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30/10/2008 | FRANCE | N°07/04982

France | France, Cour d'appel de Lyon, Ct0109, 30 octobre 2008, 07/04982


ARRÊT DU 30 Octobre 2008

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 18 avril 2006

N° rôle : 2004j2904
N° RG : 07 / 04982
Nature du recours : Appel
APPELANTE :
SA HYUNDAI HEAVY INDUSTRIES EUROP NV, société de droit belge Vossendaal, 11 2440 GEEL BELGIQUE

représentée par Me Annick DE FOURCROY, avoué à la Cour
assistée de Me François LEBACQ, avocat au barreau d'ANVERS, substitué par Me ABEL, avocat au barreau de LYON
INTIMES :
SARL DROMARD Rue de la Tuilerie 25500 MONTLEBON

représentée par

la SCP DUTRIEVOZ, avoués à la Cour
assistée de Me SERRI, avocat au barreau de BESANCON
SA CURTY MATERIEL Zone...

ARRÊT DU 30 Octobre 2008

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 18 avril 2006

N° rôle : 2004j2904
N° RG : 07 / 04982
Nature du recours : Appel
APPELANTE :
SA HYUNDAI HEAVY INDUSTRIES EUROP NV, société de droit belge Vossendaal, 11 2440 GEEL BELGIQUE

représentée par Me Annick DE FOURCROY, avoué à la Cour
assistée de Me François LEBACQ, avocat au barreau d'ANVERS, substitué par Me ABEL, avocat au barreau de LYON
INTIMES :
SARL DROMARD Rue de la Tuilerie 25500 MONTLEBON

représentée par la SCP DUTRIEVOZ, avoués à la Cour
assistée de Me SERRI, avocat au barreau de BESANCON
SA CURTY MATERIEL Zone Industrielle 40, rue Roger Salengro 69740 GENAS

Maître Claude A..., mandataire judiciaire, pris en qualité de commissaire à l'exécution du plan de redressement par continuation de la société CURTY MATERIEL par jugement rendu le 21 juin 2005 du tribunal de commerce de LYON ... 69001 LYON

représentés par la SCP LIGIER DE MAUROY-LIGIER, avoués à la Cour
assistés de Me Michèle AMANTE, avocat au barreau de LYON

Instruction clôturée le 20 Juin 2008

Audience publique du 24 Septembre 2008

LA TROISIÈME CHAMBRE SECTION A DE LA COUR D'APPEL DE LYON,

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

Monsieur Bernard CHAUVET, Président Monsieur Bernard SANTELLI, Conseiller Madame Marie-Françoise CLOZEL-TRUCHE, Conseiller

DEBATS : à l'audience publique du 24 Septembre 2008 sur le rapport de Madame Marie-Françoise CLOZEL-TRUCHE, Conseiller

GREFFIER : la Cour était assistée lors des débats de Mademoiselle Patricia LE FLOCH, greffier

ARRET : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 30 Octobre 2008, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;
Signé par Monsieur Bernard CHAUVET, Président, et par Mademoiselle Patricia LE FLOCH, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LES FAITS ET LES DÉCISIONS RENDUES

Le 14 mars 2001 la SARL DROMARD, qui exerce une activité de travaux publics et de location de matériel, a commandé à la SA CURTY MATÉRIELS (CURTY) concessionnaire HYUNDAI, divers matériels de travaux publics dont une pelle neuve R 200 W-3 moyennant un prix total de 1. 530. 000 Francs dont il devait être déduit le prix de " 11 reprises ". Le bon de commande mentionnait une garantie suivant conditions générales du constructeur de 2 ans ou 3. 000 heures. A la demande de la SARL DROMARD qui souhaitait effectuer des travaux en déport tout en conservant la cabine orientée sur l'axe de translation de l'engin, la SA CURTY a fait modifier l'équipement excavation de la pelle R 200W-3 en implantant sur la flèche une articulation supplémentaire.

La livraison de la pelle R 200 W-3 est intervenue le 4 septembre 2001, date à laquelle les sociétés CURTY et DROMARD ont signé un document intitulé garantie prévoyant une garantie constructeur pour une période de douze mois ou 2 000 heures. Ce document prévoyait notamment qu'aucune indemnité ne pourrait être demandée au titre de dommages immatériels ou pertes indirectes tels que pertes de chiffre d'affaires, indemnités de retard, intérêts, etc. Une extension de garantie a aussi été signée par les sociétés CURTY et DROMARD reprenant la durée de 2 ans ou 3. 000 heures après épuisement de la garantie standard.

