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07/04/2015 | FRANCE | N°14/09647

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile b, 07 avril 2015, 14/09647


R.G : 14/09647















Décision du

Président du TC de Lyon

Référé

du 13 novembre 2014





RG : 2014R699







SASU NOVELIGE



C/



SAS ADP COURTAGE PLUS





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile B



ARRET DU 07 Avril 2015







APPELANTE :



société NOVELIGE

[Adresse 1]



[Localité 1]



Représentée par Me Guillaume BELLUC, avocat au barreau de LYON









INTIMEE :



société ADP COURTAGE PLUS

[Adresse 2]

[Localité 2]



Représentée par la SELARL LEVY ROCHE SARDA, avocat au barreau de LYON

Assistée Me MAZEN-CANNET-MIGNOT, avocat au barreau de DIJON







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R.G : 14/09647

Décision du

Président du TC de Lyon

Référé

du 13 novembre 2014

RG : 2014R699

SASU NOVELIGE

C/

SAS ADP COURTAGE PLUS

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRET DU 07 Avril 2015

APPELANTE :

société NOVELIGE

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par Me Guillaume BELLUC, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

société ADP COURTAGE PLUS

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représentée par la SELARL LEVY ROCHE SARDA, avocat au barreau de LYON

Assistée Me MAZEN-CANNET-MIGNOT, avocat au barreau de DIJON

******

Date de clôture de l'instruction : 12 Mars 2015

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 12 Mars 2015

Date de mise à disposition : 07 Avril 2015

Audience présidée par Michel FICAGNA, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Agnès BAYLE, greffier.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Jean-Jacques BAIZET, président

- Marie-Pierre GUIGUE, conseiller

- Michel FICAGNA, conseiller

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Jean-Jacques BAIZET, président, et par Emanuela MAUREL, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire .

*****

EXPOSE DE L'AFFAIRE

Selon marché de travaux privé en date du 24 mai 2013 et avenant du 28 août 2013, la société ADP Courtage Plus a confié à la société Novelige, entrepreneur principal, la réalisation sur la ZAC « La porte de [Localité 2]», à [Localité 2], de deux immeubles de bureaux d'environ 2.100 mètres carrés chacun, répartis sur 2 niveaux en R+1 et R+2, avec emplacements de parkings en rez-de-chaussée sous les immeubles, pour un montant 6.498.302,44 € TTC.

La réception a été fixée au 12 mai 2014.

A cette date, la société ADP Courtage Plus a refusé la réception.

Une nouvelle date de réception a été fixée au 16 juin 2014 et une imposante liste de réserves a été établie par la société ADP Courtage Plus.

La société Novelige a refusé de signer ce procès verbal, puis a formulé des contestations sur une partie des réserves.

Par acte du 4 juillet 2014, la société ADP Courtage Plus a assigné la société Novelige devant le président du tribunal de commerce de Lyon statuant en référé aux fins d'expertise judiciaire et octroi d'une provision à valoir sur ses préjudices.

La société Novelige ne s'est pas opposée à la demande d'expertise et a formé une demande reconventionnelle aux fins de règlement du solde impayé de ses factures à hauteur de 2 788 302,48 € et subsidiairement de voir ordonner à la société ADP Courtage Plus de fournir la garantie édictée à l'article 1799-1 du code civil .

Par ordonnance du 13 novembre 2014, le président du tribunal de commerce a fait droit à la demande d'expertise et a débouté les parties de leurs demandes respectives de provision.

La société Novelige a relevé appel de cette ordonnance.

Elle demande à la cour:

- de réformer l'ordonnance et statuant à nouveau,

- de constater que l'obligation de la société ADP Courtage Plus au paiement des sommes contractuellement dues ne se heurte à aucune contestation sérieuse,

- de condamner la société ADP Courtage Plus à payer par provision à la société NOVELIGE la somme de 2.788.302,48 euros TTC,

subsidiairement sur ce point,

- de condamner la société ADP Courtage Plus à payer par provision la somme de 2.168.929,91 euros TTC (échéancier contractuel purgé de la situation de travaux relative à la phase de réception).

subsidiairement, sur la garantie de paiement,

- de constater que l'obligation de la société ADP Courtage Plus à fournir la garantie de paiement édictée par l'article 1799-1 du Code Civil, est incontestable,

- de condamner la société ADP Courtage Plus , sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir, à fournir en application de l'article 1799-1 du code civil, le cautionnement solidaire de l'un des établissements visés au Décret 99-658 du 30/07/1999, d'un montant égal à la différence entre la provision allouée et le solde contractuellement dû de 2.788.302,48 €, ou, à défaut de provision, à hauteur de 2.788.302,48 €,

- de se réserver la faculté de liquider l'astreinte,

- de condamner la société ADP Courtage Plus à verser à la société NOVELIGE la somme de 10.000 € au titre des frais non compris dans les dépens,

- de condamner la même aux entiers dépens de l'instance.

