La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/01/2013 | FRANCE | N°11/07675

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile b, 15 janvier 2013, 11/07675


R.G : 11/07675









Décision du

Tribunal de Grande Instance de SAINT-ETIENNE

Au fond

du 02 novembre 2011



RG : 06/03855

ch n°





[Y]



C/



Société CRCAM PROVENCE COTE D'AZUR

CAISSE DE CREDIT AGRICOLE LOIRE HAUTE LOIRE





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile B



ARRET DU 15 Janvier 2013







APPELANT :




M. [J] [Y]

né le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 13]

[Adresse 4]

[Localité 2]



représenté par Me Nathalie ROSE, avocat au barreau de LYON

assisté de Me Dominique CHAMBON, avocat au barreau d'ARDECHE,







INTIMEES :



CAISSE REGIONALE DE CREDIT A...

R.G : 11/07675

Décision du

Tribunal de Grande Instance de SAINT-ETIENNE

Au fond

du 02 novembre 2011

RG : 06/03855

ch n°

[Y]

C/

Société CRCAM PROVENCE COTE D'AZUR

CAISSE DE CREDIT AGRICOLE LOIRE HAUTE LOIRE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRET DU 15 Janvier 2013

APPELANT :

M. [J] [Y]

né le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 13]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représenté par Me Nathalie ROSE, avocat au barreau de LYON

assisté de Me Dominique CHAMBON, avocat au barreau d'ARDECHE,

INTIMEES :

CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL

PROVENCE COTE D'AZUR

[Adresse 10]

[Localité 5]

représentée par la SCP LAFFLY - WICKY, avocats au barreau de LYON,

assistée de Me Philippe BARBIER, avocat au barreau de TOULON

CAISSE DE CREDIT AGRICOLE LOIRE HAUTE LOIRE

[Adresse 6]

[Localité 3]

représentée par la SCP LAFFLY - WICKY, avocats au barreau de LYON,

assistée de Me Thomas NASRI, avocat au barreau de LYON

******

Date de clôture de l'instruction : 06 Juin 2012

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 27 Novembre 2012

Date de mise à disposition : 15 Janvier 2013

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Jean-Jacques BAIZET, président

- Marie-Pierre GUIGUE, conseiller

- Michel FICAGNA, conseiller

assistés pendant les débats de Frédérique JANKOV, greffier

A l'audience, Michel FICAGNA a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Jean-Jacques BAIZET, président, et par Frédérique JANKOV, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

Suivant bon de commande du 16 juin 1990, M. [J] [Y] a commandé à la société FRANCE MARINE OFFSHORE ( société FMO )située dans le Var, la construction d'un bateau de type Force 70 moyennant le prix de 5.930.000 F livrable fin juin 1991.

Il a acquis de cette même société dans l'attente de la livraison de ce bateau, un bateau de type Force 10 .

Le bon de commande prévoyait la reprise à terme par la société FMO du force 10 ainsi que d'autres bateaux appartenant à M. [Y].

En garantie de ses obligations, M. [Y] a remis à l'établissement bancaire de la société FMO, la société Crédit Agricole du Var, une caution de son établissement bancaire, la société Crédit Agricole Loire Haute Loire.

En garantie de ses engagements de reprises, la société FMO a accepté quatre lettres de change aux montants respectifs de 300.000 F, 595.200 F, 1.300.000 F, 3.200.000 F, avalisées par son établissement bancaire, la société Crédit Agricole du Var, aux droits de laquelle vient la société Crédit Agricole Provence Côte d'Azur.

La société FMO n'ayant pas été en capacité de livrer le bateau force 70 les effets de commerce ont été remis à l'escompte par M. [Y] à la société Lyonnaise de Banque.

Ces effets étant revenus impayés à leur échéance, la société Lyonnaise de Banque a procédé à la contrepassation des effets dans les comptes de M. [Y].

M. [Y] a fait assigner la société Crédit Agricole Provence Côte d'Azur en sa qualité d'avaliste et de caution des engagements de la société FMO .

La société Crédit Agricole Provence Côte d'Azur a contesté avoir donné son aval au profit de M. [Y] et avoir cautionné les engagements de la société FMO à son égard.

Par jugement du 27 septembre 1994 le tribunal de commerce de Draguignan a condamné la société Crédit Agricole Provence Côte d'Azur à payer à M. [Y] la somme de 5.395.000 F outre intérêts.

