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18/03/2014 | FRANCE | N°13/01527

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile b, 18 mars 2014, 13/01527


R.G : 13/01527









Décision du

Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond

du 18 octobre 2012



RG : 09/03923

ch n°





[X]

[X]

[X]



C/



[V] VEUVE [X]

[X]

[X]

[X]

[I]-[A]

SCI JOCYVECAR





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile B



ARRET DU 18 Mars 2014







APPELANTS

ET INTIMES :



Melle [T] [Q] [W] [X]

née le [Date naissance 4] 1979 à [Localité 9] Nigéria

[Adresse 9]

[Localité 1] ALLEMAGNE



M. [DN] [F] [R] [X]

né le [Date naissance 2] 1981 à [Localité 9] Nigéria

[Adresse 8]

[Localité 5]



Melle [H] [C] [D] [X]

née le [Date naissance 5] 1982 à ...

R.G : 13/01527

Décision du

Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond

du 18 octobre 2012

RG : 09/03923

ch n°

[X]

[X]

[X]

C/

[V] VEUVE [X]

[X]

[X]

[X]

[I]-[A]

SCI JOCYVECAR

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRET DU 18 Mars 2014

APPELANTS ET INTIMES :

Melle [T] [Q] [W] [X]

née le [Date naissance 4] 1979 à [Localité 9] Nigéria

[Adresse 9]

[Localité 1] ALLEMAGNE

M. [DN] [F] [R] [X]

né le [Date naissance 2] 1981 à [Localité 9] Nigéria

[Adresse 8]

[Localité 5]

Melle [H] [C] [D] [X]

née le [Date naissance 5] 1982 à [Localité 10] Nigéria

[Adresse 10]

[Localité 2] Suisse

Représentés par Me Rosa VALLEROTONDA de la SCP VALLEROTONDA, GENIN ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

INTIMES ET APPELANTS :

Mme [P], [O] [V]

née le [Date naissance 8] 1924 à [Localité 6] (CAMEROUN)

[Adresse 4]

[Localité 4]

décédée le [Date naissance 1] 2014 à [Localité 4]

Ayant été Représentée par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP AGUIRAUD NOUVELLET, avocat au barreau de LYON

Assisté de Me François GAILLARD, avocat au barreau de PARIS

Mme [S] [Q] [X] épouse [G] sans activité

née le [Date naissance 7] 1947 à [Localité 8] (ALLEMAGNE)

[Adresse 7]

[Localité 4]

Mme [K] [J] [X] architecte d'intérieur

née le 31 Mars 1949 à [Localité 3] (69) ([Localité 3])

[Adresse 6]

[Localité 4]

Mme [E] [N] [X] secrétaire de production

née le [Date naissance 6] 1952 à [Localité 3] (69) ([Localité 3])

[Adresse 1]

[Adresse 1]

CANADA

Représentés par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP AGUIRAUD NOUVELLET, avocat au barreau de LYON

Représentée par Me François GAILLARD, avocat au barreau de PARIS

INTIMES ET APPELANTS INCIDENTS :

Mme [B] [I]-[A]

né le [Date naissance 3] 1947 à [Localité 10] (NIGERIA)

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Rosa VALLEROTONDA de la SCP VALLEROTONDA, GENIN ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

SCI JOCYVECAR

[Adresse 3]

[Localité 3]

Représentée par Me Rosa VALLEROTONDA de la SCP VALLEROTONDA, GENIN ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

******

Date de clôture de l'instruction : 18 Septembre 2013

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 17 Février 2014

Date de mise à disposition : 18 Mars 2014

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Jean-Jacques BAIZET, président

- Marie-Pierre GUIGUE, conseiller

- Michel FICAGNA, conseiller

assistés pendant les débats de Patricia LARIVIERE, greffier

A l'audience, Michel FICAGNA a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Jean-Jacques BAIZET, président, et par Patricia LARIVIERE, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

M. [F] [X] est décédé à [Localité 3] le [Date décès 2] 2007 à l'âge 83 ans, laissant pour lui succéder :

- son épouse Mme [P] [V] avec laquelle il s'était marié le [Date mariage 1] 1947, sans contrat de mariage préalable,

- ses trois enfants, [S], [K] et [E] [X] nées respectivement en 1947, 1949 et 1952 nées de son mariage avec Mme [V],

- ses trois enfants, [T], [DN] et [H] [X], nés respectivement en 1979, 1981 et 1982, issus de son concubinage avec Mme [B] [I] [A].