A compter du 18 septembre 2001 la SARL DROMARD s'est plainte de divers dysfonctionnements et pannes de la pelle qui a connu une avarie des moyeux des roues le 10 décembre 2001. La société CURTY, puis la société de droit belge HYUNDAI HEAVY INDUSTRIES EUROPE NV (HYUNDAI) sont intervenues et ont proposé dès mars 2002 à titre commercial une participation au coût des travaux nécessaires à la remise en état de la pelle en mettant toutefois en cause les conditions d'utilisation de l'engin.
Par exploit du 5 juillet 2002 la SARL DROMARD a fait citer la société CURTY devant le juge des référés du Tribunal de Commerce de LYON qui par ordonnance du 5 août 2002 a désigné Daniel C... en qualité d'expert avec mission de rechercher les causes des désordres susceptibles d'affecter la pelle HYUNDAI type 200 W et de rechercher l'origine et les causes des dysfonctionnements allégués, de chiffrer le coût des remises en état et des pertes exploitation éventuelles.

L'expert C... a déposé son rapport le 26 mai 2003. Il a mentionné trois dysfonctionnements majeurs à savoir :- une détérioration du système de freinage de la pelle résultant selon l'expert de ce que le système de loquet (latch) du frein de service était resté enclenché lors d'un trajet de l'engin par la route le 10 décembre 2001, sans que le conducteur s'en rende compte ; l'expert a relevé que seul le manuel d'utilisateur rédigé en anglais expliquait le fonctionnement du latch associé à la pédale de frein de service, le manuel d'utilisation et d'entretien en français remis par la société CURTY à la société DROMARD ne le mentionnant pas.- une usure et une destruction anomale des pneus- un défaut de stabilité de la pelle dans certaines configurations de travail, l'expert précisant toutefois n'avoir pu vérifier lui-même la réalité de cette doléance.

Saisi par exploit du 10 septembre 2002 par la SA CURTY qui sollicitait paiement d'une provision de 20. 069, 98 euros sur des factures impayées, le juge des référés du Tribunal de Commerce de LYON a, par ordonnance du 6 novembre 2002, condamné la SARL DROMARD à lui payer une provision de 4. 855, 75 euros et une indemnité de procédure.
Par exploit du 15 octobre 2003 la SARL DROMARD a fait citer la SA CURTY devant le Tribunal de Commerce de LYON, au visa des articles 1641 et suivants du Code Civil, pour obtenir sa condamnation à lui payer les frais de remise en état du système de freinage de la pelle R 200, de remplacement des pneumatiques et les dépenses exposées et à l'indemniser des pertes d'exploitation et préjudices financiers subis jusqu'à la délivrance du certificat de conformité de la pelle.

La SA CURTY a été placée en redressement judiciaire le 11 mars 2004. La SARL DROMARD a effectué une déclaration de créance et appelé en cause par exploit du 31 août 2004 Maître D... mandataire judiciaire, puis par acte du 6 octobre 2004 Maître A... administrateur. La SA CURTY a formé une demande reconventionnelle en paiement d'un solde de factures de 15. 553, 78 euros TTC avec intérêts légaux à compter de l'assignation en référé du 10 septembre 2002.

Par exploit du 25 août 2005 la SA CURTY, Maître D... et Maître A... ont aussi appelé en cause et en garantie la société de droit belge HYUNDAI HEAVY INDUSTRIES EUROP NV (HYUNDAI) afin que le constructeur de la pelle soit condamnée à relever indemne la société CURTY des condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre. La société HYUNDAI n'a pas comparu en première instance.

