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21/10/2008 | FRANCE | N°08/03379

France | France, Cour d'appel de Lyon, Ct0596, 21 octobre 2008, 08/03379


RG N° : 08 / 03379

décision du Tribunal de Grande Instance de LYON au fond du 13 mai 2008

RG N° : 2008 / 3030
X... Y...

C /
Z... Z...

COUR D'APPEL DE LYON
PREMIERE CHAMBRE CIVILE B
ARRET DU 21 OCTOBRE 2008
APPELANTS :
Monsieur Sébastien X... chez melle Jennifer Y...... 69700 GIVORS

représenté par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET avoués à la Cour

assisté de Me Fabienne FINET CONDEMINE avocat au barreau de LYON

Mademoiselle Karine Y... chez melle Jennifer Y...... 69700 GIVORS

représentée par la SCP AGUIRA

UD-NOUVELLET avoués à la Cour

assistée de Me Fabienne FINET CONDEMINE avocat au barreau de LYON

INTIMES :

Monsieur Eri...

RG N° : 08 / 03379

décision du Tribunal de Grande Instance de LYON au fond du 13 mai 2008

RG N° : 2008 / 3030
X... Y...

C /
Z... Z...

COUR D'APPEL DE LYON
PREMIERE CHAMBRE CIVILE B
ARRET DU 21 OCTOBRE 2008
APPELANTS :
Monsieur Sébastien X... chez melle Jennifer Y...... 69700 GIVORS

représenté par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET avoués à la Cour

assisté de Me Fabienne FINET CONDEMINE avocat au barreau de LYON

Mademoiselle Karine Y... chez melle Jennifer Y...... 69700 GIVORS

représentée par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET avoués à la Cour

assistée de Me Fabienne FINET CONDEMINE avocat au barreau de LYON

INTIMES :

Monsieur Eric Z...... 69520 GRIGNY

représenté par Me Christian MOREL avoué à la Cour

assisté de Me François CORNUT avocat au barreau de LYON

Monsieur Georges Z...... 69520 GRIGNY

représenté par Me Christian MOREL avoué à la Cour

assisté de Me François CORNUT avocat au barreau de LYON

L'audience de plaidoiries a eu lieu le 23 Septembre 2008, date à laquelle l'affaire a été clôturée.
L'affaire a été mise en délibéré au 21 octobre 2008

COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré :

Président : Monsieur BAIZET, Conseiller : Monsieur ROUX, Conseiller : Madame MORIN

Greffier : Madame WICKER, pendant les débats uniquement.
A l'audience Monsieur ROUX a fait son rapport conformément à l'article 785 du Code de procédure civile.
ARRET : contradictoire
prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile,
signé par Monsieur BAIZET, président et par Madame WICKER greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Par acte authentique en date du 29 décembre 2006 Messieurs Eric et Georges Z... ont vendu à Monsieur Sébastien X... et Mademoiselle Karine Y... un appartement de type 5 au premier étage d'une maison d'habitation située au ... à GRIGNY (Rhône) ainsi qu'un garage et un jardin. Ces biens constituaient les lots 2, 4 et 6 de l'ensemble immobilier constitué par une maison d'habitation selon un état de division et un règlement de copropriété en date du même jour.
Le deuxième étage de la même maison constitué par des combles aménagés a été acquis au début de l'année 2007 par Monsieur D... et Madame E... .

Monsieur X... et Mademoiselle Y... ont déploré une absence d'isolation phonique entre leur appartement et celui du deuxième étage. Ils se sont plaints de nuisances sonores provenant des bruits de pas sur le carrelage posé sur le plancher existant lors de l'aménagement des combles.

Après avoir informé de ces problèmes le maire de GRIGNY ainsi que Monsieur Georges Z... syndic de la copropriété et propriétaire du rez-de-chaussée, ils ont saisi un conciliateur de justice.

