R. G : 09/ 00750
Décision du tribunal de grande instance de Lyon
Au fond du 29 janvier 2009
3ème chambre
RG : 03/ 10258
COUR D'APPEL DE LYON
1ère chambre civile A
ARRET DU 02 Décembre 2010
APPELANTS :
SARL CFPN, exerçant sous l'enseigne " ATOUT CASH ", placée sous sauvegarde de justice par jugement du tribunal de commerce de Lyon du 2 septembre 2010
143 route de Grenoble
69800 SAINT-PRIEST
Maître Jean-Philippe X...- mandataire judiciaire de SARL CFPN
...
69003 LYON
représenté par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, avoués à la Cour
assisté de la SCP BALAS ET METRAL, avocats au barreau de LYON
SELARL BAULAND GLADEL & MARTIN, administrateur judiciaire, représentée par Maître Eric BAULAND, agissant en qualité d'administrateur judiciaire de SARL CFPN
40, rue de Bonnel
69484 LYON CEDEX 03
représentés par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, avoués à la Cour
assistés de la SCP BALAS ET METRAL, avocats au barreau de LYON
INTIMEE :
SCI AMSELLEM, nouvelle dénomination de la SCI PHILIPPE
20 quai de la Gare d'Eau
69009 LYON
représentée par la SCP BAUFUME-SOURBE, avoués à la Cour
assistée de la SELARL DPG & ASSOCIES, avocats au barreau de LYON
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Date de clôture de l'instruction : 03 Novembre 2010
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 03 Novembre 2010
Date de mise à disposition : 02 Décembre 2010
Composition de la Cour lors des débats :
- Bernadette MARTIN, président
-Philippe SEMERIVA, conseiller
assistés pendant les débats de Joëlle POITOUX, greffier
A l'audience, Bernadette MARTIN a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Composition de la Cour lors du délibéré :
- Bernadette MARTIN, président
-Christine DEVALETTE, conseiller
-Philippe SEMERIVA, conseiller
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Bernadette MARTIN, président, et par Joëlle POITOUX, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS PROCEDURE PRETENTIONS DES PARTIES
La société CFPN est liée à la SCI AMSELLEM nouvelle dénomination de la SCI PHILIPPE par un contrat de bail commercial en date du 15 octobre 1996. Les lieux loués se composent d'un terrain d'une surface de 6. 900 m2 environ clos, d'un bâtiment au nord de la parcelle, surface au sol 600 m2 environ, avec une partie magasin et une partie bureaux agencée, d'un deuxième bâtiment au sud de la parcelle d'une surface au sol de 1200 m2 environ à usage d'entrepôt.
Se référant pour le détail des procédures ayant opposé les parties depuis de nombreuses années au jugement entrepris, il suffit de rappeler que par acte du 30 juillet 2003 la société CFPN a fait assigner la SCI PHILIPPE afin de la voir condamner à réaliser les travaux préconisés par l'expert Z... et que la SCI ayant fait délivrer à sa locataire le 11 août 2003 un commandement de remise en état des lieux visant la clause résolutoire du bail, la société CFPN a de nouveau fait assigner la SCI PHILIPPE par acte du 9 septembre 2003 afin de voir prononcer la nullité de ce commandement.
Les deux procédures ayant été jointes, par jugement du 29 janvier 2009 le tribunal de grande instance de Lyon a débouté la société CFPN de sa demande d'exécution de travaux par la SCI AMSELLEM, constatant que la société CFPN avait effectué de nombreuses modifications au hall 2 séparant les bâtiments nord et sud a constaté la résiliation du bail au 11 septembre 2003, ordonné l'expulsion de la locataire et condamné celle-ci au paiement d'une indemnité d'occupation équivalente aux loyers et charges contractuelles depuis le 11 septembre 2003 jusqu'à libération des lieux, débouté la société CFPN de sa demande de remboursement de la somme de 15. 248, 01 euros au titre de charges prétendues injustifiées, condamné la société CFPN à payer à la bailleresse la somme de 19. 637, 78 euros au titre de l'arriéré de loyers et charges selon décompte arrêté au troisième trimestre 2006 inclus, condamné la société CFPN au versement d'une somme de 3. 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ordonné l'exécution provisoire de sa décision.
