La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/02/2008 | FRANCE | N°06/05805

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre civile 3, 07 février 2008, 06/05805


ARRÊT DU 07 Février 2008

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 18 juillet 2006-No rôle : 2004j3195

No R. G. : 06 / 05805

Nature du recours : Appel

APPELANTS :

Société ART PRINT SARL 35, quai Saint Vincent 69001 LYON 01

représentée par Me SCP BAUFUME-SOURBE, avoué à la Cour
assistée de Me Jean-Marc BAZY, avocat au barreau de LYON
Société PRESS VERCORS IMPRIMERIE SAS Zone Industrielle " La Maladière " 38160 SAINT SAUVEUR

représentée par Me BARRIQUAND, avoué à la Cour
assis

tée de Me Jean-Pascal CHAZAL, avocat au barreau de VALENCE
Maître Bernard Z..., mandataire judiciaire, liquidateur à la...

ARRÊT DU 07 Février 2008

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 18 juillet 2006-No rôle : 2004j3195

No R. G. : 06 / 05805

Nature du recours : Appel

APPELANTS :

Société ART PRINT SARL 35, quai Saint Vincent 69001 LYON 01

représentée par Me SCP BAUFUME-SOURBE, avoué à la Cour
assistée de Me Jean-Marc BAZY, avocat au barreau de LYON
Société PRESS VERCORS IMPRIMERIE SAS Zone Industrielle " La Maladière " 38160 SAINT SAUVEUR

représentée par Me BARRIQUAND, avoué à la Cour
assistée de Me Jean-Pascal CHAZAL, avocat au barreau de VALENCE
Maître Bernard Z..., mandataire judiciaire, liquidateur à la liquidation de la société ART'PRINT, nommé en cette qualité par le Tribunal de commerce de Lyon par jugement du 13 février 2007.... 69427 LYON CEDEX 03

représenté par Me SCP BAUFUME-SOURBE, avoué à la Cour
assisté de Me Jean-Marc BAZY, avocat au barreau de LYON
INTIMES :
Société PRESS VERCORS IMPRIMERIE SAS Zone Industrielle " La Maladière " 38160 SAINT SAUVEUR

représentée par Me BARRIQUAND, avoué à la Cour
assistée de Me Jean-Pascal CHAZAL, avocat au barreau de VALENCE
Société AXA FRANCE IARD SA Agissant par sa délégation Sud-Est Technopole de Ch Gombert Rue Max Planque 13453 MARSEILLE CEDEX 13

représentée par Me Christian MOREL, avoué à la Cour
assistée de la SCP MAURICE NICOLET RIVA VACHERON, avocats au barreau de LYON
Société SIRC SA Rue Edouard Herriot 10350 MARIGNY LE CHATEL

représentée par la SCP BRONDEL-TUDELA, avoués à la Cour
assistée de la Société d'avocats FIDAL, avocats au barreau d'AUBE
Société ART PRINT SARL 35, quai Saint Vincent 69001 LYON 01

représentée par Me SCP BAUFUME-SOURBE, avoué à la Cour
assistée de Me Jean-Marc BAZY, avocat au barreau de LYON
Maître Bernard Z..., mandataire judiciaire, liquidateur à la liquidtion de la société ART'PRINT, nommé en cette qualité par le Tribunal de commerce de Lyon par jugement du 13 février 2007.... 69427 LYON CEDEX 03

représenté par Me SCP BAUFUME-SOURBE, avoué à la Cour
assisté de Me Jean-Marc BAZY, avocat au barreau de LYON

Instruction clôturée le 30 Novembre 2007

Audience publique du 10 Janvier 2008 LA TROISIÈME CHAMBRE SECTION B DE LA COUR D'APPEL DE LYON,

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

Madame Laurence FLISE, Président Madame Christine DEVALETTE, Conseiller Monsieur Alain MAUNIER, Conseiller

DEBATS : à l'audience publique du 10 Janvier 2008 sur le rapport de Madame Christine DEVALETTE, Conseiller

GREFFIER : la Cour était assistée lors des débats de Madame Joëlle POITOUX, Greffier

ARRET : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 07 Février 2008, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Signé par Madame Laurence FLISE, Président, et par Madame Joëlle POITOUX, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

**************

En mai 2002, la société ART'PRINT, société d'édition, a commandé à la société PRESS VERCORS IMPRIMERIE, ci-après PRESS-VERCORS, la fabrication matérielle d'un livre d'Art consacré au sculpteur Josepha avec une livraison prévue fin juillet 2002.