Par arrêt infirmatif du 24 avril 1996, la cour d'appel d' Aix en Provence a rejeté la demande de M. [Y].

Par arrêt du 20 juin 2000, la cour de cassation a cassé l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence et a renvoyé la cause devant la cour d'appel de Chambéry, laquelle par arrêt du 7'février 2003 a confirmé le jugement du tribunal de commerce de Draguignan.

La société Crédit Agricole Provence Côte d'Azur formait un pourvoi à l'encontre de cet arrêt.

En exécution de l'arrêt de la cour d'appel de Chambéry, la société Crédit Agricole Provence Côte d'Azur a été amenée à régler la somme totale de 1.376.903,20'€, à savoir : la somme de 280.753,07'€ et la somme de 450.556,34'€ entre les mains de M. [Y] et la somme de 645.593,74'€ entre les mains de la société Crédit Agricole Loire Haute Loire, en vertu d'une saisie attribution effectuée par celle-ci.

Par arrêt du 5 avril 2005, la Cour de Cassation a cassé l'arrêt de la cour d'appel de Chambéry et a renvoyé la cause devant la cour d'appel de Grenoble.

Par arrêt du 22 janvier 2009, la cour d'appel de Grenoble a débouté M. [Y] de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la société Crédit Agricole Provence Côte d'Azur.

Par courrier recommandé avec accusé de réception, la société Crédit Agricole Provence Côte d'Azur a mis M. [Y] en demeure de lui restituer la somme de 1.376.903,20'€ qu'il avait reçue.

Ce dernier n'a pas déféré.

Parallèlement, par jugement du 29 mars 1993, le tribunal de commerce de Romans a annulé la compensation des effets opérée par la société Lyonnaise de Banque sur le compte de M. [Y] pour un montant de 5.727.635,55 F.

L'arrêt confirmatif de la cour d'appel de Grenoble du 21 décembre 1994 a été cassé par un arrêt de la Cour de Cassation du 8 juillet 1997, avec renvoi devant la cour d'appel de Chambéry laquelle, par arrêt du 7 décembre 2001, a condamné M. [Y] à payer à la société Lyonnaise de Banque la somme de 546 641,48 F soit 83 334,96'€, outre intérêts légaux à compter du 1 er décembre 1992.

Le 14 mai 2001, un protocole transactionnel notarié a été signé entre les époux [Y] et certaines de leurs sociétés d'une part, et la société Crédit Agricole Loire Haute Loire d'autre part, afin de fixer les modalités d'apurement de leurs dettes à son égard.

Par acte du 30 novembre 2006, la société Crédit Agricole Provence Côte d'Azur a assigné M. [Y] devant le tribunal de grande instance de Saint-Étienne en «'liquidation'» des sommes dues par M. [Y].

Par acte du 13 novembre 2007, M. [Y] invoquant un manquement de la société Crédit Agricole Loire Haute Loire dans l'exécution de son mandat et d'un manquement à son obligation de conseil et d'assistance, l'a appelé aux fins de garantie et aux fins d'indemnisation de ses préjudices.

Par jugement du 2 novembre 2011, le tribunal de grande instance de Saint-Étienne a statué comme suit :

- Déclare de nul effet l'assignation délivrée le 13 novembre 2007 à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Loire Haute Loire, à la requête de M. [J] [Y].

- Rejette le moyen d'irrecevabilité des conclusions de M. [Y], soulevé par la Caisse Régionale de Crédit Agricole Loire Haute Loire.

- Liquide à la somme de 1 376 903,20'€, outre intérêts courus au taux légal depuis la mise en demeure du 30 octobre 2006, la restitution due par M. [J] [Y] à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Provence Côte d'Azur en exécution de l'arrêt rendu par la Cour de cassation le 5 avril 2005, cassant l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Chambéry du 7 février 2003,

- Dit que les intérêts seront capitalisés dans les conditions de l'article 1154 du Code civil,

- Déclare irrecevables, en raison de l'autorité de la chose jugée, l'ensemble des demandes présentées par M. [J] [Y] à l'encontre de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Loire Haute Loire.