Par actes du 13 février 2009, Mme [P] [V] et ses trois enfants ont assigné Mme [B] [I] -[A] et ses trois enfants ainsi que la Sci Jocyvecar dont les associés sont [T], [DN] et [H] [X], devant le tribunal de grande instance de Lyon aux fins, principalement :

-de voir prononcer le partage et la liquidation de la communauté et de la succession de M. [X],

- de voir prononcer les sanctions du recel communautaire et successoral à l'encontre des défendeurs relativement à :

* un appartement sis à [Localité 7] (Savoie),

* un appartement sis [Adresse 3],

* aux actifs pouvant demeurer sur les comptes bancaires ouverts en Suisse auprès de l'établissement UBS au nom de M. [F] [X],

* aux actifs pouvant demeurer sur le compte bancaire ouvert au Nigéria auprès de l'établissement Guaranty Trust Bank Limited,

- de voir ordonner le rapport de la valeur de ces divers biens à la communauté et à la succession.

Elles ont font valoir :

- que les deux biens immobiliers de la place [Adresse 3], propriété de la Sci Jocyvcar, et de [Localité 7], propriété indivise de [T], [DN] et [H] [X], avaient en réalité été entièrement financés par M. [X] qui avait ainsi diverti des fonds dépendant de la communauté,

-que les défendeurs qui avaient connaissance de cette circonstance et qui ont revendu ces deux biens à leur insu, ont commis un recel successoral,

- qu'elles n'avaient découvert l'existence de comptes bancaires à I'étranger qu'à l'occasion de l'inventaire fait par le notaire.

Les défendeurs ont demandé au tribunal de rejeter les demandes relatives aux rapports et aux recels au motif qu'il n'était pas rapporté la preuve que le défunt avait financé tout ou partie des parts sociales de la SCI Jocyvecar et du bien immobilier de [Localité 7], lesquels ont au contraire été financés par la succession de leur grand-père maternel même s'il apparaît que les fonds ont transité par des comptes au nom du défunt.

Par jugement du 18 octobre 2012, le tribunal de grande instance de Lyon a :

- Ordonné l'ouverture et le partage de la succession de M. [F] [X],

- Désigné M. le président de la chambre des notaires du Rhône pour procéder aux opérations de liquidation et partage en application des articles 1360 et suivants du code de procédure civile,

-Préalablement, a ordonné une mesure d'expertise pour évaluer l'immeuble dépendant de la communauté, acquis en 1975, situé [Adresse 4], occupé par Mme [V],

- Ordonné le rapport à la succession du prix de vente des biens immobiliers sis à [Localité 7] et [Adresse 3] s'agissant de donations déguisées de M. [F] [X] à [T], [H] et [DN] [X],

- Débouté les parties de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de toutes autres demandes notamment au titre du recel de communauté et de succession,

- Ordonné l'exécution provisoire de la présente décision,

- Dit que les dépens seront tirés en frais privilégiés de partage.

Par déclaration du 25 février 2013, Mme [T] [X], M. [DN] [X] et Mme [H] [X] ont relevé appel principal de ce jugement à l'encontre de Mme [P] [V] veuve [X], de Mme [S] [X] épouse [G], de Mme [K] [X] et de Mme [E] [X].

Par déclaration du 4 mars 2013, Mme [P] [V], Mme [S] [X] épouse [G], Mme [K] [X] et Mme [E] [X] ont également relevé appel principal du jugement, à l'encontre de Mme [T] [X], de M. [DN] [X], de Mme [H] [X], de Mme [B] [I]-[A] et de la Sci Jocyvecar.

Par ordonnance du 19 septembre 2013, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la jonction des procédures.

