COUR D'APPEL DE LYON Troisième Chambre Civile SECTION B
ARRET DU 03 Juillet 2008
Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 21 juin 2007- N° rôle : 2006j1921
N° R. G. : 07 / 04877
Nature du recours : Appel
APPELANTE :
Société BOULANGERIE DE L'EUROPE SA 1, rue Louis Vérel 51100 REIMS
représentée par la SCP LAFFLY-WICKY, avoués à la Cour
assistée de Me Alain ROCH, avocat au barreau de REIMS
INTIMEE :
Société EZDO SAS, prise en la personne de Monsieur Jean-Marc Y..., son président en exercice, 100, rue des Fougères Bâtiment Lyon Ouest 69009 LYON
représentée par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, avoués à la Cour
assistée de Me Sandrine CLOCHER-DOBREMETZ, avocat au barreau de LYON
Instruction clôturée le 01 Avril 2008
Audience publique du 05 Juin 2008
LA TROISIÈME CHAMBRE SECTION B DE LA COUR D'APPEL DE LYON,
COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :
Madame Laurence FLISE, Président Madame Christine DEVALETTE, Conseiller Monsieur Alain MAUNIER, Conseiller
DEBATS : à l'audience publique du 05 Juin 2008 sur le rapport de Madame Laurence FLISE, Président
GREFFIER : la Cour était assistée lors des débats de Madame Joëlle POITOUX, Greffier
ARRET : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 03 Juillet 2008, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;
Signé par Madame Laurence FLISE, Président, et par Madame Joëlle POITOUX, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Le 6 juin 2004 la société EZDO, qui exerce une activité d'import-export et distribution de produits agroalimentaires, a conclu avec la société LANTERNA ALIMENTARI Genova Spa, fabrique industriellement et commercialise des produits de boulangerie, une convention de prestation de services en s'engageant à fournir à son co-contractant toute l'assistance nécessaire au développement de la commercialisation de ses produits à l'international.
Le 10 janvier 2005 la société EZDO, dont le gérant était M. Jean-Marc Y..., a conclu avec la société BOULANGERIE DE L'EUROPE, qui était devenue la filiale à 100 % de la société LANTERNA ALIMENTARI Genova Spa et dont le président du conseil d'administration était M. Jean-Marc Y..., une convention de prestation de services en s'engageant à fournir à son co-contractant l'assistance nécessaire au développement de la commercialisation de ses produits à l'international. Cette convention avait une durée d'un an à compter du 1er janvier 2005, une tacite reconduction était prévue à l'issue de cette période mais chacune des parties pouvait y mettre un terme par lettre recommandée envoyée au plus tard six mois avant la fin de la période en cours. Chacune des parties avait également la faculté, en cas de modification dans l'identité des dirigeants, associés ou actionnaires des parties, de résilier le contrat par lettre recommandée avec avis de réception moyennant un délai de préavis de trente jours, à compter de la réception par tout moyen de l'information relative à la modification de l'identité de ces personnes.
Au mois de juin 2005 M. Jean-Marc Y... a été révoqué de ses fonctions de président de la société BOULANGERIE DE L'EUROPE.
Après avoir vainement réclamé le règlement des factures établies en exécution du contrat du 10 janvier 2005 pour le dernier trimestre de l'année 2005 et les trois premiers trimestres de l'année 2006, la société EZDO a fait assigner la société BOULANGERIE DE L'EUROPE devant le tribunal de commerce de Lyon.
La société BOULANGERIE DE L'EUROPE a contesté la réalité de la créance alléguée et réclamé reconventionnellement l'allocation de dommages et intérêts.
Par jugement en date du 21 juin 2007 le tribunal de commerce de Lyon a condamné la société BOULANGERIE DE L'EUROPE à payer à la société EZDO une somme principale de 62 790 € HT majorée des intérêts au taux légal à compter de l'assignation ainsi qu'une somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et a débouté les parties du surplus de leurs demandes.
La société BOULANGERIE DE L'EUROPE a interjeté appel de cette décision le 17 juillet 2007.
Aux termes de ses dernières écritures elle conclut à l'infirmation du jugement entrepris et au rejet de toutes les demandes présentées par la société EZDO. Elle demande à la Cour de constater la résiliation de la convention du 10 janvier 2005 ou, à tout le moins, de prononcer sa résolution. Elle réclame l'allocation d'une somme de 20 000 € à titre de dommages et intérêts ainsi que d'une somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient successivement que la convention du 10 janvier 2005 :
- n'a pas été approuvée dans les formes prévues par l'article L 227-10 du code de commerce
-a été résiliée, avec effet au 31 décembre 2005, d'un commun accord entre les parties à la fin du mois de juillet 2005 comme le démontre un compte-rendu de réunion adressé le 27 juillet 2005 par M. A..., nouveau responsable de la société BOULANGERIE DE L'EUROPE, à la société EZDO, qui n'a élevé aucune contestation
-a été résiliée, en application de la clause d'intuitu personae, par lettre recommandée avec accusé de réception adressée le 14 novembre 2005
- n'a plus été exécutée par la société EZDO à partir du 4e trimestre de l'année 2005.
Elle conteste la pertinence des pièces versées aux débats par la société EZDO pour démontrer l'exécution de ses prestations à la fin de l'année 2005 et courant 2006.