- Déboute la Caisse Régionale de Crédit Agricole Loire Haute Loire de sa demande aux fins de communication d'adresse sous astreinte et de celle en paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive, téméraire et vexatoire,

- Donne acte à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Loire Haute Loire de ce qu'elle accepte de restituer à la Caisse Régionale DE Crédit Agricole Provence Côte d'Azur la somme par elle perçue dans le cadre de la saisie attribution, soit la somme de 644 693,75'€,

- Condamne M. [Y] à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Provence Côte d'Azur et à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Loire Haute Loire la somme de 2 500'€, à chacune, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

- Déboute M. [Y] de sa demande présentée sur ce même fondement

- Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement.

- Condamne M. [Y] aux dépens.

Le tribunal a jugé :

- que la société Crédit Agricole Loire Haute Loire ne justifiait pas de l'inexactitude de l'adresse de M. [Y],

- que sur l'action en responsabilité la cour de Lyon dans son arrêt du 13 janvier 2005 a considéré que la transaction prévoyait les modalités d'apurement des dettes des époux [Y], et des sociétés qu'il dirigeait,

- que M. [Y] prétend de façon inopérante que le protocole ne contient aucun désistement d'instance et d'action dans la mesure ou précisément toutes actions sont exclues,

- qu'il est ainsi établi que la transaction a réglé les différends opposant M.[Y] à la société Crédit Agricole Loire Haute Loire en y incluant expréssement les procédures en cours concernant la société Crédit Agricole Provence Côte d'Azur et la Société Lyonnaise de Banque,

- qu'au visa de l'article 2052 du code civil , l'action en responsabilité de M. [Y] se heurte à l'autorité de la chose jugée attachée au protocole transactionnel notarié en date du 14 mai 2001.

Par acte du 15 novembre 2011, M. [Y] a relevé appel de ce jugement .

M. [Y] demande à la cour :

-de réformer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

-de dire et juger que le Crédit Agricole Loire Haute Loire a commis une faute dans l'exécution de son mandat en tant que banquier professionnel et a manqué à son obligation de conseil et d'assistance,

-de condamner le Crédit Agricole Loire Haute Loire à le relever et garantir des sommes dues au Crédit Agricole du Var,

-de condamner le Crédit Agricole Loire Haute Loire, sur le fondement des articles 1134 et des articles 1991 et suivants du Code Civil aux sommes suivantes :

* 312.520,49'€ (ou 2.050.000 F) versée à la Société FMO en 1990 avec intérêts de droit depuis le 30.09.1990,

* 180.000,00'€ avec intérêt de droit à compter du 30.09.1991, somme découlant de l'arrêt du 23.03.2004. de la Cour d'Appel d'Aix en Provence,

* 163.330,72 '€ (ou 1.071.379,23 F) découlant de l'arrêt de la Cour d'Appel de Grenoble l'ayant condamné à payer à la société Lyonnaise de Banque,

* 487.836,86'€ (ou 3.200.000 F) correspondant au prix d'achat du bateau Force 10, avec intérêts de droit au 30.09.1990, date de paiement du prix de ce bateau par la Société UNIMAT sur un contrat de location vente, somme découlant de l'arrêt du 23.03.2004. de la Cour d'Appel d'AIX en Provence,

* 121.959,21 € (ou 800.000 F) correspondant au coût des différentes procédures subies par M. [Y] découlant de la faute du Crédit Agricole Loire Haute Loire, somme qui doit être revalorisée avec intérêts au taux légal jusqu'à la décision à intervenir,

* 800.000 € correspondant au préjudice financier découlant de la liquidation du patrimoine de M. [Y] découlant de la faute du Crédit Agricole Loire Haute Loire,

* 500.000'€ au titre du préjudice moral,

-de condamner le Crédit Agricole Loire Haute Loire d'avoir à lui régler une somme de 200.000 '€ à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et une somme de 15.000'€ en vertu de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [Y] soutient :

- que son adresse est bien celle déclarée,

- qu'il avait mandaté son établissement bancaire, le Crédit Agricole Loire Haute Loire, afin d'effectuer un montage financier concernant l'acquisition des deux bateaux FORCE 10 et FORCE 70, commandés à la société FMO,

