R.G : 08/08240
décision du Tribunal de Grande Instance de LYON au fond du
17 septembre 2008
RG N°07/01794
ch n° 1
[E]
C/
[TC]
[TC]
[Adresse 28]
[J]
[YJ]
[J]
[F]
COUR D'APPEL DE LYON
PREMIERE CHAMBRE CIVILE B
ARRET DU 25 MAI 2010
APPELANTE :
Madame [I] [E] épouse [D]
née le [Date naissance 7] 1955 à [Localité 30] (Rhône)
[Adresse 32]
[Adresse 32]
[Localité 26]
représentée par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET
avoués à la Cour
assistée de Me Marc PELLET
avocat au barreau de LYON
INTIMES :
Monsieur [P] [M] [I] [G] [TC]
né le [Date naissance 4] 1924 à [Localité 33] (Loire)
[Adresse 28]
[Adresse 28]
[Localité 29]
représenté par la SCP BRONDEL-TUDELA
avoués à la Cour
assisté de Me BELIN de CHANTEMELE
avocat au barreau de LYON
Monsieur [WR] [Z] [ON] [T] [TC]
né le [Date naissance 9] 1950 à [Localité 30] (Rhône)
[Adresse 28]
[Adresse 28]
[Localité 29]
représenté par la SCP BRONDEL-TUDELA
avoués à la Cour
assisté de Me BELIN de CHANTEMELE
avocat au barreau de LYON
GROUPEMENT FORESTIER DU
[Adresse 28]
[Adresse 28]
[Adresse 28]
[Localité 29]
représentée par la SCP BRONDEL-TUDELA
avoués à la Cour
assistée de Me BELIN de CHANTEMELE
avocat au barreau de LYON
Madame [CG] [W] [YJ] épouse [J]
née le [Date naissance 13] 1917 à [Localité 31] (Ville de PARIS)
[Adresse 23]
[Localité 29]
représentée par la SCP BAUFUME-SOURBE
avoués à la Cour
assistée de Me Antoine ROUSSEAU
avocat au barreau de LYON
Monsieur [N] [H] [C] [J]
né le [Date naissance 6] 1946 à [Localité 30] (Rhône)
[Adresse 23]
[Localité 29]
représenté par la SCP BAUFUME-SOURBE
avoués à la Cour
assisté de Me Antoine ROUSSEAU
avocat au barreau de LYON
Monsieur [X] [P] [F]
né le [Date naissance 5] 1954 à [Localité 30] (Rhône)
[Adresse 24]
[Localité 29]
défaillant faute d'avoir constitué avoué
L'instruction a été clôturée le 16 mars 2010
L'audience de plaidoiries a eu lieu le 29 Mars 2010
L'affaire a été mise en délibéré au 11 mai 2010, prorogée au 25 mai 2010, les avoués dûment avisés conformément à l'article 450 dernier alinéa du Code de procédure civile
COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré :
Président : Monsieur BAIZET,
Conseiller : Monsieur ROUX,
Conseiller : Madame MORIN
Greffier : Madame [R], pendant les débats uniquement.
A l'audience Monsieur [HN] a fait son rapport conformément à l'article 785 du Code de procédure civile.
ARRET : par défaut
prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
signé par Monsieur BAIZET, président de chambre et par Madame JANKOV greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Selon un acte notarié en date du 2 juin 1930 reçu par Maître [U] notaire à [Localité 27] Monsieur [B] a vendu à Monsieur [P] [A] et à son épouse les biens suivants sur la commune de [Localité 29] (Rhône) :
- une parcelle de terrain en nature de bois d'une superficie de 18 a 51 ca cadastrée n° [Cadastre 25] p - 10 p - 11 p section B,
- une parcelle attenante en nature de bois d'une superficie de 25 a 87 ca cadastrée n° [Cadastre 2] p - 13 p et 63 p section B,
- un passage allant de l'angle sud-ouest de la première parcelle jusqu'au chemin rural en suivant deux directions successives,
- un passage reliant le chemin rural précité au chemin n° [Adresse 11].
Un plan annexé à l'acte permettait de situer exactement les biens vendus.
Monsieur [P] [A] bénéficiaire de l'universalité des biens de son épouse décédée le [Date décès 16] 1944 est décédé le [Date décès 3] 1960 en laissant pour seul héritier son fils unique Monsieur [K] [A].
Aux termes d'une attestation de propriété en date du 15 mars 1961 Monsieur [K] [A] a reçu l'intégralité des biens acquis par l'acte du 2 juin 1930. Les deux parcelles initiales étaient alors divisées en quatre parcelles cadastrées D [Cadastre 12], [Cadastre 14], [Cadastre 15] et [Cadastre 17]. Les deux passages étaient visés dans l'acte mais il était précisé qu'ils n'étaient pas portés au cadastre. Il était précisé que sur l'une des parcelles se trouvait une maisonnette en bois couverte en tôle.
Monsieur [K] [A] est décédé le [Date décès 22] 2003 en laissant pour recueillir sa succession sa fille Madame [Y] [A] épouse [V] et Mesdames [S], [UV] et [D] toutes trois venant par représentation d'une seconde fille du de cujus prédécédée.
