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10/05/2016 | FRANCE | N°14/02045

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile b, 10 mai 2016, 14/02045


R.G : 14/02045









Décision du

Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond

du 20 février 2014



RG : 11/03007

ch n°10





Société civile FRANCE INVESTIPIERRE



C/



SASU SNC-LAVALIN





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile B



ARRET DU 10 Mai 2016







APPELANTE :



Société FRANCE INVESTIPIERRE vena

nt aux droits de la société IMMOBILIERE PRIVEE-FRANCE PIERRE

[Adresse 2]

[Adresse 2]



Représentée par la SCP CHAZELLE & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

Assistée de la SELARL F.B.C. avocat au barreau de PARIS







INTIMEE :



Société SNC-LAVALIN SAS venant ...

R.G : 14/02045

Décision du

Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond

du 20 février 2014

RG : 11/03007

ch n°10

Société civile FRANCE INVESTIPIERRE

C/

SASU SNC-LAVALIN

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRET DU 10 Mai 2016

APPELANTE :

Société FRANCE INVESTIPIERRE venant aux droits de la société IMMOBILIERE PRIVEE-FRANCE PIERRE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par la SCP CHAZELLE & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

Assistée de la SELARL F.B.C. avocat au barreau de PARIS

INTIMEE :

Société SNC-LAVALIN SAS venant aux droits de la société SAS SIRR INGEGNERIE représentée par son gérant domicilié en cette qualité au siège social sis

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON

Assistée de la SELARL AXLO, avocat au barreau de NANTES

******

Date de clôture de l'instruction : 22 Octobre 2015

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 14 Mars 2016

Date de mise à disposition : 10 Mai 2016

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Jean-Jacques BAIZET, président

- Marie-Pierre GUIGUE, conseiller

- Michel FICAGNA, conseiller

assistés pendant les débats de Emanuela MAUREL, greffier

A l'audience, Marie-Pierre GUIGUE a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Jean-Jacques BAIZET, président, et par Emanuela MAUREL, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé en date du 4 juillet 2003, la SCPI IMMOBILIERE PRIVEE - FRANCE PIERRE a conclu avec la société SIRR INGENIERIE un bail commercial portant sur un local à usage de bureau situé [Adresse 1], pour une durée de neuf années, avec effet au 1er août 2003.

Par acte extrajudiciaire en date du 1er février 2010, la société SIRR INGENIERIE a délivré congé pour le 30 septembre 2010 en application de l'article 57 A de la loi du 23 décembre 1986.

Par exploit d'huissier en date du 25 janvier 2011, la SCPI IMMOBILIERE PRIVEE - FRANCE PIERRE a fait assigner la société SIRR INGENIERIE devant le tribunal de grande instance de Lyon en annulation du congé et paiement de l'arriéré locatif.

Par jugement du 20 février 2014, le tribunal a débouté la SCPI de ses demandes et a rejeté les demandes en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La SCPI France INVESTIPIERRE venant aux droits de la SCPI IMMOBILIERE PRIVEE - FRANCE PIERRE a relevé appel et demande à la cour de:

-réformer le jugement,

-juger que la société SIRR INGENERIE aux droits de laquelle se trouve la SNC LAVALIN ne pouvait valablement délivrer le congé du 1er février 2010 au visa de l'article 57 A de la loi du 23 décembre 1986,

-condamner la SNC LAVALIN à payer la somme de 105 456, 94 euros au titre de sa dette locative et la somme de 10545 euros au titre de la clause pénale stipulée au bail, avec intérêts au taux contractuel, soit le taux d'intérêt légal majoré de 5 % à compter de l'assignation du 25 janvier 2011,

-ordonner la capitalisation des intérêts échus à compter du 25 janvier 2012,

-condamner la SNC LAVALIN au paiement d'une indemnité de 6000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel.