Mme [P] [V] et ses enfants demandent à la cour :

- d'infirmer le jugement entrepris au titre des recels communautaires et de condamner in solidum Mesdames [B] [I]-[A], [H] [X], [T] [X] et M. [DN] [X] à restituer à Mme [P] [V] veuve [X], voire à [S] [X], [K] [X] et [E] [X] :

* la somme de 87 375,79 € sauf à parfaire, avec intérêts au taux légal à compter de la date des virements bancaires respectifs et capitalisation en application de l'article 1154 du code civil,

* la somme de 605 000 francs, soit 92 231,66 €, ces fonds ayant servi à l'acquisition de l'appartement à [Localité 7],

* la somme de 5 647 000 francs, soit 860 879,60 € ces fonds ayant servi à l'acquisition de l'appartement situé [Adresse 3],

- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il les a débouté de leurs demandes au titre des recels successoraux et dire et juger que :

* le prix issu de la vente par la SCI Jocyvecar, de l'appartement et de ses dépendances situés [Adresse 3] (lots n° 5, 11 et 24 de l'immeuble constitué en copropriété), soit la somme de 750.000 €,

* le prix issu de la vente par [T], [DN] et [H] [X] de l'appartement situé [Adresse 5] (SAVOIE) (lot n°151 de l'immeuble constitué en copropriété), soit la somme de 85.000 €,

* les actifs pouvant demeurer sur les comptes bancaires ouverts en Suisse auprès de l'établissement UBS sous les numéros 0240-595027 W.M. et 279 -00049472 F.B. et l'ensemble des actifs se trouvant dans les livres de cet établissement au nom de M. [F] [X],

* et les actifs pouvant demeurer sur le compte bancaire ouvert au Nigéria auprès de l'établissement Guaranty Trust Bank Limited sous le numéro 00113 058154005 000000 5363 98 et l'ensemble des actifs se trouvant dans les livres de cet établissement au nom de M. [F] [X],

sont des actifs dépendant de la communauté, donc pour moitié de la succession de M. [F] [X],

En conséquence,

- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a ordonné le rapport à la succession du prix de vente des biens immobiliers sis à [Localité 7] et [Adresse 3], s'agissant de donations déguisées de M. [F] [X] à [T], [H] et [DN] [X],

Et, [RY] ajoutant,

-dire et juger que Mesdames [H] et [T] [X] et M. [DN] [X], en dissimulant ces actifs (dont ils ont, de surcroît, eu la jouissance et tiré les fruits) se sont rendus responsables de recels successoraux,

- les déclarer dépourvus de tout droit sur ces actifs en particulier sur le prix de la vente du bien immobilier sis [Adresse 3], les parts de la Sci Jocyvecar et le prix de vente de l'immeuble situé à [Adresse 5],

- et ordonner sur ces bases le partage des meubles et immeubles dépendant de la succession de M. [F] [X],

- de déclarer opposable à la Sci Jocyvecar la décision à intervenir,

- d'ordonner sa publication au registre du commerce et des sociétés tenu par le tribunal de commerce de Lyon,

- de dire et juger en outre, Mesdames [H] et [T] [X] et M. [DN] [X] redevables des fruits et produits générés par les actifs recelés depuis l'ouverture de la succession le [Date décès 2] 2007,

En conséquence,

- de condamner in solidum Mesdames [H] et [T] [X] et M. [DN] [X] à payer au reste de l'indivision successorale des indemnités au titre des occupations et jouissances depuis le [Date décès 2] 2007 de :

* l'appartement et ses dépendances situé [Adresse 3] (lots n° 5,11 et 24), et jusqu'au 12 janvier 2011, date de sa vente ;

* l'appartement situé [Adresse 5] (Savoie) (lot n°151), et jusqu'au 16 septembre 2011, date de sa vente,

- de désigner tel(s) expert(s) qu'il plaira aux fins d'évaluation de ces indemnités, le tout en mettant la ou les consignation(s) fixée(s) à la charge des intimés,

A titre subsidiaire,

- de dire et juger que les parts, biens immobiliers et patrimoines visés ci-dessus ouvrent droit à une récompense dû par la succession de M. [F] [X] décédé le [Date décès 2] 2007 à [Localité 3], à la communauté des époux [X] [V],

En conséquence,

- d'ordonner à Mesdames [H] et [T] [X] et M. [DN] [X] d'en faire entier rapport à la succession,