Elle soutient :

- que la société ADP Courtage Plus est indiscutablement débitrice des sommes suivantes :

- reliquat de 3.913,10 € TTC de la situation n° 4 (phase de mise hors d'eau du bâtiment)

- 120.401,34 € TTC - situation de l'Avenant 1

- 762.541,80 € TTC - situation n°5 (phase de mise hors d'air du bâtiment)

- 7.826.09 € TTC - facture de travaux supplémentaires selon le devis signé par ADP

- 1.274.247,48 € TTC - situation n°6 (phase d'achèvement des lots architecturaux)

- 619.372,57 € TTC - situation n° 7 (phase de réception des travaux)

- qu'il n'y a aucune contestation sérieusement opposable à une telle demande, issue de l'application du contrat,

- qu'ADP Courtage Plus n'est pas fondée à subordonner son règlement à la production de l'attestation de conformité à la réglementation RT 2012 et du rapport final du bureau de contrôle relatif à la solidité de l'ouvrage, dès lors que cette condition n'était en aucun cas prévue contractuellement et qu'elle n'a jamais fait l'objet d'un accord entre les parties,

- que la première note de l'expert judiciaire ne corrobore en rien la position volontairement alarmiste de la société ADP Courtage Plus,

- que la Cour pourrait à tout le moins évaluer le montant de l'allocation provisionnelle au solde contractuellement dû, purgé de la dernière situation de travaux correspondant à la phase de réception des travaux. (situation n°7 pour 619.372,57 €),

- que l'entrepreneur peut exiger la fourniture de la garantie de paiement prévue à l'article 1799 du code civil, à tout moment, en cours d'exécution des travaux (Cassation Civile 3ème 09/11/2005 n°04-20.047) ou lorsque la réception est déjà intervenue (Cassation Civile 3ème 24/04/2003 n°01,

- qu' il est patent que la société ADP Courtage Plus n'a pas eu recours à un crédit spécifique pour financer l'intégralité du marché, ce qui nécessite la mise en place d'une caution bancaire pour le surplus.

La société ADP Courtage Plus demande à la cour :

- de débouter la société Novelige de l'ensemble de ses demandes,

- de condamner la société Novelige à lui verser à titre de provision sur les dommages et intérêts, une somme de 300 000 €,

- de condamner la société Novelige à lui verser une somme de 40 000 € par mois correspondant à l'échéance du prêt et ce jusqu'à la date du rapport d ' expertise,

- de condamner la société Novelige à lui verser une somme de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner la société Novelige à lui verser une somme de 40 000 € par mois correspondant à l'échéance mensuelle du prêt et ce jusqu'à la date de dépôt du rapport d'expertise,

- de condamner la société Novelige aux entiers dépens lesquels comprendront tous les frais d'expertise judiciaire ou non et les frais de constats d'huissiers avancés.»

Elle soutient :

- que l'article 14.2 du marché de travaux ne l'empêche pas de conserver une partie du prix, non pas en couverture de la levée des réserves, mais en couverture d'un préjudice économique avéré dont il n'est pas démontré qu'il serait couvert par une police d'assurance souscrite par la société Novelige,

- qu'elle subit un préjudice économique important qui résulte de la non-conformité des travaux exécutés par la société Novelige et donc de l'impossibilité de prendre possession du bâtiment pour exploiter son activité,

- qu'en présence de nombreuses réserves exprimées lors d'une réception, l'entrepreneur ne pouvait se prévaloir de ladite réception,

- que la société Novelige a remis une caution bancaire d'un montant de 317 865,45€ en substitution de la retenue de garantie nettement insuffisant pour la remise en état,

- que si la garantie n'est pas fournie, il appartient à l'entreprise d'user de la faculté qui lui est offerte par l'article 1799-1 alinéa 3 de suspendre l'exécution du marché,

- que la société Novelige ne peut aujourd'hui solliciter la garantie prévue par l'article 1799-1 du Code civil après la réalisation des travaux,

- qu'en revanche elle est fondée à solliciter des dommages et intérêts à titre de provision, puisqu'elle ne peut pas disposer du bâtiment, qu'elle est bien fondée à solliciter la condamnation de la société Novelige à lui rembourser une somme de 300 000 € à titre de provision à valoir sur son préjudice outre le montant des échéances de prêt de 40 000 € mensuel.

