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19/02/2013 | FRANCE | N°11/08342

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile b, 19 février 2013, 11/08342


R.G : 11/08342









Décision du

Tribunal de Grande Instance de VILLEFRANCHE SUR SAONE

Au fond

du 21 avril 2011



RG : 10/00084

ch n°





[L]

[H]



C/



[P]





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile B



ARRET DU 19 Février 2013







APPELANTS :



M. [D] [L]

né le [Date naissance 4] 1948 à [

Localité 11]

[Adresse 2]

[Localité 6]



représenté par la SCP AGUIRAUD NOUVELLET, avocats au barreau de LYON, assisté de Me Michel BEL, avocat au barreau de LYON





Mme [S] [H] épouse [L]

née le [Date naissance 1] 1949 à [Localité 10] (34)

[Adresse 2]

[Localité 6]



re...

R.G : 11/08342

Décision du

Tribunal de Grande Instance de VILLEFRANCHE SUR SAONE

Au fond

du 21 avril 2011

RG : 10/00084

ch n°

[L]

[H]

C/

[P]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRET DU 19 Février 2013

APPELANTS :

M. [D] [L]

né le [Date naissance 4] 1948 à [Localité 11]

[Adresse 2]

[Localité 6]

représenté par la SCP AGUIRAUD NOUVELLET, avocats au barreau de LYON, assisté de Me Michel BEL, avocat au barreau de LYON

Mme [S] [H] épouse [L]

née le [Date naissance 1] 1949 à [Localité 10] (34)

[Adresse 2]

[Localité 6]

représentée par la SCP AGUIRAUD NOUVELLET, avocats au barreau de LYON, assistée de Me Michel BEL, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

Mme [M] [P]

[Adresse 3]

[Localité 5]

représentée par la SCP J.TACHET, avocats au barreau de LYON

******

Date de clôture de l'instruction : 16 Octobre 2012

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 14 Janvier 2013

Date de mise à disposition : 19 Février 2013

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Jean-Jacques BAIZET, président

- Marie-Pierre GUIGUE, conseiller

- Michel FICAGNA, conseiller

assistés pendant les débats de Frédérique JANKOV, greffier

A l'audience, Marie-Pierre GUIGUE a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Jean-Jacques BAIZET, président, et par Frédérique JANKOV, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

EXPOSÉ DU LITIGE

A compter des années 1982 et 1983, Monsieur [D] [L] et son épouse née [S] [H] ont travaillé pour Madame [R] qui exerçait sous l'enseigne MB COMPOSITION EDITION.

Ils ont été licenciés au cours de l'année 1985 et ont introduit une action devant le conseil des prud'hommes, ayant pour avocat Maitre [I].

Par jugement du 13 juillet 1989, le Conseil des prud'hommes a déclaré leur licenciement sans cause réelle et sérieuse et a condamné Madame [R] à leur payer diverses sommes à titre indemnitaire.

Madame [R] a fait appel de cette décision, Maître [P] intervenant également dans le cadre de la procédure d'appel.

Le 17 avril 1991, Madame [R] a été déclarée en liquidation judiciaire.

Le 5 juin 1991, la cour d'appel de Lyon a rendu un arrêt de radiation pour défaut de diligences des parties.

A compter du 5 Juin 1993, la décision de première instance est devenue définitive par l'effet de la péremption d'instance.

Au cours de l'année 2004, les époux [L] ont appris de leur régime de retraite que leur période de travail au service de Madame [R] n'avait pas été déclarée.

Ils ont saisi le Conseil des prud'hommes de Lyon, lequel, par jugement du 23 Mai 2008, a déclaré opposable aux AGS la décision du 13 juillet 1989 ce qui devait permettre de percevoir les indemnités allouées par le jugement de 1989 et dit que les cotisations retraite seraient également garanties par l'organisme.

La cour d'appel de Lyon a réformé, par arrêt du 15 Mai 2009, ce jugement , déclarant:

-que les jugements du 13 Juillet 1989 ne pouvaient être déclarés opposables aux AGS-CGEA à défaut de communication des pièces que les salariés avaient produites devant le Conseil des prud'hommes à l'occasion de la première instance,

-que la condamnation des AGS à garantir les cotisations de retraite était en revanche confirmée.

C'est dans ces circonstances que, par exploit du 8 Janvier 2010, Monsieur [D] [L] et son épouse née [S] [H], ont assigné Maitre [P] devant le tribunal de grande instance de Villefranche sur saone en responsabilité professionnelle.

Par jugement du 21 avril 2011, le tribunal a déclaré recevable comme non prescrite l'action des époux [L] et a condamné Maître [P] à leur payer les sommes de 8000 euros à Monsieur [L] et de 2100 euros à Madame [L] en réparation de leurs préjudices ainsi que la somme de 3000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Les époux [L] ont relevé appel aux fins de réformation du jugement sur le montant des condamnations.

