R. G : 10/ 01831
COUR D'APPEL DE LYON
2ème chambre
ARRET DU 09 Mai 2011
décision du Tribunal de Grande Instance de LYON
du 22 janvier 2010
RG : 2009/ 05284
ch no 2- Cab. 6
X...
C/
Y...
APPELANT :
M. Alex X...
né le 01 Février 1951 à KANDAL (CAMBODGE)
...
91000 EVRY
représenté par Me Jean-Louis VERRIERE, avoué à la Cour
assisté de Me Kathia DEVAUX, avocat au barreau de LYON
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2010/ 010124 du 03/ 06/ 2010 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)
INTIMEE :
Mme Kimhong Y... épouse X...
née le 03 Mai 1970 au CAMBODGE
Chez Madame Z...
...
69310 PIERRE BENITE
représentée par Me Annick DE FOURCROY, avoué à la Cour
assistée de Me Mélanie CHABANOL, avocat au barreau de LYON
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2010/ 011413 du 03/ 06/ 2010 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)
Date de clôture de l'instruction : 18 Mars 2011
Date des plaidoiries tenues en chambre du conseil : 24 Mars 2011
Date de mise à disposition : 09 Mai 2011
Audience présidée par Catherine CLERC, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Christine SENTIS, greffier.
Composition de la Cour lors du délibéré :
- Jeannine VALTIN, président
-Catherine CLERC, conseiller
-Françoise CONTAT, conseiller.
Arrêt Contradictoire, rendu en Chambre du Conseil, par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
Signé par Jeannine VALTIN, président et par Christine SENTIS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
Monsieur Alex X... et Madame Kimhong Y... se sont mariés le 1er février à EVRY (91) et ont eu deux enfants :
1. Charles né le 22 janvier 2004
2. Albert né le 1er septembre 2005.
Monsieur Alex X... est appelant d'une ordonnance de non conciliation rendue le 22 janvier 2010 par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de LYON qui, statuant sur les mesures provisoires, a notamment :
- attribué à Monsieur Alex X... la jouissance du domicile conjugal,
- ordonné la remise des vêtements et objets personnels de Madame Kimhong Y...,
- constaté que les parents exercent en commun l'autorité parentale et fixé la résidence habituelle des deux enfants mineurs chez la mère,
- organisé le droit de visite et d'hébergement du père à l'amiable et à défaut durant la moitié des vacances scolaires de plus de cinq jours selon l'alternance des années paires et impaires, les trajets incombant au père,
- fixé la pension alimentaire due par le père pour l'entretien et l'éducation des enfants à la somme mensuelle de 160 euros, soit
80 euros par enfant.
Par conclusions déposées le 27 mai 2010, Monsieur Alex X... demande à la cour :
- d'annuler l'ordonnance de non conciliation du 22 janvier 2010 pour défaut de motivation
-à titre principal de fixer la résidence habituelle des deux enfants au domicile du père, d'organiser le droit de visite et d'hébergement de Madame Kimhong Y... à l'amiable et à défaut durant la moitié des vacances scolaires de plus de cinq jours selon l'alternance des années paires et impaires et de condamner celle-ci à payer une pension alimentaire mensuelle de 200 euros pour l'entretien et l'éducation des enfants (soit 100 euros par enfants)
- à titre subsidiaire, si la résidence était maintenue chez la mère, de dispenser le père du paiement de la pension alimentaire mise à sa charge pour les deux enfants et de dire que les frais de transport liés au droit de visite et d'hébergement du père seront supportés par la mère
-de condamner Madame Kimhong Y... aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés comme il est prescrit en matière d'aide juridictionnelle et sous le bénéfice de l'article 699 du code civil.
Par conclusions en réplique déposées le 21 octobre 2010, Madame Kimhong Y... s'oppose aux prétentions adverses et sollicite la confirmation de la décision déférée, outre la condamnation de l'appelant aux entiers dépens avec distraction au profit de Maître de FOURCROY sous réserve des règles applicables en matière d'aide juridictionnelle.
Il est expressément renvoyé aux dernières conclusions déposées par les parties pour l'exposé exhaustif de leurs moyens et prétentions.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 18 mars 2011 et l'affaire plaidée le 24 mars 2011 a été mise en délibéré à ce jour.
