R. G : 06 / 05914
décision du Tribunal de Grande Instance de BOURG EN BRESSE Au fond 2005 / 2195 du 10 juillet 2006
COUR D'APPEL DE LYON
8ème Chambre Civile
*
ARRÊT du 26 Mars 2008
APPELANTS :
Monsieur Jean- Pierre X... ......
représenté par la SCP BRONDEL- TUDELA, avoués à la Cour assisté de Me VILLEFRANCHE, avocat
Madame Viviane Z... épouse X... ......
représentée par la SCP BRONDEL- TUDELA, avoués à la Cour assistée de Me VILLEFRANCHE, avocat
EURL FARON CHRISTOPHE représentée par ses dirigeants légaux 55 route de la Haute Combe Les Marais 39400 MORBIER
représentée par Me MOREL, avoué à la Cour assistée de Me FAVOULET, avocat
INTIMEE :
SA ASSURANCES GENERALES DE FRANCE IART représentée par ses dirigeants légaux 87 rue Richelieu 75002 PARIS
représentée par la SCP LIGIER DE MAUROY- LIGIER, avoués à la Cour assistée de Me ARRUE, avocat
***** Instruction clôturée le 05 Novembre 2007 Audience de plaidoiries du 13 Février 2008
*****
La huitième chambre de la COUR d'APPEL de LYON,
composée lors des débats et du délibéré de :
* Jeanne STUTZMANN, présidente de la huitième chambre, qui a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries, * Martine BAYLE, conseillère, * Agnès CHAUVE, conseillère,
assistées lors des débats tenus en audience publique par Nicole MONTAGNE, greffière,
a rendu l'ARRET contradictoire suivant :
FAITS ET PRETENTIONS DES PARTIES
Jean- Pierre X... et son épouse Viviane Z... ont fait construire une maison d'habitation en 2002 à DIVONNE LES BAINS. Ils ont confié à l'EURL FARON la plâtrerie et le doublage des cloisons, par contrat en date du 2 février 2002, puis les peintures par devis accepté le 25 février 2002.
Les travaux ont été réceptionnés avec réserves le 19 juillet 2002.
Une expertise judiciaire a été ordonnée le 19 juillet 2002, expertise déclarée opposable à la SA AGF IART assureur de L'EURL FARON le 14 décembre 2004.
Par jugement rendu le 10 juillet 2006, le Tribunal de Grande Instance de BOURG EN BRESSE a :
- homologué le rapport d'expertise déposé par Patrick D...,
- condamné L'EURL FARON à payer aux époux X... la somme de 35. 065, 99 euros au titre de la reprise de l'ensemble des désordres et de la levée des réserves, déduction faite de la somme de 5. 784, 21 euros restant due par eux au titre des travaux, avec intérêts au taux légal à compter du 21 juillet 2005,
- condamné L'EURL FARON à payer aux époux X... la somme de 1. 000, 00 euros au titre de leur préjudice de jouissance complémentaire,
- condamné L'EURL FARON à payer aux époux X... la somme de 1. 500, 00 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
- débouté les époux X... du surplus de leurs demandes,
- débouté l'EURL FARON de ses demandes plus amples ou contraires,
- débouté la SA AGF IART de ses demandes plus amples ou contraires,
- dit que le présent jugement sera exécutoire dès sa signification,
- condamné l'EURL FARON aux dépens qui comprendront les frais d'expertise et de référé.
Par déclaration en date du 13 septembre 2006, les époux X... ont interjeté appel de ce jugement.
L'EURL FARON a également interjeté appel de ce jugement par déclaration du 22 septembre 2006.
Les époux X... concluent à la confirmation du jugement en ce qu'il a prononcé la condamnation de l'EURL FARON à réparer leur préjudice résultant des désordres affectant leur villa sauf à préciser que la somme de 35. 065, 99 euros avait déjà pris en compte la déduction faite du coût des travaux restant dus par eux et à la réformation en ce qu'il a mis hors de cause la compagnie AGF.