Ils demandent à la cour de condamner Maître [P] à verser à Madame [L] la somme de 2971,64 euros, et à Monsieur [L] la somme de 8835, 95 euros correspondant aux sommes allouées par le jugement prud'homal avec les intérêts légaux arrêtés au 17 avril 1991, outre les intérêts sur ces sommes au taux légal compose selon l'article 1154 du code civil depuis le 13 juillet 1989 jusqu'au jour du règlement, la somme de 6000 euros à titre de dommages et intérêts et celle de 7000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Ils font valoir que Maître [I] a commis des fautes:

-en ne poursuivant pas l'exécution provisoire du jugement prud'homal afin d'obtenir le règlement des condamnations prononcées deux ans avant la liquidation judiciaire de l'employeur, alors qu'elle était tenue de poursuivre son mandat jusqu'à l'exécution du jugement conformément à l'article 420 du code de procédure civile, n'a pas informé son client qu'elle cessait son intervention ni alors prétendu qu'elle ne disposait pas de la copie exécutoire qu'elle aurait dû leur réclamer dans l'hypothèse où elle n'en aurait pas dispose,

-en ne mettant pas en cause l'AGS en suite de la liquidation judiciaire de l'employeur au mois de mars 1991 et en ne faisant pas rétablir la procédure devant la cour en suite de la radiation intervenue le 25 juin 1991 afin que la procédure d'appel soit opposable à cet organisme,

-en ne leur ayant pas restitué le dossier malgré la demande de leur nouveau conseil le 2 avril 2004 contrairement aux dispositions de l'article 157 du décret du 27 novembre 1991 lui en faisant obligation lorsqu'il en est déchargé, ce qui a induit directement l'échec en appel de la procédure engagée contre l'AGS liée selon les motifs de l'arrêt au défaut de production des dires pièces, alors que la décision de première instance leur était favorable, la prescription de l'article 2276 du code civil ne leur étant pas opposable puisque l'avocat ne les a jamais informé de la cessation de ses fonctions.

Ils ajoutent que le préjudice est né du fait de l'inexécution du jugement du 13 juillet 1989 et non après l'arrêt du 15 mai 2009 comme le soutient à tort l'adversaire.

Ils ne sollicitent les intérêts qu'à compter du 17 avril 1992 pour tenir compte du délai suffisant à Maître [P] pour appeler en cause l'AGS après la liquidation judiciaire et obtenir le règlement des sommes dues.

Ils estiment que l'avocat ne peut leur reprocher leur inaction alors qu'ils lui ont fait confiance et devait les conseiller sur la procédure à suivre à l'encontre de l'AGS.

Ils précisent que l'indemnité de 6000 euros correspond à l'ensemble des frais d'avocats engagés pour obtenir la garantie des cotisations de retraite par l'AGS dont le fait générateur est l'absence de restitution des fiches de paie par l'avocat.

Maître [P] ne reprend pas devant la cour la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action.

Formant appel incident, Maître [P] conclut au rejet des demandes.

Subsidiairement, elle demande à la cour de réduire la demande d'indemnisation et en toute hypothèse, de condamner les appelants au paiement de la somme de 1800 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Maître [P] réplique :

-que devant la juridiction prud'homale, elle n'était tenue que d'une mission d'assistance et non de représentation ayant pris fin par le jugement, qu'elle n'avait donc pas mission d'exécuter le jugement d'autant qu'en cette matière, seuls les clients ont été destinataires de la copie exécutoire et auraient dû la lui remettre s'ils entendaient lui donner mandat distinct d'exécuter le jugement, que le nouveau mandat confié en appel n'incluait pas l'exécution même au provisoire du jugement intervenu,

-que pour la période du 13 juillet 1989 au 17 avril 1991, rien ne permet de tenir pour acquis que les condamnations auraient pu être recouvrées en totalité contre Madame [R], la cour ne disposant pas d'éléments pour apprécier sa solvabilité avant sa liquidation judiciaire,

-que le grief concernant l'absence de mise en cause de l'AGS devant la cour d'appel repose exclusivement sur l'affirmation non démontrée qu'ils se seraient dessaisis de leurs pièces en original,

-que l'inaction reprochée à l'avocat ne présente pas de lien de causalité direct et certain avec la situation résultant de l'arrêt du 15 mai 2009 mais résulte du fait que les époux [L] n'ont pas produit les pièces relatives aux procédures de licenciement,

-que Monsieur et Madame [L] n'ont pas usé de la procédure prévue en matière de contestation concernant la restitution du dossier et sont irrecevables à y prétendre en application de l'article 2276 du code civil, le fait que l'avocat ait pu disposer de pièces lors de la procédure prud'homale ne permet pas de présumer qu'il se soit agi d'exemplaires originaux alors que la restitution des dites pièces n'a jamais été demandée, la lettre du nouvel avocat du 2 avril 2004 ne réclamant que des bulletins de salaires,

