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07/05/2008 | FRANCE | N°07/07075

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3b, 07 mai 2008, 07/07075


COUR D'APPEL DE LYONTroisième Chambre Civile SECTION B

ARRET DU 07 Mai 2008

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de SAINT ETIENNE du 11 octobre 2007 - N° rôle : 2006/2409

N° R.G. : 07/07075
Nature du recours : Appel

APPELANTE :
Société F.L.J SARL, poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice550, boulevard de la PlageRoute du Levant la Favière83230 BORMES LES MIMOSAS
représentée par Me BARRIQUAND, avoué à la Cour
assistée de Me Jacques GUILLEMIN, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE :r>Société DISTRIBUTION CASINO FRANCE SAS, poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice24, r...

COUR D'APPEL DE LYONTroisième Chambre Civile SECTION B

ARRET DU 07 Mai 2008

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de SAINT ETIENNE du 11 octobre 2007 - N° rôle : 2006/2409

N° R.G. : 07/07075
Nature du recours : Appel

APPELANTE :
Société F.L.J SARL, poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice550, boulevard de la PlageRoute du Levant la Favière83230 BORMES LES MIMOSAS
représentée par Me BARRIQUAND, avoué à la Cour
assistée de Me Jacques GUILLEMIN, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE :
Société DISTRIBUTION CASINO FRANCE SAS, poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice24, rue de la Montat42000 SAINT-ETIENNE
représentée par la SCP BRONDEL-TUDELA, avoués à la Cour
assistée de la SELARL Pierre CUSSAC, avocats au barreau de PARIS

Audience publique du 27 Mars 2008

LA TROISIÈME CHAMBRE SECTION B DE LA COUR D'APPEL DE LYON,

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :
Madame Laurence FLISE, PrésidentMadame Christine DEVALETTE, Conseiller Monsieur Alain MAUNIER, Conseiller
DEBATS : à l'audience publique du 27 Mars 2008sur le rapport de Monsieur Alain MAUNIER, Conseiller

GREFFIER : la Cour était assistée lors des débats de Madame Joëlle POITOUX, Greffier
ARRET : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 07 Mai 2008, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Signé par Madame Laurence FLISE, Président, et par Madame Joëlle POITOUX, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
************** Le 1er juin 1999 la société F.L.J. a signé avec la société MEDIS, aux droits de laquelle vient aujourd'hui la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE, un contrat de franchise pour l'exploitation saisonnière d'une superette à l'enseigne SPAR à BORMES-LES-MIMOSAS (83) pour une durée allant jusqu'au 14 juin 2004.
Par avenant signé le 22 mars 2002, les parties sont convenues de prolonger la durée de la franchise de sept années à compter du 1er avril 2002.
Par lettre recommandée du 19 avril 2006, la société F.L.J. a demandé à la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE de lui "adresser dorénavant chaque semaine un cadencier spécifique des fournisseurs référencés pour l'ensemble des produits rentrant dans le référencement du réseau SPAR... de manière à (lui) permettre d'entrer directement en contact avec ces producteurs et fournisseurs référencés, de manière à (lui) permettre de connaître leurs conditions tarifaires et de s'approvisionner chez eux le cas échéant".
Par courrier du 11 août 2006, visant la clause résolutoire insérée au contrat de franchise, la société F.L.J. a formulé une nouvelle fois sa réclamation.
Par courrier du 6 septembre 2006, la société CASINO lui a communiqué un document intitulé "suivi des fournisseurs agréés".
La société F.L.J., se déclarant non satisfaite par cette communication, par lettre du 27 septembre 2006, a fait savoir à la société CASINO qu'elle constatait acquise à son profit la clause résolutoire insérée au contrat de franchise.
Les parties ont saisi le tribunal de commerce de SAINT-ETIENNE, la société F.L.J. afin de voir statuer sur les conséquences de la résiliation à son profit, la société CASINO afin de voir condamner la société F.L.J. à replacer l'enseigne et exécuter le contrat jusqu'à son terme.
Par jugement 11 octobre 2007, le tribunal de commerce de SAINT-ETIENNE, après avoir joint les instances, a :
- dit n'y avoir lieu à statuer dans l'attente de l'issue de l'information ouverte sur constitution de partie civile de la société F.L.J.
- dit que le contrat doit être poursuivi jusqu'à son terme, soit le 31 mars 2009,
- condamné la société F.L.J. à réinstaller l'enseigne SPAR ainsi que tous les éléments propres à la franchise, dans le délai de 10 jours suivant la signification du jugement, cela sous astreinte de 800 € par jour de retard,
- rejeté la demande de nomination d'un expert formulée par la société F.L.J.
- fait application de l'article 700 du (nouveau) code de procédure civile en faveur de la société CASINO
- débouté la société CASINO de ses autres demandes.
La société F.L.J. a interjeté appel le 8 novembre 2007, et a été autorisée à assigner à jour fixe par ordonnance du 10 janvier 2008.
Dans ses uniques conclusions déposées au greffe le 5 février 2008, et expressément visées par la Cour, elle sollicite la réformation du jugement du 11 octobre 2007 en toutes ses dispositions, et demande à la Cour de :
1/ à titre principal :
- constater le caractère effectif de la résiliation de plein droit du contrat de franchise du 1er juin 1999, aux torts exclusifs de la société CASINO à la suite de la mise en oeuvre de la clause résolutoire ;
- débouter la société CASINO de sa demande d'exécution forcée du contrat ;
2/ subsidiairement :
- prononcer la résiliation judiciaire du dit contrat aux torts et griefs exclusifs de la société CASINO ;
- condamner la société CASINO au paiement de la somme de 13 635 € au titre de l'article 13d du contrat de franchise ;
- désigner un expert avec la mission de se faire communiquer la liste de l'ensemble des fournisseurs et producteurs référencés pendant la période d'exécution du contrat, et vérifier le montant des ristournes, remises arrières et avantages financiers perçus par la société CASINO pendant la période considérée et déterminer le montant des avantages correspondant aux achats effectués par la société F.L.J. et devant lui revenir ;

