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09/10/2008 | FRANCE | N°07/01750

France | France, Cour d'appel de Lyon, Ct0109, 09 octobre 2008, 07/01750


COUR D'APPEL DE LYON Troisième Chambre Civile SECTION A

ARRÊT DU 09 Octobre 2008

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 01 mars 2007- N° rôle : 2007f657

No R. G. : 07 / 01750

Nature du recours : Appel

APPELANT :

Monsieur Ilario Luciano Guiseppe X... né le 20 mai 1925 à ALGER ... 69001 LYON

représenté par Me André BARRIQUAND, avoué à la Cour
assisté de Me Céline FLOTARD, avocat au barreau de LYON
INTIMES :
Maître Jean-Philippe Z..., mandataire judiciaire agissant en qualité

de liquidateur de M. Ilario X... ...69003 LYON

représenté par la SCP DUTRIEVOZ, avoués à la Cour

Monsieur LE PROCU...

COUR D'APPEL DE LYON Troisième Chambre Civile SECTION A

ARRÊT DU 09 Octobre 2008

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 01 mars 2007- N° rôle : 2007f657

No R. G. : 07 / 01750

Nature du recours : Appel

APPELANT :

Monsieur Ilario Luciano Guiseppe X... né le 20 mai 1925 à ALGER ... 69001 LYON

représenté par Me André BARRIQUAND, avoué à la Cour
assisté de Me Céline FLOTARD, avocat au barreau de LYON
INTIMES :
Maître Jean-Philippe Z..., mandataire judiciaire agissant en qualité de liquidateur de M. Ilario X... ...69003 LYON

représenté par la SCP DUTRIEVOZ, avoués à la Cour

Monsieur LE PROCUREUR GENERAL Près la Cour d'Appel de LYON 2 rue de la Bombarde 69005 LYON

représenté par Monsieur Michel GIRARD, avocat général
Instruction clôturée le 04 Juillet 2008
Audience publique du 10 Septembre 2008

LA TROISIÈME CHAMBRE SECTION A DE LA COUR D'APPEL DE LYON,

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

Monsieur Bernard CHAUVET, Président Monsieur Bernard SANTELLI, Conseiller Madame Marie-Françoise CLOZEL-TRUCHE, Conseiller

DEBATS : à l'audience publique du 10 Septembre 2008 sur le rapport de Monsieur Bernard CHAUVET, Président

GREFFIER : la Cour était assistée lors des débats de Mademoiselle Patricia LE FLOCH, greffier

ARRET : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 09 Octobre 2008, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;
Signé par Monsieur Bernard CHAUVET, Président, et par Mademoiselle Patricia LE FLOCH, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Monsieur Ilario X... exerce une activité commerciale de vente de chaussures et par jugement réputé contradictoire en date du 30 janvier 2007, le Tribunal de commerce de LYON, saisi à l'initiative du Ministère Public, constatant son état de cessation des paiements, a prononcé à son encontre l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire, Maître Z... étant désigné en qualité de mandataire liquidateur.

Le 14 mars 2007, Monsieur Ilario X... a relevé appel de cette décision.
Il expose qu'à la suite de la saisie de ses marchandises par le Trésor Public, il a été expulsé de ses locaux commerciaux le 30 août 2006 et il sollicite la suspension des poursuites par application de l'article 100 de la loi du 31- en réalité 30- décembre 1997 sur les rapatriés réinstallés dans une profession non salariée, du fait de sa saisine de la Commission nationale d'aide au désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariés.
Monsieur X... conclut à l'infirmation du jugement et à la suspension des poursuites.
Maître Z... ès qualités réplique que Monsieur Ilario X... ne produit pas aux débats la preuve de sa condition de rapatrié ni de l'existence d'un dossier qu'il aurait déposé et qu'il ne justifie pas que sa demande serait recevable et qu'il soit toujours en attente de la décision de la juridiction administrative compétente.
Il conclut à la confirmation du jugement entrepris.
Le Ministère Public relève que les éléments essentiels du fonds de commerce de Monsieur Ilario X... ont disparu, et que faute pour lui de produire la preuve de sa demande de suspension des poursuites, le jugement doit être confirmé.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 13 novembre 2007.
Par arrêt en date du 7 février 2008, la Cour a sursis à statuer sur les demandes et invité les parties à interroger la Préfecture du RHÔNE et la Commission nationale d'aide au désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée (CONAIR), à justifier du sort de la demande présentée par Monsieur Ilario X... les 8 février et 26 juillet 1999.
Maître Z... ès-qualités indique qu'il a consulté la Préfecture du RHÔNE qui lui a précisé que la Commission nationale d'aide au désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariés avait rejeté la demande de Monsieur Ilario X... et que ce dernier ne justifiait pas avoir exercé un recours contre cette décision.
Il rappelle les décisions de la Cour de cassation qui retient que la suspension automatique des poursuites est contraire à la Convention européenne des droits de l'Homme, que les difficultés financières de l'appelant ne sont pas nées de sa qualité de rapatrié et que ses difficultés sont nées de contrôles fiscaux ayant conduit à des redressements importants compte tenu de la fraude opérée par les consorts X... .
Maître Z... ès qualités conclut à la confirmation du jugement.
Monsieur Ilario X... n'a pas conclu à nouveau mais a produit aux débats les justificatifs de ses recours.
Le Ministère Public s'en rapporte à justice sur les pièces communiquées.
L'affaire a été clôturée par ordonnance du 4 juillet 2008.