Elle soutient:

-que le statut des baux professionnels s'applique aux contrats de location d'un local affecté à un usage exclusivement professionnel,

-que la notion d'affectation ne peut être réduite à l'usage que le locataire confère effectivement aux locaux pris à bail,

-qu'il convient de tenir compte de la destination des lieux contractuellement fixée,

-que le bail n'a pas été consenti exclusivement à usage de bureau d'études, mais également pour l'exercice d'activités de nature commerciale, telles que l'organisation et la surveillance de travaux, ou la prise de participations dans des entités juridiques,

-que le fait que la locataire ait choisi de n'exercer qu'une activité de bureau d'étude est indifférent,

-que le tribunal a ajouté une condition à la loi à savoir, l'usage effectif des lieux par la société locataire alors qu'il aurait dû retenir les dispositions contractuelles d'affectation des locaux,

-que dès lors que les locaux n'étaient pas exclusivement affectés à un usage professionnel, le congé devait respecter les dispositions du statut des baux commerciaux,

-que la prise de participation dans d'autres entreprises ou la direction et la surveillance de travaux par un bureau d'études relèvent d'activités commerciales conformément aux dispositions de l'article L.110-1 6° du code de commerce, contrairement à l'appréciation du tribunal,

-que même accessoire, cette activité commerciale empêche la SNC LAVALIN de se prévaloir du régime des baux professionnels,

-que le congé n'est donc pas valable et oblige la société preneuse au paiement des loyers jusqu'au terme du bail soit le 31 juillet 2022,

-qu'à titre subsidiaire, en application des dispositions combinées des articles 1134 et 1737 du code civil, la société ne pouvait se libérer avant l'expiration du bail soit le 31 juillet 2012 et se tpive tenue au paiement des loyers jusqu'au 31 juillet 2012.

La société SNC LAVALIN, venant aux droits de la société SIRR INGENIERIE, demande à la cour de confirmer le jugement, de débouter l'appelante de ses demandes et de la condamner l'appelante au paiement d'une indemnité de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir:

-que les dispositions de l'article 57 A de la loi du 23 décembre 1986, qui permettent au locataire de quitter les locaux à tout moment moyennant un préavis de six mois, sont d'ordre public et s'imposent à tout bail professionnel même conventionnellement soumis au statut des baux commerciaux,

-que l'accord des parties ne peut interdire au locataire de se prévaloir des dispositions favorables de l'article 57 A de la loi du 23 décembre 1986,

-que c'est l'activité effectivement exercée dans les lieux loués qui doit être retenue pour déterminer l'application du statut des baux professionnels, et non celle mentionnée aux termes du bail,

-qu'elle a en l'espèce effectivement exercé une activité d'ingénierie et de conseil aux entreprises, qui est de nature professionnelle et non commerciale,

-qu'elle n'a pas exercé d'activité de prise de participation ainsi qu'il ressort de l'attestation de son expert-comptable,

-qu'ayant assuré la prise de contrôle de deux sociétés, l'activité de prise de participation reste civile sans entraîner nécessairement un changement de l'activité pour devenir commerciale,

-qu'elle n'a exercé qu'une activité professionnelle civile d'ingéniérie et de conseil en entreprises sans avoir d'activité de bureau d'affaires, ce que confirme son code Insee, peu important la réalisation des études pour partie en sous-traitance,

-que le congé qu'elle a délivré en application de l'article 57 A de la loi précité est donc valable,

-qu'elle s'est acquittée du paiement des loyers jusqu'à la date d'effet du congé.

MOTIFS

S'agissant d'un bail du 4 juillet 2003 conclu antérieurement à la loi n°2008-776 du 4 août 2008, la soumission volontaire des parties au statut des baux commerciaux ne peut avoir pour effet d'évincer, lorsqu'elles sont applicables, les dispositions d'ordre public de l'article 57 A de la loi du 23 décembre 1986.

Il ressort de l'article 57 A que la faculté de délivrer congé à tout moment, moyennant le respect d'un préavis de six mois, n'est ouverte qu'au preneur à bail d'un local affecté à un usage exclusivement professionnel.

Les dispositions de l'article 57 A peuvent s'appliquer à une société ayant une forme commerciale, ce qui est le cas en l'espèce.