3/ en tout état de cause :
-faire application en sa faveur des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle indique à titre préliminaire que le sursis à statuer demandé en première instance n'a plus lieu d'être.
Ensuite, elle fait valoir que :
- il n'y a pas lieu à exécution forcée du contrat dont la société CASINO a accepté la résiliation, ce qui ressort des courriers adressés le 4 octobre 2006 à la société F.L.J. et aux époux Z..., comme cautions des engagements du franchisé ;
- la liste fournie le 6 septembre 2006 était inexploitable.
Elle explique avoir signé l'avenant du 22 mars 2002 afin de bénéficier d'un budget d'enseigne.
A l'appui de sa demande subsidiaire aux fins de résiliation judiciaire du contrat, elle expose que :
- depuis 2003, elle a été victime d'erreurs répétitives de livraison et a exprimé son mécontentement à la société CASINO ;
- les carences de la société CASINO lui ont été d'autant plus préjudiciables qu'elle subissait la concurrence d'un supermarché CASINO, distant de moins de 2 km, vendant des produits identiques à des prix inférieurs et bénéficiant d'un approvisionnement plus large ;
- elle a pu constater que la plupart des produits étaient vendus à des prix inférieurs à ceux qui lui étaient facturés sur entrepôt ;
- sous l'apparence d'un contrat de franchise, il s'agissait d'un contrat d'approvisionnement sans conditions préférentielles, et en fait exclusif puisque de manière générale le franchisé ne peut s'approvisionner chez les fournisseurs agréés ;
- le prétendu savoir faire du franchiseur dans l'approvisionnement et la logistique, dont il se vantait à l'origine, n'existait pas ;
- la somme réclamée de 13 635 € correspond à l'indemnité prévue à l'article 13d du contrat, à titre de clause pénale en faveur du franchiseur en cas de rupture aux torts du franchisé.
A l'appui de sa demande d'expertise concernant les remises et ristournes, elle soutient que les remises et ristournes consenties par les producteurs et franchiseurs, qui pour l'essentiel découlent d'accords de coopération commerciale prévoyant des prestations effectuées par les franchisés, devraient leur profiter.
Enfin, sur les sommes demandées par la société CASINO, qui réclame à titre subsidiaire le prononcé de la résiliation du contrat de franchise aux torts du franchisé, elle expose que :
- le franchiseur ne pourrait prétendre qu'à la somme prévue à l'article 13 du contrat de franchise, correspondant au montant de la redevance annuelle multiplié par le nombre d'années restant à courir jusqu'au terme du contrat ;
- au titre du remboursement du budget d'enseigne, prévu par l'avenant du 22 mars 2002 en cas de rupture aux torts du franchisé, la société CASINO ne pourrait prétendre qu'à 50% du budget d'enseigne, soit 9 910 € ;
- la perte de marge sur approvisionnement ne rentre pas dans l'indemnisation forfaitaire prévue au contrat ; de plus, en l'absence d'une clause d'approvisionnement exclusif, ou même de quotas, elle n'est pas fondée ;
- la perte d'emplacement n'est pas justifiée : la société CASINO exploite à proximité un supermarché et une superette, dont il a favorisé le développement au détriment de son franchisé SPAR ;
- la clause de non concurrence incluse dans le contrat de franchise, qui interdit au franchisé, en cas de rupture du contrat à ses torts, une activité identique à celle du franchiseur, notamment sous l'enseigne d'un groupe concurrent, pendant une année et dans un rayon de 3 km, est nulle, du fait qu'elle entraîne la perte définitive du commerce;
Sur ce dernier point, la société F.L.J. souligne le fait que depuis la rupture elle exploite son fonds de commerce de manière indépendante et ne s'est affiliée à aucune enseigne.
Aux termes de ses uniques conclusions, déposées au greffe le 14 janvier 2008, et expressément visées par la Cour, la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE demande :
- la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a ordonné la poursuite du contrat de franchise jusqu'à son terme soit le 31 mars 2009 ;
- l'infirmation du jugement en ce qu'il n'a pas statué sur la demande de la société concluante aux fins d'indemnisation des conséquences de la non exécution du contrat, et en conséquence condamner la société F.L.J. à lui payer :
* la somme de 8 800 € pour la période du 29 septembre 2006 au 15 octobre 2006 ;
* la somme de 110 000 € pour la période du 15 février 2007 au 15 octobre 2007 ;
* la somme de 550 € par jour pendant les périodes où l'enseigne SPAR ne sera pas fixée au magasin à compter du 15 février 2008.
A titre subsidiaire, la société CASINO demande à la Cour de constater la résiliation du contrat aux torts exclusifs du franchisé, et la condamnation de ce dernier à lui payer :
- la somme de 18 458 € au titre de la perte des redevances d'enseigne et de publicité ;
- la somme de 204 095 € au titre de la perte de marge sur approvisionnement ;
