R.G : 12/05443
décision du tribunal de grande instance de Lyon
Au fond du 20 juin 2012
1ère chambre section 2
RG : 11/03967
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
1ère chambre civile B
ARRET DU 10 Septembre 2013
APPELANTS :
M. [N] [H]
né le [Date naissance 2] 1965 à [Localité 3] (RHONE)
[Adresse 4]
[Localité 1]
représentée par Maître Luc CHAUPLANNAZ, avocat au barreau de LYON
Mme [V] [K] épouse [H]
née le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 5] (LOIRE)
[Adresse 4]
[Localité 1]
représentée par Maître Luc CHAUPLANNAZ, avocat au barreau de LYON
INTIMEE :
SCP [X], notaires associés
[Adresse 3]
[Localité 2]
représentée par la SELARL COLBERT LYON, avocat au barreau de LYON
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Date de clôture de l'instruction : 20 Mars 2013
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 25 Juin 2013
Date de mise à disposition : 10 Septembre 2013
Audience tenue par Jean-Jacques BAIZET, président et Michel FICAGNA, conseiller, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,
assistés pendant les débats de Frédérique JANKOV, greffier
A l'audience, Michel FICAGNA a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Composition de la Cour lors du délibéré :
- Jean-Jacques BAIZET, président
- Pierre BARDOUX, conseiller
- Michel FICAGNA, conseiller
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Jean-Jacques BAIZET, président, et par Frédérique JANKOV, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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Aux termes d'un compromis en date du 30 juin 2006, M. [N] [H] et Mme [V] [K] épouse [H], ont vendu à Mme [M] [X] et M. [W] [I] une maison située à [Localité 4] dans le lotissement [Adresse 1], moyennant le prix de 574 750 €, le compromis ayant été rédigé par Mme [M] [X] elle-même, notaire de profession, associée au sein de la société notariale [O], [T], [E], [Q], [X], [A], et [P].
Mme [X] et M. [I] ayant refusé de réitérer la vente, les époux [H] les ont assignés devant le tribunal de grande instance de Lyon aux fins de les voir condamner à leur payer l'indemnité d'immobilisation prévue au compromis.
Par jugement du 24 avril 2007, le tribunal de grande instance de Lyon, a fait droit à leur demande et a condamné Mme [X] et M. [I] à leur régler diverses sommes en réparation de leurs préjudices.
Mais par un arrêt du 16 septembre 2008, la cour d'appel de Lyon a infirmé le jugement du tribunal de grande instance de Lyon, a condamné les époux [H] à rembourser les sommes dont ils avaient obtenus le paiement et les a condamnés à payer à Mme [X] et M. [I] une somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts outre celle de 4.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par acte en date du 15 février 2011, les époux [H] ont alors assigné devant le tribunal de grande instance de Lyon la société notariale [O], [T], [E], [Q], [X], [A] et [P], en déclaration de responsabilité et indemnisation de leur préjudice, lui reprochant des manquements professionnels lors de la rédaction du compromis de vente.
La société notariale a conclu à titre principal à l'irrecevabilité des demandes en raison de l'autorité de la chose jugée s'attachant à l'arrêt de la cour du 16 septembre 2008, dans la mesure où la cour a écarté la responsabilité professionnelle de Maître [X].
Par jugement du 20 juin 2012, le tribunal a déclaré irrecevable l'action des époux [H] et les a condamnés à payer à la société notariale la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le tribunal a retenu :
- que la cour d'appel avait jugé dans son arrêt du 16 septembre 2008 que les demandeurs ne pouvaient invoquer utilement une erreur de Mme [X] en sa qualité de notaire rédacteur du compromis pour s'exonérer, ne serait-ce que partiellement, de leur entière responsabilité,
- que les seules fautes imputées à l'office notarial étaient les fautes personnellement reprochées à Maître [X], dans les mêmes termes que dans la précédente procédure et écartées par la cour d'appel de Lyon dans son arrêt devenu définitif.
Le époux [H] ont relevé appel de ce jugement.
Ils demandent à la cour de :
- de dire et juger que la société [X] est entièrement responsable de la non réalisation définitive par acte authentique de la vente de l'immeuble situé [Adresse 2] moyennant le prix de 574 750 €, consenti par M. et Mme [N] [H] à Mme [M] [X] et à M. [I] suivant compromis rédigé personnellement par Me [M] [X] à la fois notaire associée et acquéreur, le 30 juin 2006,
- de condamner la société précitée à leur payer les sommes suivantes :
1/ 49 597,14 € en remboursement de la somme qu'ils ont dû verser à Mme [X] et M. [I] sur poursuites de saisie,
2/ 167 750 € de différentiel entre le prix de vente fixé dans le compromis et le prix de vente définitif par M. et Mme [H] à un autre acquéreur,
3/ 16 266,08 € de frais et honoraires de justice,
4/ 7 522,47 € de frais afférents à la maison inoccupée pendant deux ans environ,
5/ 60 201,08 € de coût du crédit relais et des crédits immobiliers,
6/ 10 000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,
7/ 10 000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile.
Ils soutiennent :
- que l'arrêt de la Cour a été rendu dans une procédure où ni Me [X] en sa qualité de notaire, ni la société notariale à laquelle elle appartient, ne faisait partie des plaideurs en cause,
- que la lecture de l'arrêt du 23 mars 2006 a appris à Me [X], ce qu'elle aurait pu apprendre avant la signature du compromis en interrogeant en temps utile avant la signature du compromis le syndic de l'association syndicale ce qu'elle n'a pas fait.
