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17/02/2015 | FRANCE | N°13/08300

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile b, 17 février 2015, 13/08300


R.G : 13/08300









Décision du

Tribunal de Grande Instance de lyon

Au fond

du 30 septembre 2013



RG : 11/14119

ch n°4





[H]



C/



Etablissement Public

ONIAM



Organisme

RSI PL PROVINCES





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile B



ARRÊT DU 17 Février 2015



APPELANT :



M. [G] [H]>
né le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 3]

[Adresse 2]

[Localité 3]



Représenté par Me Jérôme BERTHET, avocat au barreau de LYON

Assisté de Me Gérard DAUMAS, avocat au barreau de MARSEILLE





INTIMÉES :



ONIAM

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 2]



Représentée pa...

R.G : 13/08300

Décision du

Tribunal de Grande Instance de lyon

Au fond

du 30 septembre 2013

RG : 11/14119

ch n°4

[H]

C/

Etablissement Public

ONIAM

Organisme

RSI PL PROVINCES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRÊT DU 17 Février 2015

APPELANT :

M. [G] [H]

né le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 3]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Jérôme BERTHET, avocat au barreau de LYON

Assisté de Me Gérard DAUMAS, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMÉES :

ONIAM

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par la SCP BAUFUME - SOURBE, avocat au barreau de LYON

Assistée par Me Patrick DE LA GRANGE, avocat au barreau de PARIS

Organisme RSI PL PROVINCES

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par Me Jérôme BERTHET, avocat au barreau de LYON

Assisté de Me Gérard DAUMAS, avocat au barreau de MARSEILLE

******

Date de clôture de l'instruction : 18 Juin 2014

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 19 Janvier 2015

Date de mise à disposition : 17 Février 2015

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Jean-Jacques BAIZET, président

- Marie-Pierre GUIGUE, conseiller

- Michel FICAGNA, conseiller

assistés pendant les débats de Emanuela MAUREL, greffier

A l'audience, Jean-Jacques BAIZET a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Jean-Jacques BAIZET, président, et par Patricia LARIVIERE, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

EXPOSE DE L'AFFAIRE

A la suite de troubles du membre supérieur gauche, Monsieur [H] a consulté le professeur [Q] qui a diagnostiqué des lésions anatomiques des territoires C5 - C6 et C6-C7, et réalisé une intervention de libération foraminale et radiculaire, qui a été suivie d'une aggravation caractérisée par un déficit complet du biceps. Il a été ensuite consulté différents médecins.

La commission régionale de conciliation et d'indemnisation Rhône-Alpes (CRCI), saisi par Monsieur [H], a ordonné une expertise, puis a considéré que la demande de ce dernier ne pouvait recevoir de suite.

Monsieur [H] a assigné l'office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM)en indemnisation de ses préjudices en présence de RSI-PL Provinces, en faisant valoir qu'il a été victime d'un accident thérapeutique.

Par jugement du 30 septembre 2013, le tribunal de grande instance de Lyon a débouté Monsieur [H] de ses demandes.

Monsieur [H], appelant, conclut à la réformation du jugement et sollicite la condamnation de l'ONIAM à lui payer la somme de 487 611,20 euros.

A titre subsidiaire, il demande une expertise.

Critiquant la méthodologie de l'expert, il fait valoir que celui-ci a établi un premier document qui comporte des éléments contraires à ceux figurant dans un deuxième document qu'il a signé avec son sapiteur. Il considère que contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, seul le second document doit être retenu.

Il soutient que l'opération qu'il a subie devait stopper toute possibilité d'aggravation et éventuellement permettre une amélioration non garantie, mais en aucun cas provoquer une atteinte à d'autres parties de son corps, notamment de son bras, que l'aggravation qu'il a subie ne représente en aucune manière le caractère attendu et redouté d'une complication, qu'elle ne fait pas partie des risques connus au regard de sa pathologie initiale, d'autant que l'opération n'était pas indispensable.

