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22/03/2011 | FRANCE | N°09/06948

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile b, 22 mars 2011, 09/06948


R.G : 09/06948









Décision de la Cour d'Appel de GRENOBLE au fond du 22 octobre 2009



RG : 08/03965

ch n°





[C]

SARL NUMA



C/



[X]















COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile B



ARRET DU 22 Mars 2011







APPELANTS :



M. [B] [C]

né le [Date naissance 2] 1945 à [Localité 4] (Isère)

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 5]




représenté par Me Christian MOREL, avoué à la Cour

assisté de Me MAZARE, avocat au barreau de GRENOBLE





SARL NUMA

[Adresse 6]

[Localité 4]



représentée par Me Christian MOREL, avoué à la Cour

assistée de Me MAZARE, avocat au barreau de GRENOBLE









INTIME :



Me [F] ...

R.G : 09/06948

Décision de la Cour d'Appel de GRENOBLE au fond du 22 octobre 2009

RG : 08/03965

ch n°

[C]

SARL NUMA

C/

[X]

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRET DU 22 Mars 2011

APPELANTS :

M. [B] [C]

né le [Date naissance 2] 1945 à [Localité 4] (Isère)

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 5]

représenté par Me Christian MOREL, avoué à la Cour

assisté de Me MAZARE, avocat au barreau de GRENOBLE

SARL NUMA

[Adresse 6]

[Localité 4]

représentée par Me Christian MOREL, avoué à la Cour

assistée de Me MAZARE, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIME :

Me [F] [X]

Mandataire judiciaire

[Adresse 1]

[Localité 4]

représenté par la SCP BRONDEL TUDELA, avoués à la Cour

assisté de Me Jean-Pierre FABRE, avocat au barreau de PARIS

et par Me LAURENT avocat au barreau de GRENOBLE

******

Date de clôture de l'instruction : 28 Janvier 2011

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 1er Février 2011

Date de mise à disposition : 22 Mars 2011

Les pièces de la procédure ont été régulièrement communiquées à Monsieur le Procureur Général

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Jean-Jacques BAIZET, président

- Claude MORIN, conseiller

- Agnès CHAUVE, conseiller

assistés pendant les débats de Frédérique JANKOV, greffier

A l'audience, Jean-Jacques BAIZET a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Jean-Jacques BAIZET, président, et par Madame JANKOV, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

EXPOSE DE L'AFFAIRE

Monsieur [B] [C] a créé une entreprise individuelle ayant pour objet l'étude et la fabrication de matériel de détection d'orages et de protection d'installations. Il est devenu titulaire d'une licence d'exploitation exclusive de deux brevets du CEA déposés en 1977 et 1982 et propriétaire de trois brevets déposés en 1980, 1982 et 1995. Travaillant essentiellement avec l'armée et France Télécom, il a créé, en 1994, la société Electronique 2000, qui a été mise en redressement judiciaire par jugement du 7 mars 1997 et qui a été reprise le 11 avril 1997 par la société Electronique 2001. Cette dernière, qui bénéficiait des licences et sous-licences des brevets, a été déclarée en liquidation judiciaire le 5 mai 2000 et Monsieur [X] a été désigné en qualité de liquidateur judiciaire.

Ce dernier a fait procéder au changement des serrures de l'entreprise et fait réaliser, le 11 mai 2010, un inventaire des biens. Les dossiers de l'entreprise ont été entreposés par le liquidateur dans une société d'archivage. Il est apparu que des dossiers avaient été rangés dans des armoires cadenassées, portant le nom de Monsieur [C].

Par arrêt du 25 janvier 2007, la cour d'appel de Grenoble a fait droit à une requête en revendication des dossiers de Monsieur [C]. Se prévalant d'une détérioration de ceux-ci, Monsieur [C] a obtenu une expertise en référé.

Avec la société Numa, bénéficiaire d'une licence de brevet, il a assigné en responsabilité Monsieur [X].

Par jugement du 4 septembre 2008, le tribunal de grande instance de Grenoble les a déboutés de leurs demandes.

Monsieur [C] et la société Numa ont interjeté appel. Par arrêt du 22 octobre 2009, la cour d'appel de Grenoble a renvoyé l'affaire devant la cour d'appel de Lyon en application de l'article 47 du code de procédure civile.