Elle met en doute la probité de M. Jean-Marc Y..., auquel elle reproche de n'avoir fait état de la convention datée du 10 janvier 2005 qu'au mois de juillet 2005, d'avoir quitté ses fonctions de président sans restituer le véhicule mis à sa disposition, d'avoir réclamé le règlement de factures indues et d'avoir agi déloyalement en cherchant notamment à lui faire perdre sa clientèle.
Aux termes de ses dernières écritures la société EZDO conclut à la confirmation du jugement entrepris et demande en outre que lui soient allouées une somme de 15 000 € à titre de dommages et intérêts ainsi qu'une somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient :
- que, comme le confirme une mention manuscrite, la convention du 10 janvier 2005 a bien été remise par ses soins, avant l'assemblée générale de l'année 2005, au commissaire aux comptes de la société BOULANGERIE DE L'EUROPE
-que l'analyse faite par la société BOULANGERIE DE L'EUROPE du compte-rendu adressé par M. A... est erronée, ce compte-rendu démontrant en réalité que les parties entendaient poursuivre leurs relations
-que la société BOULANGERIE DE L'EUROPE n'a jamais procédé, dans les formes contractuellement prévues, à la résiliation de la convention du 10 janvier 2005 et a, au contraire, accepté de régler la facture établie pour le troisième trimestre de l'année 2005
- qu'elle a elle-même continué à exécuter, même après le mois de septembre 2005, de nombreuses prestations pour la société BOULANGERIE DE L'EUROPE.
Elle se plaint d'une rupture brutale de relations contractuelles qui lui aurait fait supporter la charge d'un salarié embauché pour assister la société BOULANGERIE DE L'EUROPE et qui l'aurait contrainte à trouver de nouveaux partenaires.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 1er avril 2008.
SUR CE :
Attendu que la société BOULANGERIE DE L'EUROPE, si elle dénonce une violation des dispositions de l'article L 227-10 du code de commerce, ne tire aucune conséquence juridique de cette violation ;
Attendu que la preuve d'une résiliation de la convention du 10 janvier 2005 décidée d'un commun accord au mois de juillet 2005 ne peut être tirée ni du compte-rendu de M. A..., qui n'est signé par aucune des parties, ni du silence observé par la société EZDO à la réception de ce compte-rendu annonçant seulement la signature d'un avenant qui fixerait au 31 décembre 2005 le terme de la convention ;
Attendu que la lettre recommandée avec accusé de réception adressée le 14 novembre 2005 par la société BOULANGERIE DE L'EUROPE à la société EZDO ne contient aucune claire manifestation de la volonté de faire usage de la faculté de résiliation offerte par la clause d'intuitu personae (cette faculté étant la seule qui pouvait encore être exercée à la date du 14 novembre 2005) ; que le simple rappel du contenu d'entretiens antérieurs (au cours desquels aurait été évoquée une résiliation pour d'autres motifs) ne peut être considérée comme l'expression d'une telle volonté ;
Attendu que la société EZDO n'établit pas qu'elle a exécuté, postérieurement à décembre 2005, la mission confiée par la convention du 10 janvier 2005 ;
Que les contrats de travail et les courriels versés par elle aux débats pour justifier de ses diligences sont tous antérieurs au mois de septembre 2005 à l'exception d'un seul qui concerne des déplacements effectués par des collaborateurs de la société EZDO au mois de septembre et au mois d'octobre 2005 ;
Que les commandes passées au début de l'année 2006 mentionnent le nom de la société LANTERNA et non celui de la société BOULANGERIE DE L'EUROPE ;
Attendu que la société BOULANGERIE DE L'EUROPE apparaît, dès lors, bien fondée à demander que la résiliation de la convention du 10 janvier 2005 soit prononcée aux torts de la société EZDO qui a, pour l'année 2006, réclamé le paiement de prestations inexécutées ;
que la demande de paiement présentée par la société EZDO ne sera accueillie qu'à concurrence de la somme de 12 558 € correspondant au montant de la facture établie pour le dernier trimestre de l'année 2005 ;
Attendu que la société EZDO, dont le comportement fautif se trouve à l'origine de la rupture des relations entre les parties, sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts ;
Attendu que la société BOULANGERIE DE L'EUROPE, qui n'établit pas la réalité du préjudice qu'elle allègue (sans en préciser la nature), sera également déboutée de sa demande de dommages et intérêts ;
Attendu que l'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de la société BOULANGERIE DE L'EUROPE ;
PAR CES MOTIFS :
La Cour
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté les parties de leurs demandes de dommages et intérêts
Infirme pour le surplus le jugement entrepris et statuant à nouveau
Prononce la résiliation, à compter du 31 décembre 2005 et aux torts de la société EZDO, la résolution de la convention du 10 janvier 2005
Condamne la société BOULANGERIE DE L'EUROPE à payer à la société EZDO une somme de 12 558 € majorée des intérêts au taux légal à compter du 7 juin 2006
Condamne la société EZDO à payer à la société BOULANGERIE DE L'EUROPE une somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires
Condamne la société EZDO aux dépens de première instance et aux dépens d'appel qui seront distraits au profit de la SCP Laffly Wicky, avoué.