Ils demandent à la Cour de condamner la compagnie AGF conjointement et solidairement avec l'EURL FARON à leur payer le coût des désordres tel qu'évalué par l'expert à l'exception de ceux ayant fait l'objet de réserves à la réception, de condamner L'EURL FARON et AGF chacun à leur payer la somme de 1. 000, 00 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et à supporter les dépens avec distraction au profit de la SCP BRONDEL et TUDELA.
Ils soutiennent que les désordres ayant fait l'objet de réserves à la réception sont couverts par la garantie de parfait achèvement et que les désordres apparus après réception relèvent de la garantie décennale ou de la garantie de bon fonctionnement voire de la garantie contractuelle.
Ils relèvent que le caractère généralisé et évolutif de la fissuration constitue une impropriété de l'immeuble à sa destination et que le délai de prescription biennale de la garantie de bon fonctionnement a été interrompu par la délivrance de l'assignation en référé du 17 juillet 2003.
La SA compagnie AGF IART conclut au rejet des demandes présentées à son encontre. A titre subsidiaire, elle demande la limitation du montant des condamnations éventuelles à la somme de 33. 413, 74 euros, l'application de la franchise contractuelle égale à 10 % du montant des dommages sans pouvoir excéder la somme de 1. 825, 12 euros indexée et la condamnation des époux X... et de l'EURL FARON à lui payer la somme de 1. 000, 00 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens avec distraction au profit de la SCP LIGIER de MAUROY- LIGIER.
Elle fait valoir que les désordres ayant fait l'objet de réserves (défauts d'équerrage de certaines cloisons) ne peuvent relever de la garantie décennale et de la garantie de bon fonctionnement qui sont les seules garanties couvertes par elle.
S'agissant des fissures affectant les parements intérieurs, elle relève que celles- ci ne compromettent pas la solidité de l'immeuble ni ne le rendent impropre à sa destination et ne peuvent donc relever de la garantie décennale.
Elle considère que les appelants ne peuvent pas non plus se prévaloir de la garantie de bon fonctionnement pour ces désordres, faute de l'avoir mise en oeuvre dans le délai légal de deux ans à réception des travaux.
Elle précise que l'assignation en référé diligentée en 2003 ne faisait nullement état de ces fissures et ne peut donc avoir interrompu le délai de prescription.
L'EURL FARON conclut à la réformation du jugement rendu tout en se reconnaissant redevable des désordres ayant fait l'objet de réserves pour un montant de 1. 652, 25 euros qu'il convient de compenser avec le solde de facture restant du de 3. 183, 22 euros de sorte que la Cour après compensation, condamnera les époux X... à lui payer la somme de 1. 485, 97 euros.
Sur les désordres postérieurs à la réception, elle sollicite la garantie des AGF et à titre subsidiaire si le moyen de prescription invoqué par les AGF était retenu, demande à la Cour de constater que la prescription lui est également acquise et de débouter les consorts X... de leurs demandes.
En toutes hypothèses, elle sollicite la condamnation de la société AGF à lui payer la somme de 1. 500, 00 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et les dépens avec distraction au profit de maître MOREL.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 5 novembre 2007.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur les désordres ayant fait l'objet de réserves
L'EURL FARON ne conteste pas devoir être tenue des désordres ayant fait l'objet de réserves, désordres relatifs à un défaut d'équerrage des cloisons.
L'expert a chiffré le coût de reprise de ces désordres à la somme de 1. 652, 25 euros, somme qui n'est pas contestée par les parties et qui sera donc retenue.
Sur les fissures
D'après le rapport de monsieur D..., les fissures affectant les cloisons, les doublages et les faux- plafonds de la maison, sont apparues après la réception des travaux du 19 juillet 2002, à la suite de la première année de chauffe.
L'expert indique que ces désordres présentent un caractère généralisé et évolutif, et que les parements ainsi affectés constituent des éléments d'équipement dissociables.
Il relève que les fissures sont dues à des défauts et des malfaçons, mettant en jeu la responsabilité de l'EURL FARON.
Les parties divergent sur l'application de la garantie décennale de l'article 1792 du Code Civil.
Cette garantie couvre les dommages qui compromettent la solidité de l'immeuble ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.