- la somme de 70 000 € au titre de la perte d'emplacement ;
- la somme de 9 910 € au titre du remboursement du budget d'enseigne ;
- la somme de 150 000 € au titre de la violation de la clause de non concurrence.
Enfin elle sollicite une indemnité pour ses frais d'instance hors dépens.
En premier lieu, elle expose le contexte du litige, qui, comme plusieurs autres, est né de la tentative d'un groupe concurrent de débaucher ses franchisés.
En deuxième lieu, elle expose :
- avoir apporté au franchisé une enseigne, un savoir faire, une assistance et plus généralement un concept ;
- avoir approvisionné la société F.L.J. comme un grossiste, aux prix fixés dans un tarif annexé au contrat de franchise ;
- avoir donné satisfaction au franchisé, qui le 22 mars 2002 a signé un avenant prolongeant le contrat jusqu'au 31 mars 2009 ;
- ne pas avoir l'obligation contractuelle de fournir au franchisé la liste des fournisseurs, que celui-ci connaît nécessairement puisque les marques figurent sur les produits, mais seulement une liste de produits de fournisseurs agréés ;
- que le franchisé est libre de s'approvisionner auprès de tiers en produits référencés, ce qu'a fait la société F.L.J. à hauteur de 40 à 45 % de son chiffre d'affaires ;
- que cette dernière ne pouvait donc mettre en oeuvre la clause résolutoire après la lettre de mise en demeure.
En troisième lieu, elle conteste les griefs qui lui sont faits concernant :
- les problèmes logistiques, dont elle dit qu'il s'agit d'incident mineurs, ajoutant qu'elle n'avait pas l'obligation de satisfaire l'intégralité des commandes, encore moins dans un délai donné, et que le grief n'est pas invoqué dans la mise en demeure du 11 août 2006 ;
- la vente par le supermarché CASINO situé à proximité à des prix publics inférieurs à ceux des approvisionnements du franchisé ; selon elle, cela ne concernerait que très peu de produits, et, de surcroît, ne constituerait pas une faute de sa part ;
- la prétendue absence de savoir faire du franchiseur : le grief est apparu dans les dernières conclusions de la société F.L.J. après sept années d'exécution du contrat, pendant lesquelles elle a pu développer son commerce grâce à la notoriété de l'enseigne et des produits.
En quatrième lieu, elle conteste avoir accepté la résiliation du contrat de franchise, indiquant que les lettres adressées à la société F.L.J. et aux cautions le 4 octobre 2006, où elle a pris acte de la résiliation à l'initiative du franchisé, avaient pour but de préserver ses droits, précisant que le contrat prévoyait expressément, en son article 19, que le non exercice d'un recours par le franchiseur à l'encontre du franchisé, n'affectait pas son droit concernant tout manquement du franchisé, même pour celui qui n'a pas fait de réclamation immédiate.
Elle demande donc l'exécution forcée du contrat et l'indemnisation de son préjudice pendant les périodes de fermeture, sur la base de 550 € par jour.
En cinquième lieu, à l'appui de sa demande subsidiaire en indemnisation du préjudice résultant de la résiliation, elle allègue les préjudices suivants :- perte de redevance : prévue à l'article 13d du contrat en cas de rupture avant terme aux torts du franchisé : 11 291 €, avec application d'un taux de 0,45% sur un chiffre d'affaires pendant 30 mois évalué à 2 509 K€ ;
- perte de la participation publicitaire : 7 257 € avec un taux de 0,30% sur les mêmes bases ;
- perte de marge sur approvisionnement en produits de la marque Casino pendant la même durée : 204 095 €, compte tenu d'un taux de marge de 20,65% pour ce magasin qui s'approvisionnait auprès du franchiseur à hauteur de 55% de ses achats ;
- perte d'emplacement, en raison de l'atteinte à la valeur du réseau : 70 000 € ;
- violation de la clause de non-concurrence, prévue pendant un an dans un rayon de 3 km : 150 000 € ; la somme étant calculée sur la base d'une perte de chance de percevoir la redevance pendant la durée normale d'un contrat de franchise, soit 7 années ; elle soutient que la clause, qui est limitée dans le temps et dans l'espace, et se trouve proportionnée aux intérêts légitimes du franchiseur, et notamment à la protection de son savoir faire, est valable.
Elle ajoute à ces demandes le remboursement de 50% du budget d'enseigne, prévu à l'annexe 4 de l'avenant du 22 mars 2002, soit 19 820 / 2 = 9 910 €.
Sur les demandes de la société F.L.J., elle énonce que :
- le préjudice n'est pas prouvé ; de plus, il est aberrant de la part du franchisé de demander le paiement à son profit d'une clause pénale prévue en faveur du franchiseur et calculée sur la base de la redevance, que précisément il ne paiera plus ;
-en l'absence d'obligation du franchiseur de reverser aux franchisés les remises et ristournes consentis par les fournisseurs et producteurs, la demande d'expertise doit être rejetée.