La société PRESS-VERCORS a sous-traité à la société BD BRILLANCE ET JND COUPE le vernissage et la découpe d'une feuille en Conqueror 300g et à la société SIRC la reliure de l'ouvrage dont le tirage était fixé à 1 530 exemplaires dont 1 500 numérotés. La société PRESS-VERCORS a ensuite établi un devis pour un prix total de 69 942 € qui a été accepté et a donné lieu à un bon de commande du 30 mai 2002.
A la suite de retards et malfaçons, la société ART'PRINT a assigné en référé ces deux sociétés et la société AXA FRANCE IARD, ci-après AXA, assureur de la société PRESS VERCORS.
Par ordonnance du 24 juin 2003, le président du tribunal de commerce de LYON a condamné la société PRESS VERCORS à livrer 650 exemplaires manquants sous astreinte, sous réserve d'un paiement par la société ART'PRINT de 880 exemplaires déjà livrés et du solde de la facture à la livraison finale, et a désigné Monsieur A..., expert, lequel a déposé son rapport le 1er avril 2004.
Suite au dépôt du rapport, la société ART'PRINt a de nouveau saisi le tribunal de commerce en référé qui par ordonnance du 2 juin 2004 s'est déclaré incompétent.
Par exploit du 5 novembre 2004, la société ART'PRINT a assigné les sociétés PRESS-VERCORS, la société AXA et la société SIRC en condamnation solidaire pour faute lourde à l'indemniser à hauteur de 337 200 € avec exécution provisoire et une indemnité de procédure de 10 000 €.
Par jugement du 18 juillet 2006, le tribunal de commerce :
-a condamné la société PRESS VERCORS à verser la somme de 69 942 € à la société ART'PRINT, outre 1 500 € d'indemnité de procédure,
-a débouté la société ART'PRINT de ses demandes contre AXA et la société SIRC,
-a débouté la société PRESS VERCORS de ses demandes contre la société SIRC, pour forclusion, et l'a condamnée à payer à celle-ci une indemnité de procédure de 1 000 €,
-a débouté la société SIRC de ses demandes contre la société AXA et a alloué à celle-ci une indemnité de procédure de 750 €,
-a débouté la société SIRC de sa demande reconventionnelle en paiement de factures contre la société PRESS VERCORS, en raison des erreurs techniques commises,
-a ordonné l'exécution provisoire du jugement.
Par déclaration du 5 septembre 2006, la société ART'PRINT a interjeté appel du jugement contre les autres parties.
Par déclaration du 11 décembre 2006 la société PRESS VERCORS a interjeté appel du jugement contre les autres parties.
Par jugement du 13 février 2007, la société ART'PRINT a été placée en liquidation judiciaire et Maître Z... désigné comme mandataire liquidateur.
****
Aux termes de ses dernières écritures, déposées le 13 novembre 2007et qui sont expressément visées par la Cour, Maître Z..., es qualités demande qu'il soit jugé que les sociétés PRESS VERCORS et SIRC ont commis une faute lourde et que les clauses limitatives de responsabilité des usages professionnels et conditions générales de vente sont inapplicables à la cause et lui sont inopposables.
Il demande en conséquence la condamnation in solidum de ces sociétés et de l'assureur, AXA, à lui verser, ès qualités, les sommes suivantes :
-337 200 € au titre de son préjudice,
-8 000 € d'indemnité de procédure outre les dépens comprenant les frais d'expertise.
Maître Z..., ès qualités, fait valoir tout d'abord, au visa de l'article 1150 du code civil, que les usages professionnels invoqués ne sont pas applicables à l'espèce en raison de la faute lourde commise principalement par la société SIRC, caractérisée par la déchirure de la feuille CONQUEROR ensuite d'un pliage mécanisé et par une réparation de fortune, qualifié par l'expert de " bricolage ", alors qu'il s'agissait d'un ouvrage luxueux et à tirage limité, les feuilles de remplacement étant pliées à la main mais collées alors que le fil de couture tenant les autres feuilles a été coupé pour retirer les feuilles déchirées.
Il considère que la société PRESS VERCORS a elle-même commis une faute lourde en ne mettant pas suffisamment en garde son sous-traitant sur la perfection recherchée et en ne vérifiant pas la qualité du travail réalisé.
Il considère par ailleurs que son préjudice chiffré par le sapiteur de l'expert, concerne bien les préjudices immatériels (annulations de commande, pertes de marge, baisse d'activité) et doivent être couverts par AXA.
Concernant précisément ce préjudice, il fait valoir qu'à la suite du sinistre B..., la société ART'PRINT a perdu plusieurs commandes pour d'autres livres d'art subissant ainsi une perte de marge brute qui s'est prolongée sur 3 ans, et non sur une année comme retenu par le sapiteur, ainsi qu'une perte d'image qu'elle n'a pu restaurer ultérieurement.
Il chiffre la perte de marge brute à 238 091 € et la perte directement liée au dossier B... à 43 509 € outre les frais d'expertise et d'avocats chiffrés à 12 000 €, soit un préjudice global de 337 702 €.
****
Aux termes de ses dernières écritures, déposées le 11 septembre 2007 et qui sont expressément visées par la cour, la société PRESS VERCORS IMPRIMERIE demande l'infirmation du jugement :
-à titre principal, elle demande que l'action engagée contre elle par la société ART'PRINT soit déclarée irrecevable comme forclose,
-à titre subsidiaire, elle demande le rejet des prétentions de la société ART'PRINT qui ne justifie pas de son préjudice et qui peut tout au plus être indemnisée à hauteur des prestations effectuées avec compensation par rapport à la somme dont elle est débitice à son égard soit 87 829,82 € TTC,
-encore plus subsidiairement, elle demande à être relevée et garantie par le société SIRC de toute condamnation outre condamnation de celle-ci à l'indemniser de ses préjudices pour 120 441,76 €.
La société PRESS VERCORS demande à être garantie par son assureur, la société AXA des sommes mises à sa charge au titre des dommages immatériels subis par la société ART'PRINT, le rejet de toutes les demandes formées à son encontre et la condamnation in solidum de toutes les parties intimées à lui verser la somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
En application des usages professionnels dans les industries graphiques, rappelés dans les conditions générales figurant au verso des documents contractuels et notamment à l'article 15 de ses conditions générales de vente, la société appelante considère que la demande de la société ART'PRINT est forclose comme formée le 21 octobre 2002, donc au delà du délai de 4 jours ouvrables suivant la livraison des derniers exemplaires le10 octobre 2002.
La société appelante rappelle qu'il doit être à tout le moins fait application des stipulations de ce même article qui limitent sa responsabilité à la valeur des travaux exécutés soit 69 942 €, ce, en l'absence de faute lourde pouvant se déduire de son comportement.
La société PRESS VERCORS observe à cet égard que le préjudice allégué n'est pas établi car les annulations de commande d'ouvrages par des galeries d'art n'ont pas de rapport avec l'incident dans la production du livre Josepha, et, en second lieu, car les préjudices allégués pour l'annulation de la commande de ce livre ou sur une perte de vente et de marge commerciale, ne sont pas justifiés par les pièces produites, d'autant que les frais de retirage des livres Josepha litigieux ont été pris en charge par elle-même.
A titre subsidiaire, elle demande que les dommages-intérêts alloués viennent se compenser avec la facture due par la société ART'PRINT sur cette commande, soit 43 818,31 € et avec les autres factures postérieures de 44 011,51 € soit sur un total de 87 829,82 € TTC qui lui reste du, peu important, dans le cadre des dispositions de la loi du 26 juillet 2005 désormais, que cette 1ère facture n'ait pas été déclarée à la liquidation judiciaire (plus d'extinction de la créance mais non admission au passif à la répartition des dividendes).
Si elle était condamnée à des dommages-intérêts, la société PRESS VERCORS demande à être relevée et garantie par la société SIRC qui, selon le rapport d'expertise, est exclusivement responsable du sinistre, pour ses fautes professionnelles lourdes (déchirure des feuilles CONQUEROR 300g ayant donné lieu, pour leur remplacement par des feuilles pliées à la main, à la coupure des fils de couture et au collage de ces feuilles ce qui a entraîné le détachement des feuilles centrales), rappelant sur le délai de forclusion, que celui-ci est de 1 mois pour des travaux de brochure et reliure et que sa demande est donc recevable.
Elle demande que la société SIRC l'indemnise de son propre préjudice soit :
-43 818,31 € pour le non paiement de la facture par ART'PRINT du fait de sa liquidation judiciaire,
-76 623,45 € pour les frais de retirage des livres endommagés, sans application des limites de garantie du fait de sa faute lourde.
La société PRESS VERCORS demande enfin la garantie de son assureur AXA, non pas sur le remplacement des produits défectueux mais pour les dommages immatériels qu'aurait subis la société ART'PRINT, indépendamment de la clause de cantonnement du préjudice subi à la valeur de la prestation fournie qui correspond simplement à un plafond de garantie.
****
Aux termes de ses dernières écritures, déposées le 14 mai 2007 et qui sont expressément visées par la Cour, la société SIRC demande la confirmation du jugement qui a rejeté comme irrecevables ou infondées les demandes de ART'PRINT et de PRESS VERCORS à son encontre.
Elle demande la condamnation de la société PRESS VERCORS à lui verser la somme de 8 686,92 € et la condamnation de celle-ci et de la société ART'PRINT ou de l'une des deux, à lui verser solidairement la somme de 10 000 €.
A titre principal elle fait valoir que la demande de la société ART'PRINT est irrecevable à son encontre en l'absence de liens contractuels.
Subsidiairement, elle oppose à cette demande les usages professionnels en la matière dont la société ART'PRINT avait une parfaite connaissance, qui ne retiennent la responsabilité du brocheur qu'en cas de faute lourde, prévoient un délai de forclusion de 4 jours, en l'espèce dépassé par chacune des sociétés depuis la livraison du dernier ouvrage et une limitation de responsabilité du brocheur à trois fois le prix moyen du support.
Au demeurant, elle relève qu'aucune faute lourde, ni même faute simple n'est établie à son encontre, l'expert n'ayant nullement retenu que l'infime déchirure des feuilles CONQUEROR qui serait à l'origine des désordres et qui n'a concerné qu'un tiers des ouvrages livrés, lui serait imputable et les mesures réparatrices ayant été réalisées en plein accord de toutes les parties, sans que l'expert ait été en mesure de déterminer l'origine de la déchirure ou de préconiser un autre mode opératoire.
Elle conteste les éléments de préjudice allégués par la société ART'PRINT, notamment au titre de commandes annulées ou de pertes sur la fabrication du livre B..., sans preuve d'un lien avec le sinistre, ou au titre de perte de marges et d'image sans commune mesure avec la réputation internationale dont elle se prévaut et avec ses résultats nets.
Sur les demandes de la société PRESS VERCORS, et s'appuyant sur les usages d'une chambre syndicale visés dans ses conditions générales, mentionnées au verso des factures, la société SIRC rappelle là encore que sa responsabilité de brocheur n'est engagée qu'en cas de faute lourde qui n'est pas établie en l'espèce, sur contestation émise sous 4 jours de la mise à disposition des ouvrages qui a été dépassée et avec une limitation de responsabilité (à une fois la quantité de support imprimé ou trois fois la quantité de support non imprimé selon les usages retenus).
Concernant le préjudice invoqué par la société PRESS VERCORS, elle fait valoir :
-que les frais de retirage des couvertures, des feuilles de garde, et des pages intérieures ne lui sont pas imputables,
-que le retirage des 650 exemplaires ordonné par le juge des référés ne peut représenter 57 237,90 €,
Enfin, sur sa demande reconventionnelle, elle demande le paiement de deux factures restées impayées des 30 septembre et 31 octobre 2002.
****
Aux termes de ses dernières écritures, déposées le 7 novembre 2007 et qui sont expressément visées par la cour, la société AXA, assureur de la société PRESS VERCORS demande la confirmation du jugement et subsidiairement :
-de débouter la société ART'PRINT de sa demande, faute de preuve de son préjudice immatériel,
-de limiter sa garantie aux dommages immatériels avec un plafond de 272 218,15 € et déduction d'une franchise de 10 % avec un minimum de 545,01 €, opposable aux tiers,
Plus subsidiairement, elle demande à être relevée et garantie de toute condamnation par la société SIRC.
Elle demande la condamnation conjointe de la société PRESS VERCORS et de Maître Z..., es qualités à lui verser une indemnité de procédure de 3 000 €.

Elle rappelle que sa garantie ne s'applique pas aux risques d'entreprise mais aux dommages immatériels, et que la limitation de cette garantie comme la franchise sont opposables aux tiers en application de l'article L112-6 du code des assurances.

Sur le préjudice invoqué par la société ART'PRINT, la société AXA considère que celle-ci n'apporte pas la preuve que les commandes ou contrats n'ont pas été poursuivis en lien direct avec les faits litigieux ou que le préjudice lié au livre B... ait subsisté après la livraison de nouveaux ouvrages en remplacement de ceux défectueux.
Concernant le préjudice pour perte de chiffres d'affaires, elle considère qu'il fait double emploi avec la perte de commande et que la perte d'image n'est pas établie, observant enfin que les frais d'expertise et d'avocats doivent être compris dans l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 30 novembre 2007.
MOTIFS DE LA DECISION :

Les relations contractuelles entre la société ART'PRINT, société éditrice de livres d'Art, ayant commandé l'ouvrage, la société PRESS VERCORS, industriel graphique et la société SIRC, société industrielle de brochage sont régies par les usages professionnels applicables aux industries graphiques, même si les usages professionnels auxquels se réfèrent ces deux dernières dans leurs documents contractuels et dans leurs écritures n'émanent pas des mêmes instances syndicales, dans la mesure où, sur les points intéressants le présent litige, ils ne diffèrent que sur le délai de mise en oeuvre de la responsabilité de l'industriel brocheur (4 jours pour la Fédération de l'Imprimerie et de la Communication Graphique et un mois pour le Groupement des Métiers de l'Imprimerie).

Ces relations sont également régies, dans le cadre notamment de relations commerciales habituelles entre la société ART'PRINT et la société PRESS VERCORS, par les conditions générales de vente rappelées au verso des factures, dans la mesure où ces conditions ne sont pas contraires aux usages professionnels.
Ces usages professionnels qui instaurent, de manière identique pour les deux instances syndicales, une responsabilité de l'industriel graphique, maître d'oeuvre, tant sur ses propres travaux que sur ceux de ses sous-traitants vis à vis du client éditeur, ne sont cependant pas un obstacle à l'engagement de l'action directe par ce dernier contre le sous-traitant, sur le fondement de la responsabilité délictuelle de celui-ci.
Le jugement qui a déclaré irrecevable l'action engagée par Maître Z..., ès qualités, contre la société SIRC, doit être infirmé.
Concernant par ailleurs les actions engagées par ART'PRINT contre la société PRESS VERCORS ou par PRESS VERCORS contre la société SIRC et quel que soit le délai applicable en fonction des accords syndicaux visés, le moyen d'irrecevabilité tiré du non respect du délai de 4 jours ou d'un mois est inopérant dans la mesure ou ce délai n'a pas pu courir du fait de l'envoi direct par la société SIRC des livres à l'artiste B... ou aux galeries, à la demande de la société ART'PRINT, répercutée par la société PRESS VERCORS, un tel dispositif ne permettant pas de déterminer le point de départ du délai d'autant que le premier sinistre a été suivi de mesures réparatrices sur les ouvrages défectueux retournés ayant elles même occasionné un nouveau sinistre.

