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08/12/2015 | FRANCE | N°14/00822

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile b, 08 décembre 2015, 14/00822


R.G : 14/00822









Décision du

Tribunal de Grande Instance d'AVIGNON

Au fond

du 04 février 2008



RG : 2007/01292

ch n°3





SOCIETE SCI MORICE SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE



C/



[X] Veuve [F]





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile B



ARRET DU 08 Décembre 2015







APPELANTE :



SCI MORICE

[Ad

resse 1]

[Adresse 1]



Représentée par la SELARL DE FOURCROY AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

Assistée de la SCP DURY DUCROS ET ASSOCIES, avocats au barreau d'AVIGNON







INTIMEE :



Mme [W] [X] Veuve [F]

née le [Date naissance 1] 1921 à [Localité 1]
...

R.G : 14/00822

Décision du

Tribunal de Grande Instance d'AVIGNON

Au fond

du 04 février 2008

RG : 2007/01292

ch n°3

SOCIETE SCI MORICE SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE

C/

[X] Veuve [F]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRET DU 08 Décembre 2015

APPELANTE :

SCI MORICE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par la SELARL DE FOURCROY AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

Assistée de la SCP DURY DUCROS ET ASSOCIES, avocats au barreau d'AVIGNON

INTIMEE :

Mme [W] [X] Veuve [F]

née le [Date naissance 1] 1921 à [Localité 1]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON

******

Date de clôture de l'instruction : 18 Mars 2015

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 09 Novembre 2015

Date de mise à disposition : 08 Décembre 2015

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Jean-Jacques BAIZET, président

- Marie-Pierre GUIGUE, conseiller

- Michel FICAGNA, conseiller

assistés pendant les débats de Emanuela MAUREL, greffier

A l'audience, Marie-Pierre GUIGUE a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Jean-Jacques BAIZET, président, et par Emanuela MAUREL, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

EXPOSÉ DU LITIGE

Madame [X] qui avait vendu le 7 aout 1989 à la SCI Morice des actions de la société anonyme coopérative de construction « Les Orchidées III » donnant droit à l'attribution d'une villa contre paiement d'une partie du prix au comptant et du solde sous forme d'une rente viagère, a assigné la SCI Morice en résolution de la vente, après lui avoir fait délivrer un commandement de payer visant la clause résolutoire.

Par jugement du 4 février 2008 assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de grande instance d'Avignon a':

-constaté que la résolution était acquise le 28 janvier 2007,

-prononcé la résolution de la vente,

-dit que les arrérages perçus, les embellissements et améliorations éventuelles apportés à l'immeuble et la partie du prix payé comptant sont définitivement acquis au crédirentier,

-dit que la SCI Morice devra libérer les lieux au plus tard dans le délai d'un mois suivant la signification du jugement,

-à défaut, ordonné son expulsion et celle de tous occupants de son chef sous astreinte,

-condamné la SCI Morice à payer à Madame [X] la somme de 1500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'instance.

Par arrêt du 24 novembre 2009, la cour d'appel de Nîmes a confirmé le jugement et condamné la SCI Morice au paiement de la somme de 1500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par arrêt du 2 octobre 2013, la Cour de cassation a cassé et annulé l'arrêt, mais seulement en ce qu'il a dit que les arrérages perçus, les embellissements et améliorations éventuellement apportés à l'immeuble et la partie du prix payé comptant étaient définitivement acquis au crédirentier et a renvoyé l'affaire et les parties devant la cour d'appel de Lyon.