SUR CE :

Sur la demande de constatation de la résiliation :
En application de l'article 13 b) du contrat de franchises :
" (...) En cas d'inexécution ou de manquement par l'une des parties à l'une quelconque de ses obligations, l'autre partie pourra, après mise en demeure par lettre recommandée avec avis de réception non suivie d'effet dans un délai d'un mois, résilier de plein droit le présent contrat par l'envoi d'une nouvelle lettre recommandée... et ce sans formalité judiciaire".
Selon l'article 5-1, in fine "pour les produits référencés livrés directement par les fournisseurs agréés, le franchiseur communique au franchisé la liste continuellement mise à jour, leur définition et les procédures de commandes, livraisons et commandes".
Dans la lettre de mise en demeure du 11 août 2006, la société FLJ a sommé la société CASINO de transmettre la liste des fournisseurs et producteurs référencés depuis le 1er juin 1999, conformément à l'article 6, et pour chacun d'entre eux le nom des personnes en charge de réceptionner les commandes avec leur adresse.
La société CASINO est fondée à dire que la mise en demeure, qui mêle les notions de fournisseurs agréés et de produits référencés, était imprécise, et donc impropre à entraîner la résiliation de plein droit du contrat à défaut d'exécution de la société CASINO dans le mois de la réception.
De surcroît, le 11 septembre 2006, suite à la mise en demeure, la société CASINO a communiqué à la société FLJ une liste "à jour" de fournisseurs agréés, tout en contestant son obligation à cet égard, et le cadencier du mois de septembre.
La société FLJ ne démontre pas en quoi la liste des fournisseurs agréés communiquée par la société CASINO aurait été inexploitable parce qu'incomplète, alors que celle-ci mentionne pour chacun des fournisseurs les noms, les adresses, la plupart du temps avec l'indication des numéros de téléphone, et les familles de produits concernés, parfois désignés par un code, et que le cadencier de septembre 2006, communiqué en même temps, indique pour chaque produit le nom du fournisseur.
La mise en demeure, à la supposer valable, n'aurait donc pas pu entraîner la résiliation du contrat.
On peut relever encore que la découverte par la société FLJ des manquements de la société CASINO en la matière est singulièrement tardive, puisqu'intervenant après sept années d'exécution du contrat sans aucune réclamation pendant cette période, ce qui permet de douter de la bonne foi du franchisé dans la mise en jeu de l'article 13 b) du contrat.
En conséquence, la société FLJ ne peut qu'être déboutée de sa demande en constatation de la résiliation du contrat.