Il décompose sa demande indemnitaire comme suit :

PREJUDICES PATRIMONIAUX

- perte de gains professionnels actuels :62 000 euros

- incidence professionnelle :50 000 euros

- tierce personne :264 211,20 euros

PREJUDICES EXTRA PATRIMONIAUX

- déficit fonctionnel temporaire total :7200 euros

- déficit fonctionnel temporaire partiel :4800 euros

- souffrances :20 000 euros

- préjudice esthétique temporaire :5 000 euros

- déficit fonctionnel permanent (30%) :63 000 euros

- préjudice d'agrément :5 000 euros

- préjudice esthétique :6 000 euros

L'ONIAM conclut à l'irrecevabilité de la demande nouvelle présentée par RSI et à la confirmation du jugement en raison de l'absence d'anormalité du dommage au sens de l'article L 1142-1 du Code de la Santé Publique.

Il fait valoir que le rapport d'expertise considère que les complications dont se plaint Monsieur [H] sont liées à son état antérieur et aux riques de complications inhérents à l'intervention réalisée. Il considère qu'il résulte de l'expertise que :

- Monsieur [H] présentait un état antérieur significatif qui aurait abouti, en l'absence d'intervention, à une évolution dramatique,

- l'intervention de libération foraminale et radiculaire était susceptible d'engendrer une aggravation de cet état antérieur, avec une fréquence de survenue de 6 à 8%,

- il existe un lien de causalité direct et certain, si ce n'est exclusif , entre les atteintes neurologiques antérieures (fibres motrices lésées) et l'aggravation présentée en post opératoire par Monsieur [H].

Il estime en conséquence que le dommage est certes en lien avec les actes de soins reçus, ceux-ci ayant aggravé sa pathologie préexistante, mais qu'il ne revêt pas pour autant le caractère anormal exigé par les textes.

A titre subsidiaire, il conclut à la réduction des demandes indemnitaires, et au rejet des demandes de RSI dès lors qu'il n'appartient pas à l'ONIAM de rembourser la créance des organismes sociaux

RSI PL Provinces demande que l'ONIAM soit condamné à lui payer la somme de 45 105,86 euros.

MOTIFS

Attendu qu'en application de l'article L 1142-1 II du Code de la santé publique, lorsque la responsabilité d'un professionnel n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient au titre de la solidarité nationale lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'il ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de l'état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité fixé par décret ; qu'il résulte de ce texte qu'un patient peut prétendre à une indemnisation au titre de la solidarité nationale que si,d'une part, il a été victime d'un accident médical non fautif, et si, d'autre part, l'accident médical a occasionné des séquelles à la fois d'une certaine gravité et anormales au regard de l'état de santé antérieur ; que le caractère attendu et redouté de la complication survenue ainsi que son lien direct et nécessaire avec l'état antérieur du patient, ou son évolution prévisible, sont exclusifs de la notion d'aléa thérapeutique ouvrant droit à réparation ;

Attendu que l'expert [T] désigné par la CRCI a retenu les éléments suivants:

- le diagnostic préopératoire était cohérent dans la mesure où on était en présence d'une corrélation anatomo-clinique et électro-myographique suffisamment expressive pour justifier un geste neurochirurgical,

-'la complication postopératoire est essentiellement représentée par l'atteinte déficitaire complète du biceps, mais également une aggravation de la motricité de l'épaule qui rend le bras gauche de Monsieur [H] totalement inopérant.

Cette complication n'est pas liée à une lésion anatomique opératoire de la racine C6 car le patient ne présentera pas, en postopératoire, d'atteinte déficitaire de la sensibilité de ce territoire même si une discrète hypo-esthésie transitoire aura lieu, conséquence tout à fait habituelle des manipulations radiculaires chirurgicales, celle-ci disparaîtra par la suite.

La complication postopératoire est en fait due à la concomitance de deux événements :

- d'une part, les manipulations chirurgicales effectuées sur un territoire particulièrement sténosé et sur une racine oedémateuse et inflammatoire,

- d'autre part, l'existence d'une racine nerveuse présentant une atteinte neurologique chronique et dont les fibres, motrices déjà lésées ont complété leur évolution péjorative'

- qu'il a ajouté :

' - les compressions radiculaires, récentes et aigües avec atteinte déficitaire modérée sont en général de bon pronostic avec une récupération motrice plus ou moins importante évoluant sur 6 à 18 mois,