La Cour a jugé':

«'Vu les articles 1134 et 1229 du code civil ;

Attendu que constitue une clause pénale toute évaluation conventionnelle forfaitaire et a priori des conséquences d'une inexécution imputable ;

Attendu que la clause résolutoire litigieuse prévoyait qu'en cas de résolution, tous les arrérages perçus par le crédirentier et tous les embellissements et améliorations apportés à l'immeuble seraient définitivement acquis au crédirentier et que la destination de la part du prix payé comptant serait laissée à l'appréciation des tribunaux ;

Attendu que pour dire que les arrérages échus et les travaux et embellissements réalisés ainsi que la part du prix payé comptant, restaient acquis à Mme [X], l'arrêt retient que la SCI Morice n'établissait pas que la clause dût être qualifiée de clause pénale ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé, par refus d'application, les textes susvisés'».

Par déclaration du 31 janvier 2014, la SCI Morice a saisi la cour d'appel de Lyon.

Elle demande à la cour de condamner Madame [X] au paiement des sommes de':

-21342,86 euros outre intérêts légaux au titre de la partie du prix payée comptant,

-101453,66 euros outre intérêts légaux au titre des arrérages perçus,

-16212,54 euros outre intérêts légaux au titre des améliorations et embellissements réalisés par la SCI MORICE,

-27930 euros outre intérêts légaux au titre de l'impôt foncier et des assurances,

-50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

-5000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Elle fait valoir que la Cour de Cassation a jugé que qu'en cas de résolution, tous les arrérages perçus par le crédirentier et tous les embellissements et améliorations apportés à l'immeuble ainsi que la partie du prix payée comptant n'étaient pas définitivement acquis au créancier et que les restitutions demandées sont justifiées par les pièces versées au débat, notamment les factures de travaux ou de fournitures correspondant aux embellissements.

Elle affirme avoir subi un important préjudice moral en raison du litige, ayant même conduit sa gérante à tenter de se suicider.

Madame [X] demande à la cour de':

-confirmer le jugement en ce qu'il a dit que les arrérages perçus, les embellissements et améliorations éventuelles apportés à l'immeuble et la partie du prix payé comptant sont définitivement acquis au crédirentier,

-à titre subsidiaire, si la cour devait considérer que la clause litigieuse est une clause pénale, dire n'y avoir lieu à application de l'article 1152 du code civil,

-déclarer irrecevable et non fondée la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral,

-débouter la SCI Morice de ses demandes,

-la condamner au paiement d'une indemnité de 5000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel recouvrés au profit de la SCP AGUIRAUD & NOUVELLET.

Elle soutient':

-que la Cour de cassation a rappelé qu'il n'appartenait pas aux parties d'établir ou non qu'une clause soit qualifiée de clause pénale,

-qu'il appartient donc à la cour de renvoi de procéder à cette qualification,

-que le jugement a fait une stricte application de l'article 1134 du code civil, des usages dans la vente d'immeuble en viager et de la convention des parties pour dire que les arrérages perçus voire échus et produisant intérêts restent acquis au crédirentier ainsi que les travaux et embellissements réalisés par le débirentier lors de la résolution du contrat et que la partie du prix payé comptant est également acquise au crédirentier en contrepartie de la mise à disposition des lieux jusqu'au jour du jugement,

-que subsidiairement, étant rappelé que la crédirentière est âgée de 93 ans, la cour dira qu'il n'y a pas lieu de la réduire en application de l'article 1152 du code civil dès lors que la rente viagère constituait l'essentiel de ses revenus alors que la SCI Morice a perçu des revenus locatifs pour la villa depuis 1989, ce qui établit l'absence de caractère manifestement excessif de la clause,

-qu'est irrecevable et non fondée la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral, demande nouvelle au sens des articles 564 et suivants du code de procédure civile et n'entrant pas dans le débat défini par l'arrêt de la cour de cassation.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L'article 1229 du code civil dispose que «'la clause pénale est la compensation des dommages et intérêts que le créancier souffre de l'inexécution de l'obligation principale».

Selon l'acte de vente authentique du 7 août 1989, les parties étaient convenues d'une clause résolutoire pour défaut de paiement d'un seul terme de la rente et qu'en cas de résolution pour défaut de paiement, les arrérages perçus voire échus et produisant intérêts resteraient acquis au crédirentier ainsi que les travaux et embellissements réalisés par le débirentier lors de la résolution du contrat, la partie du prix payé comptant est également acquise au crédirentier en contrepartie de la mise à disposition des lieux jusqu'au jour du jugement.