- que ces acquisitions devant se faire avec engagement de la société FMO de reprendre à la livraison du force 70, le force 10 et un autre bateau (Versil Kraft 40) moyennant les sommes de 3 200 000 francs et 1300 000 francs, le Crédit Agricole Loire Haute Loire a imaginé, en concertation avec le Crédit Agricole du Var, de faire émettre par la Société FMO une chaîne de traites avalisées par le Crédit Agricole du Var pour le garantir de la bonne exécution de l'engagement de reprise desdits bateaux à échéance des traites,

- que le Crédit Agricole Loire Haute Loire a oublié de faire mentionner sur la chaîne de traites pour le compte de qui le "bon pour aval" était donné,

- qu'aux termes de l'article 130, alinéa 6 du code de commerce ancien une présomption irréfragable concernant le droit cambiaire établit que lorsque le bon pour aval n'est pas stipulé pour le compte de qui il est donné, il est censé être donné pour le tireur, en l'occurrence lui-même, ce qui était le comble de l'absurde,

- qu'il a rencontré de graves difficultés dans le cadre de son exercice professionnel et a dû affronter la mise en redressement judiciaire du groupe textile qu'il exploitait à [Localité 7],

- que c'est dans ce contexte, très précis, que le protocole transactionnel en date du 14.05.2001 est intervenu,

- que ce protocole est un protocole qui visait à apurer les comptes entre les parties mais n'a nullement emporté aucun désistement d'instance et d'action concernant la mise en jeu de la responsabilité du banquier, à savoir le Crédit Agricole Loire Haute Loire sur une faute qui lui est reprochée dans la présente procédure concernant le mandat qui lui avait été confié,

- que les obligations du Crédit Agricole Loire Haute Loire, dans le cadre d'un mandat impératif qui lui avait été donné, consistaient à sécuriser l'opération qui lui avait été confiée pour garantir la solvabilité de la Société FMO,

- que le Crédit Agricole Loire Haute Loire a également manqué à son obligation de conseil et d'assistance, puisqu' aux termes de l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble, ainsi que du dernier arrêt de la Cour de Cassation, ce banquier n'aurait procédé, purement et simplement, qu'à un échange de garantie pour se protéger lui-même en cas de défaillance de la Société FMO,

- que ces manquements ont provoqué sa ruine patrimoniale totale et complète,

- que son préjudice est caractérisé,

- qu'il apparaîtra équitable de condamner aux mêmes sommes le Crédit Agricole du Var à titre solidaire,

- qu'en ce qui concerne la demande d'anatocisme du Crédit Agricole du Var sur l'article 1154 du code civil, elle ne peut être prononcée car elle aboutirait à modifier des décisions définitives.

La société Crédit Agricole Loire Haute Loire demande à la cour :

* confirmant le jugement rendu par le Tribunal de grande instance de Saint-Etienne le 2 novembre 2011 :

-de constater qu'elle accepte de restituer à la Caisse Régionale De Crédit Agricole Provence Côte d'Azur la somme de 644 693,75'€ qu'elle a perçue dans le cadre de la saisie attribution ,

-de dire et juger irrecevables les demandes de M. [Y] ,

* à titre infiniment subsidiaire :

-de débouter M. [Y] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

* statuant à nouveau et y ajoutant :

-de condamner M. [Y] à communiquer son adresse actuelle, sous astreinte de 5.000'€ par jour de retard à compter de la décision à intervenir,

-de condamner M. [Y] à lui verser la somme de 100.000 € à titre de dommages et intérêts en raison du caractère abusif et vexatoire de la procédure intentée à son encontre ,

-de condamner M. [Y] à lui verser la somme de 15 000'€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle soutient :

* sur l'adresse de M. [Y]

- que M. [Y] mentionne dans ses conclusions qu'il réside chez M. [L] [Y], alors qu'il est certain qu'il réside actuellement au Maroc où il exploite un complexe hôtelier,

-que résidant permanent au Maroc, M. [Y] était tenu de faire élection de domicile au cabinet de son Conseil, ce qu'il n'a pas fait,

-qu'il dissimule sa véritable adresse afin d'échapper aux conséquences des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre,

- que les conclusions de M. [Y] sont donc irrecevables,

* sur l'action en responsabilité intentée par M. [Y] :

- que l'action en responsabilité intentée par M. [Y] est irrecevable en raison de l'autorité de chose jugée attachée au protocole transactionnel qui interdit toute contestation par les parties,