Le 30 juillet 2007 a été établi entre Monsieur X... et Mademoiselle Y... d'une part, Monsieur D... et Mademoiselle E... d'autre part, et Monsieur Georges Z... de troisième part un procès-verbal de conciliation aux termes duquel toutes les parties se sont accordées pour faire intervenir un expert en bâtiment afin d'effectuer un rapport sur le plancher du deuxième étage objet du litige. Il était convenu que les frais d'expertise seraient pris en charge par la copropriété.
L'expert choisi, Monsieur F..., a déposé le 8 août 2007 un rapport de consultation duquel il ressort que la maison datant des années 1900 a été divisée en trois lots habitables sans véritable ingénierie, travaux réalisés en absence d'ouvrage.
Monsieur F... précisait que le principal désordre était l'absence d'insonorisation des sols, Monsieur Z... occupant du rez-de-chaussée étant incommodé par les impacts sonores provenant du premier étage, Monsieur X... et Mademoiselle Y... étant incommodés par les bruits en provenance du deuxième étage.
Monsieur F... préconisait la dépose du carrelage du sol du deuxième étage ainsi que des plinthes, et la mise en place d'un complexe isolant incompressible recouvert d'un aggloméré à rainures afin d'insonoriser les sols. Il suggérait que la finition de surface soit privilégiée d'un revêtement flottant avec semelle résiliente incorporée. Par procès-verbal de conciliation du 24 septembre 2007 les parties ont décidé d'effectuer les travaux préconisés par l'expert Monsieur F... .
Les travaux ont été réalisés en novembre 2007 pour un coût total de 10. 500 euros réparti entre les copropriétaires.
Par acte en date du 14 février 2008 Monsieur Sébastien X... et Mademoiselle Karine Y... ont assigné Messieurs Eric et Georges Z... devant le Tribunal de Grande Instance de LYON pour obtenir l'annulation de la vente pour erreur et dol et la condamnation de leurs vendeurs à leur payer 180. 000 euros à titre de restitution du prix, 12. 233 euros à titre de dommages et intérêts correspondant aux frais de notaires et 12. 644, 73 euros au titre des travaux et frais divers.
Ils soutenaient que les vendeurs leur avaient caché l'absence d'isolation acoustique entre le premier et le deuxième étage alors qu'ils en étaient parfaitement informés puisque la maison avait été divisée dans le but d'une cohabitation familiale, Monsieur Georges Z... ayant habité dans les combles et sa mère au premier étage. Ils faisaient valoir que Monsieur Georges Z... ayant habité dans cette maison durant toute son enfance n'ignorait pas la situation.
A titre subsidiaire ils sollicitaient l'organisation d'une expertise et souhaitaient qu'il soit demandé à l'expert si les vendeurs ignoraient les informations concernant les autorisations administratives et en conséquence les isolations phoniques.
Les défendeurs résistaient à la demande en soutenant que le litige avait été réglé par la conciliation entre les parties en date du 24 septembre 2007. Ils invoquaient la clause d'exonération de garantie contenue dans l'acte de vente (page 6) et soutenaient que les travaux de réfection avaient été réalisées conformément aux prescriptions de l'expert choisi par toutes les parties. Ils ajoutaient qu'ill n'avaient rien dissimulé aux acquéreurs lors de la vente.
Par jugement en date du 13 mai 2008 le Tribunal de Grande Instance de LYON a relevé :
- que l'objet du litige dont il était saisi était différent de l'objet de la conciliation du 24 septembre 2007,
- que les acquéreurs savaient que la maison dans laquelle se trouvait l'appartement qu'ils achetaient était une maison familiale divisée en trois logements puisque l'acte de vente précisait qu'un état descriptif de division et un règlement de copropriété avaient été établis le même jour,
- que les acquéreurs produisaient l'attestation d'un électricien qui avait vu l'appartement en décembre 2006 et avait constaté la précarité de l'installation,