Sur la demande aux fins de résiliation judiciaire du contrat :
Sur les erreurs de logistique
La société FLJ se prévaut de problèmes survenus en 2003 et qui auraient perduré. Cependant, si elle justifie, par la production des lettres ou télécopies des 18 juillet, 20 août et 26 août 2003, des doléances qu'elle a adressées à la société CASINO en 2003, aucune pièce n'est versée concernant les années 2004 et 2005. Il n'est donc pas démontré que les problèmes ont perduré. Quant aux difficultés de 2003, elles sont impropres à justifier une demande de résiliation formée en 2006.
Pour l'année 2006, la société FLJ produit :
- un premier courrier du 19 avril 2006, relatif à de "nouvelles difficultés d'approvisionnement", après les problèmes de février et mars dus au fractionnement et au décalage des livraisons, relatives à des manquants pour le week-end de Pâques ;
- un deuxième courrier du 2 août 2006, déplorant la chute de deux rolls à l'ouverture du camion de livraison, et à l'intérieur la présence de plusieurs rolls couchés, écrasés ou déformés, outre un nombre croissant de manquants ;
- un fax du 10 août 2006, relatif à la non livraison de produits d'épicerie et de produits frais.
Ces trois incidents ne présentent pas en eux-mêmes un facteur de gravité tel qu'ils justifieraient la résiliation du contrat, et la société FLJ ne produit pas d'éléments établissant que de tels incidents se produisaient de manière habituelle et concernaient une part importante des commandes.
Ensuite, elle ne produit aucun élément justificatif d'un préjudice financier ou commercial qu'elle aurait subi pendant la période considérée.
Par ailleurs, la lettre de mise en demeure du 11 août 2008 ne vise pas ce grief.
Enfin, aux termes de l'avenant n° 4 au contrat de franchise, signé le 22 mars 2002, et "Livraison et Transports", alinéa 2, "Les délais de livraison prévus lors des commandes ne sont donnés qu'à titre indicatif et les retards éventuels ne donnent pas le droit d'annuler la vente, de refuser la marchandise ou de réclamer des dommages-intérêts". A fortiori, les manquements allégués ne peuvent justifier la résiliation du contrat de franchise.
Sur les prix "entrepôt" supérieurs aux prix en supermarché
La société CASINO n'a souscrit envers la société franchisée aucun engagement à cet égard. En outre, il n'est pas précisé, et encore moins justifié, par la société FLJ que le supermarché CASINO proche a été ouvert après la signature du contrat de franchise.
Sur l'opposition de la société CASINO à l'acquisition par la société FLJ du supermarché SPAR à LA FLORANE
Au préalable, on ne peut que relever que ce grief anéantit les autres.
Au fond, le refus de la société CASINO de consentir à la société FLJ un autre contrat de franchise, à le supposer injustifié ou abusif, ne saurait entraîner la résiliation du contrat de franchise en cours d'exécution.
Sur l'absence de savoir-faire
Dans ses écritures la société FLJ dénonce une tromperie évidente et l'inexistence du savoir-faire de la société CASINO.
Cependant, dans le courriel adressé le 20 août 2003 à la société CASINO, relatif aux problèmes de logistiques rencontrés alors, la société FLJ, après quatre années d'exécution du contrat, proclame qu'elle est notoirement "un fervent défenseur de l'enseigne SPAR, de son concept, de son dynamisme et de la qualité de son écoute commerciale". Elle ne soutient, ni ne démontre, qu'elle a formulé ce compliment sous la contrainte, ou dans le but d'obtenir un avantage quelconque.
De même, l'avenant le 22 mars 2002 prolongeant la durée du contrat de franchise de sept années, même s'il a été signé par la société FLJ afin de bénéficier d'un budget d'enseigne, contredit les reproches relatifs à l'absence de savoir faire du franchiseur.
En conséquence, la demande aux fins de prononcé de la résiliation du contrat n'est pas fondée, et ne peut qu'être rejetée.