- qu'en application de l'article 5 du protocole transactionnel, seuls les gains éventuels réglés par la société Lyonnaise de Banque ou par la Caisse Régionale de Crédit Agricole Côte d'Azur à la suite des arrêts de la Cour d'appel de Chambéry avaient vocation à être partagés entre les époux [Y] et la concluante et non les condamnations qui pourraient être mises à la charge de M. [Y],

- que cette interprétation a été retenu par le juge de l'exécution de Saint Etienne, dans un jugement du 16 juin 2003, confirmé par la cour d'appel de Lyon qui a jugé qu'en aucun cas il ne pouvait être déduit des termes du protocole que les condamnations mises à la charge de M. [J] [Y] devaient être également partagées et supportées par moitié par le Crédit Agricole Loire Haute Loire,

- que son engagement au titre des frais ne peut dépasser la somme de 38.112,25 € ainsi que la cour d'appel de Lyon l'a reconnu dans le même arrêt,

* sur le mandat

- que M. [Y] est mal fondé à soutenir avoir par une lettre recommandée du 7 août 1990, confié à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Loire Haute Loire un mandat impératif de « protéger ses intérêts en cas de défaillance de la société FMO et lui obtenir une garantie pour la reprise des bateaux F10 et VERSIL KRAFT 40 à la livraison de FORCE 70 » , alors qu'il ne justifie pas d'une acceptation du mandataire,

* sur les fautes qui lui sont reprochées par M. [Y]

- que sa mission consistait uniquement à fournir à M. [Y] une caution bancaire pour garantir l'acquisition du bateau Force 70, et que son obligation de conseil et d'assistance s'appliquait à cette seule prestation,

-que si M. [Y] estimait que la concluante avait commis une faute ainsi qu'il le prétend, il lui appartenait de l'évoquer dans le cadre des négociations qui ont précédé la signature du protocole transactionnel et d'en faire mention dans ledit protocole ce qui n'a pas été le cas,

* sur les sommes réclamées par M. [Y]

- que M. [Y] ne fournit aucun élément permettant de justifier les montants qu'il avance,

* sur le caractère abusif et vexatoire de la procédure intentée par M.[Y]

- qu'en dépit du protocole transactionnel signé le 14 mai 2001 dont les termes sont dépourvus de toute équivoque, M. [Y] n'a pas craint de l'assigner en sollicitant le paiement de sommes faramineuses, au terme d'un raisonnement précédemment rejeté par d'autres juridictions,

- qu'il s'agit d'un acharnement qui démontre la mauvaise foi dont il a fait preuve et justifie l'allocation, au profit de la concluante, d'une somme de 100.000'€ à titre de dommages et intérêts en raison du caractère abusif et vexatoire de la procédure intentée à son encontre.

La société Crédit Agricole Provence Côte d'Azur demande à la cour :

- de confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

- et de condamner M. [Y] à lui payer la somme de 5 000'€ par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Elle soutient qu'elle est bien recevable et fondée, dès lors que M. [Y] n'a pas déféré à la mise en demeure de restituer qui lui a été adressée le 30 octobre 2006, à entendre liquider la créance découlant de la cassation prononcée le 5 avril 2005 à la somme de 1 376 903.20'€ outre intérêts courus au taux légal depuis le 30 octobre 2006.

MOTIFS

Sur la recevabilité des conclusions de M. [Y]

Aux termes de l'article 814 du code de procédure civile :

La constitution de l'avocat par le défendeur ou par toute personne qui devient partie en cours d'instance est dénoncée aux autres parties par notification entre avocats.

Cet acte indique :

a) Si le défendeur est une personne physique, ses nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance.

b) Si le défendeur est une personne morale, sa forme, sa dénomination, son siège social et l'organe qui le représente légalement.

Aux termes de l'article 815 du code de procédure civile :

Les conclusions des parties sont signées par leur avocat et notifiées dans la forme des notifications entre avocats. Elles ne sont pas recevables tant que les indications mentionnées à l'alinéa 2 de l'article 814 n'auront pas été fournies.

La communication des pièces produites est valablement attestée par la signature de l'avocat destinataire apposée sur le bordereau établi par l'avocat qui procède à la communication.

En l'espèce, il n'est pas justifié que le domicile de M. [Y] serait situé au Maroc.