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu qu'il résulte des pièces produites que le 28 janvier 1988, Monsieur Ilario X... a sollicité le bénéfice d'un prêt de consolidation en vertu d'une loi du 16 juillet 1987 relative au règlement de l'indemnisation des rapatriés et que par décision du 7 mars 1997, la Commission d'Aide aux Rapatriés réinstallés (CODAIR) a rejeté sa demande de prêt ;

Que Préfet du RHÔNE a rejeté sa demande de recours gracieux et que cette décision a été contestée devant le Tribunal administratif de LYON qui l'a débouté de sa demande le 14 décembre 1999, décision confirmée par la Cour administrative d'Appel de LYON le 12 octobre 2004 ;
Que le 2 mai 2005, le Conseil d'Etat a donné acte à Monsieur Ilario X... de son désistement ;
Attendu que le 8 février 1999, Monsieur Ilario X... a demandé à être admis au nouveau dispositif de la Commission nationale d'aide au désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée (CONAIR) et qu'il a été déclaré inéligible par décision du 18 octobre 2000 ;
Que le 8 février 2002, Monsieur Ilario X... a saisi le Préfet du RHÔNE a fin de bénéficier du dispositif de désendettement des rapatriés issu du décret du 4 juin 1999, demande rejetée par la CONAIR le 12 mai 2004, puis par le Premier Ministre ;
Attendu que le 7 novembre 2006, sur recours à l'encontre de cette décision, le Tribunal administratif de LYON, a débouté Monsieur Ilario X... de sa requête ;
Que Monsieur Ilario X... a interjeté appel de ce jugement devant la Cour administrative d'Appel de LYON qui n'a pas encore statué ;
Attendu que l'état des créances fait apparaître des dettes d'un montant de 491 942 euros, constituées essentiellement par des dettes vis à vis du TRESOR PUBLIC ;
Attendu que si l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales permet à l'Etat de limiter le droit d'accès à un tribunal dans un but légitime, c'est à la condition que la substance même de ce droit n'en soit pas atteinte et que, si tel est le cas, les moyens employés soient proportionnés à ce but ;
Attendu que les dispositions relatives au désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée résultant notamment des articles 100 de la loi n° 97-1269 du 30 décembre 1997 et 2 du décret n° 99-469 du 4 juin 1999, organisent, sans intervention du juge, une suspension automatique des poursuites d'une durée indéterminée, portant atteinte dans leur substance même aux droits des créanciers privés de tout recours alors que le débiteur dispose de recours suspensifs devant les juridictions administratives ;
Qu'en l'espèce, Monsieur Ilario X..., qui sollicite en vain depuis 20 ans l'application des dispositions relatives aux rapatriés, n'émet aucune contestation à l'encontre des dettes figurant sur l'Etat des créances, qui fait notamment apparaître des réclamations au titre de l'impôt sur les revenus de 1998 à 2002 ;
Attendu que le Tribunal de commerce relève, sans être contredit, qu'une salariée n'est pas payée de son salaire de décembre 2006, que l'URSSAF a opéré la saisie du stock de marchandises du fait du non-paiement de cotisations et le propriétaire des locaux a fait procéder à l'expulsion de Monsieur Ilario X... le 5 août 2006 ;
Attendu que les recours exercés par Monsieur Ilario X... à l'encontre de la décision de la CONAIR est sans influence sur le droit des créanciers, consacré par l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, d'obtenir, à travers une procédure collective demandée par le Ministère Public, le règlement de tout ou partie de leurs créances, les limitations apportées aux droits des créanciers des rapatriés par la législation invoquée, apparaissant en l'espèce disproportionnées par rapport au but poursuivi ;
Attendu dès lors, la cessation des paiements de Monsieur Ilario X... étant avérée et que l'absence d'exploitation du commerce depuis deux années rendant impossible le redressement judiciaire, il convient de confirmer le jugement déféré ;
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,
Vu l'arrêt du 7 février 2008,
Confirme le jugement,
Rejette les autres demandes,
Condamne Monsieur Ilario X... aux dépens, ceux d'appel étant recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Ct0109
Numéro d'arrêt : 07/01750
Date de la décision : 09/10/2008

Analyses

RAPATRIE - Mesures de protection juridique - Suspension provisoire des poursuites (article 100 de la loi du 30 décembre 1997 complété par l'article 25 de la loi du 30 décembre 1998).

La mise en oeuvre par l'Etat de la limitation du droit d'accès à un tribunal dans un but légitime reconnu par l'article 6 § 1 de la Convention de Sauvegarde des droits de l'Homme et des Libertés Fondamentale est subordonnée à ce que ce droit n'en soit pas atteint dans sa substance et que si tel devait en être le cas, alors les moyens employés soient proportionnels au but poursuivi.C'est ainsi que les dispositions relatives au désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée (article 100 Loi nº 97-1269 du 30/09/1997, article 2 Décret nº 99-469 du 04/06/1999), permettent d'organiser sans intervention du juge une suspension automatique des poursuites, pour une durée indéterminée. Ces mesures portant atteinte dans la substance même des droits des créanciers du rapatrié puisque ceux-ci se trouvent privés de tout recours alors que le débiteur rapatrié dispose toujours de recours suspensifs, le juge doit alors contrôler que l'application de cette législation n'est pas disproportionnée au regard du but poursuivi. En l'espèce, l'applications des articles susvisés est disproportionnée dès lors que l'état de cessation des paiements du débiteur rapatrié est avéré, à un point tel que tout redressement judiciaire est impossible (dette due au Trésor Public de 491.942 euros, expulsion du local commercial, non-exploitation du commerce depuis 2 ans).


Références :

article 6 § 1 de la Convention de Sauvegarde des droits de l'Homme et des Libertés Fondamentale, article 100 Loi nº97-1269 du 30/12/1997, article 2 Décret nº99-469 du 04/06/1999

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Lyon, 01 mars 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2008-10-09;07.01750 ?
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