Monsieur [C] et la société Numa sollicitent l'infirmation du jugement entrepris et soutiennent que Monsieur [X] a commis plusieurs fautes consistant dans :

- l'enlèvement des documents qui étaient dans les armoires cadenassées avec le nom de Monsieur [C], alors que Maître [X] aurait du vérifier au préalable le contenu de ces armoires,

- le défaut d'inventaire des documents qui étaient dans les armoires cadenassées,

- l'absence de précaution pour la conservation des documents (calques, disquettes, typons et circuits imprimés), entreposés dans les locaux d'Archives Services, société d'archivage, ce qui a conduit à les rendre inutilisables,

- le fait d'avoir laissé des tiers pénétrer librement dans les lieux,

- le fait d'avoir présenté au Juge Commissaire une offre de rachat de la société Cegelec sur l'activité détecteur d'orages au mépris des droits de propriété intellectuelle de Monsieur [C], et sans informer le Juge Commissaire de la revendication de ce dernier,

- le fait que Monsieur [X] a permis à la société Dena Desarrollos d'appréhender toute une série de documents au mépris de la revendication engagée par Monsieur [C].

Les appelants font valoir que ces différentes fautes du liquidateur ont eu pour conséquence, pour la société Numa, la disparition de l'ensemble des éléments liés à la licence d'exploitation, ce qui l'a mise dans l'impossibilité de produire le moindre chiffre d'affaires, de sorte que son préjudice peut être évalué par la perte durant cinq ans de la marge bénéficiaire qu'elle pouvait escompter de l'exploitation du brevet et du savoir faire de Monsieur [C], soit 1.830.000,00 euros.

D'autre part, Monsieur [C] estime avoir subi plusieurs préjudices ; la privation de la possibilité de valoriser ses droits de propriété intellectuelle (estimée à 4.250.000 euros), la perte de salaires depuis l'année 2000 (soit 662548,34 euros) et l'affaiblissement qui en résulte de ses indemnités de retraite (soit 329.268,00 euros) pour un préjudice global s'élevant à 5.241.816,30 euros.

Monsieur [X] conclut à la confirmation du jugement en l'absence de faute de sa part et de préjudice subi par les appelants. Il conteste l'ensemble des griefs invoqués par ceux-ci, et sollicite leur condamnation à lui payer la somme de 5.000 euros à titre de dommages intérêts pour procédure abusive.

Le Ministère Public, qui a eu communication de l'affaire, conclut à la confirmation du jugement. Son avis a été communiqué aux parties.

Pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux dernières conclusions déposées par les appelants le 17 janvier 2011 et par l'intimé le 4 janvier 2011.

MOTIFS

Attendu qu'au titre du premier grief relatif à l'enlèvement des documents qui se trouvaient dans des armoires cadenassées comportant son nom, Monsieur [C] reproche à Monsieur [X] d'avoir commis une négligence fautive en ne le prévenant pas qu'il allait fracturer les armoires et en emporter le contenu et de ne pas avoir donné d'instructions pour la conservation des documents ;

Attendu qu'il résulte des pièces produites aux débats, et notamment d'une enquête de police, qu'à la suite de la liquidation judiciaire de la société Electronique 2001 le vendredi 5 mai 2000, Monsieur [C] a, entre cette date et le mardi 9 mai 2000, pénétré dans les locaux de l'entreprise, au mépris des instructions données par son employeur, pour entreposer des documents ou matériels dans des armoires cadenassées portant une étiquette à son nom ; que le liquidateur judiciaire, qui avait l'obligation de faire procéder à l'inventaire des biens de l'entreprise dès l'ouverture de la procédure, n'a pas commis de faite en faisant procéder, par le commissaire priseur, à l'ouverture des armoires qui se trouvaient dans l'entreprise afin de vérifier si celles-ci contenaient des éléments lui appartenant ; que le contenu des armoires a été transféré chez un archiviste dans l'attente de la décision du juge commissaire sur une éventuelle revendication ; qu'à aucun moment, jusqu'au terme de son action en revendication, Monsieur [C] n'a attiré l'attention de Monsieur [X] sur la nécessité de prendre des mesures particulières de conservation jusqu'à l'issue de la procédure de revendication ; qu'aucune faute n'est caractérisée à l'encontre du liquidateur au titre de ce premier grief ;