La société CFPN a relevé appel du jugement.
Aux termes de ses dernières conclusions qui tendent à la réformation du jugement, elle fait valoir :
- que le commandement qui lui a été délivré le 11 août 2003 aux fins de remise en état des lieux n'est qu'une manoeuvre du bailleur pour tenter d'échapper aux importants travaux préconisés par l'expert Z... dans son pré-rapport du 30 juin 2003, que les " transformations " visées dans le commandement concernent le hall no2 lequel a été uniquement viabilisé et sécurisé, qu'il s'agit de travaux non seulement autorisés par le bailleur mais aussi nécessaires pour l'exploitation prévue au bail et rendus nécessaires par la vétusté des lieux, que ces travaux ont été faits en conformité avec un permis de construire obtenu en 1986 avant la signature du bail, qu'ils ne peuvent donc être considérés comme faits à l'insu du bailleur et jugés comme constitutifs d'une infraction aux clauses du bail de nature à justifier sa résiliation,
- sur le non respect par la SCI AMSELLEM de ses obligations, que le bailleur a été condamné par arrêt de cette Cour du 13 mars 2008 à procéder aux travaux d'enlèvement des plaques de fibrociment qui couvrent la toiture des bâtiments A et C mais ne s'est pas exécuté, que les désordres affectant les locaux donnés à bail ont été parfaitement constatés par M. Z... dans son rapport de septembre 2003 comme l'avait fait M. A... en 1999 et que le jugement doit être réformé en ce qu'il a considéré que les désordres ne relevaient pas des grosses réparations et ne constituaient pas un manquement de la SCI à son obligation de délivrance, que la SCI PHILIPPE s'était engagée le 15 octobre 2003 à réaliser les travaux préconisés par l'expert Z... aux points 1, 3, 4 et 6 de son rapport mais n'a pas tenu ses engagements puisqu'elle a cédé ses locaux deux mois plus tard à la SCI AMSELLEM, que les prestations exécutées par la SCI AMSELLEM sont insuffisantes, les moyens mis en place dérisoires et inadaptés, et qu'aucun des désordres contenus dans le rapport Z... n'a été circonscrit, les bâtiments étant toujours inondés par gros orage,
- que la bailleresse, SCI PHILIPPE, a manqué à son obligation de délivrance en lui louant en 1996 des locaux défaillants et qu'elle est en droit d'obtenir réparation des préjudices engendrés par ce défaut de délivrance, que la SCI AMSELLEM ne mettra jamais en oeuvre les moyens nécessaires et indispensables pour remédier aux troubles de jouissance de sa locataire, que le préjudice qu'elle subit du fait des inondations répétées doit être indemnisé par une somme de 249. 827, 57 euros,
- sur les sommes dues, que celles-ci s'établissent à 3. 829, 03 euros au lieu des 19. 637, 78 euros retenus par le tribunal.
Elle demande, en conséquence, à la Cour de condamner la SCI AMSELLEM à réaliser les travaux définis par l'expert Z... et l'étude Brea d'août 2007 sous astreinte, de débouter la SCI de toutes ses demandes, de fixer le montant des sommes par elle dues au titre des différents commandements à la somme de 3. 829, 03 euros, de condamner la SCI AMSELLEM à lui verser outre intérêts légaux la somme de 249. 827, 57 euros au titre du préjudice subi, d'ordonner la compensation entre les deux sommes, de condamner l'intimée à lui payer la somme de 6. 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
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Aux termes de ses dernières conclusions, la SCI AMSELLEM sollicite la confirmation du jugement et la condamnation de l'appelante à lui verser la somme de 6. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Sur les griefs développés par l'appelante, elle expose que la société CFPN a entravé ou s'est opposée à la réalisation des travaux suite au rapport Z... allant même jusqu'à saisir le juge des référés par assignation du 17 juin 2004 d'une nouvelle demande d'expertise judiciaire à laquelle il n'a été fait droit qu'en ce qui concerne la présence d'amiante dans la couverture en faux plafond. S'agissant des travaux de désamiantage mis à sa charge par l'arrêt du 13 mars 2008, elle observe que la société CFPN a dans un premier temps réalisé les travaux de désamiantage la concernant relatifs aux faux plafonds sans information de son bailleur rendant ainsi impossible l'exécution conjointe pourtant prescrite par l'arrêt du 13 mars 2008, que bien plus l'accès des locaux aux entreprises a été refusé par la société CFPN qui a d'ailleurs été déboutée de sa demande de liquidation d'astreinte par le juge de l'exécution.