Vu l'article 388-1 du Code Civil ;
MOTIFS
Attendu que liminairement il y a lieu de retenir la compétence du juge français et l'application de la loi française, nonobstant le fait que les époux soient nés au CAMBODGE, Madame Kimhong Y... ayant acquis la nationalité française le 9 juillet 2007 en application des dispositions de l'article 21-2 du code civil en considération de la nationalité française de son conjoint ;
Attendu que l'ordonnance entreprise comporte un énoncé succinct des prétentions des parties et de leurs situations économiques respectives ;
que pour autant aucune motivation ne vient étayer l'énoncé du dispositif s'agissant de la fixation des mesures provisoires relatives aux enfants, alors même que ces points étaient en litige entre les parties, l'obligation de motivation posée par l'article 455 alinéa 1 du code de procédure civile ne pouvant être satisfaite en l'état de la mention portée par le premier juge « vu les explications données et les documents produits » ;
Attendu que l'obligation de motiver étant prescrite à peine de nullité (article 458 du code de procédure civile), il y a lieu d'annuler l'ordonnance entreprise pour défaut de motivation ;
Attendu que par l'effet dévolutif de l'appel la cour est saisie de l'entier litige et doit statuer au fond après l'annulation de l'ordonnance entreprise (dernier alinéa de l'article 562 du code de procédure civile) ;
Attendu que les parties ne contestaient pas l'ordonnance déférée en ce qu'elle a autorisé les époux à introduire une instance en divorce, attribué à Monsieur Alex X... la jouissance du domicile conjugal, et ordonné la remise des vêtements et objets personnels de Madame Kimhong Y... ;
Qu'il sera donc statué en ce sens dans les termes du dispositif ci-après ;
Attendu que le principe de l'exercice en commun de l'autorité parentale, non discuté par les époux, sera maintenu à l'égard de leurs deux enfants mineurs ;
Attendu que Monsieur Alex X... revendique l'attribution de la résidence habituelle des deux enfants Charles et Albert au motif qu'ils étaient très proches de ses six autres enfants issus d'une précédente union, dont quatre résident encore chez lui, que Madame Kimhong Y... ne dispose pas des garanties matérielles, éducatives et financières pour accueillir dans de bonnes conditions les deux enfants, en faisant valoir qu'il est, pour sa part, parfaitement apte à leur apporter un soutien scolaire et à leur assurer une unité familiale en se prévalant du fait qu'il s'est vu attribuer la résidence de ses six premiers enfants par une ordonnance du juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance d'EVRY en date du 19 décembre 1996 ;
Attendu cependant que le moyen tiré de l'existence de cette précédente décision n'est pas pertinent dès lors que sa lecture révèle que Monsieur Alex X... et sa première compagne, Madame A..., avaient convenu d'un commun accord, de fixer la résidence habituelle de leurs six enfants mineurs chez le père, de sorte que le juge aux affaires familiales n'avait pas eu à statuer sur les qualités paternelles de Monsieur Alex X... mais seulement à entériner l'accord des parents ;
Attendu qu'ensuite Madame Kimhong Y... justifie par ses pièces régulièrement communiquées, qu'elle est depuis quelques mois, locataire d'un logement personnel de type T3 à VERNAISON (69), ..., qu'elle a régulièrement assuré auprès de la MAMUT à compter du 22 juin 2010 et où elle reçoit toute sa correspondance ;
Que les deux enfants communs sont régulièrement couverts par une assurance scolaire souscrite par leur mère ;
Attendu que de fait, Monsieur Alex X... ne rapporte pas la preuve, en l'état des pièces communiquées de ce que les deux enfants Charles et Albert auraient à souffrir de leurs conditions de vie au domicile maternel ou encore que leur mère serait inapte à satisfaire leurs besoins matériels, affectifs ou éducatifs ;
Que les témoignages recueillis par l'appelant auprès de certains de ses enfants issus de sa première union sont sans incidence sur la solution du litige, en ce que ces témoins ne rapportent pas avoir constaté des signes de souffrance chez Charles et Albert du fait de leur résidence au domicile maternel, mais se bornent à regretter leur absence (cf pièces 9, 10, 11, 12) ;
Qu'en tout état de cause il doit être constaté que ces témoins sont tous majeurs et ont des centres d'intérêts nécessairement différents de leurs jeunes frères Charles et Albert âgés respectivement de 7 et 5 ans ;
Que pas davantage ne peuvent être retenues comme pertinentes les attestations des voisins du père qui témoignent de la bonne entente du couple durant sa vie commune et qui font l'éloge des qualités personnelles de Monsieur Alex X..., ces appréciations n'étant pas de nature à remettre en cause les conditions de vie des deux enfants chez leur mère ;