Attendu, sur l'absence d'inventaire des documents se trouvant dans les armoires, qu'en application des dispositions alors applicables de l'article 28 de la loi du 25 janvier 1985, s'il devait être procédé à l'inventaire des biens de l'entreprise dès l'ouverture de la procédure, l'absence d'inventaire ne faisait pas obstacle à l'exercice des actions en revendication ou en restitution ; qu'en tout état de cause, seuls sont inventoriés les biens de l'entreprise, alors qu'en l'espèce, les étiquettes apposées par Monsieur [C] laissaient apparaître que le contenu des armoires était sa propriété ; que par ailleurs, il résulte d'un procès-verbal établi par le juge commissaire le 14 novembre 2000, qu'au cours d'une réunion organisée à cette date pour lui permettre de préciser le périmètre de sa revendication, Monsieur [C], assisté de son conseil, a limité celle-ci à seize classeurs précisément identifiés, de sorte que dès lors qu'il a pu déterminer les biens sur lesquels il souhaitait exercer sa revendication, l'absence d'inventaire reprochée au liquidateur n'a pu lui occasionner le préjudice dont il se prévaut ni celui invoqué par la société Numa ; que par arrêt du 25 janvier 2007, la cour d'appel de Grenoble a confirmé le jugement rendu par le tribunal de commerce ayant considéré que la revendication ne pouvait aller au-delà de l'énumération limitative résultant du compte rendu de la réunion du 14 novembre 2000 ; qu'en outre, alors qu'il se prévaut de l''exercice, dans les locaux de la société Electronique 2001, d'une activité personnelle relevant du 'confidentiel défense', Monsieur [C] n'en rapporte pas la preuve ;

Attendu, sur le grief tenant à l'absence de précaution pour la conservation des documents, la demande est fondée essentiellement sur le rapport d'expertise déposé en l'état par Monsieur [P], faute pour Monsieur [C] d'avoir versé la consignation complémentaire mise à sa charge pour la poursuite de l'expertise ; que l'expert n'a pu de ce fait procéder aux investigations utiles pour répondre à la mission qui lui avait été fixée ; qu'il

indique uniquement que certains plans sur calques sont dégradés et que les mesures de quelques typons analysés sont différentes des mesures alléguées par Monsieur [C]; qu'il précise que les circuits imprimés multicouches et les plans papier étaient dans un état correct, que les typons offraient un aspect visuel correct, que les calques étaient dans un état différent d'un classeur à l'autre et d'une pochette plastique à l'autre, et que certains d'entre eux n'étaient plus lisibles, sans qu'il ait pu effectuer de constat précis, puisque Monsieur [C] lui a refusé la possibilité de continuer sa mission ; qu'il doit être relevé qu'entre le moment où les documents ont été retirés chez la société d'archivage et celui où ils ont été présentés à l'expert, il s'est écoulé huit mois sans que les conditions de stockage au cours de cette période aient pu être connues ; qu'en conséquence, Monsieur [C] ne démontre pas l'existence d'une faute du liquidateur judiciaire dans la conservation des documents ;

Attendu qu'il n'établit pas non plus que la visite d'un représentant de la société Cegelec et de salariés d'Electronique 2001 dans les lieux le 30 mai 2000 s'est effectuée en dehors de la présence du mandataire liquidateur ou du commissaire priseur, alors que les clés d'accès avaient été changées ; que cette visite ne présentait aucun caractère anormal de la part d'un candidat souhaitant présenter une offre de reprise de certains éléments d'actifs ; que la société Numa a d'ailleurs pu bénéficier d'une visite des lieux dans les mêmes conditions ; qu'il n'est pas démontré qu'à cette occasion la société Cegelec se soit rendu coupable de la disparition de documents, prototypes et matériels ;

Attendu qu'il est reproché à Monsieur [X] d'avoir présenté au juge commissaire l'offre de rachat de la société Cegelec sur l'activité détecteur d'orages au mépris des droits de propriété intellectuelle de Monsieur [C] et sans informer le juge commissaire de la revendication de ce dernier ;