- qu'ils étaient donc en mesure de se convaincre de certaines défaillances dans la structure et les équipements de l'appartement,
- qu'ils n'apportaient pas la preuve d'une réticence dolosive et intentionnelle de la part des vendeurs,
- qu'une expertise était inutile puisque Monsieur F... avait déjà donné un avis technique.
Le Tribunal déboutait en conséquence Monsieur X... et Mademoiselle Y... de leurs demandes et les condamnait au paiement de la somme de 2. 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par acte en date du 22 mai 2008 Monsieur Sébastien X... et Mademoiselle Karine Y... ont relevé appel de cette décision.
Ils exposent que les travaux préconisés par Monsieur F... et réalisés n'ont pas permis de remédier aux désordres comme l'atteste un constat d'huissier du 10 janvier 2008 ainsi que plusieurs témoignages.
Ils maintiennent que la clause d'exclusion de garantie contenue dans l'acte de vente est inopérante puisque leur demande tend à la nullité de l'acte.
Ils soutiennent que leur consentement a été vicié par une erreur sur la substance de la chose dès lors que l'appartement objet de la transaction n'était pas conforme aux règles d'urbanisme ;
Ils rappellent que l'immeuble où se trouve leur appartement était à l'origine une maison comportant un garage au rez-de-chaussée, un logement au premier étage et un grenier au second, et que le garage et le grenier ont été aménagés en habitation sans aucune autorisation.
Ils font valoir que le grenier ne pouvait être aménagé en logement dès lors que la hauteur de plafond était inférieure à 1,80 mètre.
Ils soutiennent que la conformité du bien vendu étant une condition déterminants de leur engagement ils sont recevables et bien fondés à invoquer la nullité de la vente sur le fondement de l'article 1110 du Code Civil.
Ils maintiennent par ailleurs que leurs vendeurs ont commis un dol par réticence en ne les informant par des nuisances sonores existantes ni des travaux réalisés pour transformer cet immeuble familial sans autorisation légale.
Ils exposent que Madame G... qui occupait les mêmes lieux avant eux a connu les mêmes problèmes de nuisances sonores.
Ils versent au débat une attestation de Monsieur H... carreleur ayant cassé le carrelage du sol du deuxième étage et qui déclare que le chapiste a refusé de couler une dalle entre les premier et deuxième étage en raison d'un risque de surcharge et d'effondrement, tout en précisant qu'une chape liquide ne pourrait atténuer les bruits.
Ils exposent qu'ils ont déménagé depuis janvier 2008 et doivent régler un loyer.
Ils demandent la réformation du jugement déféré et le bénéfice de leur acte introductif d'instance.
Ils sollicitent, outre la satisfaction de leurs demandes initiales, 15. 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et 8. 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Messieurs Georges et Eric Z... soutiennent que la demande est irrecevable en vertu de la clause inscrite à la page 6 de l'acte de vente en vertu de laquelle :
" l'acquéreur.... prendra les biens vendus dans l'état où ils se trouveront le jour de l'entrée en jouissance sans aucune garantie de la part du vendeur pour raison :
- soit de l'état du sol ou du sous-sol de l'immeuble à raison de fouilles ou excavations qui auraient pu y être pratiquées,
- soit de l'état des biens vendus, de l'immeuble dont ils dépendent, des vices de toute nature apparents ou cachés dont ils peuvent être affectés... "
Ils exposent que l'appartement litigieux a été loué entre 2000 et 2004 et que les locataires n'ont invoqué aucun problème de bruit.
Ils soutiennent que la demande est irrecevable en raison de la transaction intervenue le 24 septembre 2007.
Ils réfutent les moyens et arguments de Monsieur X... et Mademoiselle Y... et sollicitent la confirmation de la décision déférée.
Ils demandent 5. 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et 5. 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