- celles avec atteinte déficitaire totale sont par contre d'un pronostic particulièrement péjoratif car il est exceptionnel qu'une récupération quelconque ait lieu par la suite,

- les compressions radiculaires chroniques avec atteinte déficitaire modérée ou déjà évoluée sont d'un pronostic beaucoup moins satisfaisant car donnant lieu le plus souvent à une stabilisation des lésions mais pour laquelle en aucune façon il ne faut exclure une aggravation post opératoire qui survient dans 6 à 8% des cas,il s'agit donc là d'un événement accidentel difficilement prévisible et d'un événement incontournable dans la mesure où le geste chirurgical était considéré comme impératif et susceptible d'enrayer une évolution dramatique'.

Attendu qu'ayant constaté des discordances inhabituelles dans la pathologie cervico-arthrosique cervicale, l'expert a sollicité l'avis d'un neurologue spécialisé afin de vérifier si une pathologie neuro-musculaire sous-jacente pouvait avoir interféré avec les complications post-opératoires; que l'expert et son sapiteur ont établi un rapport complémentaire, aux termes duquel ils retiennent que :

- aucune faute professionnelle de l'opérateur ou de l'établissement ne peut être retenue au regard des données actuelles des connaissances,

- sur le plan neurologique, même si l'atteinte neurologique pré-opératoire est atypique pour une radiculopathie compressive cervicarthrosique, aucun diagnostic alternatif ne peut être proposé. Dans la mesure où il existe une bonne corrélation entre l'atteinte radiculaire clinique potentielle et les images de compression foraminale observées sur l'IRM et le scanner, l'indication opératoire apparaît licite,

- le lien chronologique qui lie l'aggravation neurologique au geste opératoire, et la corrélation entre le niveau anatomique de l'intervention et la systématisation du déficit neurologique aggravé par l'intervention font que la responsabilité du geste opératoire doit être retenue. Cette aggravation est fonctionnellement très défavorable dans la mesure où elle a provoqué une paralysie quasi complète de la flexion du coude qui entraîne une utilisation très précaire du membre supérieur gauche,

- les deux experts récusent toute mise en cause du professeur [L] ;

Attendu que le fait que l'expert n'a pas rédigé de rapport de synthèse après avoir signé son propre rapport et contre signé celui de son sapiteur n'entraîne aucune irrégularité des opérations d'expertise, le premier rapport n'étant pas contredit par le second qui avait pour objet de rechercher si une pathologie sous-jacente pouvait avoir interféré avec les complications post opératoires ;

Attendu qu'il résulte des opérations d'expertise que l'intervention chirurgicale était rendue nécessaire pour une pathologie préexistante dont l'évolution devait conduire à une invalidité importante, que l'intervention de libération foraminale et radiculaire était susceptible d'engendrer une aggravation de l'état antérieur, avec une fréquence de survenue de 6 à 8%, et qu'il existe un lien de causalité direct et certain entre les atteintes neurologiques antérieures et l'aggravation présentée en postopératoire ; qu'il résulte d'un courrier adressé par le professeur [Q] au médecin traitant de Monsieur [H] que l'intervention n'avait que des objectifs limités, visant surtout à éviter une aggravation, mais avec un risque d'échec important ;

Attendu qu'il découle de ce qui précède que la complication dont a été victime Monsieur [H] est en lien avec les soins reçus et a aggravé sa pathologie préexistante, mais qu'elle ne peut être considérée comme anormale au regard de son état de santé, de l'évolution prévisible de celui-ci et du risque d'aggravation connu dans 6 à 8% des cas ; que Monsieur [H] était en réalité exposé, compte tenu de son état antérieur, à une complication qui est survenue ; que le préjudice subi ne relève pas de la réparation au titre de la solidarité nationale dans les conditions prévus par l'article L 1142-1 II du Code de la santé publique.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris,

y ajoutant ,

Déboute RSI PL Provinces de ses demandes,

Rejette les demandes de Monsieur [H] et de RSI PL Provinces fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Monsieur [H] aux dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile b
Numéro d'arrêt : 13/08300
Date de la décision : 17/02/2015

Références :

Cour d'appel de Lyon 1B, arrêt n°13/08300 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-02-17;13.08300 ?
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