Le bail conclu entre la SCPI IMMOBILIERE PRIVEE - FRANCE PIERRE et la société SIRR INGENIERIE stipule que la société preneuse s'est engagée "à n'utiliser les lieux loués que pour l'exercice de son activité définie sur l'extrait Kbis de son inscription au registre du commerce, soit : Prise de participation dans toutes entités juridiques. Etablissement de plans, études de devis de construction. Préparation de projet de marché, diriger et surveiller les travaux".

Il en résulte qu'aux termes du bail, les seules activités autorisées étaient de nature professionnelle, s'agissant d'une activité de bureau d'étude et de maîtrise d'oeuvre d'ingéniérie, relevant de prestations de nature intellectuelle jusqu'à la surveillance et la réception des travaux.

Il n'est pas davantage établi en appel par la SCPI FRANCE INVESTIPIERRE que le preneur ait affecté les locaux à des actes de commerce tels que la fourniture de matériel ou de personnel, ou qu'il ait accompli des actes relevant d'une activité commerciale d'agence d'affaires.

Le fait que la société preneuse exerce sous une forme commerciale et à but lucratif, le nombre de ses salariés ou le montant de son chiffre d'affaires ne suffisent pas à conférer à son activité une nature commerciale.

En effet, le recours à la sous-traitance invoqué par la bailleresse, qui représente 17 % du chiffre d'affaires de la société preneuse selon la pièce 11 de l'appelante, ne prouve pas que la société SIRR INGENIERIE devenue SNC LAVALIN ait fourni du personnel ou vendu des prestations payées à des tiers alors que la sous-traitance du travail d'études pour le refacturer à un client dans le cadre d'une activité professionnelle de nature intellectuelle telle celle exercée à titre de bureau d'études ou de profession libérale ne confére pas un caractère commercial à l'activité exercée.

C'est également à juste titre que les premiers juges ont retenu que l'affectation contractuelle des locaux à la prise de participation dans toutes entités juridiques, qui n'est pas une activité commerciale par nature, ne pouvait suffire à exclure la qualification d'activité professionnelle.

En outre, la société SNC LAVALIN démontre que cette activité n'a pas été exercée dans des conditions susceptibles d'entraîner une qualification de bail commercial, s'agissant d'un acte isolé de prise de participation majoritaire dans une entreprise d'ingéniérie ensuite absorbée ne traduisant pas en soi l'exercice d'une activité commerciale.

Il ressort de cette analyse que les dispositions d'ordre public du statut des baux professionnels étaient applicables au congé qui a été valablement délivré par la société SIRR INGENIERIE par acte extrajudiciaire le 1er février 2010 pour la date d'effet du 30 septembre 2010.

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la SCPI FRANCE INVESTIPIERRE de sa demande en paiement au titre des loyers et charges échus postérieurement au 30 septembre 2010.

Le premier juge a relevé que la société SNC LAVALIN a justifié en cours de délibéré avoir procédé le 20 janvier 2014 au règlement de la somme de 23 668,75 euros correspondant aux loyers, taxes et charges impayés arrêtés au 30 septembre 2010.

Le paiement intégral des loyers, taxes et charges pour la période allant jusqu'à la date d'effet du congé n'est pas discuté en appel.

Le jugement doit être confirmé en toutes ses dispositions.

La SCPI FRANCE INVESTIPIERRE, qui succombe en appel, supporte les dépens ainsi qu'une indemnité supplémentaire en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La cour rejette la demande de prise en charge anticipée au titre de l'article 10 du tarif des huissiers.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la SCPI FRANCE INVESTIPIERRE à payer à la SNC LAVALIN la somme de 3000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SCPI FRANCE INVESTIPIERRE aux dépens d'appel avec droit de recouvrement direct par la SCP Aguiraud&Nouvellet, avocats,

Rejette la demande de prise en charge anticipée au titre de l'article 10 du tarif des huissiers.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile b
Numéro d'arrêt : 14/02045
Date de la décision : 10/05/2016

Références :

Cour d'appel de Lyon 1B, arrêt n°14/02045 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-05-10;14.02045 ?
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