- d'ordonner sur ces bases le partage des meubles et immeubles dépendant de la succession de M. [F] [X],

- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il les a débouté de leurs demandes de dommages intérêts,

- de constater que Mesdames [H] [X] et [T] [X] et M. [DN] [X] se sont indûment opposés au partage amiable, ont indûment dissimulé des actifs et refusé jusqu'à l'incident devant le juge de la mise en état près le tribunal de grande instance de Lyon la communication par les notaires des éléments sur l'origine des fonds ayant permis les acquisitions immobilières et qu'ils ont, de ce fait, agit fautivement retardant en particulier le dépôt de la déclaration de succession avec les pénalités fiscales induites,

- de condamner in solidum Mesdames [H] et [T] [X] et M.[DN] [X] à payer aux concluantes une somme équivalente à ces pénalités fiscales, à tout le moins, à en garantir le paiement,

- de condamner in solidum Mesdames [B] [I]-[A], [H] [X], [T] [X] et M. [DN] [X] à leur payer en une somme de 25.000 € en indemnisation des préjudices subis et résultant de la résistance abusive des héritiers lyonnais,

- de condamner Mesdames [B] [I]-[A], [H] [X], [T] [X] et M. [DN] [X] in solidum à leur payer, la somme de 15.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner les mêmes in solidum aux entiers dépens avec faculté de recouvrement direct au profit de la Scp Aguiraud Nouvellet.

Ils soutiennent :

- qu' il ressort des éléments fournis que le chèque ayant permis l'apport en capital de la Sci Jocyvcar et le paiement du prix d'acquisition l'appartement de la place [Adresse 3], a été tiré sur un compte ouvert auprès d'un établissement bancaire aux droits duquel vient l'établissement bancaire UBS dont le titulaire n'est autre que M. [X],

- que les héritiers de la branche lyonnaise, qui ne pouvaient qu'en avoir parfaite connaissance en tant que bénéficiaires de ces opérations, ont commis un recel successoral en dissimulant volontairement ces informations pour faire échapper cet actif à la succession,

- que la circonstance que le bien ait été vendu par les héritiers lyonnais le 11 janvier 2011, en cours de procédure, alors qu'une très vive contestation portait sur ledit bien, à l'insu des concluantes, témoigne à l'évidence d'une volonté manifeste de dissimulation dont la Cour devra tirer toutes conséquences,

- que l'acquisition de l'immeuble de [Localité 7] a été financée par M.[F] [X], au moyen de fonds dépendant de la communauté des époux [X] [V],

- que c'est à l'insu des concluantes, au cours de la présente procédure, que les héritiers de la branche lyonnaise ont vendu cet immeuble dépendant manifestement de la succession, et dont le prix de vente n'a pu être séquestré qu'à l'issue d'une procédure d'incident initiée par les héritières de la branche parisienne,

- que nul ne pouvant prouver pour soi-même, le document produit par les héritiers de la branche lyonnaise est insuffisant pour rapporter la preuve de l'origine familiale maternelle alléguée des fonds,

- que les opérations d'inventaires conduites les 2 et 9 juin 2008 ont révélé l'existence de divers comptes ouverts à l'étranger dont plusieurs en Suisse dans les livres de l'établissement bancaire UBS et au Nigeria,

- que ces actifs et comptes bancaires étaient connus des héritiers lyonnais qui résident sur le lieu même où les documents bancaires ont été trouvés,

- que les donations faites par M. [X] en 1993 et dont ils ont été les bénéficiaires, l'ont été au moyen d'un compte UBS différent,

- que l'un des comptes bancaires français de M. [F] [X] (LCL n° 731187 K) fait apparaître sur les 10 dernières années (l'établissement bancaire n'ayant pu fournir des relevés plus anciens) qu'un certain nombre de virements bancaires ont été faits au profit des enfants lyonnais et de leur mère, dont le total s'élève (sauf à parfaire) à 87.375,79 € se décomposant, comme suit:

* au profit de " Melle [X] " ou «[B] [I]-[A]» nominativement: 43.069,71 €,

* au profit de " [QG].[X] " ou [DN] [X] nominativement : 6.727,91 €,

* au profit de " [M].[X] " ou [H] [X] nominativement : 36.489,65 €,

* au profit de " [L].[X] " ou [T] [X] nominativement : 3.088,52 €.

