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16/04/2013 | FRANCE | N°12/08222

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile b, 16 avril 2013, 12/08222


R.G : 12/08222









décision du tribunal de grande instance de Lyon

Au fond du 02 octobre 2012





3ème chambre



RG : 10/16177



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile B



ARRET DU 16 Avril 2013







APPELANTE :



SARL LA PLAGE

[Adresse 1]

[Adresse 1]



représentée par Maître Fouziya BOUZERDA, avocat au barreau de LYON

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INTIMEES :



SCI DAM venant aux droits de la SCI JULIEN

[Adresse 3]

[Adresse 3]



représentée par la SCP MARIE TISSERAND, avocats au barreau de LYON





SCI LA RIZE

[Adresse 2]

[Adresse 2]



représentée par la SCP BAUFUME - SOURBE, av...

R.G : 12/08222

décision du tribunal de grande instance de Lyon

Au fond du 02 octobre 2012

3ème chambre

RG : 10/16177

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRET DU 16 Avril 2013

APPELANTE :

SARL LA PLAGE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Maître Fouziya BOUZERDA, avocat au barreau de LYON

INTIMEES :

SCI DAM venant aux droits de la SCI JULIEN

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représentée par la SCP MARIE TISSERAND, avocats au barreau de LYON

SCI LA RIZE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par la SCP BAUFUME - SOURBE, avocats au barreau de LYON

assistée de la SCP D'AVOCATS DUMONT-LATOUR, avocats au barreau de LYON

******

Date de clôture de l'instruction : 25 Mars 2013

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 25 Mars 2013

Date de mise à disposition : 16 Avril 2013

Audience tenue par Jean-Jacques BAIZET, président et Marie-Pierre GUIGUE, conseiller, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,

assistés pendant les débats de Frédérique JANKOV, greffier

A l'audience, [H] [S] a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Jean-Jacques BAIZET, président

- Marie-Pierre GUIGUE, conseiller

- Michel FICAGNA, conseiller

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Jean-Jacques BAIZET, président, et par Frédérique JANKOV, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

EXPOSE DE L'AFFAIRE

Par acte du 12 avril 2010, la société Julien a donné à bail commercial à la société La Plage un local situé à [Localité 1] moyennant un loyer annuel de 36 000 € H.T. La clause de destination prévue au bail mentionnait les activités de 'bar licence IV, restauration sur place ou à emporter, brasserie, bar à thème, activités événementielles et de loisir, bar dansant et activités connexes'.

Par acte du 24 avril 2010, la Sci La Rize a consenti à la société La Plage un bail sur un local commercial voisin du précédent, moyennant un loyer mensuel de 1 200 € H.T. Le bail comportait la clause de destination suivante : 'le présent bail est un bail tous commerces, il est donc accordé pour toutes activités, dont restauration sur place ou à emporter, bar licence IV, discothèque, événementiel, activités de loisirs et activités connexes'.

Faisant valoir qu'elle avait découvert que les lieux loués n'appartenaient pas aux bailleurs, qui n'étaient que preneurs des Hospices Civils de Lyon en vertu de baux emphytéotiques expirant avant le terme des baux commerciaux et que l'activité de débit de boissons était interdite par le règlement de copropriété, la société La Plage a assigné la Sci Julien, devenue la Sci Dam et la Sci La Rize, en nullité des baux, subsidiairement en résiliation de ceux-ci aux torts de ces deux sociétés, et en paiement de différentes indemnités.

Par jugement du 2 octobre 2012, le tribunal de grande instance de Lyon a débouté la société La Plage de ses demandes, constaté la résiliation des baux commerciaux, ordonné l'expulsion de la société La Plage, condamné celle-ci à payer à la Sci Dam la somme de 39 075, 34 € au titre des loyers dus au 30 septembre 2011, une indemnité d'occupation égale au montant du loyer à compter du 1er octobre 2011 jusqu'à la libération effective des lieux, et à la Sci La Rize la somme de 35 880 € au titre des loyers dus au 30 octobre 2012, et une indemnité d'occupation égale au montant du loyer à compter du 1er novembre 2012 jusqu'à la libération effective des lieux.