En l'espèce, l'expert n'a pas relevé que les fissures constatées rendaient l'immeuble impropre à sa destination ou compromettait la solidité de l'immeuble, se contentant de relever que les parements constituent des éléments d'équipement dissociables et que les revêtements de ces parements sont affectés dans leur fonction d'embellissement.
Nonobstant le caractère généralisé de ces fissures, la responsabilité de l'EURL FARON et de son assureur ne peut pas être recherchée sur le fondement des dispositions 1792 et 1792- 2 du Code Civil.
Les époux X... invoquent encore la garantie de parfait fonctionnement, la garantie de bon achèvement et la responsabilité contractuelle de l'EURL FARON.
Le maître d'ouvrage qui entend se prévaloir de la garantie de parfait achèvement ou de la garantie de bon fonctionnement doit engager son action dans un délai d'un an pour la première et de deux ans pour la seconde, soit respectivement avant les 19 juillet 2003 et 19 juillet 2004, la réception étant intervenue le 19 juillet 2002.
Les époux X... ont certes diligenté une action en référé tendant à la désignation d'un expert le 17 juillet 2003 mais cette assignation ne vise pas expressément les fissures litigieuses. En effet, les seuls désordres visés dans cette assignation sont les désordres ayant fait l'objet de réserves à la réception et des malfaçons évoquées dans un courrier du 24 novembre 2002. 0r, ce courrier du 24 novembre 2002 ne mentionne nullement ces fissures.
Seule l'assignation au fond délivrée le 21 juillet 2005 se réfère à ces fissures.
Dès lors, il apparaît que l'action des époux X... qui relève de la garantie biennale de bon fonctionnement est irrecevable.
Les dommages allégués relevant d'une garantie légale, en l'espèce la garantie de bon fonctionnement, la responsabilité contractuelle du constructeur ne peut pas être recherchée.
Il convient donc de confirmer le jugement entrepris par substitution de motif en ce qu'il a mis hors de cause la compagnie AGF IART et de l'infirmer en ce qu'il a condamné l'EURL FARON à réparer les désordres résultant des fissures.
Le préjudice complémentaire alloué par le premier juge au titre des opérations d'expertise et plus particulièrement des dégradations commises par l'expert dans le cadre de sa mission, dégradations qui ne concernent que les fissures ne pourra donc être retenu, le maître de l'ouvrage étant irrecevable dans sa demande à ce titre.
Sur le compte entre les parties
Au vu du rapport d'expertise qui n'est pas contesté par les parties, il apparaît que le montant des travaux réalisés par l'EURL FARON s'élève au total à la somme de 38. 204, 21 euros.
Sur cette somme, 35. 065, 99 euros ont été réglés par les époux X....
L'EURL FARON est encore redevable au titre de la levée des réserves de la somme de 1. 652, 25 euros aux époux X....
Il en résulte que les époux X... après compensation de ces différentes sommes seront condamnés à payer à l'EURL FARON la somme de 1. 485, 97 euros et seront déboutés de leurs demandes.
L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit des parties.
Compte- tenu des désordres relevés par l'expert et de l'absence de levée volontaire par l'EURL FARON des réserves, il y a lieu de faire masse des dépens y compris les frais d'expertise et de les mettre par moitié à la charge des époux X... et de l'EURL FARON.
PAR CES MOTIFS La Cour,
Confirme le jugement rendu en ce qu'il a débouté les époux X... et l'EURL FARON de leurs demandes à l'encontre de la compagnie AFG IART, par substitution de motifs.
L'infirme pour le surplus.
Statuant à nouveau,
Déclare irrecevables les demandes présentées par Jean- Pierre X... et son épouse Viviane Z... au titre des fissures à l'encontre de l'EURL FARON.
Condamne Jean- Pierre X... et son épouse Viviane Z... à payer à l'EURL FARON la somme de 1. 485, 97 euros.
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Fait masse des dépens d'instance et d'appel qui seront supportés par moitié par Jean- Pierre X... et son épouse Viviane Z... et par l'EURL FARON, ces derniers étant distraits au profit des avoués de la cause, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Cet arrêt a été prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Jeanne STUTZMANN, présidente de la huitième chambre et par Nicole MONTAGNE, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.