

Le jugement sera en conséquence réformé sur le montant des dommages et intérêts alloués à M. [C].

Les intérêts courent au taux légal à compter de ce jour par application de l'article 1153-1 du code civil. La capitalisation des intérêts dus pour une année entière est de droit dès lors qu'elle est demandée, ce en application de l'article 1154 du code civil.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

REFORME le jugement déféré en ce qu'il a condamné la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE LOIRE DROME ARDÈCHE à verser à M. [C] le montant des échéances des prêts n°3554318 et 3554323 entre mai 2009 et février 2016, soit la somme de 187 097,76 € et la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts ;

Statuant à nouveau,

CONDAMNE la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE LOIRE DROME ARDÈCHE à payer à M. [C] la somme de 15 000 € à titre de dommages et intérêts, ce outre intérêts au taux légal à compter de ce jour ;

ORDONNE la capitalisation des intérêts sous réserve qu'ils soient dûs pour une année entière ;

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses autres dispositions ;

Y ajoutant,

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

CONDAMNE la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE LOIRE DROME ARDÈCHE aux dépens des époux [C] ;

CONDAMNE les époux [C] aux dépens de la société CNP ASSURANCES ;

AUTORISE la SCP BONIFACE HORDOT FUMAT MALLON, avocats, à recouvrer directement à leur encontre les dépens dont elle aurait fait l'avance sans avoir reçu provision.

LE GREFFIERLA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile b
Numéro d'arrêt : 15/05166
Date de la décision : 14/02/2017

Références :

Cour d'appel de Lyon 1B, arrêt n°15/05166 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-02-14;15.05166 ?
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