DISCUSSION

Attendu que le jugement déféré a rejeté les deux moyens d'irrecevabilité tirés par les consorts Z... de la clause de non-garantie figurant à la page 6 de l'acte de vente et de l'existence d'une transaction supposée mettre un terme au litige ; que la Cour adoptant les motifs du Tribunal déclarera recevable l'action en nullité (et non pas en garantie des vices cachés) engagée par Monsieur X... et Mademoiselle Y... ;

Attendu qu'il résulte de l'ensemble des pièces versées au débat que Monsieur X... et Mademoiselle Y... ont acheté un appartement situé au premier étage d'une maison qui comporte un appartement au rez-de-chaussée et un autre au deuxième étage ;
Attendu qu'il est constant que cette maison construite au début du XXème siècle comportait à l'origine un garage au rez-de-chaussée, un logement au premier étage et des combles au dessus ; qu'elle n'a donc pas été conçue pour être divisée en trois appartements ;
Attendu qu'il résulte du rapport de consultation de Monsieur F... que la construction a fait l'objet de transformations pour diviser le bâtiment en trois lots habitables sans véritable ingénierie et sans correction acoustique pour éviter les incidents sonores tels que les bruits d'impacts de circulation des occupants ou les chocs d'objets sur le sol, que cet expert estime que le principal désordre est l'absence d'insonorisation des sols ;
Attendu qu'il résulte du constat d'huissier du 10 janvier 2008 que les pas des occupants du deuxième étage provoquent des bruits, des tremblements de cloisons et des vibrations au point que l'on peut suivre les déplacements ;
Attendu qu'il est ainsi manifeste que malgré l'exécution des travaux préconisés par Monsieur F... le logement de Monsieur X... et Mademoiselle Y... subit des nuisances sonores rendant son occupation intolérable, et ne respecte pas la réglementation imposant un niveau d'isolement à obtenir vis-à-vis des bruits issus des logements voisins ;
Attendu que Monsieur X... et Mademoiselle Y... qui souhaitaient vivre paisiblement dans ce logement ont été victimes d'une erreur sur une qualité substantielle de ce bien, à savoir une isolation acoustique conforme à la réglementation en vigueur, et qu'il est manifeste qu'ils n'auraient pas acheté ce bien s'ils avaient eu connaissance de ces désordres, lesquels ne sont apparus que postérieurement lors de l'occupation du deuxième étage par Monsieur D... et Mademoiselle E... ;
Attendu qu'il y a lieu de prononcer l'annulation de la vente sur le fondement de l'article 1110 du Code Civil ;
Attendu que les consorts Z... seront condamnés à restituer le prix de vente et à payer à Monsieur X... et Mademoiselle Y... :
-12. 233 euros correspondant aux frais de notaire,
-12. 644, 73 euros correspondant aux travaux d'aménagement,
-10. 000, 00 euros au titre du préjudice de jouissance,
-3. 000, 00 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,

Vu l'article 1110 du Code Civil,

Déclare l'action recevable,
Infirme le jugement déféré,

Prononce l'annulation de la vente passée le 29 décembre 2006 devant Maître Marie Anne I... notaire à GIVORS (Rhône) entre Monsieur Eric Z... et Monsieur Georges Z... vendeur, Monsieur Sébastien X... et Mademoiselle Karine Y... acquéreur, portant sur les lots 2, 4 et 6 d'un immeuble en copropriété situé ... à GRIGNY (Rhône) cadastré A0 56 d'une surface de 5 a 93 ca,

Condamne Messieurs Eric et Georges Z... à payer à Monsieur X... et Mademoiselle Y... les sommes suivantes :

- CENT QUATRE VINGT MILLE EUROS (180. 000 EUROS) à titre de restitution du prix,
- DOUZE MILLE DEUX CENT TRENTE TROIS EUROS (12. 233 EUROS) correspondant aux frais de notaire,
- DOUZE MILLE SIX CENT QUARANTE QUATRE EUROS SOIXANTE TREIZE CENTS (12. 644, 73 EUROS) correspondant aux travaux d'aménagement,
- DIX MILLE EUROS (10. 000 EUROS) en réparation du préjudice de jouissance,
- TROIS MILLE EUROS (3. 000 EUROS) en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

Ordonne la publication du présent arrêt à la conservation des hypothèques,

Condamne Messieurs Eric et Georges Z... aux dépens de première instance et d'appel, avec pour ces derniers droit de recouvrement direct au profit de la Société Civile Professionnelle (SCP) AGUIRAUD-NOUVELLET, Société d'avoués.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Ct0596
Numéro d'arrêt : 08/03379
Date de la décision : 21/10/2008

Analyses

CONTRATS ET OBLIGATIONS CONVENTIONNELLES - Consentement - Erreur - Erreur sur la substance - Erreur sur une qualité substantielle - Définition - Portée

Est constitutive d'une qualité substantielle de la chose au sens de l'article 1110 du Code civil l'isolation acoustique conforme à la réglementation en vigueur sur laquelle il peut être commis une erreur, notamment quant à la réalité de cette conformité et qu'il est manifeste que l'acquéreur n'aurait pas acheté le bien s'il en avait eu connaissance.En l'espèce, bien que les désordres relatifs au défaut d'isolation ne soient apparus que postérieurement à l'achat, l'absence d'insonorisation des sols est le résultat direct d'une transformation du bâtiment antérieure à la vente et réalisée sans ingénierie et sans correction acoustique. Dès lors, cette absence d'insonorisation des sols entraîne l'annulation de la vente pour erreur sur les qualités substantielles portant sur le défaut d'insonorisation de l'immeuble au titre de l'article 1110 du Code civil.


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Lyon, 13 mai 2008


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2008-10-21;08.03379 ?
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