Elle rappelle que le litige a pris parallèlement une tournure délictuelle et que le gérant de la société CFPN a été condamné par arrêt du 17 novembre 2009 à 36 mois d'emprisonnement dont 18 mois assortis d'un sursis avec mise à l'épreuve pendant 3 ans des chefs de destruction du bien d'autrui par incendies, par moyens dangereux ou par inscriptions au préjudice des associés de la SCI AMSELLEM qui ont obtenu du tribunal puis de la cour l'allocation de dommages intérêts et que c'est dans ce contexte que la SCI AMSELLEM a donné congé à la société CFPN avec refus de renouvellement et refus d'indemnité d'éviction par acte d'huissier du 23 janvier 2008 au titre des voies de fait commises sur la personne des associés de la SCI.
Sur les préconisations de l'expert Z... et les travaux requis par la société CFPN, elle soutient que le jugement ayant fait une exacte lecture des " constatations et préconisations " de l'expert Z... au regard des obligations des parties découlant du bail doit être confirmé.
Sur la résiliation du bail au vu du commandement de remise en état du 11 août 2003 elle expose que la société CFPN a bien pris possession d'un " hall intermédiaire couvert " construit par la société GIMM et reliant les deux bâtiments mentionnés au bail au nord et au sud de la parcelle, s'agissant d'un hall de stockage en tôles galvanisées ouvert sur sa façade ouest, que ce qui lui est reproché c'est d'avoir changé l'aspect extérieur de ce hall intermédiaire et d'avoir réalisé des travaux et transformations sans l'autorisation écrite du bailleur afin de lui donner une destination d'entrepôt commercial au lieu de son usage de hall intermédiaire, que la société CFPN ne peut exciper du permis de construire de 1986 lequel se rapporte à d'autres travaux réalisés par le précédent locataire.
Sur les loyers et charges impayés, elle indique avoir fait délivrer 5 commandements de payer successifs et justifier du montant de sa créance si bien que la résiliation de plein droit est également acquise à ce titre. Elle ajoute que le paiement des surprimes d'assurance incombe à la société CFPN dès lors qu'il est justifié que ces surprimes résultent de " l'activité du locataire ", ce qui est le cas.
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La procédure a été clôturée par ordonnance du 2 juillet 2010. Toutefois, la société CFPN ayant été placée sous sauvegarde de justice par jugement du 2 septembre 2010, l'ordonnance de clôture a été révoquée à l'audience de plaidoirie du 23 septembre 2010 et l'affaire renvoyée à l'audience du 3 novembre 2010 pour mise en cause des organes de la procédure.
Me X... ès qualités de mandataire judiciaire et Me BAULAND ès qualités d'administrateur judiciaire sont intervenus à la procédure aux côtés de la société CFPN et la SCI AMSELLEM a déposé de nouvelles conclusions le 25 octobre 2010 et communiqué le même jour de nouvelles pièces.