Les biens immobiliers situés à [Localité 29] cadastrés D [Cadastre 12], D [Cadastre 14], D [Cadastre 15], D [Cadastre 17] ont été cédés à titre de licitation amiable à Madame [I] [E] épouse [D] selon un acte du 25 novembre 2003. Cet acte ne faisait pas mention des deux passages.
Madame [I] [D] expose que les deux passages visés dans l'acte de 1930 sont devenus impraticables et que depuis une période ancienne son arrière grand-père et son grand-père ont accédé en voiture à sa maisonnette en empruntant un passage traversant la parcelle B [Cadastre 18] appartenant au GROUPEMENT FORESTIER DU DOMAINE DE [Adresse 28], les parcelles B [Cadastre 19] et B [Cadastre 20] de Monsieur [WR] [TC], et la parcelle B [Cadastre 20] de Messieurs [P] et [WR] [TC]. Ce passage permettait d'accéder en voiture jusqu'au chemin départemental n° 92 dénommé [Adresse 28].
En 2001 Monsieur [P] [TC] s'est opposé au passage de Madame [D] sur sa propriété.
Madame [D] lui a rappelé que ses grands-parents traversaient son domaine depuis l'année 1957 en vertu d'un accord conventionnel. Faisant valoir que sa propriété était enclavée elle a sollicité un droit de passage sur les terrains des consorts [TC] et du [Adresse 28]. Elle proposait un passage situé à une extrémité du domaine évitant la proximité des habitations.
Les consorts [TC] lui ont fait valoir qu'elle disposait des deux passages visés dans l'acte de 1930 et que le trajet le plus court et le moins dommageable pourrait passer par les parcelles D [Cadastre 8] ou D [Cadastre 10] de Monsieur et Madame [J] ou D 20 ou D 21 de Monsieur [X] [F].
A cela Madame [D] répondait que ces passages étaient impraticables en voiture.
Par acte en date du 7 septembre 2006 Madame [D] a assigné devant le Tribunal de Grande Instance de LYON Monsieur [P] [TC], Monsieur [WR] [TC], le [Adresse 28], Monsieur [L] [J] et son épouse née [RG] [YJ], Monsieur [N] [J] et Monsieur [X] [F] afin qu'il soit jugé que sa propriété cadastrée D [Cadastre 12], D [Cadastre 14], D [Cadastre 15] et D [Cadastre 17] était enclavée et que soit désigné un expert pour déterminer le chemin le plus court et le moins dommageable pour y accéder.
Les consorts [TC] et le [Adresse 28] résistaient à la demande en soutenant que Madame [D] bénéficiait d'un accès à la voie publique par les passages dont elle était propriétaire et qu'elle ne justifiait pas que ces passages fussent insuffisants pour exploiter son fonds. Ils soutenaient que la situation qu'elle subissait résultait de son seul fait. Ils faisaient valoir que Madame [D] et avant elle ses grands-parents et arrière grands-parents n'avaient bénéficié que d'une tolérance pour traverser leurs parcelles mais qu'il ne s'agissait pas d'un droit.
Les consorts [J] et [F] soutenaient que la servitude de passage issue de l'acte du 2 juin 1930 s'était éteinte par le non usage trentenaire de sorte que la propriété de Madame [D] était enclavée. Ils soutenaient qu'elle ne pouvait bénéficier que d'un accès piétonnier.
Par jugement en date du 17 septembre 2008 le Tribunal de Grande Instance de LYON a relevé :
- que les passages visés dans l'acte de 1930 n'étaient pas des servitudes mais faisaient partie de la propriété de la famille [A] de sorte que les consorts [J]-[F] étaient déboutés de leur demande d'extinction de la servitude,
- que Madame [D] bénéficiait d'un accès à la voie publique puisqu'elle était propriétaire d'un passage donnant accès à un chemin rural,
- que Madame [D] avait transformé un petit cabanon en maison d'habitation, qu'elle s'était ainsi volontairement enclavée et ne pouvait revendiquer l'application de l'article 682 du Code Civil.
Le Tribunal condamnait Madame [I] [E] épouse [D] à payer aux consorts [TC] et au [Adresse 28] la somme de 1.200 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter les dépens.
Par déclaration en date du 2 décembre 2008 Madame [I] [E] épouse [D] a relevé appel de cette décision.
Elle expose que les deux passages visés dans l'acte de 1930 n'ont été que rarement utilisés et seulement à pied. Elle précise que le second passage n'existe plus. Elle indique que ses auteurs accédaient à leur propriété en traversant les parcelles des consorts [TC] et du GROUPEMENT FORESTIER DU DOMAINE DE [Adresse 28] en vertu d'une autorisation donnée depuis plus de trente années jusqu'à ce que Monsieur [TC] impose un autre passage à travers bois créé à la suite de la tempête de 1999 puis interdise tout passage en 2004.