Le jugement qui a déclaré irrecevable pour forclusion l'action engagée par la société PRESS VERCORS contre la société SIRC doit être infirmé mais confirmé en revanche en ce qu'il a déclaré la société ART'PRINT recevable en son action contre PRESS VERCORS. Sur le fond, il ressort des pièces et du rapport d'expertise de Monsieur A..., que sur les 1 430 exemplaires de l'ouvrage B... livrés par la société SIRC après brochage,580 présentaient une déchirure à la " réserve découpée " du feuillet 53-56 et que cette déchirure n'a pu se produire, non pas au cours des opérations de décorticage réalisées par la société BD BRILLANCE mais qu'au cours des opérations de pliage effectuées mécaniquement par la société SIRC alors que la rigidité de la feuille Conqueror aggravée par l'apposition de vernis, aurait nécessité un pliage manuel. Les opérations de réparation réalisées ensuite par la société SIRC sur les exemplaires retournés n'ont pas permis de remédier, de manière durable et satisfaisante à cette difficulté et ont nécessité, la réfection des exemplaires manquants par une autre entreprise aux frais de la société PRESS VERCORS.

Aucune faute lourde, seule susceptible d'engager, selon les usages professionnels, la responsabilité de la société SIRC, n'est cependant caractérisée en l'espèce à l'encontre de celle-ci, la déchirure de quelques millimètres affectant seulement une feuille Conquéror sur un tiers des ouvrages brochés ne pouvant caractériser une telle faute, ou même une erreur technique de fabrication, selon les termes de l'article 408 de ces même usages professionnels, alors que le pliage manuel d'une feuille Conqueror ne constitue pas, pour cet industriel, dont les coûts de fabrication sont ainsi réduits, un procédé habituel ou qui lui aurait été spécialement commandé et qu'il aurait sciemment omis d'appliquer, manquant ainsi à une obligation essentielle ou commettant une négligence d'une extrême gravité confinant au dol.
Par ailleurs, aucune faute lourde ne peut être retenue contre la société SIRC, dans le cadre des mesures réparatrices, certes inadéquates, qu'elle a tenté de trouver, comme le préconisent les usages professionnels, dès lors que ces mesures ont été mises en oeuvre avec l'accord des autres parties et ne sont que la conséquence du sinistre initial.
Le jugement qui a débouté les sociétés ART'PRINT et PRESS VERCORS de leur action contre la société SIRC doit, par substitution de motifs, être confirmé comme il doit être confirmé sur le rejet de la demande de celle-ci en paiement de factures correspondant aux travaux défectueux qu'elle a réalisés.
A l'égard de la société ART'PRINT, la société PRESS VERCORS, industriel graphique qui a été chargé de la réalisation complète de l'ouvrage, considéré selon les usages de la profession, comme le coordinateur responsable à la fois de ses propres travaux et de ceux de ses sous-traitants, a commis une faute en n'assurant pas la livraison de 1 500 livres d'art exempts de toute défectuosité et en choisissant comme sous-traitant, un brocheur industriel, sans préconisations particulières.
Cette défaillance n'est cependant pas constitutive d'une faute lourde de nature à écarter la clause limitative de garantie prévue aux conditions générales de vente (article 15) et opposable à la société ART'PRINT, dans la mesure où elle ne constitue pas un manquement à une de ses obligations essentielles, malgré le haut degré de perfection exigé en la matière, tous les ouvrages présentant une légère déchirure dans la zone de découpe de la feuille centrale ayant fait l'objet, aux frais de la société PRESS VERCORS, d'un retirage qui a donné parfaite satisfaction.
Dans la limite de ce plafond de garantie fixé à 69 942 € et correspondant au montant de la commande, la société PRESS VERCORS doit donc indemniser du préjudice occasionné par le sinistre B... en termes de pertes de commandes et donc de perte de marges brutes, préjudice qui même en retenant les estimations basses de l'expert sur ce dernier poste seulement, hors perte d'image, est largement supérieur à ce plafond de garantie.
Le jugement qui a condamné la société PRESS VERCORS à verser cette somme à la société ART'PRINT, désormais en liquidation judiciaire, doit être confirmé.