En conséquence, le moyen d'irrecevabilité des conclusions de M. [Y], n'est pas fondé.

Sur la portée du protocole transactionnel du 14 mai 2001

Selon acte notarié du 14 mai 2001 passé pardevant Maître [D] [R] notaire à Dunières, la société Crédit Agricole Loire Haute Loire, d'une part, représentée par son directeur financier dûment mandaté et Mme [X] [O] épouse [J] [Y], d'autre part, agissant tant en son nom personnel qu'au nom de son époux et des sociétés '[Y] et Cie Transmed', 'Les Cèdres', et '[Y] [J] et Cie', ont exposé les engagements financiers des époux [Y] et des sociétés sus mentionnées à l'égard de la société Crédit Agricole Loire Haute Loire et ont exposé l'état des procédures en cours.

Ensuite de cet exposé les parties ont conclu une convention à titre de protocole transactionnel aux termes de laquelle :

- les débiteurs versent une somme de 5.920.227 francs,

- le Crédit Agricole abandonne :

* le solde restant dû sur une créance initiale de 3.600.000 francs due au titre d'un acte sous seing privé du 30 septembre 1997, soit la somme de 2.900.000 francs,

* certaines inscriptions d'hypothèques, de nantissements, et de saisies,

- les parties renégocient les conditions et modalités de remboursement de certains prêts,

- les parties conviennent d'un partage par moitié des gains éventuels provenant des procédures en cours et conviennent des modalités de prise en charge des frais de justice afférents à ces procédures en cours.

La convention mentionne dans son article 6 les autres ' engagements des parties' dans les termes suivants :

' Les engagements et les obligations contractées par les parties antérieurement à ce jour sont maintenus et les garanties de toutes nature prises en faveur du Crédit Agricole Loire Haute Loire conservent leur plein et entier effet contre la société ' Gaila'.

En outre les parties s'engagent expressément à ne jamais faire état du présent protocole.

Celui-ci n'entraîne aucune novation et en cas d'inexécution des présentes les sommes versées resteront définitivement acquises.

Tout remboursement par anticipation se fera sans indemnité de remboursement anticipé.

Pour le cas où les engagements contractés par le débiteur ne seraient pas respectés par lui les sommes dues en capital et intérêts au Crédit Agricole Loire Haute Loire seraient immédiatement exigibles après mise en demeure restée infructueuse dans le délai d'un mois.

Par ailleurs concernant les procédures contre le Crédit Agricole Provence Côte d'Azur et la société Lyonnaise de Banque Monsieur et Mme [Y] es nom et qualité s'engagent de manière irrévocable à donner à leurs conseil toutes instructions à l'effet d'informer le Crédit Agricole Loire de l'état d'avancement desdites procédures ceci de manière régulière soit tous les trimestres au moyen d'une lettre recommandée avec accusé de réception et dans les mêmes formes l'issues des décisions rendues par les juridictions saisies.

Chacune des parties déclare se désister des instances engagées devant les juridictions civiles et consulaires les opposant actuellement chacune des parties conservant à sa charge les frais par elle exposés.'

Au terme de l'article 11 de la convention, intitulé Nature juridique des présentes il est encore précisé :

Le présent protocole vaut transaction dans les termes des articles 2044 et suivants du code civil.

Les parties reconnaissent avoir connaissance des dispositions de l'article 2052 du code civil, qui dispose :

' les transactions ont entre les parties l'autorité de la chose jugée en dernier ressort.

Elles ne peuvent être attaquées pour cause d'erreur de droit, ni pour cause de lésion'

Elles déclarent en outre que le présent protocole exprime de manière fidèle et exacte leurs accords intervenus à la suite de diverses réunions et que la transaction intervenue et la signature du présent protocole exclut de leur part toute contestation ultérieure.

Par ailleurs, il est convenu que toutes les clauses du présent acte prévaudront en toute hypothèse sur celles contenues dans l'offre de crédit des prêts GAILA.'

Il résulte des termes de cette transaction que les parties ont renoncé aux seules procédures en cours les opposant.

La société Crédit Agricole Loire Haute Loire ne soutient pas que l'une ou l'autre de ces procédures avait pour objet une action en responsabilité dirigée à son encontre par M. [Y].

Par ailleurs la 'renonciation à toute contestation ultérieure' consentie par les parties se rapporte aux clauses du protocole.