La société [X], notaires associés, demande à la cour :
- de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action des époux [H] et les a condamnés à lui payer une indemnité de 1.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens de l'instance,
le réformant partiellement le jugement,
- de condamner les époux [H] à lui payer une somme de 5.000 € de dommages et intérêts pour procédure abusive et une indemnité complémentaire de 5.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient :
- que la présente action en responsabilité - qui n'a d'autre fondement que la solidarité de la société civile professionnelle avec Me [X]- se heurte à l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt du 16 septembre 2008, puisque la cour ne pourrait accueillir les demandes formées contre l'office notarial sans remettre en cause l'autorité de la chose jugée attachée à son précédent arrêt,
très subsidiairement,
- que les informations obtenues par la suite par Madame [X] lui ont permis de constater que la situation était bien différente de celle décrite par les vendeurs, du fait à la fois de l'arrêt rendu par la cour d'appel de Lyon le 23 mars 2006, d'autre part du coût prévisionnel des travaux,
- que Mme [X] et M. [I] n'auraient tout simplement pas signé le compromis s'ils avaient eu connaissance du vice qui affecte le bien vendu.
MOTIFS
Sur l'autorité de la chose jugée
Aux termes de l'article 480 du code de procédure civile, le jugement qui tranche dans son dispositif tout ou partie du principal, ou celui qui statue sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident a, dès son prononcé, l'autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'il tranche.
Le principal s'entend de l'objet du litige tel qu'il est déterminé par l'article 4 du code de procédure civile.
Il en résulte que l'autorité de la chose jugée est uniquement attachée à ce que le jugement a tranché dans son dispositif.
Par ailleurs, aux termes de l'article 1351 du code civil, l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité.
En l'espèce, la cour d'appel dans le dispositif de son arrêt du 16 septembre 2008 a statué en ces termes :
- infirme le jugement critiqué,
- Prononce la nullité du compromis de vente du 30 juin 2006 pour erreur sur la substance de la chose svendue,
- Déboute les époux [H] de toutes leurs demandes,
- Condamne les époux [H] à verser aux consorts [X]-[I] la somme de 10.000 € en réparation de leur préjudice et celle de 4.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Ainsi, la responsabilité de Maître [X], qui de surcroît ne constituait pas l'objet du litige, n'a pas été tranchée dans le dispositif de l'arrêt.
Par ailleurs, Mme [X] n'était dans la cause qu'en qualité de co-acquéreur indivis et non en sa qualité de notaire . De plus la société notariale à laquelle elle appartenait n'était pas dans la cause.
En conséquence, le jugement sera infirmé en ce qu'il a retenu la fin de non recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée de l'arrêt de la cour d'appel du 16 septembre 2008.
Sur la responsabilité
L'action des époux [H] tend à faire juger que la société notariale à laquelle appartient Maître [X] serait responsable de la mauvaise rédaction du compromis ainsi que d'une absence d'information des acquéreurs, ces manquements ayant permis à ces derniers par la suite de faire annuler la vente.
Or, la responsabilité de l'annulation de la vente incombe aux seuls époux [H] qui n'ont pas rempli leur obligation d'information à l'égard des acquéreurs.
Par ailleurs, le grief fait par les époux [H] à la société notariale tiré de la non justification par les acquéreurs, dans le délai de 15 jours prévu au compromis, des démarches nécessaires pour l'obtention de leur prêt immobilier est inopérant dès lors que le non respect de cette clause autorisait seulement les vendeurs à se prévaloir de la caducité du compromis, ce qu'ils n'ont pas fait.
En tout état de cause, le préjudice des époux [H] ne pourrait être constitué que par une perte de chance de voir Mme [X] et M. [I], bien que totalement informés, soit réitérer l'acte de vente, soit être condamnés au paiement de l'indemnité d'immobilisation.
Toutefois, si le compromis signé le 30 juin 2006, avait mentionné et relaté de manière complète le contenu de l'arrêt de la cour d'appel du 23 mars 2006 aux termes duquel l'association syndicale se voyait tenue de prendre à sa charge 70 % du montant des travaux pour remédier aux conséquences du glissement de terrain, il est certain que Mme [X] et M. [I] n'auraient pas signé le compromis, de sorte que les époux [H] ne peuvent prétendre avoir subi une quelconque perte de chance de réaliser la vente.
Dès lors en l'absence de faute de la société notariale et en l'absence de préjudice, il convient de débouter les époux [H] de leurs demandes.
Sur les dommages et intérêts
Il ne ressort pas de la procédure que les époux [H] aient fait un usage abusif de leur droit de saisir la justice et d'exercer les voies de recours autorisées.
Le demande de dommages intérêts de la société notariale sera rejetée.
Sur l'article 700 du code de procédure civile
Il convient de faire application de dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
la cour,
Reformant le jugement déféré et statuant de nouveau,
- Déclare l'action de M. [N] [H] et Mme [V] [K] épouse [H] à l'encontre de la société notariale recevable,
Sur le fond,
- Déboute M [N] [H] et Mme [V] [K] épouse [H] de leur action en responsabilité civile dirigée contre la société notariale [X], dans le cadre de la vente immobilière du 30 juin 2006, annulée par arrêt de la cour d'appel de Lyon du 16 septembre 2008,
- Déboute la société notariale [X] de sa demande de dommages intérêts,
- Condamne solidairement M. [N] [H] et Mme [V] [K] épouse [H] à payer à la société notariale [X] la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamne solidairement M [N] [H] et Mme [V] [K] épouse [H] aux entiers dépens d'appel et de première instance, ces derniers distraits au profit de la société d'avocats Colbert dans les termes de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRESIDENT