R. G : 10/ 03205
Décision du tribunal de grande instance de Lyon Au fond du 21 avril 2010
1ère chambre-section 1- cabinet A-
RG : 2007/ 14913
COUR D'APPEL DE LYON
1ère chambre civile A
ARRET DU 14 Avril 2011
APPELANT :
Henri-Simon X... né le 19 Juillet 1937 à VIENNE (ISERE)... 69450 SAINT CYR-AU-MONT-D'OR
représenté par la SCP LAFFLY-WICKY, avoués à la Cour
assisté de la SELARL ANSERMAUD ET ASSOCIES, avocats au barreau de LYON, substituée par Maître Annie GIEN, avocat au barreau de Lyon
INTIMEE :
Société X...-SCI-... 69002 LYON
représentée par la SCP AGUIRAUD NOUVELLET, avoués à la Cour
assistée de Maître Christophe NEYRET, avocat au barreau de LYON
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Date de clôture de l'instruction : 23 Février 2011
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 23 Février 2011
Date de mise à disposition : 31 Mars 2011, prorogée au 14 Avril 2011, les avoués dûment avisés conformément à l'article 450 dernier aliéna du Code de procédure civile
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :- Michel GAGET, président-Christine DEVALETTE, conseiller-Philippe SEMERIVA, conseiller
assistés pendant les débats de Joëlle POITOUX, greffier
A l'audience, Michel GAGET a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Michel GAGET, président, et par Joëlle POITOUX, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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Vu le jugement du 21 avril 2010 rendu par le tribunal de grande instance de Lyon qui, après avoir condamné la Sci X...à racheter les parts d'Henri-Simon X..., condamne ce dernier à verser une indemnité d'occupation de 4. 000 euros par mois à compter du 21 mars 2005, au motif qu'à compter du retrait d'un associé qui s'est retiré, il n'y a aucune justification à ce que la Sci fasse bénéficier un tiers d'une occupation à titre gratuit de l'un des actifs de la société ;
Vu la déclaration d'appel faite le 03 mai 2010 par Henri-Simon X... et vu ses conclusions du 13 juillet 2010 dans lesquelles il conclut, à titre principal, à la réformation de la décision attaquée en ce qu'elle l'a condamné à verser une indemnité d'occupation mensuelle de 4. 000 euros au motif de l'existence d'un commodat entre lui et la société civile immobilière concernant la maison de Saint-Cyr-au-Mont-d'Or, et à titre subsidiaire, à la désignation d'un expert pour fixer une indemnité d'occupation à moins que la cour ne fixe celle-ci à la somme de 2. 200 euros par mois à compter du 10 janvier 2006, date à laquelle l'évaluation des parts était connue ;
Vu les conclusions en réponse de la Sci X..., en date du 08 décembre 2010, soutenant la réformation de la décision attaquée quant au montant de l'indemnité d'occupation à fixer à compter du 25 mars 2005 à la somme de 6. 000 euros et quant à l'astreinte prononcée pour l'information de réitérer les actions de cession pesant sur elle, réclamant en outre la somme de 50. 000 euros de dommages intérêts, outre 5. 000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ;
A l'audience du 23 février 2011, le rapport a été fait par Monsieur le Président Michel Gaget.
DECISION
Les appels sont limités à l'indemnité d'occupation due par Henri-Simon X... à la Sci et à l'astreinte prononcée à l'encontre de celle-ci.
Sur l'indemnité d'occupation
A la suite du retrait de Henri-Simon X... de la Sci dans laquelle il était associé avec ses frères, consacré par le jugement du 21 avril 2010 en ses dispositions non frappées d'appel, décision qui en évalue le coût à payer par la Sci, celle-ci réclame le paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle de 6. 000 euros à compter du 21 mars 2005, date de l'ordonnance de référé, et ce pour l'occupation du bien qu'il occupe et qui est la propriété de la société.
En revanche, Henri-Simon X... soutient, au principal, qu'il ne doit pas une indemnité d'occupation, et à titre subsidiaire la fixation de celle-ci à la somme de 2. 200 euros par mois à compter du 10 janvier 2006, date à laquelle l'évaluation des parts était connue.
La cour trouve, dans le dossier, les éléments de fait nécessaires à la fixation d'une indemnité d'occupation, sans avoir à recourir à une expertise.
Henri-Simon X... soutient qu'il bénéficie d'un commodat de l'article 1875 du code civil pour la villa qu'il occupe, depuis sa construction et mise gratuitement à sa disposition, sans limitation de durée.
Il soutient que, ne percevant pas le montant de ce qui lui est dû par la Sci, il ne peut se reloger et que le commodat prendra fin le jour où il aura perçu le montant de ses parts, en exécution de l'arrêt de la cour d'appel du 16 janvier 2007, confirmant l'ordonnance de référé du 21 mars 2005 et du jugement du 21 avril 2010 qui bénéficie de l'exécution provisoire en ce qu'il fixe le montant à payer par la Sci avec intérêts au taux légal à compter du 10 janvier 2006.
Mais la cour observe qu'il est constant que, comme l'expert Ketty A... l'a rapporté dans son expertise du 10 janvier 2006 que la maison qu'occupe Henri-Simon X... a été mise à sa disposition par la Sci depuis sa construction et qu'aucun loyer et aucune rémunération n'ont été convenus avec la Sci en contrepartie de cette occupation.
La cour remarque que le gérant de la Sci Gérard X...bénéficie pour l'autre maison, construite sur le même terrain, du même droit d'occupation à titre gratuit.
Et la cour retient que la Sci n'offre aucune preuve permettant de penser que l'occupation de la maison ait été convenue avec une contrepartie quelconque.
Il s'agit donc bien d'un prêt à usage gratuit relevant de l'application des articles 1888 et 1889 du code civil, conclu pour une durée indéterminée dont le terme doit être fixé en tenant compte des besoins de celui qui a emprunté et de l'intérêt bien compris de la Sci.
Le prêt à titre gratuit avait été reconnu en première instance par la Sci dans ses conclusions, comme le rappelle l'appelant. Ce prêt est bien un prêt de l'article 1875 du code civil.
Et le prêteur à usage ne peut retirer la chose prêtée qu'après qu'elle a servi à l'usage pour lequel elle a été empruntée, sauf le cas où il survient au prêteur un besoin pressant et imprévu de sa chose et où le juge peut obliger l'emprunteur à la lui rendre, et ce suivant les circonstances. Il s'agit de l'application des articles 1888 et 1889 du code civil.
En l'espèce, la convention des parties n'ayant rien stipulé, il appartient au juge de rechercher la date à laquelle le prêt à usage doit prendre fin compte tenu des circonstances du retrait de Henri-Simon X... qui n'a pas encore reçu les sommes que la Sci lui doit.
Le premier juge a fixé à la date du 21 mars 2005, jour de l'ordonnance de référé autorisant le retrait, la fin du prêt à usage, concédé à titre gratuit.
Mais, à cette date, compte tenu des faits de l'espèce et de la nécessité d'évaluer le coût des parts, la Sci n'établit pas qu'elle subissait un besoin pressant et imprévu de reprendre le bien prêté.
Toutefois, compte tenu de la mésentente entre les parties, de la nécessité pour la Sci de trouver les fonds nécessaires pour régler le coût des parts à Henri-Simon X..., le retrait ayant été autorisé le 21 mars 2005, l'expert ayant évalué le coût dans son rapport en date du 10 janvier 2006, la Sci justifie d'un besoin de reprendre la chose à la date de la condamnation prononcée le 21 avril 2010 par le tribunal de grande instance de Lyon qui l'a contraint à racheter les parts de l'appelant pour la somme de 1. 118. 300 euros, avec intérêt au taux légal à compter du 10 janvier 2006 et à réitérer les actes de cession, dans le mois de la signification.
La date du 21 avril 2010 doit être retenue comme fin de l'occupation gratuite, eu égard aux revenus de Henri-Simon X..., à ses propres besoins de se reloger et aux intérêts de la Sci qui doit trouver le financement nécessaire dont elle connaît l'ampleur depuis le rapport de l'expert en date du 10 janvier 2006.
A compter de cette date, une indemnité d'occupation est due par Henri-Simon X... qui doit faire le nécessaire pour rendre la chose prêtée.
Cette indemnité doit être évaluée à la somme mensuelle de 4. 000 euros à compter du 21 avril 2010, eu égard aux données de la cause, notamment les inconvénients de l'occupation de la villa et la valeur locative effective d'une telle villa.
Le recours à une expertise pour ce faire qui serait une mesure coûteuse, sans profit pour les parties, n'est pas nécessaire, compte tenu des éléments de fait donnés par les parties dans le débat.
Quant à l'astreinte prononcée par les premiers juges, la Sci ne prouve aucune circonstance de nature à supprimer cette astreinte qui pèse sur la Sci qui doit faire le nécessaire pour que le retrait de Henri-Simon X... soit effectif alors qu'il est autorisé depuis le 21 mars 2005.
Il n'est pas établi que l'attitude d'Henri-Simon X... l'ait empêché de manière absolue de remplir les obligations qui étaient les siennes, dont elle a la certitude depuis le 21 mars 2005, et dont elle connaît le prix depuis le 10 janvier 2006.
La procédure ne témoigne pas d'un abus commis par Henri-Simon X... qui fait valoir son droit en appel et causant un préjudice à la Sci, Le comportement de Henri-Simon X... peut être qualifié de dolosif.
L'équité commande de ne pas appliquer l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une ou de l'autre des parties.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR, statuant dans les limites des appels formés,
- confirme la décision du 21 avril 2010 en ce qui concerne l'astreinte prononcée contre la Sci X...;
- réforme cette décision en ce qui concerne le point de départ de l'indemnité d'occupation due par Henri-Simon X... à la Sci ;
- statuant à nouveau, dit que cette indemnité d'occupation doit commencer à courir à compter du 21 avril 2010, terme du prêt à usage gratuit dont Henri-Simon X... ;
- condamne Henri-Simon X... à verser à la Sci X...une indemnité d'occupation mensuelle de QUATRE MILLE EUROS (4. 000 EUROS) à compter du 21 avril 2010, et jusqu'à son départ effectif des lieux ;
- déboute la Sci X...de sa demande de dommages intérêts faite en appel ;
- dit n'y avoir lieu à appliquer l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamne la Sci X...aux dépens d'appel ;
- autorise la Société Civile Professionnelle Laffly-Wicky, avoués, à les recouvrer aux formes et conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
Joëlle POITOUX Michel GAGET