Cette clause claire et précise par laquelle les parties avaient évalué forfaitairement l'indemnité à laquelle donnerait lieu l'inexécution de la convention constitue une clause pénale au sens de l'article 1229 sus-énoncé.

Il ressort du débat et des pièces produites que la rente viagère constituait l'essentiel des revenus de madame [X], crédirentière née le [Date naissance 1] 1921, alors que la SCI Morice percevait au titre de la location de la villa acquise en 1989 des revenus locatifs d'un montant supérieur à la rente. La réalité et l'importance des travaux d'amélioration du bien ne sont pas justifiés par les pièces produites à savoir l'attestation de messieurs [B] et [O] [N], ce dernier époux de la gérante, et des factures de matériaux ne pouvant être rattachées avec certitude au bien immobilier.

Faisant application pure et simple de la convention, la cour n'estime pas devoir faire application de l'article 1152 alinéa 2 du code civil et modérer la peine forfaitairement convenue.

La SCI Morice sera déboutée de ses demandes en paiement des sommes de'21342,86 euros au titre de la partie du prix payée comptant, de 101453,66 euros au titre des arrérages perçus et de 16212,54 euros au titre des améliorations et embellissements.

La SCI Morice demande paiement de la somme de 27930 euros en remboursement de l'impôt foncier et des assurances pendant 21 ans mais ne produit pas de pièces justifiant le montant et le paiement effectif de l'assurance du bien alors qu'il était donné en location, pas plus que des impôts fonciers qui ne peuvent faire l'objet d'une évaluation forfaitaire annuelle.

La SCI Morice, qui se prévaut du préjudice moral causé à sa gérante, ne rapporte pas la preuve d'un préjudice moral causé par l'action de la crédirentière. La demande de dommages et intérêts, bien que recevable devant la cour de renvoi en application de l'article 566 du code de procédure civile, n'est pas fondée.

La SCI MORICE, qui succombe, supporte les dépens de première instance et d'appel y compris ceux de la décision cassée ainsi qu'une indemnité supplémentaire en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Vu l'arrêt de la cour de cassation du 2 octobre 2013;

Infirme le jugement du tribunal de grande instance d'Avignon du 4 février 2008 en ce qu'il a dit que les arrérages perçus, les embellissements et améliorations éventuelles apportés à l'immeuble et la partie du prix payé comptant sont définitivement acquis au crédirentier;

Statuant à nouveau de ce chef,

Dit que constitue une clause pénale la clause contenue dans l'acte de vente authentique du 7 août 1989 par laquelle les parties étaient convenues qu'en cas de résolution pour défaut de paiement, les arrérages perçus voire échus et produisant intérêts resteraient acquis au crédirentier ainsi que les travaux et embellissements réalisés par le débirentier lors de la résolution du contrat, la partie du prix payé comptant est également acquise au crédirentier en contrepartie de la mise à disposition des lieux jusqu'au jour du jugement;

Dit n'y avoir lieu à réduction de la pénalité;

Déboute la SCI Morice de ses demandes en paiement;

Y ajoutant,

Déboute la SCI Morice de sa demande de restitution des impôts fonciers et assurances et indemnisation de préjudice moral';

Condamne la SCI Morice à payer à Mme [X] la somme supplémentaire de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile';

Condamne la SCI Morice aux dépens de première instance et d'appel y compris ceux de la décision cassée, avec droit de recouvrement direct par la SCP Aguiraud & Nouvellet, avocat.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile b
Numéro d'arrêt : 14/00822
Date de la décision : 08/12/2015

Références :

Cour d'appel de Lyon 1B, arrêt n°14/00822 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-12-08;14.00822 ?
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