-que le préjudice ne serait en toute hypothèse qu'une perte de chance de recouvrer les condamnations par le biais de l'AGS sachant que les intérêts ne couraient plus à compter de la liquidation judiciaire de sorte que la demande de condamnation intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision jusqu'au règlement est mal fondée et que les époux [L] ne peuvent réclamer qu'une partie de ce principal,

-que la capitalisation ne peut prendre effet qu'à compter de la demande en appel, que les intérêts ne peuvent être réclamés antérieurement à la décision de 2009 puisque c'est à cette date qu'auraient été constatées les conséquences du défaut de restitution des pièces, que l'évaluation du préjudice devra tenir compte de l'attitude inexpliquée des époux [L] qui sont demeurés quinze ans sans se soucier du sort des condamnations allouées et ont contribué à la réalisation du préjudice dont ils demandent réparation par le biais du point de départ des intérêts et de la capitalisation laquelle peut être refusée en cas de faute du créancier résultant de leur inaction.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L'article 411 du Code de procédure civile relatif à la représentation en justice énonce que seul le représentant de la partie peut accomplir au nom du mandant les actes de la procédure.

Il résulte de l'article 412 du Code de procédure civile que la mission d'assistance quant à elle consiste à conseiller la partie et à présenter sa défense, ce qui implique que cette mission prend fin avec la décision de justice.

La procédure prud'homale est une procédure pour laquelle l'avocat n'est pas obligatoire. Par ailleurs, le jugement est notifié directement aux parties. Ainsi, il en ressort que, lorsqu'un avocat intervient dans le cadre d'un telle procédure, celui-ci a un rôle d'assistance des parties et non de représentation.

Maître [P] est intervenue auprès des époux [L] devant le Conseil de prud'hommes avec pour mission de les assister au sens de l'article 412 du Code de procédure civile. Ainsi, son mandat d'assistance a pris fin avec la décision du Conseil dont elle n'avait pas à poursuivre l'exécution à défaut de mandat spécifique confié par les époux [L] dans ce but.

Par ailleurs, la procédure d'appel est une procédure distincte, de sorte que le mandat d'exécuter le jugement de première instance ne peut exister par le seul fait que les époux [L] ont fait appel à Maître [P] pour les assister en cause d'appel.

Au surplus, les époux [L] ont seuls été destinataires du jugement revêtu de la formule exécutoire permettant son exécution, et ne rapportent pas la preuve que Maître [P] ait été en possession de l'exemplaire original et qu'elle ne leur aurait pas remis.

En outre et en tout état de cause, il n'est pas démontré que l'employeur des époux [L], en liquidation judiciaire par la suite, aurait effectivement payé les sommes dues en cas d'exécution du jugement par Maître [P], de sorte que le préjudice invoqué n'est, par ailleurs, pas certain.

Dans ces conditions, Maître [P] n'a pas commis de faute en ne poursuivant pas l'exécution du jugement du Conseil de prud'hommes en date du 13 juillet 1989.

La Cour d'appel de LYON, dans son arrêt du 15 mai 2009 rejette la demande des époux [L] aux fins d'opposabilité à l'AGS et au CGEA du jugement du Conseil de prud'hommes du 13 juillet 1989, au motif du défaut de communication des pièces produites devant le Conseil et qui ont permis la reconnaissance des créances dont les époux [L] demandent la garantie.

Il ressort de cet arrêt que seule l'absence de production de ces pièces est à l'origine de la décision de la Cour d'appel.

Or, les époux [L] ne démontrent pas qu'ils se sont dessaisis des originaux de ces pièces au profit de Maître [P], qu'ils n'en ont gardé aucune copie, qu'ils en ont demandé restitution et que Maître [P] ne les leur a jamais rendu.

Dès lors, les époux [L] ne rapportent pas la preuve que Maître [P] est à l'origine du préjudice causé par le défaut de production des pièces nécessaires à la reconnaissance de leurs créances et ne démontrent donc pas le lien de causalité direct et certain entre le comportement de Maître [P] et leur préjudice.

Par ailleurs, le défaut d'appel de l'AGS à la procédure n'est pas à l'origine du rejet de la Cour d'appel, de sorte qu'aucun lien de causalité direct et certain n'existe non plus entre le préjudice des époux [L] résultant de la décision de la Cour d'appel et l'inaction de Maître [P] à cet égard.

Aucune faute ne peut être retenue à l'égard de Maître [P]. Monsieur et Madame [L] seront déboutés de l'intégralité de leurs demandes.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Infirme le jugement entrepris,

Statuant à nouveau :

Déboute les époux [L] de leurs demandes,

Condamne les époux [L] à payer à Maître [P] la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Condamne les époux [L] aux dépens, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Le greffierLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile b
Numéro d'arrêt : 11/08342
Date de la décision : 19/02/2013

Références :

Cour d'appel de Lyon 1B, arrêt n°11/08342 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-02-19;11.08342 ?
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