Que tel n'est pas le cas d'une éventuelle action en responsabilité de M. [Y] à l'encontre de la société Crédit Agricole Loire Haute Loire restée en dehors du champ de la convention.

En conséquence, le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur les manquements de la société Crédit Agricole Loire Haute Loire au 'mandat' qui lui a été confié

Par lettre recommandée du 7 août 1990, M. [Y] a écrit à la société Crédit Agricole de la Loire , à l'attention de M. [B] :

'Monsieur,

Suite à la mise en place du financement UNIMER pour les bateaux FORCE 10 et 70, vous deviez pour vous couvrir des engagements FMO récupérer au Crédit Agricole DU VAR une chaîne de traites avalisées par eux dont ci-joint la liste :

- 15.09.90 500.000 Reprise 2 CHRISCRAFT

- 30.09.91 3.200.000 Reprise FORCE 10

- 30.09.91. 1.300.000 Reprise V 40

- 30.09.91. 300.000 Location FORCE 10 1 ère Année

- 31.08.91. 250.000 Location FORCE 21 1 ère Année

- 31.08.92. 250.000 Location FORCE 21 1 ère Année

------------

5.800.000

Cette chaîne de traites devait être émise contre la signature des bons de commande du FORCE 10 et FORCE 70 établis le 24.07.1990.

Pour la bonne forme juridique, nous sommes et c'était le contrat totalement désengagé en cas de défaillance de la Société FMO.

Il y a eu accord verbal entre M. [U], PDG de FMO et moi-même et entre M. [B] du Crédit Agricole de la Loire et Mr [E] du Crédit Agricole du Var.

Nous vous demandons de faire en sorte que cet engagement soit réalisé.

Nous vous signalons que ce marché a été passé à la seule et unique condition que le Crédit Agricole de la Loire et du Var donne une garantie de bonne fin à ce marché conclut entre FMO et TRANSMED que je représente.

Je vous remercie d'accuser réception à ce courrier en me précisant que vous faite votre affaire de cette chaîne de traites à récupérer au Crédit Agricole du Var ou mieux de me préciser que vous êtes déjà en possession de celle-ci.

Veuillez agréer, M., l'expression de mes salutations distinguées.

[J] [Y]'

Il ne résulte pas de ce courrier unilatéral la preuve d'un mandat confié par Monsieur [Y] à son établissement bancaire aux fins d'avoir à s'assurer que les lettres de change tirées sur la société FMO seraient avalisées par le Crédit Agricole du Var à son profit personnel en cas de défaillance de la société FMO.

Ainsi que cela a été jugé par la cour d'appel de Grenoble dans son arrêt du 22 janvier 2009, les courriers échangés entre les banques attestent au contraire de la volonté de ces deux établissement bancaires de se garantir mutuellement .

En conséquence, il convient de débouter M. [Y] de son action fondée sur l'existence d'un mandat.

Sur les manquements de la société Crédit Agricole Loire Haute Loire à son obligation de conseil et d'assistance

M. [Y] fait valoir que le ' banquier aurait procédé, purement et simplement, qu'à un échange de garantie pour se protéger lui-même en cas de défaillance de la Société FMO '.

Il ne peut être déduit de cette seule affirmation un manquement à une obligation de conseil et d'assistance, alors que M. [Y] lui-même dans son courrier du 7 août 1990, indique : ' (...) vous deviez pour vous couvrir des engagements de FMO récupérer au Crédit Agricole du Var une chaîne de traites avalisées par eux (...) , ce dont il résulte qu'il avait bien conscience de ce que les garanties étaient souscrites en faveur de son établissement bancaire qui a financé l'opération.

Le second grief est tiré du défaut de mise en oeuvre par la société Crédit Agricole Loire Haute Loire des garanties qui lui ont été reconnues aux termes des diverses procédures judiciaires.

Ce grief ne relève pas d'un manquement au devoir de conseil et de diligence lesquels ne trouvent à s'appliquer qu'au moment de la mise en place des financements. En conséquence, il convient de débouter M. [Y] de son action en responsabilité fondée sur les dispositions de l'article 1134 du code civil.

Sur la demande de M. [Y] pour résistance abusive

Compte tenu du rejet des prétentions de M. [Y], la demande de ce dernier pour résistance abusive de la société Crédit Agricole Loire Haute Loire est mal fondée.