Par jugement réputé contradictoire en date du 18 avril 2006 le Tribunal a :- ordonné la jonction des instances- rejeté la demande de contre-expertise formée par la société CURTY- fixé la créance de la société DROMARD au redressement judiciaire de la société CURTY à titre chirographaire aux sommes suivantes * 25. 092, 32 euros HT au titre des frais de remise en état des 4 moyeux de la pelle R 200 W-3 * 3. 862 euros HT au titre des frais de remplacement des pneumatiques * 820, 98 euros au titre des dépenses engagées * 24. 600 euros HT au titre de la perte d'exploitation subie entre le 5 février 2002 et le 15 septembre 2003 (en faisant application d'un taux de marge de 20 %)- rejeté les demandes d'indemnisation formées par la société DROMARD au titre de la perte financière au delà de la date du 15 septembre 2003- donné acte à la société DROMARD de ce qu'elle se réservait de saisir la justice pour le litige relatif au défaut de stabilité de la pelle, une fois celle-ci réparée- condamné la société DROMARD à payer à la société CURTY la somme de 11. 767, 82 euros TTC outre intérêts au taux légal à compter de l'assignation (en référé du 10 septembre 2002)- condamné la société HYUNDAI à garantir et relever la société CURTY des condamnations mises à sa charge- condamné la société CURTY à payer une indemnité de procédure de 2. 000 euros à la société DROMARD et à supporter les entiers dépens en ce compris les frais d'expertise.

Par déclaration remise au greffe le 19 juillet 2007 la société de droit belge HYUNDAI HEAVY INDUSTRIES EUROP NV a interjeté appel de ce jugement en toutes ses dispositions. La SA CURTY MATÉRIELS et Maître A..., es qualités de commissaire à l'exécution du plan de redressement par continuation adopté le 21 juin 2005, ont interjeté appel incident. La SARL DROMARD a pour sa part formé un appel provoqué.

LES PRÉTENTIONS ET LES MOYENS DES PARTIES

Par conclusions N° 2 signifiées le 13 juin 2008, la société HYUNDAI demande à la Cour " d'anéantir le jugement entrepris et de dire pour droit qu'elle n'est pas tenue de garantir et relever la SA CURTY des condamnations mises à sa charge par ledit jugement ".
La société HYUNDAI souligne que bien qu'elle soit intervenue en 2002 à la demande de la SA CURTY et ait continué à échanger de la correspondance avec elle au sujet de la pelle R 200 W-3 litigieuse, elle n'a pas été avisée des opérations d'expertise judiciaire ni appelée à y participer ; qu'elle n'a pu se défendre. Elle soutient donc que l'expertise C... lui est inopposable. Elle observe qu'à titre principal la SA CURTY s'oppose à la demande de la SARL DROMARD et sollicite subsidiairement l'organisation d'une nouvelle expertise en reprenant à son compte les reproches qu'elle avait elle-même formulés à l'encontre de la société DROMARD.

Elle ajoute que la SA CURTY qui achète sur un marché international ne peut lui reprocher de n'avoir pas fourni les descriptifs complets et en français de la pelle 200W ; qu'au surplus la SARL DROMARD a signé à la réception un " delivery report " en langue anglaise sans solliciter de traduction ; que la SARL DROMARD a fait usage de la pelle sans aucune réserve.

Enfin elle reproche à la SARL DROMARD qui prétend que la pelle est hors de service depuis le 7 février 2002 d'avoir tardé à agir et de n'avoir pas respecté son obligation de limiter son dommage.

Par conclusions récapitulatives N° 4 signifiées le 16 juin 2008 la SA CURTY et Maître A..., ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de redressement de cette société, demandent à la Cour au visa des articles 1641 et suivants du Code Civil

- sur l'appel principal de la société HYUNDAI de * constater que la responsabilité de la société HYUNDAI constructeur est engagée pour n'avoir pas fourni les descriptifs complets et en français de la pelle R 200 W-3 lors de la vente

* en conséquence confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la SA HYUNDAI à la relever et garantir des condamnations prononcées à son encontre au profit de la SARL DROMARD

-sur son appel incident, d'infirmer le jugement entrepris et de * débouter la SARL DROMARD de toutes ses demandes compte tenu d'un défaut d'entretien et de maintenance et de la mauvaise utilisation du matériel exclusifs de la mise en jeu de sa garantie * ordonner une nouvelle expertise sur les défauts, désordres et dysfonctionnements allégués par la société DROMARD concernant le système de freinage * très subsidiairement confirmer le jugement en ce qu'il a fixé à 26. 400 euros le préjudice financier de la SARL DROMARD

- dans tous les cas de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société DROMARD à lui payer la somme de 11. 767, 82 euros TTC outre intérêts légal à compter de l'assignation et de condamner la SA HYUNDAI ou la SARL DROMARD à lui payer une indemnité de procédure de 3. 000 euros.