Par conclusions du 3 novembre 2010, Me X... ès qualités, Me BAULAND ès qualités et la société CFPN demandent à la Cour de constater que par ces écritures la SCI AMSELLEM ne s'est pas contentée de reprendre ses précédentes conclusions à l'encontre des organes de la procédure de sauvegarde, constater qu'ils n'ont pas disposé d'un temps utile et suffisant pour organiser leur défense, écarter des débats les conclusions adverses signifiées le 25 octobre 2010 et les pièces 55 à 71 communiquées le même jour.
L'ordonnance de clôture a été prononcée à l'audience du 3 novembre 2010.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la procédure
Les conclusions de l'intimée du 25 octobre 2010 ne diffèrent des précédentes qu'en ce qu'en pages 9 et 10 elles ajoutent un commentaire sur la difficulté par elle rencontrée pour obtenir l'exécution du jugement assorti de l'exécution provisoire, le jugement de sauvegarde du 2 septembre 2010 étant venu en définitive paralyser toute exécution. Les pièces 55 à 71 qu'elle a communiquées en dernier lieu sont destinées à illustrer cette difficulté (ainsi sursis à exécution, factures d'indemnités d'occupation, échange de courriers entre les parties, engagement de M. B... de quitter les lieux le 31 août 2010, report de la restitution des clés au 6 septembre à l'initiative de la société CFPN, courrier du conseil de CFPN en date du 3 septembre annonçant la mise sous sauvegarde).
En tout cas les pièces communiquées le 25 octobre sont toutes connues de la société CFPN. Le commentaire complémentaire que renferment les conclusions de la même date est sans incidence sur la solution des questions à résoudre dans le cadre du litige qui est porté devant la Cour. Enfin, l'appelante avait le temps de répliquer si tel avait été son souhait.
La société CFPN et ses mandataires sont en conséquence mal fondés à soutenir qu'" ils n'ont pas disposé d'un temps utile et suffisant pour organiser leur défense ". Leur demande tendant à écarter des débats les conclusions adverses signifiées le 25 octobre 2010 ainsi que les nouvelles pièces communiquées le même jour doit être rejetée.
Sur les demandes de réalisation de travaux et de dommages intérêts de la société CFPN
La demande de réalisation de travaux s'appuie sur le rapport d'expertise de M. Z... lequel a été désigné comme expert par ordonnance du 26 novembre 2002 avec mission de vérifier l'existence des désordres allégués (inondation des locaux suite à l'orage du 28 juin 2002), en rechercher l'origine et les causes, donner son avis sur les travaux effectués par le bailleur suite au précédent rapport d'expertise, décrire les travaux nécessaires pour mettre fin aux désordres, les évaluer.
L'expert a répertorié les désordres qui s'articulent autour de trois axes, soit le hall 1 (magasin), le hall 3 (entrepôt arrière), les extérieurs.
S'agissant du hall 1, deux désordres sont retenus, à savoir inondation des locaux en cas d'orage par refoulement des tuyaux de descente situés à l'intérieur du bâtiment, coulées d'eau abondantes dans l'angle nord ouest. L'expert a indiqué pour le premier désordre que les diamètres des descentes d'eaux pluviales étant trop faibles pour des orages importants, il faut compenser les sections trop faibles par une meilleure répartition des descentes et éviter les regroupements de canalisations enterrées, d'où une série de préconisations de reprise du réseau des descentes d'eaux pluviales en extérieur avec un diamètre plus important avec raccordement à un puits perdu, reprise des pentes de la noue, ces travaux devant également remédier aux coulées d'eau dans l'angle nord ouest par la suppression de différents coudes de la descente.
S'agissant du hall 3 entrepôt arrière, quatre désordres sont invoqués. Lors de l'orage survenu le 19 mai 2003 l'expert a pu constater le même désordre que pour le magasin (inondation des locaux par refoulement des tuyaux de descente situés à l'intérieur du bâtiment) et a retenu des causes similaires (diamètre insuffisant des DEP 2 et 3, ensemble des sections trop faible...) le conduisant à préconiser des travaux de reprise du réseau en sa totalité. Concernant les infiltrations d'eau horizontale le long du mur ouest, désordre avéré trouvant son origine dans l'absence d'enduits de façade, l'expert a préconisé la réalisation d'un enduit ou la pose d'un bardage. Côté est il existe des tôles disjointes en imposte bruyantes en cas de vent, entrées d'air et d'eau par temps d'orage et l'expert a indiqué qu'un simple entretien de ces éléments permettrait de les fixer définitivement. S'agissant du chéneau extérieur est qui est dans son état d'origine et en mauvais état l'expert indique que son remplacement doit faire parti de la réfection d'ensemble sur le traitement des eaux pluviales sur la parcelle.
S'agissant des extérieurs, il a été constaté par l'expert que les tuyaux de descente extérieurs n'étant pas reliés à un puits perdu les eaux pluviales s'écoulent dans le terrain sans être maîtrisées ce qui contribue à la dégradation de l'enrobé extérieur, que le bitume est délité devant l'entrepôt, que le parking clientèle n'est pas aménagé pour des récupérations d'eaux pluviales.
En vertu des dispositions du bail, la société CFPN preneur s'est obligée à " prendre les lieux loués dans leur état actuel et, par dérogation à l'article 1720 du code civil, ne pouvoir exiger du bailleur aucune réparation, soit à son entrée en jouissance, soit pendant toute la durée de ladite, gardant pour son compte toutes celles à faire, sauf celles qui dites ‘ grosses réparations'sont définies par l'article 606 du code civil ".
Eu égard à la consistance des lieux loués, à la clause ci-dessus rappelée et aux travaux déjà réalisés, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté les demandes de l'appelante tendant à voir condamner la SCI à exécuter des travaux sous astreinte.
En effet, concernant les extérieurs l'expert a simplement constaté l'état dégradé de l'enrobé et l'état du bitume devant l'entrepôt ainsi que l'absence d'aménagement du parking clientèle pour la récupération des eaux pluviales. S'il a indiqué qu'une étude de viabilité des parkings et aires de circulation confiée à un bureau spécialisé était à envisager, étude que la société CFPN a fait réaliser en août 2007, force est de constater que la réalisation de tels travaux constitue une amélioration des lieux, lesquels se présentent tels qu'ils ont été donnés à bail, et ne correspond pas aux seules " grosses réparations " dont le bailleur est tenu. Par ailleurs, cet état de fait ne constitue pas un manquement du bailleur à son obligation de délivrance.
Concernant le hall 3, les points 5 et 6 répertoriés au rapport de l'expert correspondent à des travaux d'entretien n'incombant pas au bailleur et pour le point 4 la SCI AMSELLEM verse aux débats une facture de l'entreprise LATP en date du 18 octobre 2004 justifiant de ce qu'il a été procédé à la pose d'un enduit deux couches de sorte que la demande présentée par l'appelante sur ce point ne saurait prospérer.
S'agissant de l'inondation des locaux en cas d'orage par refoulement des tuyaux de descente situés à l'intérieur tant du hall 1 que du hall 3, il s'évince du rapport d'expertise que ces désordres auxquels se rattachent les coulées d'eau constatées dans l'angle nord ouest du magasin ont pour cause un diamètre insuffisant des descentes d'eaux pluviales équipant les bâtiments, le cheminement, la section et l'état du réseau enterré étant inconnu, ce qui conduit à la reprise de tout le réseau. Compte tenu de l'origine des désordres se rattachant à un défaut de conception, les réparations à envisager doivent contrairement à l'opinion des premiers juges être qualifiées de " grosses réparations " à la charge du bailleur. D'ailleurs par lettre recommandée du 15 octobre 2003, la SCI PHILIPPE a informé la société CFPN qu'elle effectuera les travaux préconisés par l'expert se rapportant notamment aux points 1 et 3 du rapport.
Quant à cette exécution, la SCI AMSELLEM verse aux débats différentes pièces dont il résulte qu'elle a confié la réalisation de travaux à l'entreprise MORGILLO mais que celle-ci qui devait intervenir à compter du 7 juin 2004 s'est heurtée à des difficultés d'exécution en lien avec des exigences de la locataire (horaires imposés, refus d'approvisionnement en eau et électricité, critique des travaux effectués, exigence d'un " fax authentifiable " pour prévenir de l'intervention d'une entreprise, exigence d'un fax signé...), que certains travaux (façades extérieures, reprise de canalisations pour les halls 2 et 3) ont pu être réalisés, que d'autres n'ont pu l'être, MM. AMSELLEM et ROCH s'étant par exemple retirés après que le gérant de la société CFPN ait exigé " d'authentifier votre fax du 22/ 11, reçu non signé, de me justifier l'identité de la personne vous accompagnant ".
Or, il convient de rappeler qu'aux termes de l'article 26 des conditions générales du bail, la société CFPN était tenue de supporter sans réclamation ni indemnité toutes les réparations, transformations jugées nécessaires par le bailleur, de donner libre accès aux entreprises chargées des travaux, de déplacer et replacer par ses soins et à ses frais tous objets mobiliers pour permettre l'exécution des travaux. Il est manifeste que la société CFPN n'a pas respecté ses obligations, allant même jusqu'à interdire toute intervention pour le hall no1 du magasin puisqu'elle exigeait la prise en charge par la SCI de la perte d'exploitation du magasin, du démontage et remontage des gondoles et vitrines par une entreprise spécialisée etc...
Dans ces conditions, la société CFPN ayant fait obstruction à la réalisation des travaux par le bailleur est mal fondée à solliciter la condamnation de celui-ci à les exécuter sous astreinte.
La société CFPN n'établit pas une impossibilité de faire usage des lieux selon leur destination. Par ailleurs, étant de par son attitude principalement responsable de la persistance des troubles, elle doit être déboutée de sa demande d'indemnisation.
Sur la résiliation du bail
Aux termes de l'article 3 des conditions générales du bail, le preneur s'est engagé à " ne pas changer l'aspect extérieur des lieux loués ni leur distribution intérieure, n'y faire de travaux, transformations ou installations nouvelles sans l'autorisation écrite du bailleur ou de son mandataire : si cette autorisation lui est accordée, le preneur devra faire exécuter les travaux sous la direction et la surveillance d'un architecte désigné par le bailleur. Les honoraires de cet architecte seront pris en charge par le preneur. "
Le 11 août 2003, la SCI a fait délivrer à sa locataire un commandement visant la clause résolutoire d'avoir à remettre les lieux en état ; est ainsi visé le hall no2 qui avait été construit par un ancien locataire, la société GIMM en 1986 conformément à un permis de construire obtenu à l'époque, et qui est décrit dans l'état des lieux effectué lors de la prise à bail de la société CFPN comme " hall intermédiaire couvert : sol goudronné, murs à droite : tôle emboutie bon état général avec un portail avec crémaillère et porte intégrée bon état, à gauche contreplaqué et stratifié HS. Toiture tôle galvanisée bon état. "
L'expert Z... a établi un état descriptif comparatif entre l'état des lieux annexé au bail et l'état actuel de ce hall intermédiaire couvert. Il en résulte que la société CFPN au lieu du sol goudronné a réalisé une dalle de 20 centimètres d'épaisseur en béton, que la réalisation de cette chape en béton d'une épaisseur de 20 cm a eu pour conséquence la création d'une rampe d'accès, la nécessité de rehausser l'ensemble des tabourets existants, l'immobilisation du portail coulissant au sud du local pris dans la dalle ainsi que de la porte piéton bois qui se trouve en butée contre le dallage, que la société CFPN a mis en place un nouveau portail " provisoire " ouvrant à deux battants sur l'extérieur et a réalisé une façade par mise en place de plateaux métalliques (sur 27 mètres de long et 6 mètres de haut) avec création d'une porte piéton, côté façade ouest où le local était ouvert, qu'elle a créé un puits perdu extérieur.
Tous ces travaux ont été réalisés sans autorisation écrite de la SCI en infraction aux clauses du bail sus rappelé. Les explications fournies par l'appelante (dont certaines ne relèvent que de la simple allégation) pour justifier la réalisation des travaux sont inopérantes au regard des obligations contractuelles qui étaient les siennes, de même que celle-ci ne peut se prévaloir d'une autorisation qui avait été donnée à un précédent locataire ou du fait que les travaux de transformation réalisés représenteraient selon elle une amélioration.
Dans ces conditions, c'est à bon droit, le preneur n'ayant pas effectué la remise en état dans le délai d'un mois imparti par le commandement du 11 août 2003, que le tribunal a constaté la résiliation du bail au 11 septembre 2003, ordonné l'expulsion de la société CFPN et condamné celle-ci à payer une indemnité d'occupation équivalente aux loyers et charges contractuelles depuis le 11 septembre 2003 jusqu'à la libération des lieux.
Sur la demande en paiement de loyers et charges impayés
La société CFPN ne conteste plus que le bail prévoit un paiement forfaitaire des charges excluant l'obligation pour le bailleur de justifier de la nature et du montant réel des charges.
La SCI AMSELLEM a fait délivrer cinq commandements de payer et produit un décompte précis de sa créance prenant en compte le principal et les accessoires dus (y compris la taxe d'ordures ménagères, le coût des actes plus frais de procédure pour le commandement du 12 avril 2005) ainsi que les différents versements intervenus.
La société CFPN prétend qu'il existe une erreur quant au montant des sommes versées pour le 4e trimestre 2005 qui serait de 18. 024, 63 euros et non de 15. 471, 72 euros. Ont été portés au crédit de la locataire un règlement de 5. 157, 24 euros à la SCI le 9 novembre 2005 et un règlement de 10. 314, 48 euros à la SCP PARISOT le 11 novembre 2005 ; or, pour prétendre à un crédit supérieur l'appelante ne produit à titre de pièces justificative que ses relevés bancaires des 21 octobre et 21 novembre 2005 avec surlignage de trois chèques, ce qui est insuffisant pour établir qu'elle s'est valablement libérée à hauteur du montant revendiqué.
Par ailleurs, il est demandé à la société CFPN le versement de surprimes qui sont imposées au bailleur par sa compagnie d'assurance en raison de l'activité de la locataire ainsi qu'il résulte des différents courriers de la société TISSERANT Assurances. Ces surprimes sont bien dues en application de l'article 63 des conditions générales du bail. Cependant, la locataire invoque à juste titre la prescription quinquennale de la demande portant sur les années 1995 à 1997 réclamées par commandement du 24 février 2004. Le bailleur ne formulant aucune observation sur cette argumentation, il sera donc déduit de la réclamation la somme de 2. 423 euros.
Enfin, la clause pénale de 10 % prévue par le bail dans le cas où pour obtenir le recouvrement des sommes dues le bailleur devra exercer des poursuites, n'est pas excessive et doit être appliquée.
En définitive, la société CFPN doit être condamnée au paiement de la somme de 17. 214, 78 euros, le jugement étant réformé dans cette mesure.
La société CFPN qui succombe pour l'essentiel sera condamnée aux dépens d'appel et paiera à l'intimée une somme complémentaire de 2. 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS, LA COUR
Vu le jugement du 2 septembre 2010 plaçant la société CFPN sous sauvegarde de justice,
Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a condamné la société CFPN à payer la somme de 19. 637, 78 euros au titre de l'arriéré de loyers, charges et accessoires.
Réformant sur ce point et statuant à nouveau,
Fixe la créance de la SCI AMSELLEM au titre des loyers et charges impayés à la somme de 17. 214, 78 euros.
Confirme le jugement pour le surplus.
Y ajoutant,
Condamne la société CFPN à payer à la SCI AMSELLEM une indemnité complémentaire de 2. 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne la société CFPN aux dépens d'appel avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP BAUFUME SOURBE avoués.
LE GREFFIER LE PRESIDENT