Elle maintient que sa propriété est enclavée car le passage visé dans l'acte de 1930 ne peut pas être emprunté avec un véhicule. Elle soutient que la maisonnette existant sur sa propriété a toujours été destinée à l'habitation et qu'elle n'a pas changé sa destination.
Elle demande à la Cour de constater l'état d'enclave de sa propriété et de fixer l'assiette de la servitude de passage pour cause d'enclave.
A titre subsidiaire elle demande l'organisation d'une mesure d'expertise.
Elle demande la condamnation des défendeurs à lui verser 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
[P] [TC], [WR] [TC] et le [Adresse 28] rappellent que l'acte du 25 novembre 2003 désigne la propriété de Madame [D] comme 'un terrain en nature de bois sur lequel est édifié un cabanon en bois couvert de tôle' et que dans le même acte l'acquéreur déclare 'que le bien n'est pas destiné par lui à l'habitation'.
Ils soutiennent que la propriété de Madame [D] n'est pas enclavée dès lors qu'elle dispose d'un accès suffisant pour l'usage auquel elle est destinée.
Ils exposent que ce n'est que tardivement que Monsieur [K] [A] a sollicité la permission de passer en voiture sur leur propriété et qu'il prévenait préalablement à chaque passage.
Ils sollicitent la confirmation de la décision déférée et demandent la condamnation de Madame [D] à leur payer la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Monsieur [N] [J] et Madame [RG] [YJ] épouse [J] exposent qu'ils étaient propriétaires des parcelles D [Cadastre 8], D [Cadastre 10] et D [Cadastre 21] et qu'ils ont vendu la parcelle D [Cadastre 21] en 2007. Ils se déclarent étrangers au litige et soutiennent que la question de l'enclave de la propriété de Madame [D] ne les concerne pas. Ils exposent par ailleurs que Madame [D] a assigné [L] [J] le 7 septembre 2006 alors que Monsieur [L] [J] est décédé le [Date décès 1] 2001.
Ils demandent que soit constatée leur mise en cause injustifiée et sollicitent 1.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Monsieur [X] [F] n'a pas constitué avoué et n'a pas été assigné à sa personne.
DISCUSSION
Attendu que le présent arrêt est rendu par défaut en application de l'article 474 du Code de procédure civile ;
Attendu qu'il est constant que Monsieur [P] [A] a acquis le 2 juin 1930 les parcelles actuellement cadastrées D [Cadastre 12], D [Cadastre 14], D [Cadastre 15] et D [Cadastre 17] et la propriété de deux passages permettant d'accéder à la voie publique ;
Attendu que l'acte du 15 mars 1961 précise que sur l'une des parcelles est édifiée une maisonnette en bois couverte de tôle ;
Attendu que l'acte de licitation du 25 novembre 2003 précise que sur le terrain est édifié un cabanon en bois couvert de tôle et qu'il résulte de la déclaration du cessionnaire Madame [D] que le bien n'est pas destiné par elle à l'habitation ;
Attendu qu'il résulte des attestations versées au débat émanant de Madame [Y] [A] épouse [V], de Madame [KE] [E] épouse [UV] et de Madame [O] [E] veuve [S] que cette maisonnette a été aménagée pour y passer les week-ends et les vacances et que l'accès se faisait soit par le passage depuis le chemin rural, soit en voiture à travers les propriétés des consorts [TC] avec l'autorisation de ces derniers ;
Attendu que la propriété de Madame [D] dispose d'un accès sur la voie publique puisqu'elle comporte un passage donnant accès au chemin rural, lequel passage existe toujours puisque la propriété ne s'éteint pas ;
Attendu que la tolérance accordée par les consorts [TC] n'a pas créé de droit de passage sur leur propriété puisqu'une servitude de passage ne peut s'acquérir que par titre ;
Attendu que l'aménagement de la maisonnette en une maison plus confortable résulte du seul fait de Madame [D], laquelle ne peut dès lors revendiquer une servitude de passage pour cause d'enclave afin d'accéder à sa propriété avec un véhicule automobile ;
Attendu qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que les consorts [TC] sont bien fondés à refuser à Madame [D] le passage sur leur propriété ;
Attendu que les consorts [J] et [F] seront mis hors de cause ;
Attendu que le jugement déféré sera en conséquence confirmé en toutes ses dispositions;
Attendu que l'équité commande d'élever à 2.000 euros le montant de l'indemnité allouée aux consorts [TC] au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et d'allouer 1.000 euros sur ce même fondement aux époux [J] ;
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf à élever à DEUX MILLE EUROS (2.000 EUROS) le montant de l'indemnité allouée sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile aux consorts [TC] et au [Adresse 28],
Y ajoutant,
Condamne Madame [I] [E] épouse [D] à payer à Monsieur [N] [J] et à Madame [RG] [YJ] épouse [J] la somme de MILLE EUROS (1.000 EUROS) en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
Condamne Madame [I] [E] épouse [D] aux dépens de l 'appel, avec droit de recouvrement direct au profit des Sociétés Civiles Professionnelles (Scp) BRONDEL-TUDELA et BAUFUME-SOURBE, Sociétés d'avoués.
LE GREFFIER LE PRESIDENT