La société La Plage, appelante, conclut à la réformation du jugement et sollicite :

- la nullité, ou à tout le moins la résolution, des deux contrats de bail signés avec les sociétés La Rize et Dam,

- à titre subsidiaire, la résiliation de ces contrats aux torts de ces deux sociétés,

- leur condamnation solidaire à lui payer :

* la somme de 90 475,49 € au titre des frais engagés en vue de l'exploitation de son fonds de commerce, sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt,

* la somme de 29 925,25 € au titre de la restitution du dépôt de garantie, des frais d'acte, des loyers versés pour des locaux inexploitables, et non conformes à la destination des baux, ainsi que l'acompte sur la taxe foncière et les charges, sous la même astreinte.

* la somme de 245 832 € au titre du manque à gagner qu'elle a subi.

* la somme de 20 000 € à titre de dommages intérêts en réparation de son préjudice moral.

Elle fait valoir :

- que le terrain sur lequel est édifié le local commercial objet des baux n'appartient pas aux sociétés La Rize et 'Julien', ni au syndicat des copropriétaires,

- que le syndicat des copropriétaires dispose d'un bail emphytéotique consenti par les HCL qui expirera le 30 juin 2018, avant le terme des baux qu'elle a signés,

- que l'article L 145-3 du code de commerce rappelle que la durée des baux commerciaux consentis par le preneur d'un bail emphytéotique ne peut excéder la date d'expiration de ce bail,

- que les sociétés La Rize et Julien ne pouvaient lui consentir la mise à disposition de locaux pendant une durée de neuf ans et qu'elles ont manqué à leurs obligations nées du contrat de bail et ont violé les dispositions d'ordre public de l'article L 145-4 du code de commerce qui prévoit que la durée du bail ne peut être inférieur à neuf ans,

- que cette situation fait obstacle au droit au renouvellement des baux commerciaux,

- que les deux sociétés ont manqué à leur obligation d'assurer la jouissance du local commercial,

Elle soutient par ailleurs que ces deux sociétés ont chacune consenti un bail pour une activité interdite, puisque le règlement de copropriété et le bail emphytéotique consenti par les HCL prévoient que toute activité de débit de boissons est purement et simplement interdite, alors qu'elle souhaitait exploiter un fonds de commerce de restaurant bar licence IV, qu'elle a acquis à cette fin une licence IV au prix de 30 000 € et que les clauses de destination insérés dans les baux visent expressément cette activité. Elle considère en conséquence que les sociétés La Rize et Julien n'ont pas satisfait à leur obligation de délivrance.

Elle ne prévaut également d'un dol et affirme qu'elle n'aurait jamais conclu les baux et investi des sommes aussi importantes si elle avait eu connaissance de ces éléments. Elle souligne qu'initialement, elle avait recherché des locaux à acquérir et avait accepté de signer un bail dès lors que les propriétaires avaient évoqué leur projet de céder leur local à terme, raison pour laquelle elle avait exigé l'intervention d'une clause de cession préférentielle à son profit.

Elle fait valoir que les intimées ne justifient en rien de la conclusion d'un nouveau bail emphytéotique prorogeant la durée de location, ni de ce que ce nouveau bail autoriserait l'activité envisagée.

La SCI Dam conclut à la confirmation du jugement, sauf en ce qu'il a rejeté sa demande au titre de la remise en état des locaux. Elle sollicite, à ce titre, la condamnation de la société La Plage à lui payer la somme de 217 253,40 €, outre intérêts à compter de l'arrêt et capitalisation de ceux-ci, ainsi que la somme de 10 000 € à titre de dommages intérêts pour appel abusif.

Elle fait valoir que le bail emphytéotique expirant initialement le 30 avril 2018, la société La Plage ne justifie d'aucun droit né et actuel à agir en nullité du bail pour ce motif, et qu'en toute hypothèse, le bail consenti par les Hospices Civils de [Localité 1] sur ce terrain depuis plus de 40 ans a été renouvelé par anticipation pour une durée de 20 ans à compter du 1er janvier 2011, de sorte que l'allégation de la société La Plage tenant à une impossibilité d'exploiter les locaux postérieurement au 30 avril 2018 est sans objet, et aucune réticence dolosive ne peut être retenue à son encontre.