- que ces virements sont intervenus en violation manifeste des devoirs et obligations du mariage, par prélèvement sur des actifs dépendant de la communauté légale existante à l'époque entre M. [F] [X] et son épouse légitime Mme [P] [V] veuve [X],

- que les virements à destination des comptes bancaires des enfants mineurs, pour les montants susvisés, n'étaient à l'évidence pas une forme de contribution à l'entretien et l'éducation des enfants,

- que ces versements, effectués sur les fonds appartenant à la communauté des époux [X] et [V], à l'insu de Mme [V] veuve [X], ont constitué des donations déguisés au profit de [T], [DN] et [H] [X] et de leur mère, qui les ont dissimulées,

- que la cour reconnaîtra sur ce point le recel communautaire et successoral et en tirera les conséquences,

- que les héritiers de la branche lyonnaise ont tout entrepris depuis l'ouverture de la succession pour provoquer un déséquilibre du partage en recelant ou en divertissant des actifs de la succession, et en dissimulant de nombreuses informations, ou en s'opposant à leur divulgation par les notaires compétents.

Mme [P] [V] est décédée le [Date décès 1] 2014..

Mme [T] [X], M. [DN] [X], Mme [H] [X], Mme [B] [I]-[A], et la Sci Jocyvecar demandent à la cour :

- de réformer le jugement du tribunal de grande instance de Lyon du 18 octobre 2012 mais uniquement en ce qu'il a ordonné le rapport à la succession du prix de vente des biens immobiliers sis à [Localité 7] et [Adresse 3], s'agissant de donations déguisées de M. [F] [X] à [T], [H] et [DN] [X], et dire qu'il [RY] aura lieu à réduction en cas de dépassement de la réserve héréditaire,

- de dire qu'il n'y a pas lieu au rapport à la succession du prix de vente desdits biens immobiliers,

- de confirmer pour le surplus, le jugement du tribunal de grande instance de Lyon,

- de débouter en conséquence Mme [V], Mme [S] [X], Mme [K] [X] et Mme [E] [X] de leurs demandes,

- de renvoyer les parties aux opérations de compte, liquidation et partage de la succession de M. [F] [X] devant le notaire désigné et dont l'état liquidatif tiendra compte de la présente décision,

- de condamner solidairement Mme [V], Mme [S] [X], Mme [K] [X] et Mme [E] [X] à leur payer à chacun la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner les mêmes sous la même solidarité aux entiers dépens.

Ils soutiennent :

- qu'il ressort des pièces n°2 et 9 versées aux débats que [T], [H] et [DN] [X] percevaient depuis 1987 de la succession de leur grand-père maternel une somme annuelle totalisant pour les trois 450.000 francs et qu'il apparaît ainsi évident que les fonds apportés à la Sci Jocyvecar pour l'acquisition de l'appartement de la place [F] [Y] et que le prix de l'acquisition de l'immeuble de [Localité 7] en 1989 provenait de la succession du grand-père maternel,

- que rien ne permet de remettre en doute la validité de ce document établi conformément aux dispositions légales applicables au Nigéria,

- que même si le prix d'achat de l'appartement de [Localité 7] de [Localité 7] et les fonds apportés lors de la constitution de la société Jocyvecar ont transité par des comptes bancaires ouverts au nom de M. [F] [X], ce que les concluants ignoraient, il n'en reste pas moins que ces comptes ont pu être alimentés par des fonds appartenant en propre aux concluants et provenant de l'héritage de leur grand-père maternel,

- que les acquisitions de biens immobiliers ont été faites au nom des enfants quand ils étaient encore très jeunes et qu'ils pouvaient légitimement se croire régulièrement propriétaires,

- qu'ils n'ont jamais tenté de dissimuler quoi que ce soit,

- que la famille parisienne avait parfaitement connaissance de l'existence de l'appartement [Adresse 3] appartenant à la Sci Jocyvecar et de l'appartement situé à [Adresse 5],

- qu'une divergence de position, de fait ou de droit ne saurait, en aucun cas, être assimilée à un recel successoral,

- que les héritiers de la branche parisienne de M. [F] [X] avaient autant de raisons que ceux de la branche lyonnaise de connaître l'existence des comptes à l'étranger de M. [X].

MOTIFS

1°) Sur l'origine des fonds litigieux

Le régime matrimonial des époux [X]-[V] était celui de la communauté de meubles et d'acquêts, correspondant au régime légal applicable antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 13 juillet 1965.

En régime de communauté, les deniers déposés sur un compte personnel d'un époux sont présumés communs.

En l'espèce, le capital social de la Sci Jocyvecar et le prix d'acquisition du bien de [Localité 7] proviennent de fonds qui étaient déposés sur des comptes bancaires dont M. [F] [X] était titulaire.

Les fonds reçus directement par Mme [I] [A] et ses enfants, à hauteur de la somme de 87.375,79€  proviennent également des comptes bancaires de M. [X].

De même, les avoirs de M. [X] au jour de son décès sont constitués de sommes en dépôt sur des comptes bancaires à son nom.

L'ensemble de ces fonds sont donc présumés être des actifs de communauté.

Au soutien de leur thèse tendant à démontrer que ces fonds proviendrait en tout ou partie en réalité de la succession du père de Mme [I] [A], celle-ci et ses enfants produisent un document daté du 8 février 1993, aux termes duquel il apparaît que Mme [A] a déclaré devant [BO].[U] [Z], notaire public à [Localité 10] au Nigéria, qu'à son décès, son père a laissé ses biens incluant des maisons actions etc. au profit de ses enfants petits enfants dont elle-même et ses enfants, que chacun a reçu la part à laquelle il avait droit du revenu de la succession chaque fois qu'une distribution a été faite de temps en temps, que chacun d'eux reçoit chaque année de la succession l'équivalent d'environ 100 000 FF à 150 000 FF, impôts payés.

Cette unique pièce qui reproduit que les déclarations de Mme [I] [A], est dépourvue de force probante.

En conséquence, en l'absence de tout autre élément probant, il doit être présumé que les fonds actuellement sur les comptes bancaires au nom de M. [X], ceux qui ont servi à la libération du capital social de la Sci Jocyvecar et ceux qui ont servi à l'acquisition en indivision par [T], [DN] et [H] [X] du bien immobilier de [Localité 7], étaient des biens communs.

2°) Sur le recel communautaire

a- en ce qui concerne les fonds employés pour l'acquisition des biens immobiliers

Aux termes de l'article 1477 du code civil, celui des époux qui aurait diverti ou recelé quelques effets de la communauté est privé de sa portion dans lesdits effets.

Le recel au sens de l'article 1477 du code civil n'implique pas nécessairement un acte d'appropriation. Il peut résulter de tout procédé tendant à frustrer un des époux de sa part de communauté.

En outre, le recel de communauté peut être commis même avant la dissolution de la communauté.

En espèce, il est établi par la copie des chèques, que M. [X] a financé au moyen de ses avoirs bancaires présumés biens de communauté, l'acquisition de deux biens immobiliers au profit ses trois derniers enfants, sans apparaître lui-même comme apporteur des fonds et sans faire intervenir aux actes son épouse commune en bien, ce qui constitue une volonté de dissimulation de la part de M. [X].

Ces montages financiers ne pouvaient avoir pour objectif que de faire échapper ces fonds aux règles du partage de communauté.

M. [X] ayant eu l'intention de fausser les opérations de partage de la communauté au détriment de son épouse, il s'est rendu coupable de recel de communauté.

Les héritiers bénéficiaires du recel n'ont pas immédiatement offert de restituer ces sommes suite à la réclamation des héritiers de la branche parisienne faite dès 2007 pour le bien de la place [Y] à [Localité 3] et dès 2009 pour le bien de [Localité 7] ( pièce 23 et pièce 33).

Au contraire, ils ont poursuivi la dissimulation en revendant les biens immobiliers courant 2011, moyennant les prix de 750 000 € et 85 000 €, à l'insu de leurs copartageants, malgré le litige en cours, et en tentant de justifier par des moyens inéfficients et ce, jusqu'en cause d'appel, que les fonds provenaient de la succession de leur grand-père maternel.