D'abord la SA CURTY et Maître A... es qualités font valoir que l'appel principal de la société HYUNDAI doit être rejeté alors que le rapport d'expertise C... a été communiqué à la SA HYUNDAI qui a pu en discuter les conclusions ; qu'il existe d'autres élément de preuve, et notamment la brochure à usage technico commercial de la pelle en français qui ne décrit pas le système de freinage de l'engin. Ils soutiennent que la responsabilité de la société HYUNDAI, constructeur du matériel incriminé, est engagée à l'égard de la SA CURTY pour ne lui avoir pas fourni au moment de la vente un document complet.

Ensuite ils contestent l'existence des vices invoqués par la SARL DROMARD et sollicitent une contre expertise. Ils font valoir s'agissant du problème du système de freinage que les conclusions de l'expert sont critiquables dans la mesure notamment où il n'a à aucun moment mentionné le témoin lumineux susceptible de prévenir le conducteur de l'activation du frein de service et où il n'a pas constaté l'usure des freins arrières. Ils se prévalent de l'hypothèse émis par l'expert privé missionné (en juin 2003) par la SA CURTY qui a conclu que la destruction des freins résultait de la présence d'un obstacle venu se loger sous la pédale de frein. S'agissant du défaut de stabilité de la pelle dans certaines configurations, ils rappellent que ce problème n'a pas été signalé lors de la procédure initiale du fonctionnement de la pelle ; ils ajoutent que l'expert n'a pu constater un prétendu défaut d'équilibre. S'agissant de l'usure des pneumatiques ils émettent les plus expresses réserves en rappelant que la SARL DROMARD a procédé le 5 octobre 2001 au remplacement de 2 pneus par 2 pneus neufs.

La SA CURTY et Maître A... qui observent que la SARL DROMARD prétend agir sur le fondement de la garantie légale des vices cachés soutiennent qu'elle tente ainsi d'échapper aux limitations conventionnelles de responsabilité qu'elle a acceptées en sa qualité de professionnel éclairé de la même spécialité, comme exerçant une activité de location d'engins de travaux publics. Ils font valoir que seule la garantie contractuelle constructeur doit s'appliquer ; que cette garantie, qui ne peut s'appliquer aux dommages immatériels, n'est pas due pas alors que les dysfonctionnements résultent d'une mauvaise utilisation de l'engin auquel s'est ajouté un non respect des préconisations d'entretien de la pelle.

Subsidiairement, sur les indemnités réclamées, ils contestent devoir supporter :- des pertes d'exploitations pour la période du 5 février 2002 au 15 septembre 2003 ; ils observent que la SARL DROMARD ne justifie même pas de la marge tirée de la location de la perte, que le Tribunal a estimé devoir fixer à 20 %- une perte financière hebdomadaire pour défaut de communication par la S CURTY d'un certificat de conformité ; ils soulignent qu'il ne tenait qu'à la SARL DROMARD de faire réparer la pelle dès septembre 2003.

Enfin s'agissant des contestations de DROMARD sur les factures CURTY ils précisent que :- la facture 99510 a été annulée-la facture 99505 concerne la société CHATEL-la facture 99815 concerne une intervention sur la pelle suite à un accident et a été remboursée à DROMARD par son assureur.

Par conclusions signifiées le 28 mars 2008 la SARL DROMARD demande à la Cour au visa des articles 1641 et suivants du Code Civil- d'écarter des débats toutes pièces qui n'auraient pas fait l'objet d'une traduction en français- d'infirmer le jugement mais seulement en ce qu'il a limité à 24. 600 euros sa perte financière et a rejeté ses demandes à ce titre au delà du 15 septembre 2003 et fait droit à la demande en paiement de factures de la société CURTY, et statuant à nouveau : - de fixer en conséquence sa créance au passif du redressement judiciaire de la SA CURTY * à 123. 013 euros HT au titre des pertes d'exploitation * à 42. 083, 34 euros au titre du préjudice financier pour la période du 15 septembre 2003 au 11 mars 2004 * à 1. 618, 59 euros par semaine au titre du préjudice financier subi à compter du 11 mars 2004 jusqu'à la délivrance du certificat de conformité de la pelle et du certificat de conformité du bras de déport de la pelle ; et de débouter la SA CURTY de sa demande en paiement de factures- de confirmer le jugement entrepris dans ses autres dispositions en lui allouant une indemnité de procédure de 7. 600 euros.

La SARL DROMARD expose qu'il n'est pas nécessaire de recourir à une contre-expertise ; qu'il ressort du rapport de l'expert C... que la pelle 200 RW présente trois dysfonctionnements à savoir- un problème lié au système de freinage qui a occasionné le 10 décembre 2001 une sérieuse avarie, en raison d'un échauffement anormal, conséquence du maintien de la pédale du frein de service à l'insu du conducteur dans une position entraînant un contact permanent des disques de freinage- un défaut de stabilité de la pelle dans certaines configurations- une usure anormale des pneumatiques. Elle souligne qu'il a été nécessaire de recourir à une expertise pour déterminer la cause de l'avarie du 10 décembre 2001 de sorte qu'il s'agit bien de vice caché, alors que dans le cas contraire elle se trouverait fondée à solliciter réparation sur le fondement de la non-conformité.

Elle soutient que si la pelle litigieuse bénéficiait d'une garantie " constructeur " le vendeur lui doit la garantie légale des défauts cachés ou vices rédhibitoires de la chose ; que la garantie conventionnelle s'ajoute à la garantie légale ; que le vendeur professionnel doit réparer l'intégralité du préjudice occasionné. Elle ajoute que la SA CURTY n'a jamais délivré le certificat de conformité obligatoire tant pour la pelle que pour le bras de déport ; qu'elle sollicite l'indemnisation de la perte financière à ce titre et se réserve le droit, une fois la pelle réparée d'avoir recours à la justice pour faire trancher le litige portant sur le problème de stabilité de la pelle. Elle s'oppose à la demande de contre expertise en soutenant que la SA CURTY n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause les conclusions de l'expert judiciaire.

S'agissant de l'arriéré de factures CURTY elle soutient que la créance alléguée au titre de prestations d'entretien ne sont pas certaines alors que le montant réclamé a varié et ne correspond à rien. Elle conteste ainsi les factures :- concernant une société TRADI TP (99505 et 510)- relatives à la pelle R 200 toujours immobilisée- la facture 99815 d'un montant de 12. 794, 46 euros du 16 octobre 2001 relative à l'échange d'un moteur sur un matériel qui a été repris le 14 mars 2001 par la SA CURTY- des prestations facturées au titre des nouvelles pelles acquises qui bénéficiaient de la garantie contractuelle. Elle rappelle qu'elle a réglé la somme de 4. 855, 75 euros en vertu de l'ordonnance de référé du 6 novembre 2002.

S'agissant de la garantie due par la SA HYUNDAI elle soutient aussi que la responsabilité et la garantie du constructeur ne peuvent être écartées alors que le rapport C... a été soumis à la discussion des parties et qu'il incombait au fabricant de fournir une notice explicative détaillée en langue française.
Une ordonnance en date du 20 juin 2008 clôture la procédure.
SUR CE LA COUR
Attendu tout d'abord que les pièces produites libellées en langue étrangère et non traduites seront écartées des débats ;
Attendu qu'aux termes de l'article 1641 du Code Civil le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine ; que si le vendeur professionnel doit en principe réparer l'intégralité du préjudice provoqué par le vice affectant la chose vendue, la garantie due par le vendeur est toutefois susceptible d'être aménagée en cas de vente entre professionnels de même spécialité ; que de telles clauses limitatives de garantie peuvent ainsi recevoir effet ;

Qu'en l'espèce le contrat conclu entre les sociétés CURTY, vendeur de matériel de travaux publics, et DROMARD professionnel de même spécialité comme exerçant une activité de travaux publics, location de matériel, stipule que la garantie consentie par le vendeur, ne s'applique pas aux conséquences du manque de compétence du personnel de l'utilisateur, de la mauvaise utilisation, du défaut, de surveillance ou d'entretien, et exclut toute indemnité au titre de dommages immatériels ou pertes indirectes tels que pertes de chiffre d'affaires, indemnités de retard, intérêts ;

Que la garantie du vendeur CURTY au titre de dysfonctionnements survenus à la pelle R 200 W-3 ne peut en l'espèce être recherchée par la SARL DROMARD que dans les limites ainsi convenues ;

Attendu que sur l'assignation délivrée le 5 juillet 2002 par la SARL DROMARD à son vendeur CURTY, le juge des référés a par ordonnance du 5 août 2002 désigné Daniel C... en qualité d'expert avec mission de rechercher l'origine et les causes des dysfonctionnements susceptibles d'affecter la pelle HYUNDAI R 200W3 livrée neuve le 4 septembre 2001 ;

Que l'expert a procédé à 2 réunions les 15 octobre 2002 et 10 janvier 2003 ; qu'il a été destinataire de 5 dires auxquels il a répondu ; qu'il a déposé le 25 mai 2003 un rapport circonstancié dans lequel il a relaté les constatations opérées sur la pelle R 200 W3 et explicité ses conclusions techniques ; que le rapport déposé par l'expert C... a été versé aux débats ; que les parties ont donc été à mêmes de le discuter ;

Que la demande de contre-expertise formée par la société CURTY a donc à juste titre été rejetée par les premiers juges ;

Attendu que l'expert C... a consigné 3 types de désordres :- la détérioration du système de freinage (grippages, arrachements de métal, déformations plastiques, voire disparition de métal suite fusion dans chaque moyeu de roues) en raison d'un échauffement anormal survenu le 10 décembre 2001 soit après seulement 3 mois d'utilisation à l'occasion d'un trajet de la pelle automotrice entre 2 chantiers- l'usure anormale des pneus équipant la pelle- un problème de stabilité ; Que s'agissant du premier désordre, l'expert n'a pu examiner la pédale d'accélération qui avait été déposée et changée par la société CURTY qui selon les déclarations faites à l'expert " ignorait apparemment " le dispositif mécanique de loquet (latch) dont le constructeur avait doté la machine ; qu'alors que la société CURTY attribuait l'avarie du 10 décembre 2001 à " un dysfonctionnement de la pédale d'accélérateur " l'expert a retenu plutôt l'hypothèse de la circulation prolongée de l'engin alors que la pédale de frein de service était maintenue abaissée par le système de latch dont il ignorait l'existence et le fonctionnement ; qu'en cours d'expertise la société CURTY n'a fait aucune observation sur le témoin lumineux susceptible d'alerter le chauffeur ; qu'elle n'établit pas que seuls les freins avant auraient été affectés par l'avarie alors qu'à diverses reprises l'expert a évoqué dans les mêmes termes tous les moyeux de la pelle ;

Que s'agissant du second désordre s'il résulte du bon de commande DROMARD du 5 octobre 2001 que cette société a facturé au client MARIOTTE 2 pneus neufs, la société CURTY qui a réalisé diverses opérations d'entretien sur la pelle n'a fait aucune observation ni au cours des opérations d'entretien dont elle avait la charge, ni en cours d'expertise sur le fait que la pelle aurait été délivrée le 4 septembre 2001 équipée de pneus MICHELIN ; qu'en toute hypothèse l'expert a précisé que chaque demi essieu était équipé de deux roues jumelées et consigné une usure anormale de tous les pneumatiques équipant la pelle et préconisé le remplacement d'un train complet soit 4 pneus ;

Que l'expert a indiqué n'avoir pu constater la réalité des problèmes de stabilité de la pelle dans certaines situations ;

Que la SA CURTY ne démontre pas que les graves dysfonctionnements ainsi relevés par l'expert résultent d'un mauvais entretien ou d'une mauvaise utilisation susceptibles d'être imputés à la SARL DROMARD en considération des informations qu'elle lui avait dispensées oralement ou par la notice remise, et qui ne mentionnait pas l'existence du dispositif latch ;

Qu'en conséquence les premiers juges ont à juste titre fixé la créance de la société DROMARD au redressement judiciaire de la société CURTY à titre chirographaire aux sommes suivantes : * 25. 092, 32 euros HT au titre des frais de remise en état des 4 moyeux de la pelle R 200 W-3 * 3. 862 euros HT au titre des frais de remplacement de 4 pneumatiques * 820, 98 euros au titre des dépenses engagées- donné acte à la société DROMARD de ce qu'elle se réservait de saisir la justice pour le litige relatif au défaut de stabilité de la pelle, une fois celle-ci réparée- condamné la société CURTY à payer une indemnité de procédure à la société DROMARD ; Qu'en raison de la limitation de garantie convenue les demandes formées par la SARL DROMARD au titre de perte d'exploitation et de préjudice financier doivent être rejetées ; Que le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu'il a fixé au passif du redressement judiciaire de la SA CURTY une créance de 24. 600 euros HT au titre d'une perte d'exploitation subie entre le 5 février 2002 et le 15 septembre 2003 ;

Attendu sur la garantie de la société HYUNDAI, que la SA CURTY se prévaut des dispositions de l'article 1641 du Code Civil, pour engager la responsabilité de son fournisseur belge pour ne lui avoir pas fourni les descriptifs complets, et plus particulièrement en français de la pelle litigieuse ; Que toutefois la SA CURTY qui s'abstient de verser aux débats le contrat qu'elle a conclu avec la société HYUNDAI et plus généralement aucun élément sur les accords conclus avec elle, ne démontre pas que l'appelante ait manqué à ses obligations à son égard ;

Qu'il y a donc lieu de débouter la SA CURTY et Maître A... de leurs demandes dirigées contre la société HYUNDAI ; Que le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu'il a condamné la société HYUNDAI à garantir et relever la société CURTY des condamnations mises à sa charge ;

Attendu ensuite qu'il sera observé que la SA CURTY ne sollicite plus le paiement d'un solde de 15. 553, 78 euros, en complément de la condamnation provisionnelle obtenue le 6 novembre 2002, mais la confirmation de la condamnation principale de 11. 767, 82 euros TTC prononcée par les premiers juges ; que ce montant est inférieur à celui de la facture N° 99815 du 16 octobre 2001, soit 12. 794, 46 euros TTC, que la SARL DROMARD conteste devoir honorer ; Que cette facture est relative à l'échange d'un moteur sur un matériel HYUNDAI 210 suivant bon d'intervention du 3 juillet 2001 ; Que la facture afférente à la cession en l'état et sans garantie de ce matériel (pièce 50 CURTY) n'a été établie par la SARL DROMARD que le 18 janvier 2002 ; Qu'en raison de cette cession postérieure à la réparation les premiers juges ont à juste titre estimé que la facture était due par la SARL DROMARD ; Que dans ces conditions il y a lieu de confirmer aussi le jugement entrepris en ce qu'il condamné la société DROMARD à payer à la société CURTY la somme de 11. 767, 82 euros TTC outre intérêts au taux légal à compter de l'assignation en référé du 10 septembre 2002 ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu de faire application en cause d'appel des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile au profit de la SARL DROMARD ; Que les dépens doivent incomber à la SA CURTY qui succombe dans la majeure partie de ses prétentions ;

PAR CES MOTIFS

Ecarte des débats les pièces produites libellées en langue étrangère et non traduites ;

Infirme le jugement rendu le 18 avril 2006 par le Tribunal de Commerce de LYON en ce qu'il a :- fixé une créance de la société DROMARD au redressement judiciaire de la société CURTY à titre chirographaire de 24. 600 euros HT au titre de la perte d'exploitation subie entre le 5 février 2002 et le 15 septembre 2003- condamné la société HYUNDAI à garantir et relever la société CURTY des condamnations mises à sa charge ;

Statuant à nouveau sur ces points,
Déboute la société DROMARD de ses demandes au titre d'une perte d'exploitation ;
Déboute la société CURTY et Maître A... de leurs demandes dirigées contre la société HYUNDAI ;
Confirme le jugement dans toutes ses autres dispositions ;
Y ajoutant :
Vu les dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile dit n'y avoir lieu d'allouer à la SARL DROMARD une indemnité de procédure complémentaire ;
Condamne la société CURTY aux dépens recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Ct0109
Numéro d'arrêt : 07/04982
Date de la décision : 30/10/2008

Analyses

VENTE - Garantie - Vices cachés - Clause limitative - Vente entre professionnels - / JDF

La garantie légale du vendeur professionnel à raison des défauts cachés de la chose vendue de l'article 1641 du Code civil est susceptible d'être aménagée en cas de vente entre professionnels de même spécialité par une clause limitative de garantie. En l'espèce, les dispositions contenues dans le contrat conclu entre deux sociétés l'une et l'autre de même spécialité (vente de matériel de travaux publics et location de matériel) qui stipule que la garantie consentie par le vendeur ne s'applique pas aux conséquences du manque de compétence du personnel de l'utilisateur, de la mauvaise utilisation, du défaut de surveillance ou d'entretien et excluant toute indemnisation au titre de dommages immatériels ou pertes indirectes tels que les pertes de chiffres d'affaires, indemnités de retard et intérêts, sont pleinement applicables


Références :

Article 1641 du code civil

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Lyon, 18 avril 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2008-10-30;07.04982 ?
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