Elle soutient par ailleurs que les locaux sont exploités comme débits de boissons depuis des décennies, qu'à la suite d'un simple défaut de mise à jour du règlement de copropriété ancien est restée inscrite l'interdiction du commerce de débit de boissons mais que l'assemblée générale des copropriétaires a modifié la destination des parties privatives en autorisant l'exercice de toutes activités commerciales, sans aucune restriction. Elle considère que la société La Plage a toujours eu la possibilité d'exploiter dans les locaux loués un bar restaurant qui existait déjà, et qu'elle n'établit ni réticence dolosive ni comportement fautif de sa part, de nature à justifier la nullité ou la résiliation du bail à ses torts. Elle précise que la société La Plage n'a vraisemblablement pas obtenu le prêt bancaire nécessaire à l'aboutissement de son projet ou n'a pas entendu poursuivre celui-ci alors qu'elle a procédé de son propre chef à des démolitions dans les lieux qui ne nécessitaient pas de travaux spécifiques et a décidé d'y faire des investissements d'importance. Elle considère que les demandes de la société La Plage n'ont pour but que de tenter d'obtenir un désengagement à bon compte de ses obligations sur la base d'artifices juridiques.

Elle soutient que le défaut de paiement des loyers, le défaut d'exploitation des locaux et le défaut de justification de l'assurance de ceux-ci justifient sa demande reconventionnelle en résiliation du bail, et expulsion, et en paiement des loyers.

Elles expose que les locaux ont été complètement démolis alors qu'ils étaient totalement équipés et prêts à être exploités, que le preneur a porté atteinte aux parties communes en créant des ouvertures importantes notamment dans la toiture, que pendant deux ans, les locaux ont été abandonnés, et que la société La Plage se trouve à l'origine de ces dégradations dont le coût de remise en état représente la somme de 217 253, 40 € TTC suivant deux devis.

La Sci La Rize conclut à la confirmation du jugement et demande en outre la condamnation de la société La Plage à remettre les lieux en état d'origine, sous astreinte de 150 € par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt, et à lui payer la somme de 10 000 € à titre de dommages intérêts pour procédure abusive.

Elle rappelle que la société La Plage ne paie plus le loyer depuis le mois d'octobre 2010 et que le commandement qu'elle lui a fait délivrer est demeuré sans effet. Elle fait valoir que la société La Plage a, sans autorisation, procédé à la démolition intégrale de l'intérieur des locaux, en touchant également les parties communes, de sorte qu'elle est tenue de les remettre en état.

MOTIFS :

Attendu qu'à l'appui de sa demande en nullité ou en résolution des baux qu'elle a contractés avec les sociétés Dam et La Rize, la société La Plage soutient, d'une part, que le bail emphytéotique consenti par les Hospices Civils de Lyon au syndicat des copropriétaires expirera le 30 juin 2018 avant le terme des baux qu'elle a signés et que les sociétés Dam et La Rize ont violé les dispositions d'ordre public fixées par l'article L 145-4 du code de commerce et ont commis un dol à son égard, d'autre part, qu'elles lui ont consenti des baux pour une activité de débit de boissons interdite ;

Attendu cependant que les société Dam et La Rize justifient que le bail consenti par les Hospices civils de [Localité 1] sur le terrain depuis plus de 40 ans a été renouvelé par anticipation pour une durée de 20 ans à compter du 1er janvier 2011, de sorte que l'argumentation de la société La Plage relative à l'impossibilité d'exploiter postérieurement au 30 avril 2018 et d'obtenir le renouvellement de son bail est inopérante ; qu'elle ne justifie à cet égard ni de manoeuvres dolosives commises par les sociétés bailleresses ni d'un manquement de leur part à leur obligation d'assurer la jouissance du local commercial ;

