COUR D'APPEL DE LYON
Troisième Chambre Civile
section A
ARRÊT DU 06 Décembre 2007
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 19 février 2007 - No rôle : 2006f4647
No R.G. : 07/01325
Nature du recours : Appel
APPELANTS :
Maître Patrick-Paul X..., mandataire judiciaire, agissant en qualité de liquidateur de la société CULTURE EDUCATION LOISIR DÉCORATION ART - CELDA SAS, désigné à cette fonction par jugement du Tribunal de commerce de LYON du 30 novembre 2006
...
69006 LYON
représenté par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, avoués à la Cour
assisté de Me Ludovic MOITIE, avocat au barreau de PARIS
Société CULTURE EDUCATION LOISIR DECORATION ART- CELDA SAS
2, avenue Lacassagne
69003 LYON
représentée par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, avoués à la Cour
assistée de Me Ludovic MOITIE, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE :
Société EUROSERI SARL
ZA de Domagne
01250 CEYZERIAT
représentée par Me Annie GUILLAUME, avoué à la Cour
assistée de Me Amandine MAISSE, avocat au barreau de LYON
Instruction clôturée le 16 Octobre 2007
Audience publique du 07 Novembre 2007
LA TROISIÈME CHAMBRE SECTION A DE LA COUR D'APPEL DE LYON,
DÉBATS en audience publique du 07 Novembre 2007
tenue par Monsieur Bernard SANTELLI et Madame Marie-Françoise CLOZEL-TRUCHE, conseillers qui ont ainsi siégé, sans opposition des avocats dûment avisés, et en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré, sur le rapport de Monsieur Bernard SANTELLI, conseiller
COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :
Monsieur Bernard CHAUVET, Président
Monsieur Bernard SANTELLI, Conseiller
Madame Marie-Françoise CLOZEL-TRUCHE, Conseiller
GREFFIER : la Cour était assistée lors des débats de Melle Patricia LE FLOCH, Adjoint Administratif faisant fonction de Greffier
ARRET : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 06 Décembre 2007 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Signé par Monsieur Bernard CHAUVET, Président et par Melle Patricia LE FLOCH, Adjoint Administratif faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
La société CULTURE EDUCATION LOISIR DÉCORATION ART (ci-après désignée CELDA), qui a pour activité la création et la distribution de matériels éducatifs pour les écoles, a été déclarée en redressement judiciaire par jugement du Tribunal de commerce de LYON en date du 1er juin 2006, publié au BODACC le 2 juillet 2006, Maître X... étant désigné en qualité de mandataire judiciaire et Maître B... en qualité d'administrateur judiciaire.
Par courrier du 14 juin 2006 adressé à la société CELDA, la société EUROSERI SERIGRAPHIE, se prévalant d'une clause de réserve de propriété, a sollicité la restitution de marchandises livrées les 13 et 20 décembre 2005, puis a saisi le Juge commissaire le 17 juillet 2006, d'une requête en revendication des marchandises.
Par ordonnance du 24 octobre 2006, le Juge commissaire a rejeté la demande au motif qu'elle n'avait pas été adressée à Maître B... ès qualités.
La société EUROSERI SERIGRAPHIE a formé opposition à cette ordonnance et par jugement du 19 février 2007, le Tribunal de commerce de LYON a infirmé l'ordonnance et fait droit à sa demande de revendication.
Après le prononcé de la liquidation judiciaire de la société CELDA le 30 novembre 2006, Maître X... désigné en qualité de liquidateur judiciaire a relevé appel de cette décision le 19 février 2007 avec la société CELDA et ils exposent qu'aux termes de l'article L 624-9 du Code de commerce, le créancier doit adresser sa demande de revendication à l'administrateur judiciaire avec copie au mandataire judiciaire, puis, à défaut d'acquiescement dans le délai d'un mois, il doit saisir le Juge commissaire dans un délai d'un mois.
Ils font valoir, que la société EUROSERI SERIGRAPHIE a adressé sa demande le 14 juin 2006, uniquement à la société CELDA, puis a saisi le Juge commissaire le 17 juillet 2006, sans formuler préalablement une demande d'acquiescement à l'administrateur judiciaire conformément à l'article 114 du décret du 28 décembre 2005.
Maître X... ès qualités et la société CELDA en concluent que la demande est irrecevable, peu important que la société EUROSERI SERIGRAPHIE ait adressé la totalité du dossier à l'administrateur judiciaire, le 21 septembre 2006, ce qui n'est pas de nature à régulariser la procédure.