MOTIFS

Sur la demande de provision de la société Novelige

Aux termes de l'article 873 du code de procédure civile :

Le président [du tribunal de commerce] peut, [dans les limites de la compétence du tribunal de commerce] ... Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

En l'espèce, le marché de travaux signé par les parties, n'interdit pas au maître d'ouvrage de suspendre le paiement des sommes réclamées par la société Novelige en cas de constatation de désordres affectant l'usage ou la solidité même du bâtiment.

L'expertise en cours n'est pas suffisamment avancée pour permettre de préjuger des désordres invoqués par la société ADP Courtage Plus.

En effet l'expert a indiqué au terme de la première réunion :

« En première approche et selon les dires du demandeur ( société ADP courtage Plus) , les points litigieux peuvent être classés de la manière suivante :

1°) Difficulté pour conclure le contrat Dommage Ouvrage

2°) Non-conformité des installations très basse tension, rendant impossible l'exploitation du système informatique

3°) Retard d'exécution des travaux

4°) Non-conformités contractuelles

5°) Réserves d'ordre esthétique

6°) Réserves d'ordre technique, les rapports de visite de VERITAS en cours de chantier mentionnent plusieurs observations techniques. Ces rapports ont été communiqués à Novelige en cours de chantier. Les rapports finaux de VERITAS signalent que de nombreuses observations subsistent.

D'autres observations sont rapportées par ADP dans son assignation (DEP mal implantées, portance local archives, ...)

7°) Non respect de la RT 2012»

Par ailleurs, la société ADP Courtage Plus justifie par de nombreuses pièces, notamment des constats d'huissier de justice et un rapport du bureau Veritas la possibilité de nombreuses malfaçons affectant l'immeuble qui seraient susceptibles de concerner non seulement la «phase réception» n° 7 mais également le gros oeuvre et les installations électriques, particulièrement importantes.

La société Novelige a reconnu devant l'expert la justesse de «certaines réserves» formulées par le maître d'ouvrage.

Pour le cas où il s'avérerait que ces désordres sont réels et qu'il rendent impossible l'utilisation du bâtiment, les préjudices de la société ADP Courtage Plus pourraient être équivalents ou supérieurs au solde impayé des factures.

En conséquence, il convient de rejeter la demande de provision de la société Novelige qui ne justifie pas au sens de l'article 873 du code de procédure civile d'une obligation non sérieusement contestable.

Sur la demande de garantie au titre de l'article 1799-1 du code civil

Aux termes de l'article 1799-1 alinéa 3 du code civil, applicable au jour du marché de travaux:

Lorsque le maître de l'ouvrage ne recourt pas à un crédit spécifique ou lorsqu'il y recourt partiellement, et à défaut de garantie résultant d'une stipulation particulière, le paiement est garanti par un cautionnement solidaire consenti par un établissement de crédit, une entreprise d'assurance ou un organisme de garantie collective, selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat. Tant qu'aucune garantie n'a été fournie et que l'entrepreneur demeure impayé des travaux exécutés, celui-ci peut surseoir à l'exécution du contrat après mise en demeure restée sans effet à l'issue d'un délai de quinze jours.

En l'espèce, la société Novelige a poursuivi l'exécution du contrat après le stade « hors d'eau» jusqu'au stade de la levée des réserves, alors qu'elle n'était plus réglée de ses factures.

En conséquence, il n'y a pas lieu d'ordonner sous astreinte en référé, la mise en oeuvre d'un cautionnement, que la société Novelige a négligé d'exiger.

La société Novelige peut seulement «surseoir à l'exécution du contrat».

La demande bien tardive de la société Novelige sera donc rejetée.

Sur la demande de provision de la société ADP Courtage Plus

La société ADP Courtage Plus retient par la mise en jeu de l'exception d'inexécution un montant de près de 3 million d'€ pour se garantir des conséquences des désordres affectant l'ouvrage livré par la société Novelige, alors que les travaux ont bien été achevés.

Elle ne justifie pas d'un préjudice plus ample qui apparaîtrait d'ores et déjà «non sérieusement contestable» et permettant de lui allouer une somme supplémentaire au titre de son préjudice qui reste à établir et à évaluer.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur les dépens

Il appartient au juge du premier degré, même statuant en référé de statuer sur les dépens.

Il convient en l'espèce de partager les dépens tant de première instance que d'appel.

PAR CES MOTIFS:

la cour,

- Confirme l'ordonnance déférée en ce qu'elle a débouté les parties de leurs demandes respectives de provision,

y ajoutant,

- Déboute la société Novelige de sa demande aux fins de garantie,

- Déboute les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Fait masse des dépens de première instance et d'appel et dit qu'il seront partagés par moitié entre chaque partie.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile b
Numéro d'arrêt : 14/09647
Date de la décision : 07/04/2015

Références :

Cour d'appel de Lyon 1B, arrêt n°14/09647 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-04-07;14.09647 ?
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