R.G : 13/08894
Décision du
Président du TGI de LYON
Référé
du 22 juillet 2013
RG : 13/00889
SARL COSY HOME HERMES
C/
[S]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
1ère chambre civile B
ARRET DU 20 Mai 2014
APPELANTE et INTIMEE INCIDENTE :
SARL COSY HOME HERMES
représentée par son gérant en exercice monsieur [F] [N]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Cécile NONFOUX, avocat au barreau de LYON, assisté de Maître Isabel BACLE, avocat au barreau de PARIS
INTIME et APPELANT INCIDENT:
M. [Z] [S]
chez Monsieur [Adresse 5]
[Localité 1]
Représenté par Me Nathalie ROSE, avocat au barreau de LYON, assisté de Maître Didier LEMASSON, avocat au barreau de LYON
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Date de clôture de l'instruction : 01 Avril 2014
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 14 Avril 2014
Date de mise à disposition : 20 Mai 2014
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
- Jean-Jacques BAIZET, président
- Marie-Pierre GUIGUE, conseiller
- Michel FICAGNA, conseiller
assistés pendant les débats de Emanuela MAUREL, greffier
A l'audience, Marie-Pierre GUIGUE a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Jean-Jacques BAIZET, président, et par Emanuela MAUREL, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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EXPOSÉ DU LITIGE
Par acte sous sein privé en date du 18 mars 2011, monsieur [X] [V] aux droits duquel vient désormais monsieur [Z] [S] a donné à bail à la société Cosy Home Hermes des locaux à usage de commerce situés [Adresse 3] dans l'immeuble dénommé [Adresse 4] pour une activité d'exploitation de résidences étudiant et appartements meublés.
Des loyers et charges n'ayant pas été réglés, monsieur [S] a fait délivrer le 29 janvier 2013 un commandement de payer la somme principale de 1840,02 euros en visant la clause résolutoire contenue au bail.
La société COSY HOME HERMES a formé opposition à commandement devant le tribunal de grande instance de Lyon par assignation du 26 février 2013.
Ce commandement étant demeuré sans effet, par acte du 27 mars 2013, monsieur [S] a assigné la SARL Cosy Home Hermes devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Lyon en :
-constatation de l'acquisition de la clause résolutoire et expulsion de la défenderesse du studio sis au 3ème étage de l'immeuble 82 rue du premier mars 1943 formant le lot [Cadastre 1] de la copropriété et l'appartement 318,
-paiement d'une provision de 2.760,03 euros au titre des loyers et charges impayés au 30 avril 2013,
-paiement d'une indemnité d'occupation égale à 521,75 euros,
-paiement d'une somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ordonnance du 22 juillet 2013, le juge des référés du tribunal de grande instance de Lyon :
-s'est déclaré incompétent en raison de contestations sérieuses pour statuer sur la résiliation du bail et l'expulsion de la locataire,
- a condamné la société Cosy Home Hermes à payer à monsieur [Z] [S] la somme provisionnelle de 3066,70 euros, au titre de l'arriéré de loyers et charges arrêtés au 31 mai 2013,
- a dit que la société Cosy Home Hermes pourra s'acquitter de cette somme par 10 versements mensuels de 300 euros, le solde payable à la dernière échéance, au plus tard le 1er de chaque mois à compter du mois de septembre 2013, en plus du lover et charges en cours,
- a rejeté les autres demandes des parties,
- a condamné la société Cosy Home Hermes à payer à monsieur [S] la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'instance.
Le juge des référés a retenu :
-qu'au vu des contestations émises par le preneur, notamment quant au non respect de l'obligation de délivrance et aux incidences de la procédure collective de l'ancien locataire commercial, il existe une contestation sérieuse qui doit être tranchée par le juge du fond qui a été saisi et qui rend le juge des référés incompétent pour connaître,
-que la défenderesse ne justifie pas en l'état d'avoir été autorisée à suspendre le paiement des loyers et doit les arriérés,
-que la société COSY HOME HERMES ne peut prétendre être dispensée du paiement de ces loyers, son argumentation sur ce point devant faire l'objet d'une appréciation par le juge du fond de sorte que l'obligation au paiement des loyers est incontestable.
La société COSY HOME HERMES a interjeté appel aux fins de réformation partielle de l'ordonnance.