Ils soutiennent que les Premiers juges ne pouvaient se fonder sur la lettre du 21 septembre 2006 pour valider la saisine du Juge commissaire intervenue par requête du 17 juillet 2006: l'irrégularité n'avait pas disparu lorsqu'il a statué, puisqu'il avait été saisi directement, la lettre adressée à la société n'ayant pu produire aucun effet quant à la procédure de revendication.
Maître X... ès qualités et la société CELDA concluent à l'infirmation du jugement, à l'irrecevabilité de la demande en revendication et à l'allocation de la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.
La société EUROSERI SERIGRAPHIE réplique que l'article 126 du Nouveau code de procédure civile dispose que dans le cas où la situation donnant lieu à fin de non recevoir est susceptible d'être régularisée, l'irrecevabilité sera écartée si sa cause a disparu au moment où le juge statue et que dès lors, est recevable la requête en revendication présentée au Juge commissaire avant l'expiration du délai d'un mois dont disposait le liquidateur pour répondre à la demande en acquiescement et qu'à la date où le juge a statué, ce délai d'un mois était expiré.
Elle relève qu'après la demande adressée à la société CELDA le 14 juin 2006, elle a saisi le Juge commissaire le 20 juillet 2006, puis manifesté le 21 septembre 2006, auprès de Maître B... administrateur judiciaire, sa volonté de récupérer ses marchandises : le Juge commissaire a statué le 24 octobre 2006, date à laquelle le délai d'acquiescement d'un mois était expiré de sorte que l'irrégularité de la procédure initiale avait disparu.
La société EUROSERI SERIGRAPHIE sollicite la confirmation du jugement et la condamnation des appelants au paiement de la somme de 3 500 euros en application de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 16 octobre 2007.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Attendu qu'aux termes de l'article L 624-9 du Code de commerce, la revendication des meubles ne peut être exercée que dans le délai de trois mois suivant la publication du jugement ouvrant la procédure, soit en l'espèce avant le 2 octobre 2006 ;
Que selon l'article R 624-13 du Code de commerce, la demande est adressée par lettre recommandée à l'administrateur s'il en a été désigné ou, à défaut, au débiteur et le demandeur en adresse une copie au mandataire judiciaire ;
Qu'à défaut d'acquiescement dans le délai d'un mois à compter de la réception de la demande, le demandeur doit, sous peine de forclusion, saisir le juge commissaire au plus tard dans le délai d'un mois à compter de l'expiration du délai de réponse ;
Attendu en l'espèce, que par courrier adressé le 14 juin 2006 à la société CELDA, dont copie envoyée à Maître X..., mandataire judiciaire, la société EUROSERI SERIGRAPHIE a formé une demande de revendication de propriété et en restitution de biens livrés les 13 et 15 décembre 2005 pour un montant de 28 528,54 euros ;
Que le 17 juillet 2006, la société EUROSERI SERIGRAPHIE a saisi le Juge commissaire au redressement judiciaire de la société CELDA en restitution de ces marchandises ;
Que le 21 septembre 2006, la société EUROSERI SERIGRAPHIE faisait parvenir à Maître B..., administrateur judiciaire, la totalité du dossier, lui demandant où se trouvait la marchandise et l'autorisation de la récupérer ;
Attendu que le Juge commissaire a statué le 24 octobre 2006 ;
Attendu qu'il résulte de la combinaison des articles L 624-9 et R 624-13 du Code de commerce, qu'un double délai s'impose au revendiquant qui doit saisir l'administrateur de la demande dans les trois mois de la publication du jugement d'ouverture puis, à défaut d'acquiescement de ce mandataire dans le délai d'un mois à compter de la réception de la demande doit, à peine de forclusion, saisir le Juge commissaire dans un délai identique à compter de l'expiration du délai de réponse du mandataire ;
Que le Juge commissaire ne peut être saisi par le revendiquant qu'à défaut d'acquiescement du mandataire et la procédure préliminaire devant l'administrateur constituant un préalable obligatoire à l'engagement de l'action en revendication devant le Juge commissaire, il apparaît en l'espèce, que la société EUROSERI SERIGRAPHIE a saisi l'administrateur postérieurement -et non préalablement- au dépôt de la requête devant le Juge commissaire ;
Attendu dès lors que la société EUROSERI SERIGRAPHIE est forclose pour agir en revendication de sa marchandise et qu'il convient d'infirmer le jugement déféré ;
Attendu que l'équité commande de ne pas faire application de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,
Reçoit l'appel comme régulier en la forme,
Infirme le jugement et statuant à nouveau,
Déclare irrecevable la demande en revendication présentée par la société EUROSERI SERIGRAPHIE,
Rejette les autres demandes,
Condamne la société EUROSERI SERIGRAPHIE aux dépens, ceux d'appel étant recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Patricia LE FLOCH Bernard CHAUVET