Seul le prix de revente du bien immobilier de Saint Martin de [Localité 7] a pu faire l'objet d'un séquestre judiciaire, à la suite d'une intervention judiciaire énergique des héritiers de la branche parisienne.

En conséquence, Mme [P] [V] ( désormais ses héritiers qui ont qualité pour poursuivre l'action engagée par elle), victime du recel est devenue propriétaire exclusif des biens divertis ou recelés à compter du décès de M.[X].

Elle a droit aux fruits et revenus produits par ces biens depuis la date de la dissolution de la communauté.

En l'espèce, s'agissant du recel de sommes d'argent, ces fruits et revenus correspondent aux intérêts au taux légal.

Dès lors, il n'y a pas lieu à expertise.

La demande de restitution qui porte sur le prix de revente des biens immobiliers, est donc bien fondée, mais uniquement en ce qu'elle est dirigée à l'encontre de Mesdames [H] [X], [T] [X] et M. [DN] [X], qui sont des copartageants, qualité requise aux termes de l'article 1477 du code civil comme condition du recel de communauté.

En revanche, elle est mal fondée en ce qu'elle est dirigée à l'encontre de Mme [I] [A], qui n'a pas la qualité de copartageant.

b - en ce qui concerne les sommes régulièrement versées par M. [X] à Mme [I] [A] et à ses enfants nés de son concubinage

En application de l'article 224 du code civil, chacun des époux perçoit ses gains et salaires et peut en disposer librement après s'être acquitté des charges du mariage.

En l'espèce, il n'est pas contesté que M. [F] [X] s'est acquitté des charges du mariage.

Il n'est pas soutenu que la somme litigieuse qui s'élève à 87.375,79 € sur les dix dernières années, soit 728 € par mois, proviendrait de biens autres que les gains et salaires de M. [X].

Enfin, au regard du montant raisonnable de ces sommes la demande de restitution est mal fondée, M. [X] pouvant librement disposer de ses gains et salaires.

3°) Sur le recel successoral

a- en ce qui concerne les prix de revente des biens immobiliers

Le recel communautaire étant admis en ce qui concerne les prix de revente des biens immobiliers acquis au moyen des fonds de la communauté, le recel successoral est sans objet.

En effet, le conjoint victime ( en l'espèce sa succession) doit être considérée comme propriétaire exclusif des biens recelés depuis la dissolution de la communauté soit depuis le décès de M. [X].

Ces biens, qui sont donc la propriété de Mme [V] n'appartiennent pas à la succession de M. [X] et ne peuvent faire l'objet d'un recel successoral.

b- en ce qui concerne les fonds déposés sur des comptes à l'étranger

Le notaire, lors de l'inventaire des biens de M. [X] diligenté à son domicile, [Adresse 3], le 21 mai 2008, a trouvé sans difficulté particulière des pièces correspondant à un compte Nigérian ( carnet de chèque de la Guaranty Trust à [Localité 10]) ce qui démontre l'absence de volonté de Mme [I] [A] ou de ses enfants, qui habitaient dans ce lieu de divertir ou de receler les fonds déposés sur ce compte.

En ce qui concerne les avoirs en dépôt à la société UBS en Suisse, les héritiers de la branche lyonnaise en connaissaient l'existence depuis 1993, ce qui leur a d'ailleurs permis de questionner utilement cette banque.

Par ailleurs, les demandeurs ne produisent aucune pièce laissant penser que les héritiers de la branche lyonnaise auraient eu une connaissance précise des coordonnées de ces comptes et qu'ils les auraient dissimulées en vue de bénéficier seuls des avoirs.

En conséquence, la demande d'application des sanctions du recel successoral est mal fondée en ce qui concerne ces avoirs bancaires.

4°) Sur la demande de dommages et intérêts formés par les héritiers de la branche parisienne

Il n'est pas établi par les pièces du dossier que les pénalités prononcées par l'administration fiscale soient dues à un comportement fautif de Mesdames [H] et [T] [X] et de M. [DN] [X].