Sur la demande d'expertise concernant les avantages financiers consentis par les producteurs et fournisseurs :
L'article 5-alinéa 1, du contrat de franchise, prévoit donc que :
"Le franchiseur négocie directement avec les producteurs et fournisseurs et agit en tant que centrale de référencement et d'achat pour l'ensemble des produits, et ce pour le compte du réseau, dans son intégralité".
La mention dans le contrat de ce que la société MEDIS négocie avec les producteurs et fournisseurs "pour le compte" du réseau ne caractérise ni un mandat, ni un contrat de commission, en premier lieu du fait que le "réseau" n'a pas la personnalité morale, et en second lieu du fait que le franchiseur :
- comme centrale d'achat, achète en son nom et pour son propre compte, et revend aux franchisés,
- comme centrale de référencement, agit comme un courtier, sans autre obligation que de communiquer aux adhérents du réseau, selon l'article 5-1, alinéa 2, in fine, du contrat, "la liste (des produits référencés) continuellement mise à jour, leur définition et les procédures de commandes, livraisons et paiement".
Ces dispositions n'ouvrent aucun droit du franchisé au reversement des remises et ristournes consenties au franchiseur par les producteurs fournisseurs.
Le fait que le contrat ne prévoit aucune modalité, ni procédure, de redistribution entre d'une part le franchiseur et les franchisés, d'autre part entre les franchisés, le confirme.
L'absence de réclamations à ce titre de la société FLJ pendant les six premières années d'exécution du contrat confirme encore qu'il n'était pas dans l'intention des parties, au moment de la signature du contrat, de faire bénéficier directement les franchisés de ces avantages.
Il n'y a donc pas lieu d'instituer l'expertise sollicitée.