Sur la demande de la société Crédit Agricole Loire Haute Loire aux fins de constater qu'elle accepte de restituer à la Caisse Régionale De Crédit Agricole Provence Côte d'Azur la somme de 644 693,75'€ qu'elle a perçue dans le cadre de la saisie attribution

Il convient de faire droit à cette demande non contestée.

Sur la demande de liquidation des sommes dues par M. [Y]

La société Crédit Agricole Provence Côte D'Azur ayant réglé à M. [Y], directement entre ses mains ou pour son compte entre les mains de la société Crédit Agricole Loire Haute Loire, la somme totale non contestée de 1.376.903,20'€, il convient de liquider à ce montant le montant que M. [Y] devra rembourser à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Provence Côte d'Azur.

La somme de 644.693,75 € majorée des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 30 octobre 2006 que restituera la société Crédit Agricole Loire Haute Loire à la société Crédit Agricole Provence Côte d'Azur pour le compte de M. [Y] devra venir en déduction de cette somme.

Sur la capitalisation des intérêts

Il sera fait droit à cette demande , l'application de l'article 1154 du code civil étant de droit dès lors que les conditions prévues sont réunies.

Sur la demande de la société Crédit Agricole Loire Haute Loire aux fins de dommages et intérêts en raison du caractère abusif et vexatoire de la procédure intentée à son encontre

Compte tenu de l'infirmation partielle du jugement déféré, il ne peut être reproché à M. [Y] d'avoir exercé une action ou un appel abusif à l'encontre de la société Crédit Agricole Loire Haute Loire.

Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Il convient de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

la cour,

Infirmant partiellement le jugement déféré et statuant de nouveau,

- Déboute la société Crédit Agricole Loire Haute Loire de sa demande aux fins d'irrecevabilité des conclusions de M. [J] [Y], et de sa demande de communication sous astreinte de son adresse,

- Déboute la société Crédit Agricole Loire Haute Loire de sa demande aux fins d'irrecevabilité des demandes de M. [J] [Y] en raison de l'autorité de la chose jugée du protocole transactionnel du 14 mai 2001,

- Dit que M. [J] [Y] n'a pas confié un mandat à la société Crédit Agricole Loire Haute Loire de s'assurer de ce que les traites litigieuses seraient avalisées par la société Crédit Agricole du Var à son profit en cas de défaillance de la société FMO dans le paiement des lettres de change à leur échéance,

- Dit que M. [J] [Y] ne rapporte pas la preuve d'un manquement de la société Crédit Agricole Loire Haute Loire à son devoir de conseil et à son obligation de diligence à l'occasion du financement de l'acquisition des bateaux,

- Déboute en conséquence M. [J] [Y] de ses demandes d'indemnisation et de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive,

- Liquide à la somme de 1.376.903,20'€, outre intérêts capitalisés dans les conditions de l'article 1154 du code civil, au taux légal à compter de la mise en demeure du 30 octobre 2006, la restitution due par M. [J] [Y] à la société Agricole Provence Côte d'Azur en exécution de l'arrêt rendu par la Cour de cassation le 5 avril 2005, cassant l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Chambéry du 7 février 2003,

- Donne acte à la société Crédit Agricole Loire Haute Loire de qu'elle accepte de restituer à la société Crédit Agricole Provence Côte d'Azur la somme de 644.693,75'€ qu'elle a perçue dans le cadre de la saisie attribution,

- Dit que cette somme sera majorée des intérêts au taux légal à compter du 30 octobre 2006, capitalisés dans les conditions de l'article 1154 du Code civil, et viendra en déduction de la somme due par M. [J] [Y],

- Déboute la société Crédit Agricole Loire Haute Loire de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- Condamne M. [J] [Y] à payer à la société Crédit Agricole Loire Haute Loire et à la société Crédit Agricole Provence Côte d'Azur la somme de 1.500 euros à chacune en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Déboute M. [J] [Y] de sa demande à ce titre,

- Condamne M. [J] [Y] aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, par'ceux qui en ont fait la demande ,

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile b
Numéro d'arrêt : 11/07675
Date de la décision : 15/01/2013

Références :

Cour d'appel de Lyon 1B, arrêt n°11/07675 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-01-15;11.07675 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award