En effet, la situation conflictuelle a été créée par M. [F] [X] qui a seul et personnellement mis en oeuvre les montages financiers destinés à gratifier ses trois derniers enfants alors mineurs au détriment de son épouse et de ses trois premiers enfants, et ce sans aucune complicité démontrée de Mme [I] [A].

Cette demande sera donc rejetée.

5°) Sur la demande de publication au registre du commerce et des sociétés du présent arrêt

Cette demande, dont ni l'objectif ni le fondement juridique ne sont précisés, sera rejetée.

6°) Sur l'article 700 du code de procédure civile

Il convient de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS:

la cour,

Confirme le jugement en ce qu'il a :

- ordonné l'ouverture et le partage de la succession de M. [F] [X],

- désigné M. le président de la chambre des notaires du Rhône pour procéder aux opérations de liquidation et partage en application des articles 1360 et suivants du code de procédure civile,

- préalablement, ordonné une mesure d'expertise pour évaluer l'immeuble situé [Adresse 4],

Le réformant pour le surplus et statuant de nouveau :

- Déboute [S] [X], [K] [X] et [E] [X] de leur demande au titre du recel de communauté relatif à la somme de 87.375,79 €,

- Dit que le prix issu de la vente par la SCI Jocyvecar, de l'appartement et de ses dépendances situés [Adresse 3], lots n° 5, 11 et 24 de l'immeuble constitué en copropriété, soit la somme de 750.000 €, et que le prix issu de la vente par [T], [DN] et [H] [X] de l'appartement situé [Adresse 5] (Savoie), lot n°151 de l'immeuble constitué en copropriété, soit la somme de 85.000 €, sont des actifs de la communauté ayant existé entre Mme [P] [V] et M. [F] [X] qui ont été divertis ou recelés par ce dernier,

- Condamne in solidum Mme [T] [X], M.[DN] [X] et Mme [H] [X], détenteurs de ces fonds à les rapporter à Mme [S] [X], Mme [K] [X] et Mme [E] [X] en leur qualité d'ayants-cause et d'ayants-droit de leur mère Mme [P] [V], avec intérêts au taux légal à compter du [Date décès 2] 2007, avec capitalisation en application des dispositions de l'article 1154 du code civil,

- Dit n'y avoir lieu à expertise,

- Déboute Mme [S] [X], Mme [K] [X] et Mme [E] [X] de leur demande de restitution dirigée à l'encontre de Mme [I] [A],

- Dit que les héritiers de M.[F] [X] sont privés de leur portion dans lesdits effets, au sens de l'article 1477 du code civil, en raison du recel de communauté commis par leur auteur,

- Dit que ces actifs étant la propriété exclusive de Mme [P] [V] à compter du décès de M. [F] [X], ils ne peuvent faire l'objet d'un recel successoral, ces actifs n'étant pas entrés dans la succession de M. [F] [X],

- Déboute Mme [S] [X], Mme [K] [X] et Mme [E] [X] de leurs demandes au titre des recels successoraux, de leurs demandes de rapport à succession, et de leur demande de dommages et intérêts,

- Déclare opposable à la Sci Jocyvecar la décision à intervenir,

- Condamne Mme [B] [I]-[A], Mme [T] [X], M. [DN] [X] et Mme [H] [X], in solidum à payer à Mme [S] [X], Mme [K] [X] et Mme [E] [X] la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Déboute Mme [B] [I]-[A], Mme [T] [X], M. [DN] [X] et Mme [H] [X] de leurs demandes,

- Renvoie les parties devant le notaire pour la poursuite des opérations de compte liquidation et partage de la succession de M. [F] [X],

- Condamne Mesdames [B] [I]-[A], [H] [X], [T] [X] et M. [DN] [X] in solidum aux entiers dépens de première instance et d'appel, sauf les frais d'expertise qui seront employés en frais privilégiés de partage, avec faculté de recouvrement direct au profit de la Scp Aguiraud Nouvellet.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile b
Numéro d'arrêt : 13/01527
Date de la décision : 18/03/2014

Références :

Cour d'appel de Lyon 1B, arrêt n°13/01527 : Interprète la décision, rectifie ou complète le dispositif d'une décision antérieure


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-03-18;13.01527 ?
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