Attendu qu'en définitive la résidence habituelle des deux enfants mineurs sera fixée chez la mère, Monsieur Alex X... s'abstenant de rapporter la preuve de l'existence de lacunes éducatives de la mère dans la prise en charge de Charles et Albert ;
Attendu que Monsieur Alex X... justifie, en l'état de sa dernière pièce communiquée, percevoir une somme mensuelle de
1 766, 78 euros en valeur février 2010 au titre des prestations servies par la CAF de l'ESSONNE (allocations familiales, APL, revenu de solidarité active) ;
Qu'il est redevable d'un loyer courant, APL déduite, de 228, 01 euros par mois (valeur mars 2010) en sus des dépenses de la vie courante pour un foyer composé de lui-même et de ses quatre enfants majeurs encore à charge Arthur, Franck, Catherine et Caroline) ; qu'il expose avoir une dette de loyer en cours ;
Que Madame Kimhong Y... bénéficie de prestations sociales et familiales d'un montant mensuel de 1 032, 27 euros (en valeur septembre 2010) parmi lesquelles une allocation de soutien familial de 174, 27 euros (mais qui a vocation à disparaître lorsque le père s'acquittera effectivement de la pension alimentaire), et un revenu de solidarité active de 391, 84 euros ;
Que son loyer, après APL, représente une dépense mensuelle de 97, 34 euros (valeur octobre 2010) qu'elle ne justifie pas d'autres charges (prêts notamment) autres que celles de la vie courante ;
Que l'évolution des situations économiques des parties et leurs facultés contributives respectives n'autorisent pas l'accueil de la demande subsidiaire du père tendant à se voir dispensé de payer une pension alimentaire, ce dernier ne se trouvant pas hors d'état de contribuer aux dépenses d'entretien et d'éducation de ses deux enfants Charles et Albert ;
Que la pension alimentaire due à ce titre par celui-ci sera en conséquence fixée à la somme mensuelle de 160 euros (soit 80 euros par enfant) ;
Attendu que rien ne s'oppose à ce qu'il soit prévu au profit du père un droit de visite et d'hébergement à l'égard des deux enfants mineurs, lequel devra s'exercer, à défaut de meilleur accord amiable, selon les modalités visées ci-après du dispositif ;
Que les frais de transport occasionnés par l'exercice de ce droit de visite et d'hébergement seront laissés à la charge du père, bénéficiaire dudit droit, la situation économique de la mère ne permettant pas qu'ils puissent être assumés par celle-ci ;
Attendu que Monsieur Alex X..., qui succombe sur les mesures provisoires, sera condamné aux dépens d'appel dans les termes du dispositif ci-après, sans qu'il y ait lieu de statuer à l'égard des dépens de première instance qui sont inexistants en matière d'ordonnance de non conciliation ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant en chambre du conseil, par arrêt contradictoire, en dernier ressort,
Vu les articles 455 et 458 du code de procédure civile,
Annule pour défaut de motivation l'ordonnance de non conciliation rendue le 22 janvier 2010 par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de LYON,
Vu l'article 562 dernier alinéa du code de procédure civile,
Statuant au fond,
Autorise les époux à introduire l'instance en divorce,
Les renvoie à saisir le juge aux affaires familiales pour qu'il prononce le divorce et statue sur ses effets,
Rappelle aux époux qu'aux termes de l'article 1113 du code de procédure civile « dans les trois mois du prononcé de l'ordonnance, seul l'époux qui a présenté la requête initiale peut assigner en divorce. En cas de réconciliation des époux ou si l'instance n'a pas été introduite dans les trente mois du prononcé de l'ordonnance, toutes ses dispositions sont caduques, y compris l'autorisation d'introduire l'instance »,
Statuant sur les mesures provisoires,
Attribue à Monsieur Alex X... la jouissance du domicile conjugal,
Ordonne la remise des vêtements et objets personnels à Madame Kimhong Y...,
Constate que l'autorité parentale est exercée en commun par les deux parents,
Fixe la résidence habituelle des deux enfants mineurs chez la mère,
Dit que le droit de visite et d'hébergement du père s'exercera librement et amiablement et à défaut, pendant la moitié des vacances scolaires de plus de cinq jours, la première moitié les années paires et la seconde moitié les années impaires, à charge pour le père de prendre et de ramener les enfants chez la mère,
Fixe et en tant que de besoin, condamne le père à servir à la mère payable à son domicile et d'avance en sus des allocations et prestations familiales, une pension alimentaire mensuelle de
160 euros (soit 80 euros par enfant) pour sa part contributive à l'entretien et à l'éducation des enfants jusqu'à ce qu'ils subviennent eux-mêmes à leurs propres besoins,
Rappelle que les mesures provisoires sont de plein droit exécutoires en application de l'article 514 du code de procédure civile,
Rejette les autres demandes,
Condamne Monsieur Alex X... aux dépens d'appel avec distraction au profit de Maître VERRIERE, avoué, sous réserve des règles applicables en matière d'aide juridictionnelle.
LA GREFFIERE, LE PRESIDENT.