Attendu que la société Dam souligne à juste titre que les locaux sont exploités comme débit de boissons depuis des décennies, et que c'est par suite d'un défaut de mise à jour du règlement de copropriété ancien qu'est restée inscrite l'interdiction d'exercer un commerce de débit de boissons ; qu'il résulte d'un procès verbal du 17 décembre 2010 que l'assemblée générale des copropriétaires, qui a accepté le renouvellement du bail emphytéotique, a décidé de modifier la destination des parties privatives des locaux et a autorisé l'exercice de toutes activités commerciales sans aucune restriction ; que le syndic de copropriété atteste qu'aucun recours n'a été formé à l'encontre de cette résolution ; qu'il en découle que la société La Plage n'est pas privée de la possibilité d'exercer son activité de débit de boissons avec licence IV, qui était déjà exercée dans les lieux précédemment ; qu'elle n'est pas fondée à se prévaloir à ce titre d'un dol des bailleresses ou d'un manquement de leur part à leur obligation de délivrance ; qu'elle doit dès lors être déboutée de ses demandes en nullité, résolution ou résiliation des baux et en paiement des indemnités qu'elle réclame au titre des frais qu'elle a supportés, des travaux qu'elle a engagés, d'un manque à gagner et d'un préjudice moral ;

Attendu qu'à la suite du défaut de paiement des loyers par la société La Plage, les commandements de payer visant la clause résolutoire qui lui ont été adressés sont demeurés sans effet ; que c'est, à juste titre, que le premier juge a constaté la résiliation des baux, ordonné l'expulsion de la société La plage, et prononcé sa condamnation au paiement des loyers impayés et d'une indemnité d'occupation égale au montant du loyer jusqu'à la libération effective des locaux ; que la société Dam ayant actualisé sa créance à la date de reprise des lieux le 19 décembre 2012, il doit être fait droit à la sa demande en paiement d'une somme de 100 130,54 € ;

Attendu qu'il résulte d'un procès verbal de constat du 6 octobre 2010 que la société La Plage a procédé à d'importants travaux de démolition alors que les locaux étaient équipés et prêts à être exploités, ainsi que l'atteste l'agence Thomas Broquet, ; qu'elle a ensuite laissé les locaux à l'abandon ; que c'est à bon droit que les intimées sollicitent sa condamnation au titre de la remise en état des lieux ; que la société Dam justifie par deux devis non discutés et non contredits que le coût de la remise en état s'élève à 217 253, 40 € ; que la société La Plage doit être condamnée à remettre les locaux de la Sci La Rize en leur état d'origine, dans le délai de quatre mois à compter de la signification de l'arrêt, sans astreinte de 150 € par jour de retard ;

Attendu qu'il n'est pas établi que la société La Plage a commis un abus dans le déroulement de la procédure et en interjetant appel ;

Attendu qu'elle doit supporter les dépens et des indemnités en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a débouté la Sci Dam et la Sci La Rize de leurs demandes relatives à la remise en état des lieux.

Réformant de ce seul chef, émendant sur le montant de la condamnation prononcée au profit de la Sci Dam et ajoutant,

Condamne la société La Plage à payer à la Sci Dam la somme de 100 130, 54 €, outre intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, au titre des loyers, charges et indemnités d'occupation dus au 19 décembre 2012.

Condamne la société La Plage à payer à la Sci Dam la somme de 217 253, 40 € TTC au titre de la remise en état des locaux, outre intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

Ordonne la capitalisation des intérêts sur les sommes dues à la Sci Dam,

Condamne la société La Plage à remettre en état d'origine les locaux de la Sci La Rize, dans le délai de quatre mois à compter de la signification de l'arrêt, sous astreinte de 150 € par jour de retard,

Déboute la Sci Dam et la Sci La Rize de leurs demandes de dommages intérêts pour procédure abusive,

Condamne la société La Plage à payer, en application de l'article 700 du code de procédure civile à la Sci Dam et à la Sci La Rize, à chacune, la somme supplémentaire de 2 000 €,

Rejette la demande de la société La Plage présentée sur ce fondement,

Condamne la société La Plage aux dépens, avec droit de recouvrement direct par Maître Tisserand, avocat.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile b
Numéro d'arrêt : 12/08222
Date de la décision : 16/04/2013

Références :

Cour d'appel de Lyon 1B, arrêt n°12/08222 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-04-16;12.08222 ?
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