Elle demande à la cour de se déclarer incompétente pour connaître de la condamnation au titre des loyers impayés en raison de l'existence de contestations sérieuses.
A titre subsidiaire, elle demande de suspendre les effets de la clause résolutoire jusqu'à ce que le tribunal ait statué sur la validité du commandement en lui accordant un délai de paiement pouvant aller jusqu'à 24 mois.
Elle demande condamnation de Monsieur [S] au paiement de la somme de 3000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
La société COSY HOME HERMES fait valoir :
-que monsieur [V] avait donné son bien à bail à la société Antaeus laquelle avait sous-loué l'appartement à madame [B],
-que la société Antaeus a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire de sorte que les baux commerciaux conclus avec les divers propriétaires de la résidence dont monsieur [V] ont été résiliés,
--que le contrat consenti à la sous-locataire n'est pas soumis aux dispositions de la loi du 6 juillet 1989 et a pris fin en raison de la fin du bail principal, le sous-locataire ne pouvant disposer de plus de droit que le locataire,
-qu'elle subit cependant la présence dans les locaux de cette occupante sans droit ni titre du chef du bailleur,
-que le bailleur a manqué à son obligation de délivrance et est responsable de l'occupation illicite du bien loué, ce bien n'ayant pu être exploité normalement et a délivré le commandement de mauvaise foi,
-que le manquement du bailleur à son obligation de délivrance justifie la rétention des loyers en application de l'article 7 du contrat de bail portant sur la privation de jouissance de chaque appartement et non de la totalité de la résidence, de sorte que le loyer est suspendu jusqu'à ce que la sous-locataire ait quitté les lieux,
-que le juge des référés ne pouvait donc condamner la société au paiement d'une provision sur les loyers tout en constatant l'existence d'une contestation sérieuse sur l'application de la clause résolutoire.
-que l'expulsion de madame [B] a été réalisée le 14 octobre 2013 de sorte qu'elle a pu relouer les locaux à compter du 17 octobre 2013 et a réglé les loyers à compter d'octobre 2013.
Monsieur [S] demande à la cour d'infirmer partiellement l'ordonnance, de constater la résiliation du bail et ordonner l'expulsion de la société COSY HOME HERMES, de la condamner au paiement d'une provision de 5218,21 euros au titre des loyers et charges allant jusqu'à fin février 2014 outre une indemnité d'occupation mensuelle de 521,75 euros jusqu'à libération des lieux ainsi que la somme de 3000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en première instance et en appel.
Il réplique :
-que l'instance engagée au fond à son encontre est une manoeuvre pour tenter d'évincer la compétence du juge des référés,
-qu'aucun manquement à l'obligation de délivrance n'est établi dès lors qu'il est d'essence même du contrat de bail d'immeuble au profit d'un hôtelier ou d'un exploitant de résidence d'étudiant que les chambres soient louées de sorte que la résiliation du bail principal n'affecte pas les droits du client de l'hôtel ou de l'étudiant maintenu dans les lieux en cas de changement de propriétaire des murs ou d'exploitant,
-que la société COSY HOME HERMES a repris sans réserve les baux de la société Antaeus et pour ce qui concerne Madame [B] par les appels de loyers et la procédure de résiliation de bail intentée pour défaut de paiement des loyers qu'elle a intenté à son encontre,
-que cette société ne peut prétendre à privation de jouissance puisqu'elle a poursuivi l'expulsion de Madame [B] et avait réglé sans réserve les loyers dus en vertu du bail pour finalement reprendre le paiement des loyers en novembre et décembre 2013 après expulsion de la locataire,
-que le défaut de paiement des loyers par sa locataire ne constitue pas une privation de jouissance des locaux,
-que l'article 7 est sans application dès lors que cette clause vise la privation de la jouissance normale des immeubles ce qui signifie la résidence entière en cas d'hypothèses cumulatives de désordres de nature décennale ou de circonstances exceptionnelles graves ce qui n'est pas le cas du défaut de paiement de la locataire,
-que n'ayant aucun lien de droit avec Madame [B], il ne peut avoir troublé la possession de la société COSY HOME HERMES par son fait personnel ou par des personnes dont il a la charge selon l'article 1719 du code civil,
-qu'il conteste la mauvaise foi que lui impute son adversaire, rappelant régler les échéances mensuelles du crédit contracté sur 25 ans pour l'acquisition des locaux de sorte qu'il était légitime pour lui de souhaiter la résiliation du bail,
MOTIFS DE LA DECISION
L'article 7 du contrat de bail commercial liant les parties stipule que « dans le cas où, pendant la durée du bail, le preneur se verrait privé de la jouissance effective et normale des immeubles désignés en tête du présent bail pour une raison ne relevant pas de son fait (désordres de nature décennale, circonstances exceptionnelles et graves etc'), le loyer défini ci-avant serait suspendu jusqu'à l'expiration du mois au cours duquel le trouble de jouissance aura pris fin ».
Le bail autorise la sous-location par le preneur mais seule la société COSY HOME HERMES, venant aux droits de la société ANTAEUS, dispose d'un lien de droit avec l'occupante des lieux au titre de la convention conclue avec le locataire principal en date du 26 octobre 2007, ce qui a permis à la société appelante d'obtenir la résiliation de la dire convention et l'expulsion de l'occupante des lieux pour défaut de paiement des redevances.
N'ayant aucun lien de droit avec Madame [B], Monsieur [S] ne peut avoir troublé la jouissance de la société COSY HOME HERMES par son fait personnel ou par des personnes dont il a la charge.
En application des articles 1719 et 1725 du code civil, Monsieur [S] ne doit donc pas répondre des conséquences de l'occupation illicite des lieux par le sous-locataire du chef de la société COSY HOME HERMES. La mauvaise foi de Monsieur [S] n'est pas démontrée puisqu'il n'était pas juridiquement tenu d'intervenir dans les relations nées du bail conclu par la société ANTAEUS avec la sous-locataire.
Aucune manquement imputable au bailleur [S] n'étant démontré, l'exception d'inexécution invoquée par la société COSY HOME HERMES à l'appui de sa demande de suspension du paiement des loyers n'est d'évidence pas démontrée.
La société COSY HOME HERMES n'a pas contesté devant le premier juge ni en appel son obligation au paiement des loyers arriérés s'élevant à la somme de 5218,21 euros au titre des loyers et charges et indemnités d'occupation allant jusqu'à fin février 2014 et sera condamnée au paiement d'une provision élevée en appel à ce montant.
Alors même que la dette de loyers est particulièrement ancienne, la société COSY HOME HERMES ne justifie d'aucun paiement en cours de procédure d'appel au titre des loyers arriérés et charges et indemnités d'occupation et s'est contentée de régler un montant équivalent aux loyers courants à compter de l'expulsion de l'occupante des lieux de sorte que sa demande de délais suspendant la clause de résiliation du bail sera rejetée.
En conséquence, il convient de constater, sans contestation sérieuse, la résiliation de plein droit du bail du 18 mars 2011 pour défaut de paiement des loyers en vertu du commandement du 29 janvier 2013 rappelant la clause résolutoire du bail. La résiliation est acquise à la date du 28 février 2013 et il y a lieu d'ordonner l'expulsion de la société COSY HOME HERMES qui sera par ailleurs condamnée au paiement d'une indemnité d'occupation égale au montant du loyer et des charges, jusqu'à son départ effectif des lieux.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Réforme l'ordonnance entreprise,
Statuant à nouveau,
Constate la résiliation de plein droit du bail à la date du 28 février 2013,
Ordonne l'expulsion de la société COSY HOME HERMES et de tous occupants de son chef, au besoin avec l'assistance de la force publique, du studio situé au 3ème étage de l'immeuble [Adresse 2] formant le lot n°[Cadastre 1] du règlement de copropriété, appartement 318, appartenant à Monsieur [S],
Condamne la société COSY HOME HERMES à payer à Monsieur [Z] [S] la somme de 5218, 21 à titre de provision à valoir sur les loyers et charges et indemnités d'occupation arriérés allant jusqu'au 28 février 2014,
Condamne la société COSY HOME HERMES à payer à Monsieur [Z] [S] une indemnité d'occupation mensuelle de 521,75 euros à compter du 1er mars 2014 jusqu'à libération des lieux,
Condamne la société COSY HOME HERMES à payer à Monsieur [Z] [S] la somme de 1500 euros au titre des frais exposés en première instance et en appel en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société COSY HOME HERMES aux dépens de première instance et d'appel avec droit de recouvrement direct pour ces derniers au profit de Maître ROSE, avocat.
Le GreffierLe PRÉSIDENT