Sur les demandes de la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE :
Il y a donc eu rupture anticipée du contrat aux torts du franchisé.
Sur la demande d'exécution forcée du contrat
Par courrier du 4 octobre 2006 la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE a informé la société FLJ de sa décision de saisir la juridiction compétente afin d'obtenir réparation de son préjudice du fait de la résiliation anticipée du contrat, rappelé l'effet immédiat de la résiliation et l'interdiction d'usage de ses marques sans son autorisation, et mis en demeure la société FLJ de cesser tout acte de contrefaçon, et notamment de descendre l'enseigne.
Elle n'est donc pas fondée à demander aujourd'hui la continuation du contrat jusqu'à son terme.
L'article 19 du contrat, aux termes duquel elle se réserve le droit d'exercer tout recours en cas de défaut, omission ou manquement quelconque du franchisé à ses obligations, même en l'absence de réclamation immédiate, est impropre à rétablir un droit auquel elle a explicitement renoncé.
Sur la perte de redevance
L'article 13 d) du contrat de franchise prévoit, en cas de résiliation anticipée du contrat aux torts du franchisé :" (...) Le franchisé devra payer au franchiseur une somme fixée au montant de la redevance annuelle multiplié par le nombre d'années à courir jusqu'à l'année du terme du contrat avec un minimum de douze mois".
Le contrat devait courir jusqu'au 31 mars 1999, soit pendant encore 30 mois. La pénalité réclamée, d'un montant de 18 458 € n'est pas contestée en son montant.
Sur le remboursement du budget d'enseigne
Selon l'article 4 de l'avenant no4 au contrat de franchise en date du 22 mars 2002, en cas de rupture aux torts du franchisé avant le 31 mars 2007, celui-ci remboursera au franchiseur la moitié du budget d'enseigne. La demande, d'un montant de 9 910 € n'est pas contestée.
Sur les demandes au titre de la perte de redevance et de la perte d'emplacement
En application de l'article 1152, alinéa 1, du code civil :
"Lorsque la convention porte que celui qui manquera de l'exécuter payera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre".
En l'espèce, il ne peut donc être alloué à la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE au titre de la rupture anticipée des indemnités autres que celles prévues à l'article 13 d) du contrat de franchise et à l'article 4 de l'avenant n° 4, qui constituent des clauses pénales. Les demandes faites au titre de la perte de marge sur approvisionnement et de la perte d'emplacement seront donc rejetées.
Sur la violation de la clause de non concurrence
En application de l'article 13 d), 2e et 3e alinéa, du contrat de franchise :
"En outre (dans le cas de rupture anticipée du contrat aux torts du franchisé avant l'échéance) le franchisé s'interdit d'exploiter ou de participer d'une quelconque manière, directement ou par personne interposée, à l'exploitation la gestion, l'administration, le contrôle d'un fonds de commerce ou d'une entreprise ayant une activité identique ou similaire à l'unité en franchise, et de s'affilier, d'adhérer ou de participer de quelque manière que ce soit, à une chaîne concurrente du franchiseur, ou d'en créer une lui-même, et plus généralement de se lier à tout groupement, organisme ou entreprise concurrente du franchiseur".
"Cette interdiction sera valable pendant un an dans un rayon... de trois kilomètres du supermarché...".
La clause est donc limitée dans le temps et dans l'espace, comme dans son objet.
Elle est proportionnée aux intérêts du franchiseur qui a apporté au franchisé un savoir faire, dont celui-ci a reconnu la réalité et la valeur dans le mail du 14 août 2003, rappelé supra.
En conséquence, le fait que pendant la période considérée, la clause interdirait au franchisé l'exercice dans le local concerné d'une activité commerciale concurrente, même de manière indépendante, n'est pas de nature à entraîner sa nullité.
La demande est donc fondée en son principe à l'encontre de la société FLJ, qui ne conteste pas qu'une activité concurrente de celle du franchiseur est exercée dans les lieux, dont il importe peu qu'elle ne soit pas exercée sous une enseigne concurrente de celle de la société CASINO.
Le préjudice subi par la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE sera fixé à 12 000 €, correspondant à peu près, selon les éléments au dossier, à la perte de la seule redevance d'enseigne qui aurait été perçue si le contrat était allé à son terme normal.
Sur les demandes accessoires
Il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile du code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties.
PAR CES MOTIFS :
La Cour
Infirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a condamné la société FLJ aux dépens de première instance
Déboute la société FLJ de l'ensemble de ses demandes
Constate que le contrat a été rompu aux torts du franchisé
En conséquence condamne la société FLJ à payer à la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE la somme de 18 458 € au titre de la perte des redevances
La condamne à payer à la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE la somme de 9 910 € au titre du remboursement du budget d'enseigne
La condamne à payer à la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE la somme de 12 000 € à titre de dommages-intérêts pour violation de la clause de non concurrence
Déboute la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE du surplus de ses demandes
Condamne la société FLJ aux dépens, avec distraction au profit de la SCP BRONDEL et TUDELA, avoués, sur son affirmation de droit.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3b
Numéro d'arrêt : 07/07075
Date de la décision : 07/05/2008
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : Tribunal correctionnel de Saint-Etienne, 11 octobre 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2008-05-07;07.07075 ?
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