A cet égard, la société PRESS VERCORS qui ne demande pas la fixation de sa créance contre la société ART'PRINT pour les factures postérieures au litige pour lesquelles elle a produit et dont elle ne justifie pas qu'elles aient été définitivement admises au passif doit être déboutée de sa demande de compensation de ces factures avec la somme qu'elle est condamnée à verser à la liquidation judiciaire de cette société et qui ne présente aucun lien de connexité avec ces factures.
Par ailleurs s'agissant de la facture de 43 818,31 € du 15 mai 2003 qui correspondrait à un solde impayé de travaux sur l'ouvrage B..., la société ART'PRINT, qui n'a d'ailleurs pas produit à la liquidation judiciaire sur cette facture, doit être déboutée de sa seule demande de compensation.
Indépendamment de la clause de limitation de garantie au montant de la commande, qui constitue une simple référence servant au calcul du plafond d'indemnisation, la société AXA doit garantir, en application de l'article 18 de la convention spéciale " responsabilité civile " la société PRESS VERCORS de la condamnation prononcée contre elle en réparation du préjudice immatériel subi par la société ART'PRINT du fait du sinistre B..., soit à hauteur de 69 942 €, somme inférieure au plafond de sa garantie et avec application de la franchise de 10 % du dommage, opposable à son assurée, la société PRESS VERCORS, comme à Maître Z..., ès qualités.
Le jugement qui n'a pas statué sur la demande de garantie de la société PRESS VERCORS contre son assureur et qui a débouté la société ART'PRINT de sa demande contre AXA doit être complété ou infirmé.
Le jugement doit être également infirmé en ce qu'il a débouté la société SIRC d'une demande inexistante contre la société AXA.
L'équité commande qu'il ne soit fait application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile au profit d'aucune des parties, tant en première instance qu'en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf :
-sur l'irrecevabilité de l'action, poursuivie par Maître Z..., es qualités, contre la société SIRC ;
-sur l ‘ irrecevabilité pour forclusion de l'action engagée par la société PRESS'VERCORS contre la société SIRC ;
-sur le rejet des demandes respectives de la société SIRC ou de la société ART'PRINT contre la société AXA ;
-sur les sommes allouées en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Et statuant à nouveau sur ces chefs de demande ou en complément,
-déclare recevable les actions engagées par Maître Z..., ès qualités et la société PRESS VERCORS contre la société SIRC ;
-constate que la société SIRC n'a formulé aucune demande contre la société AXA
-condamne la société AXA à payer à la liquidation judiciaire de la société ART'PRINT in solidum avec la société PRESS VERCORS la somme de 69 942 €, sous déduction de la franchise de 10 % sur le sinistre ;
-condamne la société AXA à garantir la société PRESS VERCORS de cette condamnation, sous déduction de cette même franchise ;
-déboute les parties de leur demande au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Y ajoutant,
Déboute la société PRESS VERCORS de ses demandes de compensation à l'égard de la société ART'PRINT en liquidation judiciaire ;
Condamne la société PRESS VERCORS aux dépens d'appel avec distraction au profit des SCP BAUFUME-SOURBE et BRONDEL TUDELA et de Maître MOREL, avoués.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 06/05805
Date de la décision : 07/02/2008
Type d'affaire : Civile

Analyses

RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - Clause limitative de responsabilité - Application - / JDF

L'industriel graphique qui a été chargé de la réalisation complète d'ouvrages et qui est considéré selon les usages de la profession comme le coordinateur responsable à la fois de ses propres travaux et de ceux de ses sous-traitants, commet une faute en n'assurant pas la livraison de 1500 livres d'art exempts de toute défectuosité et en choisissant comme sous-traitant un brocheur industriel, sans préconisations particulières. Cette défaillance n'est cependant pas constitutive d'une faute lourde de nature à écarter la clause limitative de garantie prévue aux conditions générales de vente, dans la mesure où elle ne constitue pas un manquement à une de ses obligations essentielles


Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Lyon, 18 juillet 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2008-02-07;06.05805 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award