Attendu qu'il appartenait au liquidateur de présenter au juge commissaire toutes les offres de rachat dont il était saisi ; que le juge commissaire a choisi les mieux disantes en retenant les offres des sociétés Desarrollos et Cegelec Sud Ouest et a autorisé la cession à cette dernière de l'activité détecteur d'orages pour sites sensibles ; que la question des brevets et droits intellectuels dont se prévalaient Monsieur [C] et la société Numa a été expressément évoquée, puisque l'ordonnance du juge commissaire les a exclus du champ d'application de la cession ;que sur le recours formé par la société Numa contre cette ordonnance, le tribunal de commerce de Grenoble a rappelé ces éléments et relevé que dans les offres des sociétés Dena Desarrollos et Cegelec Sud Ouest figurait expressément la mention selon laquelle les brevets existants n'étaient pas nécessaires à la bonne continuité de l'affaire de la nouvelle société, que ces sociétés ont affirmé qu'elles n'avaient pas besoin des droits dérivant des brevets, licences ou sous-licences, et concessions dont la société Numa se prétendait titulaire et qu'elles ont revendiqué le droit d'assumer ce choix devant une juridiction compétente si un litige devait s'élever à ce propos face à la société Numa ou à Monsieur [C] et qu'il appartenait à la société Numa de préserver judiciairement ses intérêts contre ces deux sociétés ; que les appelants n'établissent pas que celles-ci auraient utilisé irrégulièrement leurs droits ; qu'en conséquence, aucun manquement n'est caractérisé à l'encontre du liquidateur judiciaire dans les conditions de transmission des offres, alors, au surplus, que le juge commissaire a statué sur les offres par une ordonnance du 30 juin 2000 et que Monsieur [C] n'a présenté une requête en revendication que le 29 septembre suivant ;

Attendu qu'à hauteur d'appel, Monsieur [C] fait grief à Monsieur [X] d'avoir remis à la société Dena Desarrollos une série de documents au mépris de la revendication qu'il avait engagée ; qu'il soutient que ces documents correspondaient à un marché d'étude passé par Franck Télécom, portant sur un capteur par moulin à champ, dénommé par la suite 'PIXY', qui relevait de sa propriété, et non de celle de la société Electronique 2001 ; que par courrier du 20 mars 2001, le liquidateur judiciaire a autorisé le conseil de la société Dena Desarrollos à récupérer certains documents entreposés chez la société Archives Services ; qu'à cette date, Monsieur [C] avait précisément délimité l'objet de sa revendication, ainsi qu'il résulte du procès-verbal établi par le juge commissaire le 14 novembre 2000 ; qu'il avait alors identifié deux classeurs rouge 'PIXY I' et 'PIXY II' qui n'ont pas été remis à la société Dena Desarrollos, puisqu'ils faisaient partie de la liste des documents entrant dans le cadre précis de la revendication à l'issue de la réunion du 14 novembre 2000 ; qu'il n'est pas établi que d'autres documents correspondant au marché d'étude sur le matériel 'PIXY' aient été remis à la société Dena Desarrollos ni que cette dernière s'est livrée à une contrefaçon du matériel ; que si le procès-verbal de constat établi le 20 avril 2010 à la requête de Monsieur [C] sur un matériel 'Previstorm' vendu par la société Dena Desarrollos établit de nombreuses similitudes sur l'aspect visuel des deux détecteurs d'orages, ces constatations n'apportant aucun élément sur la structure de ces deux matériels et sur le détail de leur fonctionnement, ainsi que l'a relevé l'huissier de justice; que ce dernier grief imputé à Monsieur [X] n'est pas caractérisé ;

Attendu en conséquence que Monsieur [C] et la société Numa ont été déboutés à juste titre de leurs demandes ; que leurs prétentions complémentaire présentées à hauteur d'appel doivent également être rejetées ;

Attendu que Monsieur [X] n'établit pas que les appelants ont diligenté la procédure de manière abusive ;

Attendu que Monsieur [C] et la société Numa doivent supporter les dépens et une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris,

Déboute Monsieur [C] et la société Numa de leurs demandes complémentaires,

Déboute Monsieur [X] de sa demande de dommages intérêts,

Condamne Monsieur [C] et la société Numa à payer à Monsieur [X] la somme supplémentaire de TROIS MILLE EUROS (3.000 EUROS) en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Monsieur [C] et la société Numa aux dépens, avec droit de recouvrement direct par la Société Civile Professionnelle (Scp) Brondel-Tudela, avoués.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile b
Numéro d'arrêt : 09/06948
Date de la décision : 22/03/2011

Références :

Cour d'appel de Lyon 1B, arrêt n°09/06948 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-03-22;09.06948 ?
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